Cette fanfic HP a été écrite en premier lieu pour le forum de la Pensine. Après mûres réflexions et sous l'insistance de certain(e)s de mes lecteurs (et lectrices), je me décide enfin à publier sur ce site incontournable. Mon pseudo (BP Horadus) est du au fait que "Black Phoenix", pseudo sous lequel je suis plus connu, est déjà pris par un autre auteur de fic sur ce site. Je souhaite à tous mes nouveaux lecteurs de passer un agréable moment en compagnie d'Harry, Ron et Hermione, mais aussi d'une foule de personnages tous plus délurés les uns que les autres.
Bonne lecture et n'oubliez pas de laisser un commentaire.
Titre: Harry Potter et le syndrome d'Horadus
Rating: T (PG-13). Ce rating est du à quelques passages grivois mais pourrait évoluer vers un ton plus dramatique.
Spoilers: I-II-III-IV-V : Le récit débute juste après le tome 5. Le début de cette fic a été écrit en 2004, soit avant la publication du tome 6 et de la réalisation du site de JKR. La fic ne se base donc que sur les seules informations révélées dans les cinq premiers tomes.
Disclaimer: Il est évident que l'univers d'Harry Potter n'appartient qu'à JK Rowling (et légalement parlant, aussi à Warner Bros). Tous les personnages issus de mon imagination n'auraient jamais vu le jour si JKR n'avait pas créé ce petit monde magique et je dois l'en remercier. Le seul profit qu'on puisse tirer de cette fic est celui du plaisir de la lecture.
Allez zou ! On commence sans plus attendre...
CHAPITRE 1 - Nouveaux voisins
Une chaude après–midi ensoleillée s'esquissait sur la paisible Little Whinging. La chaleur de l'été avait depuis longtemps envahi les jardins de Privet Drive et rares étaient ceux qui avaient osé s'aventurer hors de chez eux. La circulation elle–même semblait ne jamais avoir existé et il régnait désormais sur le quartier un silence impressionnant, lourd et somnolent que seul le bourdonnement incessant des insectes butineurs venait troubler. Ce mois de juillet s'était montré particulièrement clément, chaud mais sans sécheresse, ce qui avait eu pour conséquence une excellente humeur généralisée chez tous les habitants de la rue. Tous exceptés bien entendu les résidents du numéro 4.
Si cet état de félicité ne touchait guère la famille Dursley, c'est que, pour elle, l'été se déroulait de la manière la plus épouvantable qu'elle pût imaginer. Pourtant, tout avait si bien commencé. Ils avaient en effet été heureux d'apprendre que les résultats de leur fils unique, Dudley, avaient été très brillants, comme ils aimaient le répéter à leurs voisins. A vrai dire, il n'avait que cinq examens à repasser alors qu'ils s'attendaient tous à une situation bien plus désagréable. En récompense, l'oncle Vernon et sa femme Pétunia lui avaient permis de partir avec les Polkiss et certains autres de ses amis pendant deux semaines au Pays de Galles. Mais l'éloignement de Dudley relevait de la torture morale pour Pétunia qui ne voyait déjà pas beaucoup son fils durant l'année scolaire. Et puis surtout, Dudley parti, il restait néanmoins chez les Dursley une personne dont la présence ne les enthousiasmait pas vraiment : leur neveu Harry Potter.
Le jeune Harry était arrivé à Privet Drive d'une manière aussi étrange qu'inconvenante et à leurs yeux il représentait l'épine irritante que l'on aimerait retirer du pied. Il n'était donc pas étonnant que l'aversion qu'ils éprouvaient pour lui s'était fortement accentué au fil des années. Jamais cet enfant ne leur avait apporté la moindre satisfaction, et sans doute jamais aucun espoir ne persistait à cet égard. Or, voilà qu'à présent les Dursley se voyait dans l'obligation de changer leurs habitudes dénigrantes envers leur indésirable neveu. Et faire en sorte que Harry se sente le bienvenu dans la demeure familiale relevait du tour de force après toutes ces années passées à l'ignorer ou le rabrouer. Mais avaient–ils vraiment le choix ? Se faire menacer quelques semaines plus tôt par une bande de sorciers farfelus qui leur avait conseillé de prendre soin du garçon n'avait déjà rien de réjouissant. Ils ne savaient pas très bien si leurs intimidations étaient sérieuses, mais il valait mieux se méfier avec ce genre d'individus. Surtout que la tête de ces gens n'avaient rien de très rassurant. Et puis ils ne s'étaient pas longtemps posé la question. En effet, une certaine Tonks –en voilà un bien étrange prénom– était passée prendre des nouvelles de Harry voilà une semaine. Oh, elle n'était pas restée bien longtemps ; elle n'avait pas même posé le moindre pied sur la propriété des Dursley, encore heureux ! Passant simplement en rue, elle s'était arrêtée quelques minutes devant leur jardin pour échanger quelques mots avec cet affreux Potter. Puis elle était repartie et personne n'aurait pu dire la direction qu'elle avait prise.
