Je rappelle que la lecture d'Amitié Douloureuse (AD) est inutile pour la compréhension de cette histoire... En fait, AD ne permet que de bien comprendre le caractère du personnage principal qui se résume en trois mots : Cruche-lâche-pleurnicheuse. Cette histoire résumera parfaitement ce qui se passe dans AD.
Un grand merci aux lecteurs de Amitié douloureuse et aux revieweurs. Je n'ai pas su répondre à toute mes sachez que je les relis souvent et qu'elle me font toujours chaud au coeur... Je suis sincère, j'ai même mal aux joues quand je les relis.
Enfin, sachez que souvent (peut être pas tout le temps), les chapitres commenceront par un extrait de Amitié douloureuse. (qui donnera des détails à ceux qui ne veulent pas lire AD)
Merci à tous et à toutes.
Un immense hommage au G4, Anwa, Eliane et Lalouisablack, pour leur soutiens, leurs idées, leur aide, leurs corrections, leurs critiques et nos discussions sans queue ni tête sur msn. Cette fic est notre fic les filles.
Note d'Anwa : Tout comme pour un bon nombre des fics de Taka, le résumé ainsi que l'image est de notre fait, au G4 et à moi. Et tout comme pour AD, si Louisa apporte une correction discrète mais efficace pour le béta-read, je vais quant à moi continuer à me lâcher sur les remarques débiles, que certains d'entre vous ont peut être déja aperçus dans AD lorsque Taka se plantait de version.
Soyez attentifs, si ça se trouve, elle va encore se planter de version 2-3 fois, et vous pourrez lire mes idioties en exclusivité !
Pour ceux et celles qui n'ont pas lu la première fic et qui ne comprennent pas certaines choses, ne vous en faites pas, même ceux qui l'ont lu ne doivent pas saisir tous les sous entendus.
Désormais, laissons place à l'histoire !
Reconstruction
Chapitre 1 : Bon, je recommence
-Sirius ? Est-ce que tu voudrais bien me rejoindre dans le parc à deux heures ? J'aimerai te parler…
Elle avait dit ça rapidement, d'un ton presque brusque, la tête légèrement baissée mais ses yeux le fixant malgré tout, ses joues étaient écarlates et ses mains trituraient son sac…Il soupira avant de répondre avec dédain :
-…Si tu veux.
-Merci beaucoup !
La salle était silencieuse mis à part les crépitements du feu dans la cheminée. De nombreux livres étaient éparpillés entre les étagères, des classeurs d'où certains formulaires dépassaient et, parfois, l'un d'entre eux était posé à même la terre, étalant son contenu autour de lui. Une grande cape en fourrure pendait négligemment du dossier d'un fauteuil dont la couleur verte commençait à s'effacer. Les traces de brûlures et deux trois longues entailles intriguaient souvent les nouveaux venus. Le dit fauteuil était placé en face d'un bureau sombre et recouvert de toute sorte d'objets, de la plume d'oie la plus commune jusqu'à la brosse à dent et au coupe-griffe pour sphinx. Mais ce qui prédominait restait les papiers : des parchemins griffonnés, des feuilles mises en boules, des contrats attendant la signature d'un client, deux emplois du temps, des croquis de créatures plus farfelues les unes que les autres, des articles de journaux... Tout cela s'entassait au point de former dunes et vallées entrecoupées par moment d'une bougie ou d'un dictionnaire. Cependant, un seul endroit semblait épargné par ce champ de bataille : un petit espace paraissait être l'objet d'une grande méticulosité mais un unique objet y était dressé, comme si cette zone y était totalement dédiée. Un cadre s'y élevait, contenant une simple photographie en noir et blanc. Les jeunes personnes représentées paraissaient bien trop nombreuses pour l'espace accordé par le rectangle de papier glacé, ou peut être que le photographe n'avait pas pris assez de recul malgré le fait qu'ils étaient à l'extérieur, mais cela ne semblait les gêner : ils se tenaient tous bras-dessus, bras-dessous, souriant à pleine dent. Parfois, un jeune homme aux cheveux sombres s'amusait à donner un coup de coude à un autre à lunette qui tenait dans ses bras une jolie fille, faisant rire le reste de ce qui devait être leurs amis. Ils étaient tous heureux, cette photo transpirait le bonheur.
