« Poudlard ? Même après dix années passées dans cette cellule, avec pour seule lumière le reflet que mon verre d'eau peut parfois faire, j'arrive encore à m'imaginer les mille lumières du château, les murs élevés à la pierre noircie, les portraits, majestueux et emplis d'histoire. Je me revois dans les escaliers avec James, Remus et Peter, à faire la course pour savoir qui atteindrait la Grande Salle en premier. Je me revois avec James à essayer d'éteindre les bougies avec du jus de citrouille. Je me souviens de nous, assis avec les filles de notre année devant la cheminée de notre salle commune, à rigoler de qui s'était pris la plus grosse cuite la veille. Je me revois avec mes camarades de maison, unis pour gagner la coupe de Quidditch, ou du moins défendre l'honneur de notre maison.
Poudlard ? On y a vécu notre innocence, mais on y est également devenus des adultes, finie l'adolescence et les enfantillages. Tellement de choses se sont passées lors de notre dernière année, je n'aurais jamais pensé que c'était cela de devenir adulte. Bien sûr, ça ne l'était pas. La guerre a rendu notre monde anormal. Je revois encore son corps tomber devant moi, pour ne plus jamais se relever. Mais je choisis de continuer de me voir avec James, rigolant d'une bêtise qu'on venait de dire, ce sont ces images qui me maintiennent en vie. Mon frère, il comptait tellement. Dans ce château, j'ai appris à aimer, que ce soit en amour ou en amitié. Aujourd'hui, c'est ton anniversaire. Et je pense à toi. Ma lumière, tu comptais tellement. Aujourd'hui encore, dans cette sombre cellule, ton souvenir continue d'illuminer mes pensées.
Poudlard ? J'y ai également appris que notre force ne réside pas seulement dans nos exploits et le courage que l'on se donne, mais également dans notre volonté de ne pas abandonner. Et enfermé dans cette cellule, seul face à mon destin, je repense à ces moments qui ont fait de moi un homme. Tout ce que l'on voulait, c'était profiter de la vie et rire de nos bêtises. Je me revois simplement profiter des plus belles années de ma jeunesse. Et je ne lâche pas prise. »
Sirius Black, 18 juin 1991, prison d'Azkaban
Chapitre 1
30 Août 1977, Manchester, Angleterre.
« Le thé est trop chaud ». Ce fut ce que Louise se dit, assise à la table de la cuisine alors qu'elle reposait sa tasse d'un geste brusque. De son autre main, elle changea de chaîne avec la télécommande. Un bruit se fit entendre et elle eut un grand sourire quand elle entendit toquer à sa fenêtre. Après six années, elle connaissait ce bruit matinal d'été par cœur, celui d'un bec qui tapait contre la vitre. L'effet était le même à chaque fois, elle ne pouvait jamais retenir ce sourire, celui qu'elle avait quand ses deux mondes se rencontraient comme à cet instant, alors que sur l'écran apparaissaient des visages en noir et blanc qui donnaient les informations du jour et elle, le journal par hibou.
- Louise, lâche cette satanée télévision et va ouvrir à Pliveile !
« Pliveile, quel nom idiot ». La dite Louise se garda bien de dire à haute voix ce qu'elle pensait de l'oiseau de sa sœur et posa la télécommande pour aller ouvrir la fenêtre. Au bruit que fit Pliveile en entrant dans la cuisine, le hibou était mécontent, mais Louise n'y fit pas attention, même quand il essaya de lui mordiller la main. Elle laissa l'oiseau voler en direction de sa sœur et retourna à sa télévision aussitôt. Les joies de l'été, c'était pour Louise de retrouver sa technologie préférée. Et bien qu'elle était heureuse de retourner à Poudlard dans deux jours, elle tenait à profiter de celle-ci jusqu'aux derniers instants.
- Il semblerait que la fille qui avait été choisie pour être porte-parole des sixièmes années de Serdaigle ait changé d'avis, indiqua Lucille.
- Amanda Kreig ? demanda Louise. Tant mieux, cette fille aurait été un poids plus qu'une aide pour les réunions.
Louise se garda bien un sourire à l'entente de la nouvelle. La Serdaigle avait été son binôme en Runes en quatrième année, et Louise avait maudit pendant tout un semestre ses airs de princesse intelligente. Elle n'avait rien à faire en tant que porte-parole, elle n'aurait jamais été capable de représenter les Serdaigles de son année, et tout le monde savait très bien qu'il n'y avait rien de plus important que les réunions des porte-paroles pour faire valoir les intérêts de chacun.