Cela avait eu plusieurs conséquences. La première était que Pétunia avait failli avoir une crise d'apoplexie en voyant qu'une personne de si mauvais genre –portant des cheveux roses chewing–gum, pensez donc !– s'était arrêtée devant chez elle, sous le nez des voisins et s'était mise à discuter avec son horrible neveu comme si elle le connaissait depuis toujours. L'oncle Vernon avait dû expliquer au voisinage qu'il s'agissait probablement d'une de ces droguées que devait fréquenter Harry à St–Brutus et qu'il avait appelé la police pour la faire fuir. Mais bien que sa femme et lui furent dans une colère noire, ils n'avaient pas osé sanctionner Harry. La dénommée Tonks n'était en effet pas venue par hasard. Elle l'avait fait dans le but de prendre des nouvelles du garçon et de rappeler aux Dursley le contrat qu'ils avaient négocié (un peu sous la contrainte) concernant Harry. Tonks prouvait que celui–ci était bel et bien sous surveillance et il était dans leur intérêt de ne pas le maltraiter. Le message avait très bien été reçu. Depuis ce jour, ils s'efforçaient d'être aimable avec Harry, ce qui donnait à leurs sourires forcés une crispation très proche de la grimace.
Une autre raison semblait inquiéter les Dursley. La vieille Higgins qui habitait au numéro 6, avait fini par pousser son dernier souffle en mai dernier et depuis tout ce temps, la maison restait inoccupée, attendant désespérément un acquéreur. Pétunia qui avait eu beaucoup à raconter sur le compte de la vieille Higgins depuis son décès, passait la plupart de son temps collé à la fenêtre pour surprendre quiconque venait observer l'affiche annonçant la mise en vente de la demeure. Elle qui aimait la vie si bien rangée, elle redoutait à présent l'arrivée de nouveaux voisins.
—– J'espère que ce ne sera pas un jeune couple. Ils auront probablement des enfants en bas âge qui nous réveilleront toutes les nuits, s'était–elle plainte à son mari.
—– Ou de ces cinglés transpercés de partout (Vernon n'appréciait ni tatouages, ni percings, et, en fait, rien de tout ce qui sortait de l'ordinaire) qui nous pollueront les oreilles de ce bruit qu'ils appellent musique. Mais, foi de Dursley, ils trouveront à qui parler.
—– Et si… et si c'étaient… des gens comme… comme lui !
Pétunia se refusait à prononcer le mot « sorcier » et préférait montrer Harry d'un signe de la tête. Un frisson parcouru tout son corps.
—– Allons, ma chérie, ne raconte pas de telles sottises. Pourquoi diable ce genre d'individu viendrait s'installer ici ? Ils sont beaucoup mieux entre–eux, avec leurs petites affaires et le mieux, c'est qu'ils y restent, répliqua Vernon qui disait ça surtout pour se rassurer.
Eux qui avaient tant d'aversion pour la magie ne voulaient jamais l'évoquer mais depuis les évènements de l'année passée, lorsque leur fils avait été agressé par une créature magique, ils ne pouvaient plus faire abstraction du monde des sorciers. Aussi, depuis le retour de Harry chez eux, ils ne se sentaient plus tout à fait tranquilles.