Puis, le même jeune homme brun désigna quelque chose du doigt dans la salle avant de ricaner avec ses proches mis à part une des filles, qui semblait gênée. L'objet montré était en réalité une femme, de l'autre côté du bureau, assoupie, la tête basculant derrière son siège. Cette femme endormie était la version adulte de la demoiselle embarrassée.
* * * * * * * Łƴɲɳɑ * * * * * * *
Encore ces limaces, partout, mais au lieu de ressentir de la gêne ou du dégoût, je suis heureuse, tellement heureuse. Je ne l'ai pas été depuis si longtemps. Pas autant.
Je me penche pour plonger ma main dans cet amas orange et j'en ressors un hachoir. Ca ne me choque pas du tout. Au contraire, je regarde cet ustensile comme l'aurait fait une mère envers son enfant. Je me sens un peu idiote mais peu importe, n'est-ce pas ?
Soudain, des hurlements autoritaires surgissent derrière moi, me forçant à me retourner. Puis je les vois et je ne peux m'empêcher de sourire encore plus, les larmes aux yeux, comme si tout ce que j'avais ressentit à cette époque ressurgissait telle une fontaine salvatrice. Les hurlements persistent, je ne vois pas leur origines mais je les ignore, je préfère regarder leurs visages. Je voulais juste être avec eux et voilà que je le suis.
Difficilement, j'ouvre la bouche. Aucun son n'en sort mais le message se transmet malgré tout : Merci.
Ils sont tous là, avec moi, quand soudain l'un d'entre eux -lequel ? Je ne sais pas- tend violemment les bras. Je le regarde d'un air moqueur en le rassurant : je ne vais pas tomb...
SBAM
-AÏE ! Je hurle violemment en plaquant une main à l'arrière de mon crâne où va bientôt naître une belle bosse.
-Ça vous apprendra à dormir au travail Miss, me lance en roumain une puissante voix qui me paraît bien cruelle après un tel réveil.
Je me redresse de manière à être sur les genoux tout en époussetant les saletés qui ont profité de ma chute pour s'agripper à ma robe de sorcière puis me retourne vers mon supérieur tout en rangeant deux trois mèches qui voulaient s'évader de mon chignon. Monsieur Sigurd. Le directeur du département des créatures magiques du Ministère de la Magie en Roumanie me toise avec dédain avant d'afficher un sourire tout aussi franc que sa voix en me tendant une de ses grosses paluches. Ma main semble bien misérable dedans mais il me relève avec vigueur sans pour autant me faire mal avant de s'occuper de la chaise sur laquelle je somnolais il y a encore deux minutes. Je jette un regard rapide autour de moi, un peu gênée que mon patron voient le capharnaüm que constitue mon bureau, puis, avant qu'il ne me jette une de ces questions auxquelles ont ne peut répondre, je décide d'être celle qui ferait le premier pas : Lily appelait ça « s'enfuir vers l'avant ». D'ailleurs, elle était dans mon rêve... Non ?
-Que me vaut le plaisir votre visite Monsieur ?
-Ce n'est pas en employant de belles paroles que vous arriverez à cacher cet océan d'immondice, ni votre sieste d'il y a trente secondes, réplique-t-il, souriant tout de même à ma phrase.
M. Sigurd, contrairement à ce que son physique semble montrer, aime les belles formulations et y est très sensible, ce qui le rend très sympathique à mon égard puisque mon père apprécie lui aussi la politesse et que c'est cette éducation que j'ai reçue ; mais il sait aussi conserver les priorités dans son champs de vision et faire abstraction du reste. Sigurd est un homme qui représente à lui tout seul la sur-dimension : corps immense, musculature épaisse, manteau énorme, accent gargantuesque et caractère écrasant. Donc le physique parfait pour s'occuper d'abraxans, d'hippogriffes et de cocatris. Si on veut le convaincre, il faut montrer que tout cela ne nous fait ni chaud ni froid. L'entretien d'embauche que j'ai eu avec lui aurait normalement dû se terminer bien rapidement vu ma timidité et ma faible maîtrise du Roumain mais ce jour là, j'eus la bonne idée de passer une heure à parler avec Sue, suite à quoi, j'ai continué sur ma lancée amicale et un peu délirante, faisant croire à mon employeur que rien ne m'atteignait.