- Par Merlin, Louise !
Perdue dans ses pensées, la plus jeune sœur ne releva pas le ton inquiet de sa sœur. Elle avait l'habitude d'entendre son aînée l'appeler d'irritation et se dit qu'elle devait probablement la reprendre sur ce qu'elle venait de dire sur la Serdaigle, alors elle répondit sur un ton nonchalant.
- Je sais que t'es d'accord avec moi Luce, se défendit Louise sans quitter les yeux de l'écran de télévision.
Aucune réponse, Lucille devait avoir levé les yeux au ciel. Louise se décida à relever la tête vers son aînée, et le regard qu'elle croisa n'était pas irrité, mais terrifié. Lucille avait pâli, ses deux mains tenant la Gazette du sorcier.
- Faut que tu lises ça, Louise.
Le ton de sa sœur ne disait rien à Louise. Elle se leva de sa chaise, délaissant pour de bon la télévision, et prit la Gazette que sa sœur lui tendait. La première chose qui attira son regard fut la photo, qui exposait un corps qu'elle connaissait par cœur, et le titre, affiché en gros à l'encre noire coulante, instable sur le papier, lui confirma ce qu'elle pensait. Et non, se dit Louise quelques minutes plus tard alors qu'un haut-le-cœur la prenait, prête à vomir, il n'aurait jamais fallu qu'elle lise ça.
Les Trois Balais, Pré-au-Lard, Angleterre
Un homme posa son chapeau sur la table alors qu'il s'asseyait, les traits tirés et la mine fatiguée. D'un signe de la main, il commanda un whisky pur feu, malgré l'heure matinale, et se tourna vers la femme assise à sa table. Assise dans une position raide, le regard de la femme âgée ne quittait pas l'homme qui se tenait face à elle.
- Longue nuit Marcus ? demanda-t-elle.
- Je n'ai eu que la noirceur du ciel pour m'indiquer que c'était une nuit, ma chère.
- Ce que raconte la Gazette est donc vrai.
- Non seulement c'est bien vrai ma chère, mais en plus ne dit-elle pas tout, répondit Marcus en se passant une main sur le visage.
Travaillant tous les deux au Ministère de la magie, ils savaient tous les deux que c'était la grande agitation là-bas. Ce matin, la Gazette du sorcier avait annoncé en avant-première les faits de la nuit dernière, la mort d'un étudiant de Poudlard à deux jours de la rentrée scolaire. Très peu de choses avaient été révélées de l'affaire, et les informations étaient pour le moment très minimes, mais elles avaient suffi à choquer la population sorcière.
Outre le fait que le jeune homme assassiné était l'héritier d'une grande famille sorcière d'Angleterre, connue ouvertement pour être fermement opposée à l'actuelle ascension du mage noir qu'était Lord Voldemort, ce meurtre était le premier meurtre civil que revendiquait le nouveau mage noir. Jusque-là, les seuls dont on avait entendu parler étaient des aurors, qui avaient commencé à prendre la menace du mage noir au sérieux un peu moins d'un an auparavant. Jamais encore avait-on entendu parler d'un acte pareil de la part du mage noir au sein de la société civile. Ce meurtre était une mise en garde, et celle-ci, Marcus Axwenrel le savait, serait prise au sérieux également par la population. Comment le Ministère comptait calmer la peur des gens, cela était encore un mystère.
- La famille Hale doit être dévastée, reprit la femme.
- Elle reste surtout campée sur ses positions.
- J'ai du mal à croire qu'un étudiant de Poudlard soit mort.
Marcus Axwenrel ne put retenir une grimace en entendant la femme dire à haute voix ce que tout le monde au Ministère chuchotait depuis hier soir. Le fait ne l'attristait pas. En tant que sorcier, il ne connaissait pas le jeune étudiant, et des morts, il en avait connues et vues plus qu'il ne l'aurait souhaité. Et puis, il était un politique, il n'était que très peu sensible à ce genre d'information. Non, le fait n'attristait pas le ministre des affaires étrangères. C'étaient les conséquences qui l'inquiétaient, et ce que cet événement signifiait. Dans sa position au Ministère, il était en contact direct avec la Ligue, cependant l'organisation internationale avait décidé qu'elle ne prendrait pas encore au sérieux la menace qui pesait sur le Royaume-Uni. Pourtant, pour ceux qui savaient dans quelle situation se trouvait le Royaume-Uni en ce moment, la mort d'un jeune étudiant indiquait surtout que ce qu'ils craignaient tous se confirmait. Ils entraient dans une période sombre, une période noire.