Loin de ces préoccupations, Harry était pour le moment allongé dans l'herbe, caché derrière le massif de fleurs, à l'endroit exact où il s'était souvent tenu l'année précédente alors qu'il attendait des nouvelles du monde des sorciers. Pour lui, tout paraissait pour le mieux car beaucoup de choses avaient changé dans cette maison, et il avait maintenant bien plus de liberté qu'auparavant. Depuis que Tonks était passée, les Dursley s'étaient montrés beaucoup plus conciliants avec lui. Plus concrètement, ils faisaient surtout ce qu'ils pouvaient pour l'éviter, ce qui l'arrangeait beaucoup. De plus il n'était pas obligé de suivre le régime familial imposé par Pétunia à cause du poids excessif que Dudley n'arrivait décidément pas à perdre. Pour être totalement quitte du jeune homme, ils avaient même fini par lui offrir la vieille télé de Dudley (après qu'il en ait reçu une nouvelle pour son anniversaire) de sorte que Harry puisse regarder les informations tout seul dans sa chambre sans devoir déranger tout le monde.
Une autre source de satisfaction venait des résultats de ses Buses qui étaient finalement arrivés par hibou la semaine dernière. Harry avait été surpris de voir qu'il avait de très bonnes notes un peu partout, en dépit de ses piètres prestations en divination, histoire et astronomie. Il se demandait si Dumbledore n'était pas intervenu en sa faveur mais cette idée n'avait guère de sens. Le vieux directeur avait lui–même reconnu qu'il avait à l'égard de Harry une relation beaucoup trop proche par rapport aux autres élèves de Poudlard et que cette situation n'était pas très équitable. Intervenir de telle manière sur les décisions des examinateurs revenait à officialiser ce « favoritisme » et Harry doutait fort que Dumbledore puisse agir de la sorte. Cependant, il ne pouvait pas avoir reçut d'Effort Exceptionnel en divination sans que quelqu'un n'ait délibérément rehaussé sa note. En était–il de même pour Ron ? Avaient–ils augmenté leurs résultats en vertu de ce qui s'était passé au Département des Mystères ? Harry n'en savait rien. Il n'avait pas reçu de nouvelles de Ron depuis les résultats des Buses, ce qu'il trouvait d'ailleurs assez inquiétant. Hermione, elle, avait une fois de plus surpassé tout le monde mais comme c'était son habitude, Harry ne pouvait pas vérifier si ses notes avaient été artificiellement augmentées.
Quoi qu'il en fut, Harry n'était plus maintenant un sorcier de premier cycle et il pouvait à loisir utiliser sa baguette à condition toutefois de ne pas exercer de magie en présence de moldus. Cette perspective avait donc d'autant plus terrifié l'oncle Vernon, sa tante Pétunia et son cousin Dudley. Ce dernier avait gardé en mémoire l'attaque des Détraqueurs l'année passée et considérait toujours que Harry en gardait la seule responsabilité. Le fils Dursley n'avait donc aucunement protesté lorsque ses parents avaient offert à Harry son ancien téléviseur, espérant secrètement que son abominable cousin le laisse tranquille. Evitant de s'attarder dans la même pièce que Harry quand il le pouvait, il semblait également ne jamais vouloir rester trop longtemps à la maison, au grand dam de sa mère.
Aussi, le jeune Potter profitait de sa liberté nouvelle et aidait volontiers aux tâches ménagères. Auparavant, il avait été désigné d'office pour s'occuper des corvées de la maison, mais maintenant qu'il en était exempté, il les accomplissaient de son propre chef, et avec un plaisir non dissimulé. Il s'était ainsi amusé à nettoyer la voiture de son oncle, restée dans le garage et hors de la vue des voisins, à grands coups de sortilège récurvite. Il avait fait jaillir de sa baguette de l'eau chaude et savonneuse sous pression, ce qui avait eu pour résultat de faire briller la voiture comme jamais elle n'avait brillé. L'oncle Vernon en avait été profondément choqué, n'admettant pas que la magie ait pu rendre son véhicule aussi flamboyant que s'il avait été neuf. Et bien qu'il se serait d'ordinaire pavané en rue pour exhiber avec fierté sa belle voiture, il partait désormais travailler en bus, tant que sa voiture ne reprendrait pas rapidement des poussières. De la même manière, Harry s'était occupé des fleurs de Pétunia. Bien sûr, la baguette était proscrite à l'extérieur de la maison pour éviter qu'un moldu ne l'aperçoive mais Harry utilisait un engrais tout particulier qui donnait aux massifs une floraison de toute beauté. Le jeune homme avait trouvé un certain plaisir à lire le dilemme exprimé sur le visage de Pétunia. Elle était à la fois ravie que ses voisines la complimente sur ses merveilleuses fleurs mais elle se perdait en explications tortueuses pour expliquer comment elle s'y était prise et Harry jubilait de son malaise.