-Si je viens vous voir, Lynna, c'est pour une mutation temporaire.
Je reste silencieuse : le mot mutation m'a légèrement effrayé. J'ai déjà un peu le mal du pays ici -la Grande-Bretagne me manque- alors partir encore plus loin serait un enfer, mais si ce n'est que temporaire ça devrait aller. Cette fois, c'est la pensée du Royaume-Uni qui me ramène vers mon rêve : oui, Lily y était présente, ainsi que d'autres... A Poudlard je crois.
-Vous savez qu'il y a un effectif insuffisant chronique dans le secteur des Dragons ?
-Oui.
Bien sûr que je le sais, je suis dans le département des mammifères magiques en tant qu'agent d'élevage et de soins et pourtant je dois passer le tiers de mon temps à aider les gars du secteur mentionné, à finir leurs dossiers, à remplir les formulaires... Cette fois, je me rappelle des devoirs de l'école, quand on se demandait de l'aide les uns aux autres, surtout à Remus qui prenait constamment de l'avance sans être le meilleur pour autant, contrairement à James et...-mon coeur se pince face au fait que je considère toujours comme un duo inséparable la victime et le traître- Sirius. Eux aussi étaient là, dans mon songe.
-Mais pourquoi me muter ? je ne peux m'empêcher de demander, ne voyant dans ce déplacement du personnel qu'une absence de logique : sans moi, les dragonniers vont en baver.
-Il semblerait que d'autres départements -tel que celui des moldus ou même les des transports sorciers- ont su résoudre le même souci en cherchant de jeunes recrues à l'étranger. Puisque vous êtes celle qui maîtrise le mieux différentes langues, c'est vous qui partez.
Je fais une petite moue au dernier mot, ayant l'impression d'être un poids qui va rapidement se trouver au placard. Ma grimace fait naître un rire tonitruant mon patron qui se tient le ventre.
-Ne vous en faites pas, Lynna, vous reviendrez dans quelques mois, vous pourrez en profiter pour voir du pays vu le temps libre qui vous sera accordé -mais vous devrez emporter certains dossiers malgré tout.
-Et en quoi consistera exactement ma mission ? fais-je en en appuyant sur ma bosse qui me relance.
-Vous irez voir de jeunes gens, étudiants, pour vanter les avantages de ce métier -vous y avez assez contribué pour en parler comme une véritable professionnelle, j'en suis certain. Vous acceptez ?
-Euh...-j'angoisse rien qu'à l'idée de faire un discours devant des adolescents prêt à me manger toute crue comme le faisait les Maraudeurs. Je pense que ça ira... Pourquoi partir plusieurs mois alors qu'une semaine suffirait amplement ?
J'avoue que cette mutation, même si elle semble fort intéressante et enrichissante, continue de me faire un peu peur. Comme un enfant qui ne voudrait pas aller dans une nouvelle école, je multiplie les questions au cas où cela pourrait m'aider.
-L'administration y a compté le temps d'apprentissage de la langue du pays, mais cela ne vous sera pas nécessaire. Vous partez dans trois semaines, Compris ?
-Compris ! je réponds avec force automatiquement.
Je me retourne, réfléchissant déjà à mon futur discours, imaginant que mon patron allait partir et que je pourrai enfin terminer tranquillement ce dossier sur les Niffleurs des plages quand un petit raclement de gorge m'indique que je ne suis toujours pas seule.
-Miss, toujours aussi distraite, non ?
Je relève la tête, inquiète au possible : aurai-je oublié quelque chose ? Un sandwich sur un papier important ? Non. Un dossier urgent à rendre aujourd'hui ? Non. Ma culotte ? Non plus, enfin je crois. Je me mets à rougir sous l'anxiété avant de comprendre en frappant de mon poing la paume de ma main: j'ai oublié de poser une question !