- Ce que vous n'aurez pas de mal à croire ma chère Astride, reprit Marcus Axwenrel, c'est que cela signifie que le mage noir a décidé d'ouvrir les hostilités.
Et ceci, Astride Chantier n'en doutait pas. S'en prendre à un étudiant de Poudlard, à deux jours de la rentrée, ce n'était pas une déclaration de guerre à la famille Hale, mais plutôt à Albus Dumbledore, envers qui le mage noir montrait une haine ouverte et qui était le directeur de l'école. Lord Voldemort mettait en garde que les étudiants de l'école de magie ne seraient pas à l'abri du danger, et ceci, plus que tout, était ce qu'il y avait de plus redoutable dans les récents événements selon la ministre. C'était bien pour cela que la ministre de l'éducation avait rendez-vous avec Albus Dumbledore dès l'heure suivante.
Godric's Hollow, Angleterre
- Comment ça, Antonin Hale est mort ?
Le balai que le jeune homme tenait dans ses mains tomba au sol alors que sa mère lui annonçait la nouvelle, les traits fatigués et le regard inquiet. Derrière lui, ses trois amis se posaient au sol, une mine effarée sur le visage. Ce genre de nouvelles ne leur était plus inconnu, mais entendre la mort de quelqu'un qu'ils connaissaient était toujours douloureux. Et en effet, les maraudeurs connaissaient bien Antonin Hale.
- Tu m'as comprise James, reprit Aliah Potter en posant un regard tendre sur son fils et ses amis, ton père en a eu la confirmation au bureau ce matin. Le jeune homme a été assassiné la nuit dernière.
La main de James, qui ne tenait plus rien, se mit à trembler alors que derrière lui, il pouvait imaginer Sirius se retenant de vomir, Remus la mine sombre et Peter l'expression inquiète. Antonin, James le connaissait bien. Leurs deux familles se connaissaient depuis longtemps et s'appréciaient, James avait été proche de la soeur Hale et avait toujours rigolé avec le frère Hale. Puis, il pensa à Willah qui devait être dévastée. Dans quel état la reverrait-il à Poudlard dans deux jours ? La reverrait-il tout simplement ? Puis il pensa à Poudlard. Maintenant qu'Antonin n'était plus là, les tensions entre les Serpentards et les Gryffondors n'auraient certainement pas le même ton joueur qu'en présence d'Antonin. De nouvelles règles allaient être mises en place, et James se doutait que rien ne serait plus comme avant.
- Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demanda James à sa mère.
- Ce n'est pas encore défini, répondit-elle en fuyant presque le regard de James, ce que ce dernier remarqua. Je tenais juste à vous en informer avant que la Gazette ne diffuse l'information.
Traduction : vous n'avez pas à le savoir, ce sont des informations pour le moment confidentielles et vous ne saurez rien venant de moi. Ils le comprirent tous les quatre.
- Il a été tué par Tu-sais-qui ? demanda Sirius.
La mère de James ne répondit pas, ce qui confirma aux adolescents que la situation était grave. Les maraudeurs savaient que la mère de James était informée de ce genre d'information, et que si elle refusait de répondre, c'était qu'il devait y avoir bien plus derrière cette histoire qu'un simple oui ou non.
- Mais, continua Remus, la famille Hale ne va pas en rester là, non ?
- Ne vous mêlez pas de cette histoire les garçons, trancha Aliah sur un ton doux mais tranchant. Mais faites attention, les temps deviennent dangereux, je veux que vous soyez vigilants cette année et que vous ne créiez pas de problèmes. Et Sirius, son nom est Voldemort.
Avec un sourire, la mère de James tourna les talons sur ces mots, consciente que si elle restait plus longtemps, son fils et ses amis lui tireraient de la bouche des informations qu'elle n'avait pas le droit de révéler. Elle n'aimait pas le ton froid et distant qu'elle avait utilisé avec son fils, mais c'était la seule façon de dissuader les quatre jeunes à aller par la suite chercher des informations sur les événements. Il fallait qu'ils prennent conscience de la gravité de la situation, mais la mère de James n'avait pas idée d'à quel point ils en avaient conscience.
- C'est la merde, lâcha Sirius.
- C'est le premier d'une longue liste, constata Remus.
- Il faut qu'on réagisse, dit Peter.
- On va le faire, répondit James, et on va commencer par découvrir pourquoi Antonin a été tué.