La lotion pour plantes qu'il avait utilisée, c'était Neville Londubat qui la lui avait envoyée. Harry avait été agréablement surpris de recevoir un hibou de Neville. C'était bien la première fois qu'ils communiquaient en dehors de Poudlard. Mais Neville semblait avoir beaucoup d'estime pour Harry et il avait commencé à prendre une certaine assurance. Il faut avouer qu'avoir affronté une douzaine de Mangemorts et défendu désespérément la prophétie jusqu'à s'en faire torturer, cela consolidait considérablement les liens de l'amitié. Dans son courrier, il avait expliqué que depuis les évènements du ministère, sa grand–mère se montrait beaucoup plus souple avec lui. Elle ne cessait de répéter qu'il avait l'étoffe de ses parents et en était très fière. Elle lui avait même acheté une toute nouvelle baguette, un nouveau chaudron (plus résistant en cas d'erreur de mesure) et un grimoire de botanique. Depuis, il s'exerçait à faire quelques potions magiques, histoire de ne pas avoir à subir des leçons de rattrapage avec Rogue (il semblait bien que Malefoy avait allègrement diffusé l'information concernant les cours de rattrapage en potion de Harry).
Mais cela sous–entendait aussi que Neville allait continuer les cours de potions et il avait donc certainement reçu une mention Optimale pour cette matière. Londubat devenait assez doué, en réalité, pour autant qu'il soit suffisamment éloigné de Rogue. Certes, il avait fait déborder plusieurs fois son chaudron de sorte que la maison de sa grand–mère s'était transformée en véritable jungle, mais il avait préparé son engrais avec succès, ce qui était de très bon augure. Neville avait–il vu également sa note de potions augmenter ? En tout cas, s'il continuait les cours de potions c'est que le jeune Londubat avait probablement la volonté de poursuivre une carrière d'Auror, et suivre ainsi la trace de ses parents. Voilà au moins quelque chose de réconfortant. Qui aurait cru un jour que ce cher Neville prendrait une telle direction ! Cette idée avait alors réchauffé le cœur de Harry.
Cependant, malgré toutes ces sources de réjouissance, le jeune sorcier n'avait jamais été aussi morose de toute son existence. Ayant reçu le matin même la dernière édition de la Gazette du Sorcier, il ne cessait à présent de ressasser inlassablement les évènements qui s'étaient déroulés en juin dernier. La Gazette fourmillait de nombreux articles sur le retour du Seigneur des Ténèbres, sur l'art de l'autodéfense magique, ou encore des témoignages plus ou moins certifiés sur la présence de Mangemorts à divers endroits du pays. Rien de bien nouveau. Mais une photo l'avait marqué, en deuxième page. C'était celle de son parrain, Sirius Black, tragiquement disparu au Département des Mystères voilà à peine un mois.
Cette photo, que Harry n'avait encore jamais vue, représentait un Sirius presque jeune homme, très souriant, rayonnant même, qui ne cessait de lui adresser signes et clins d'œil. L'article qui accompagnait la photo portait un titre écrit de grandes lettres : « Réhabilitation d'un héros ». Harry ne pouvait s'empêcher d'en vouloir aux auteurs leur retournement de veste. Comment pouvaient–ils parler de héros alors que peu de temps auparavant, ils avaient eux–même qualifié Sirius Black de plus dangereux criminel que le monde sorcier ait connu ? L'article racontait donc qu'il y avait eu une petite cérémonie en hommage à son parrain, organisée par un Cornélius Fudge en perte de vitesse. Les sondages et les courriers des lecteurs étaient sans équivoque sur la manière de penser de la communauté des sorciers à propos du Ministre de la magie. Mis à mal à plusieurs reprises, Fudge essayait plus que probablement de se racheter une image en donnant à Sirius Black l'ordre de Merlin première classe à titre posthume. Harry en avait la nausée. Il ne pouvait s'empêcher de penser que Peter Pettigrow avait lui aussi reçu ce titre honorifique, alors qu'il était à l'origine de la trahison et de la mort de ses parents. Harry aurait préféré que Sirius ne reçoivent jamais ce titre mais qu'il soit là, bien vivant, à lui parler des maraudeurs, à insulter Kreattur ou plus simplement à gambader dans l'herbe sous sa forme canine. Cette pensée emplissait Harry de peine mais aussi de haine à l'égard de Fudge.