-Quelle est ma destination ? je demande, ou plutôt « réponds », comme si un professeur venait de me poser un problème auquel je connaissais la solution.
Mon patron pousse une immense exclamation -accompagnée d'un fort accent écorchant le nom étranger- qui fait trembler les murs de mon bureau minable tandis que quelques feuilles et plumes posées en équilibres s'effondrent sur le sol :
-Poudlard !
Ouvrant la porte de ma maison à l'aide d'un sort un peu trop violent, je m'engouffre dans l'entrée, jetant par dessus mon épaule mon sac et balance les deux trois dossiers rapportés du bureau afin prétextant vouloir les terminer chez moi afin de partir plus tôt. Ces derniers tombent sur un journal où la photo de Ludo Verpey fait la une, un balai à la main : c'est la nouvelle star internationale de Quidditch ! Dire qu'il était plutôt rangé à Poudlard, maintenant, c'est une célébrité.
Je ne peux m'empêcher de sourire d'un air béat en rentrant dans le salon avec l'impression d'être une gamine qu'on vient de prévenir qu'un cours était annulé. D'habitude, je suis plus discrète quand je rentre, surtout depuis que cet idiot de Josh s'est installé à côté de chez moi et vient me harceler tous les soirs, mais aujourd'hui, je m'en fiche.
Josh est un jeune homme qui doit avoir à peine deux ans de plus que moi et qui cherche toujours tous les moyens pour s'incruster chez moi. Au début j'étais plutôt contente d'avoir une nouvelle connaissance, puis j'ai cru qu'il faisait ça uniquement pour m'emprunter sans arrêt des choses mais finalement, une amie m'a appris qu'il cherchait surtout à se montrer avec moi, juste pour faire croire qu'il a réussi à « posséder » une anglaise. Depuis, je le fuis comme la peste, on ne sait jamais avec ce genre d'homme, quelque soit la nationalité.
J'envoie ma longue cape en fourrure dans les airs avant qu'elle ne se pose élégamment sur le canapé. Une seconde plus tard, mon porte manteau -placé derrière le dit canapé- la soulève poliment afin de la suspendre pour ensuite reprendre sa place. Je finis ma course sur les genoux, entraînant avec moi une partie du tapis et faisant feuler Sooty qui dormait dessus. Enfin, je jette une énorme poignée de poudre scintillante dans l'antre vide qui me fait face pour y placer ensuite ma tête. Sooty cours se réfugier sous le buffet tandis que j'annonce -ou plutôt hurle de joie- la destination.
Au bout de quelques secondes parmi les ombres déformées et les sons dénaturés -j'adore ce voyage !- je me retrouve face à un parquet sale et un tapis qui commence à se faire dévorer par les mites, mais en ce moment, tout me semble merveilleux. Même la grosse chaussette sale qui traîne près des escaliers que j'aperçois furtivement.
Puis, des bruits de pas se font entendre et enfin Remus entre dans mon champ de vision.
- Bonjour, me dit-il avec calme et chaleur, approchant son visage du mien.
Je sais qu'il aurait voulu l'approcher encore un peu plus si il n'y avait pas ces flammes qui continuait de brûler, et ça ne fait qu'amplifier le sentiment de plénitude qu'il fait naître en moi.
-Salut ! je lance avec une énergie qui le surprend mais le fait sourire.
-Qu'est-ce qui...
-TU SAIS QUOI ? je ne peux m'empêcher de crier, en lui coupant la parole.
-...te rend si heureuse ? finit-il, avec un soupir. Non, je ne sais pas, quoi ? continue-t-il avec politesse.
J'ai souvent l'impression que Remus a vieilli plus rapidement que nous autre mais il dit que c'est moi qui suit restée une enfant. Ça me touche un peu de le voir ainsi mais bon, je suis assez fière de représenter sa jeunesse ! Serait-ce naïf de ma part ?
-Et bien, je marmonne en me mordant les lèvres, comme si cet acte misérable pourrait retenir plus de trente secondes l'information qui meurt d'envie d'exploser au grand jour.
Plus un mot ne se dit. Un ange passe puis Remus reprend la parole tandis que je fait tout mon possible pour garder ma bouche fermée -tâche fort ardue vu mon sourire trop grand pour ma tête.