Le silence régna un petit moment dans le groupe, et chacun avait perdu l'envie de jouer au Quidditch. Ils échangèrent un regard, se disant tous les quatre la même chose. Leur dernière année à Poudlard ne sera pas porteuse de bonne humeur et d'amusement comme les précédentes. Maintenant que le prince des Serpentards n'était plus là, personne ne savait comment les têtes fortes de la maison allaient se comporter. Quant aux maraudeurs, ils auraient intérêt à faire attention. D'un regard, ils savaient ce que chacun pensait. Que peu importait la suite des événements, ils resteraient unis et soudés, dans le doute comme dans la victoire.
Banlieue de Londres, Angleterre
- Jeune Lady, vous avez reçu une lettre de Mr Lucius Malefoy.
- Brûle-la. Je ne veux pas de ses fausses gentillesses.
L'elfe n'insista pas, préférant s'éloigner rapidement de la colère de sa maîtresse. Seule dans la pièce peu éclairée, la jeune fille décida d'allumer une cigarette, déplaçant sa jambe pour qu'elle passe de l'autre côté du rebord de la fenêtre à laquelle elle s'était assise. Une fois la cigarette allumée, elle remercia d'une pensée les moldus que son frère et elle avaient rencontrés à Dublin trois semaines plus tôt et qui leur avaient fait découvrir les traditions moldues. Trois semaines plus tôt, et pourtant tout cela lui semblait être une éternité plus tôt. Une éternité qu'ils n'avaient plus, que lui n'avait plus, qu'elle n'avait plus.
- Willah, éteins ceci et sors d'ici.
Elle ignora les paroles de sa mère et porta la cigarette à ses lèvres. Elle ignorait tout, n'acceptait rien. Oh non, Willah n'en avait aucune envie.
- Tu as Severus Rogue et Connor Nott qui t'attendent dans le salon.
- Dis-leur que je ne veux pas les voir.
- Ils insistent.
Willah Hale ne répondit pas. On lui avait souvent indiqué dans sa jeunesse que la meilleure façon de montrer son mécontentement était le silence. Il n'y avait rien de pire que d'affliger à son adversaire le traitement du silence, ce à quoi Willah était excellente. Sa mère n'insista pas et s'en alla, laissant la porte de la pièce ouverte.
Si Willah avait tenté un tant soit peu de penser à sa mère, elle ne se serait pas montrée froide envers elle. Après tout, Willah n'était pas la seule à souffrir de la situation, ses parents également vivaient des instants durs. Mais actuellement, Willah ne pensait à personne d'autre qu'à elle-même, et ce parce qu'elle se trouvait incapable de penser à qui que ce soit d'autre. A part Antonin. Elle termina la cigarette, et fit disparaître ce qu'il en restait d'un mouvement de main puis rentra dans sa chambre. Il fallait qu'elle se change les idées, et faire sa valise pour la rentrée qui aurait lieu deux jours après pouvait être un début. Ce fut en posant les yeux sur sa valise ouverte qu'elle remarqua les deux silhouettes qui se tenaient silencieusement sur le pas de porte, mais Willah décida de les ignorer. Sa mère les avait donc fait monter. Pourquoi personne ne prenait conscience qu'elle avait envie d'être seule ?
- Je n'aurais jamais pensé te voir dans un état aussi pitoyable, Hale.
A l'entente des propos de Nott, Willah se sentit obligée de relever la tête vers lui. Elle croisa son regard froid et sut qu'elle avait la réponse à sa question. Ils avaient tous conscience qu'elle voulait être seule, mais n'y accordaient aucune importance. Et en croisant le regard de Rogue juste à côté, Willah sut qu'ils se fichaient totalement qu'elle veuille être seule ou non.
- Qu'est-ce que vous voulez ?
- Te présenter en personne nos condoléances, répondit Connor Nott avec un sourire amusé tandis que Rogue restait muet.
- Où caches-tu ton expression triste dans ce cas Nott ?
Nott maintint un sourire ironique et pénétra la pièce pour s'approcher de Willah, Rogue sur ses talons. Ce n'était pas dans les habitudes de Rogue de parler pour ne rien dire, alors il ne disait rien. Willah le connaissait cependant bien et savait que le jeune homme n'était présent que pour vérifier qu'elle allait bien. Quant à Nott, son expression mauvaise ne rassurait pas la jeune fille. Aucun sentiment de deuil. Il se tint à quelques centimètres d'elle, et le temps d'un instant, elle eut le sentiment qu'une grimace de douleur passa sur les traits du Serpentard. Mais si ce fut le cas, Nott la cacha aussitôt. Il n'était définitivement pas là pour des effusions.