Le jeune homme ruminait sa colère et son dégoût à l'ombre de la maison, lorsqu'il entendit approcher un camion. Instinctivement, il posa les doigts sur sa baguette magique et se redressa. Après tout, la guerre était à présent inévitable et il pouvait s'attendre à se faire agresser à n'importe quel moment par un Mangemort ou une quelconque créature maléfique. Il était prêt à bondir si le besoin s'en faisait ressentir. Mais le bon sens lui revint. Pourquoi des sorciers viendraient–ils avec un véhicule moldu ? D'autant plus que le bruit du moteur avait brisé la monotonie qui régnait dans la rue et que les voisins se précipitaient déjà tous à leurs fenêtres pour voir qui s'aventurait dans leur quartier à l'heure de la sieste. L'arrivée d'un ennemi aurait probablement été plus discrète. Mais Harry ne desserra pas pour autant l'étreinte autour de sa baguette. Surtout que le camion s'arrêta juste en face du jardin.
Le véhicule portait l'enseigne de « Grobras & Costeau », une société de déménagement. Manifestement les nouveaux voisins venaient d'arriver. Pétunia se rua sur la fenêtre et, dans sa précipitation, elle se cogna contre la vitre. Harry put l'entendre crier après son mari comme si elle venait d'apercevoir une soucoupe volante. Une belle voiture venait de s'arrêter et, alors que les déménageurs commençaient à ouvrir le camion, un couple en descendit et alla ouvrir la porte d'entrée du numéro 6. Manifestement, ils semblaient être au goût des Dursley car Harry les entendit pousser un soupir de soulagement. L'homme devait approcher la cinquantaine, à en juger par sa chevelure noire et légèrement grisonnante, et il portait une cravate sombre assortie à ses vêtements neufs et ses chaussures bien cirées. La femme avait l'air un peu plus jeune et avait les cheveux châtains. Elle portait une robe légère mais sobre et distinguée. D'après leur tenue, il s'agissait de gens aisés, issus de bonne famille et connaissant tous les raffinements de la bourgeoisie. Même si le quartier comportait une frange assez aisée de la population, à commencer par Vernon Dursley, PDG d'une petite entreprise de perceuses, Harry se demanda ce que des gens de ce standing venaient faire ici.
—– Oh, je le connais dit précipitamment l'oncle Vernon à sa femme. C'est William Breakspell, un avocat de la région. J'ai fait appel à ses services lors d'un litige avec un concurrent et il nous a obtenu gain de cause. Un type vraiment très doué !
—– Voilà au moins des gens respectables, répondit Pétunia toute rassurée de voir que ses nouveaux voisins n'avaient pas les cheveux rose chewing–gum.
—– Allons les accueillir comme il se doit. Il vaut mieux faire bonne impression avec ces gens–là.
Harry entendit la porte d'entrée s'ouvrir et vit sortir un oncle Vernon tout sourire. Celui–ci lança au passage un regard noir à Harry en signe d'avertissement. Malgré les menaces de Maugrey et Lupin, Harry savait très bien que s'il devait créer des problèmes de voisinage la colère de son oncle lui serait particulièrement douloureuse. Pétunia le suivait de près.
—– Bonjour à vous, Mr Breakspell, et soyez les bienvenus à Little Whinging.
—– Si je m'attendais… Bonjour Mr Dursley. Je ne savais pas que vous habitiez ici. Venez que je vous présente à ma tendre épouse, Lisbeth.
—– Enchanté de faire votre connaissance, Mrs Breakspell dit Vernon avec empressement pendant qu'il embrassait la main tendue d'Elisabeth Breakspell. Voici ma femme Pétunia. Je suis certain que vous vous entendrez à merveille.