-Tu as vraiment quelque chose à me dire où tu me contactes juste pour m'embêter ?
-J'ai un truc à dire, je glousse -bon, il a raison, je suis restée une gamine. Je t'embête ?
-Oui.
-Méchant.
Correction, je ne suis pas une gamine mais un vrai bébé !
Un second silence suit.
-Tu sais très bien que tu me diras ton « truc » avant que je ne te le demande, sourit-il avec malice.
Je bougonne un peu pour jouer le jeu puis je me lance.
-Je retourne à Poudlard ! je hurle avec bonheur.
-Ouf ! Je me disais aussi qu'il était impossible que tu ai pu terminer tes sept années vu ton QI. C'est gentil de la part de Dumbledore de te reprendre, mais je trouve que ton patron en a mis du temps pour se rendre compte de cette évi...
Je sors ma tête de la cheminée, une moue mi-boudeuse, mi-rieuse sur le visage. Je sais parfaitement que la tête de Remus va apparaître d'une seconde à l'autre dans ma cheminée mais je sursaute quand même lorsque j'entends sa voix.
-Pardon, je te taquinais. Mais je ne vois pas d'autre raisons pour lesquelles tu irais à Poudlard.
-Bon, je recommence : je dois encourager des jeunes sorciers d'Angleterre à venir travailler chez nous car on manque d'effectif.
-Pourquoi ça me fait penser à une tentative de débau..., marmonne Remus, un air faussement rêveur sur le visage avant que je ne l'interrompe une seconde fois.
-Je débarque dans deux semaines et je reste plusieurs mois ! je précise, avec enthousiasme, mon regard se plantant dans le sien, lui faisant comprendre que ce n'est pas le futur travail qui me rend le plus heureuse.
Enfin, Remus sourit à son tour : cela fait bien trop longtemps que nous ne nous sommes pas vu en dehors des cheminées mais il nous était impossible de voyager à cause de nos emplois et nos finances -quoique ça va mieux de mon côté depuis ma promotion.
Auparavant, je travaillais comme assistante d'un médicomage animalier mais je trouvais ce travail bien trop morbide et mon employeur était un véritable radin, sans compter son mauvais caractère. Sa secrétaire m'a raconté qu'il était comme ça depuis qu'une salamandre d'Egypte s'en serait pris au haut de son pantalon... Heureusement, j'ai pu changer de métier et trouver . J'essaye toujours de prendre un portoloin pour le Royaume uni une fois par an mais ce n'est pas si facile que ça. C'est pourquoi cette mutation est une véritable bénédiction pour moi, et Remus bien sûr.
Soudain, nous pensons tout les deux à la même chose, rougissant comme des adolescents, un sourire en coin sur le visage. Mon ami me jette un regard plein de sous entendu, levant un sourcil taquin tandis que je change clairement le sujet de la conversation.
-Tu avertiras Sue pour moi ? Ces horaires sont toujours trop flexibles à mon goût.
-Si c'est ce que tu désires...
-Arrête, je jette rapidement, n'arrivant pas à cacher mon sourire. Vous me préparerez une petite fête pour mon arrivée ?
-Mais oui, mais oui, ça va être ta fête, susurre-t-il avec une expression qui me laisse penser que l'esprit de James doit le posséder.
-ARRETE ! Je m'exclame en sursautant, frappant malencontreusement le rebord de la cheminée, à l'endroit exact où se situe ma bosse.
Il pousse un léger soupir de dépit mais reste assez fier de m'avoir fait craquer tandis que j'utilise toute ma force mentale pour ne pas montrer ma souffrance et, ainsi, éviter de recevoir un de ses « Lynna-patatras ». Plus de 10 ans qu'il retient ce surnom...
-D'accord, on va essayer d'arranger quelque chose. Mais tu sais où loger au moins ?