- J'espère que tu auras réussi à te reprendre pour la rentrée Willah.
- Pourquoi un ton aussi froid Nott, toi et moi ne sommes-nous pas amis ?
Le ton ironique de Willah fit sourire Nott. Elle avait compris et entrait enfin dans son jeu. Ou peut-être connaissait-elle suffisamment Connor Nott pour savoir qu'il valait mieux entrer dans son jeu, quitte à ne pas comprendre. En effet, le serpentard n'était pas là pour une visite de santé, il n'était pas venu pour prendre la jeune fille dans ses bras et lui indiquer que tout irait bien. Il n'attendait pas d'elle qu'elle lui demande comment il se sentait, il ne voulait pas qu'elle lui demande comment il accusait la mort de son ami. Il était venu la prévenir et la rappeler à l'ordre. Il attendait d'elle qu'elle ait peur de ses mots et qu'elle prenne conscience de la gravité de la situation. Alors il lui attrapa le bras sans douceur et planta son regard dans celui de la jeune fille.
- Maintenant qu'Antonin n'est plus là, tu es la grande héritière. Maintenant qu'il n'est plus là, tu deviens une cible. Fais attention à toi Willah, les temps deviennent très inquiétants pour les opposants de Voldemort. Quant à toi, il est temps que tu choisisses ton camp. Et il n'y a plus ton frère pour te protéger.
Le message était clair, elle n'avait pas le temps de pleurer la mort de son frère. Elle rencontra le regard de Rogue, sévère et indifférent, et Willah sut qu'elle devait prendre les mots de Nott au sérieux. Pourtant, il lui semblait qu'elle n'avait pas le droit de montrer qu'elle avait peur. Elle devait rester la même, avec ou sans son frère, c'est-à-dire feindre qu'elle était intouchable.
- Pourquoi mon frère a-t-il été tué, Nott ?
- Ne sois pas naïve, Willah, répondit Connor comme si la question de la jeune fille lui semblait ridicule.
En effet, Willah aurait été naïve de penser que Nott lui répondrait. Mais elle n'attendait pas de réponse, elle voulait simplement voir si les deux Serpentards savaient pourquoi et comment Antonin avait été tué, ce que personne encore n'avait daigné lui expliquer. Leur regard impassible avait suffi à Willah qui eut un sourire pour elle-même. Ce qui était naïf, c'était de croire une seconde qu'ils ne sachent pas pourquoi Antonin était mort. Ce qui était bête, c'était de leur avoir montré qu'elle, elle ne savait pas.
- Ne crois pas que tu me fais peur, Nott.
- Si tu n'as pas peur de mes mots Willah, c'est que tu n'as aucune idée de ce que la mort de ton frère signifie. Rien qu'à Poudlard, les règles changent. Fais attention à y trouver ton compte.
Willah soutint le regard de Nott. Il n'essayait pas de lui faire peur, mais la mettait en garde. Elle savait qu'elle avait intérêt à prendre au sérieux les propos du Serpentard, et surtout s'y préparer. Nott serra rapidement le bras de Willah, ce qu'elle choisit de prendre comme un geste affectueux, puis tourna les talons. Rogue échangea un dernier regard avec elle, sans avoir à un seul moment émis un son, et Willah jura y voir des excuses et de la tristesse avant qu'il ne sorte également de la pièce.
Elle se retrouva seule, et Willah soupira en tombant sur son lit. Tout ce qu'elle avait envie de faire était d'éclater en sanglot et ne jamais sortir de cette pièce, comme à la mort de son chat quand elle avait huit ans. Sauf qu'Antonin avait été là et n'avait pas quitté ce lit avec elle. Et Antonin n'était plus là. Willah le savait, personne ne la laisserait tranquille. A partir de maintenant, elle se trouvait seule face au monde et Willah se demanda comment elle arriverait à surmonter tout cela seule. Antonin était son pilier, il était celui qui parlait pour les deux, celui qui prenait l'attention sur lui pour qu'elle n'ait pas à faire semblant de participer, celui qui faisait le sale boulot quand tout ce qu'elle, elle voulait faire était disparaitre. Il était le Serpentard qui aurait du être placé à Gryffondor. Elle était la Serdaigle qui aurait du être placée à Serpentard. Aujourd'hui, elle était celle qui n'aurait plus de répit tandis qu'il était celui à qui on en donnait trop.
Assise sur son lit, Willah se demanda si elle n'était pas dans un rêve. Mais elle se rappela très vite que les rêves, eux, ne durent qu'une nuit.