Je lui jette un regard mauvais avant de comprendre que cette fois il ne plaisante pas : je m'imaginais dormir chez lui mais avec son problème de santé et ses finances... Il m'avait prévenue, en sixième année qu'il était malade, mais c'est seulement en septième qu'il m'a dit toute la vérité. Je ne lui ai pas parlé pendant dix jours... J'avais peur, je me rendais compte qu'il m'était inconnu et qu'il pouvait être dangereux, mais la guerre avançait et je me suis dit qu'il valait mieux être heureux maintenant, en étant avec lui et les autres, quitte à se faire mordre, plutôt que de prendre trop de précautions. Exactement le comportement que j'ai eu avec Black l'année précédente.
Je secoue la tête puis regarde Remus avec sérénité.
-Je verrai, je lui souffle doucement. Je n'ai pas spécialement envie de m'incruster chez mes parents... Les entendre vanter les exploits de ma sœur sans interruptions, tu imagines ? Brrr ! Que le travail me trouve un appartement serait ce qu'il y a de mieux, sinon je pourrai m'incruster chez Sue ou chez toi... Quand ça ira.
-Le problème est : est-ce que tu dois apporter un Dragon en guise d'échantillon pour tes élèves ? Parce que je doute pouvoir en garder un dans mon jardin, je tiens trop à mes rosiers.
Je lui tire la langue puis nous éclatons de rire.
-Il n'empêche que je suis trop heureuse ! Je vois la vie en rose ! Même ta chaussette puante me semble charmante.
Remus rougit violemment, avant de faire murmurer une incantation qui, je l'imagine, doit faire disparaître la chaussette, tandis que je souris de toute mes dents. Finalement, la conversation prends des allures plus banales.
-Comment va Sooty ?
-Je crois qu'il s'est enfui...
-QUOI ? hurle mon ami, horrifié.
-Sous le buffet.
-Idiote, ne me fais pas si peur, souffle-t-il comme si cette simple phrase l'avait épuisé.
Lors de l'enterrement de James et Lily, nous avons fait une sorte de petit pèlerinage, ou balade pour leur mémoire, entre proches auprès de l'ancienne maison des Potter. Là, tandis que nous nous rappelions des moments passés avec nos amis décédés, nous y avons entendus quelques miaulements misérables avant de découvrir un Sooty, le chat noir de Lily, sale, maigre et affamé mais surtout encore vivant. Je crois que l'on a encore plus pleuré face à cette vision que durant toute la cérémonie funèbre. Il a été décidé que je serai sa nouvelle maîtresse mais Remus et Sue continue de prendre de ses nouvelles puisqu'il est le dernier souvenir vivant que nous détenons de Lily. Personne n'a le droit de contacter son fils, Harry. Ordre de Dumbledore parait-il.
La discussion par cheminée se prolonge sur nos finances, nos logements, nos amis, notre travail...
Je meurs d'envie de parler des souvenirs de Poudlard, on le fait un peu mais moins que je ne l'aurai voulu. J'ai peur, peur de le blesser, peur de faire ressurgir une souffrance qui s'éteint doucement, peur qu'il me dise que je n'étais pas là. Peur qu'il m'en veuille.
Et par dessus tout, j'ai peur de montrer ce que je pense.
Tandis que le soleil commence à se coucher, je souhaite une bonne nuit à Remus -avec décalage horaire.
-A dans deux semaines ! Je lui déclare, avec une certaine cérémonie accompagné d'un clin d'oeil.
-Donc, dragon ou pas ?
Je pointe ma baguette sur son visage, feignant lui jeter un sort tandis que sa tête retourne dans son domicile.
Me relevant, les jambes engourdies et les genoux douloureux, je me dirige vers la cuisine afin de servir un rapide dîner à Sooty et moi. Tandis que je sors quelques pâtes et un vieux reste de poulet rôti, j'imagine tout ce qui va se passer dans deux semaines : je vais retrouver Remus, Sue et tous les autres. Je vais aller à Poudlard, je vais revoir les professeurs de ma jeunesse et rencontrer des jeunes d'une autre génération. Je vais me remettre à parler Anglais naturellement, retourner sur les lieux de mon enfance. Mon esprit se tourne doucement vers le passé, comme pour m'y habituer, pour me laisser le temps de me rappeler... L'époque où l'on pouvait parler librement de Sirius Black, sans haine dans la voix, sans mépris sur le visage, sans tristesse dans notre coeur.
Sans le vouloir, je laisse tomber un verre que je venais de sortir du placard. Cette pensée me fait tellement souffrir : j'ai l'impression que Remus me verrait comme étant toujours amoureuse de lui si je lui disais ce que je pensais. Mais c'est faux. Il devrait être le premier à le savoir pourtant ! Je me fais des idées.
C'est juste que tout cela est tellement impensable : Sirius, trahir James et Lily ? Non ! Non...
Cela va faire à peu près 6 ans que tout s'est détruit. Chacun, nous reconstruisons les morceaux, nous vivons nos nouvelles vies, mais je n'arrive pas à m'y faire. Peut être que les autre ressentent la même chose mais pas Remus en tout cas... La dernière fois que j'ai voulu aborder le sujet, il m'a bien fait comprendre par une colère noire qu'il était hors de question de douter de la culpabilité de Sirius. Il en a trop souffert pour en parler encore aujourd'hui, mais moi, j'ai justement besoin d'exprimer mes doutes, mes angoisses, mes peurs. Peut-être parce que je n'étais pas là, peut-être que je m'en veux : je ne peux m'empêcher de penser que, si j'étais restée, Sirius n'aurait pas changé, que j'aurai pu lui éviter cette erreur.
Mais en suis-je vraiment capable ? Là n'est plus la question.
Le véritable problème, la véritable raison pour laquelle je doute de la culpabilité, ou plutôt que je voudrais en douter, de cet ancien ami est autre que sa proximité avec James ou mon absence.
La vérité est qu'il me manque.
Il me manque autant que les autres. Non, plus que les autres. Il est encore de ce monde mais je ne pourrai plus jamais le voir, lui parler à cause de ce qu'il a fait. Je voudrai tellement lui dire ce que j'ai sur le coeur, comme je lui en veux d'avoir fait ça, de nous avoir abandonné, de les avoir tué. Je ne suis plus amoureuse de lui, j'en suis certaine, mais cet ancien amour a comme renforcé mon amitié, m'empêchant de le haïr. Si on y ajoute en plus mon absence lors de cette guerre, il est parfaitement logique que je me retrouve dans cette situation ambiguë : les souvenirs sont toujours trop douloureux, on s'acharne sur le coupable avec une cruauté que je ne connaissais pas chez certains... Mais n'est-ce pas ce que je veux faire moi aussi ? Je le sais coupable, je ne doute pas de ça mais plus de mon propre comportement, car toute cette rancoeur qu'on dirige contre cet homme, j'ai l'impression de la recevoir puisque, au fond de moi, je crois toujours que c'est à cause de mon inattention, mon éloignement qu'il a commis ces crimes.
Je ne doute pas de sa responsabilité, mais de la mienne : puis-je me venger sur lui, m'assurer que j'en ai le droit, avoir a légitimité de le faire souffrir ?
Si seulement il m'avait jetée dès le début. Je sais que jamais je n'aurai pu être aussi heureuse que durant cette époque où je l'aimai tout en étant son amie, mais...
-Merrroooow.
-Iiiik ! Sooty ! Lâche ma jambe, tu me fais mal !
Je me penche pour donner sa pâtée au chat noir comme l'ébène tout en ramassant le verre -heureusement intact- que j'ai laissé s'échapper de ma main puis je me relève brutalement en levant les yeux vers le ciel afin d'empêcher les larmes de couler : je dois être courageuse ! Je dois rester souriante...
-Allez ! Haut les coeurs Sooty ! Dans deux semaines, tu reverras Sue et Remus !
Le matou garde la queue dressée et ronronne en dévorant le contenu de sa gamelle. Je le fixe un moment avant de me mettre moi même à table tout en commençant à travailler mon futur discours à voix haute, toute seule, dans ma cuisine.
*.*.*.*.*
Note:
Merci d'avoir lu le premier chapitre ! J'espère que vous l'avez apprécié. En tout cas, c'est un réel plaisir pour moi de revoir ma petite Lynna, je n'ai jamais été aussi heureuse d'écrire une fanfiction. Et vous, ça vous fait quoi de revoir Miss-Cruche ?
Ca vous donne envie de laisser des Reviews ?