Vernon accueillait ses nouveaux voisins avec beaucoup d'agitation et de déférence pendant que les déménageurs commençaient à débarquer les premiers meubles du camion. Mrs Breakspell étaient en train de complimenter Pétunia pour son magnifique parterre de fleurs, ce qui avait pour conséquence de cristalliser cette dernière dans un sourire tendu. C'est alors que Mr Breakspell remarqua la présence de Harry.
—– C'est donc là votre fils, Mr Dursley ?
Vernon qui savait que Dudley avait encore trouvé le moyen de se vautrer chez ses amis se retourna avec une certaine démence dans les yeux.
—– Heu… non, non… c'est… c'est mon neveu. Ne faites pas attention à lui, il est un peu… dérangé… (il se mit à baisser la voix pour ne pas que Harry l'entende). Il n'a pas toute sa tête à cause de l'accident qu'il a eu étant petit et dans lequel ont péri ses parents.
—– C'est ce qui lui a fait cette vilaine cicatrice sur le front… Je vous en prie, évitez de le regarder, ajouta Pétunia.
—– Oh comme c'est épouvantable, s'écria Mrs Breakspell. La vie est faite de bien des malheurs… Pauvre garçon !
—– Mais je vois que vous avez une ravissante enfant, s'empressa de continuer l'oncle Vernon.
En effet, pendant qu'ils discutaient, deux jeunes gens étaient sortis de la luxueuse voiture. La jeune fille qui devait avoir l'âge de Harry s'approchait de ses parents avec grâce. Elle était très belle et avait de longs cheveux blonds tressés en une natte nouée dans un foulard de soie. Elle portait avec élégance une très belle robe d'été aux couleurs pastelles et se protégeait du soleil par une ombrelle de dentelle. Harry n'aurait pas été étonné qu'elle soit une enfant adoptée tant elle différait physiquement de ses parents et il aurait bien parié son éclair de feu qu'elle avait du sang de vélane. Elle alla saluer les Dursley puis son regard croisa celui de Harry et lui sourit timidement. Elle avait les yeux d'un bleu très clair mais particulièrement intense, et son regard qui pétillait sembla transpercer Harry de part en part. Il lui semblait qu'elle dégageait une aura de légèreté et de béatitude qui pouvait engloutir tout le désespoir qui avait envahi le jeune homme quelques minutes plus tôt. Le sorcier fut littéralement cloué sur place, ne sachant comment réagir. Il aurait voulu fuir ce regard qui avait quelque chose de comparable à celui de Dumbledore, mais paraissait cependant radicalement différent. Et ces deux yeux tellement particuliers le désarmaient d'autant plus… Pendant un instant, il se sentit presque nu.
—– Eh bien, qu'attends–tu pour venir te présenter ?
Harry sursauta. Il regarda l'oncle Vernon, mais ce n'était pas lui qui avait parlé. Il s'apprêtait à avancer mais ce fut le frère de cette ravissante et nouvelle voisine qui s'avança vers ses parents en traînant les pieds d'un air peu réjoui. Ce grand gaillard n'avait aucunement l'allure du reste de sa famille. Il représentait tout ce que les Dursley détestaient. Il portait un vieux jean sale, délavé et troué, un t–shirt tout aussi sale et rapiécé illustrant un groupe de heavy metal particulièrement trash. Il était grand et costaud. Ses bras, très musclés, exhibaient d'impressionnants tatouages représentant des serpents entrecroisés. Ses cheveux assez longs, ébouriffés et très noirs dissimulaient des oreilles couvertes de boucles argentées d'un goût douteux. D'ailleurs ses oreilles n'apparaissaient pas comme les seuls endroits du visage percés d'objets métalliques. Il en portait également deux sur le sourcil droit, un sur la narine gauche et un autre en travers de la lèvre. Il alla saluer très promptement et avec mauvaise humeur les Dursley qui étaient restés cloués sur place, frappés de terreur.
Puis il retourna vers la voiture pour taper un message sur son téléphone mobile du dernier cri. Il leva les yeux quelques instants et observa Harry sans ciller avec un regard mauvais. Il y avait quelque chose de terrible dans ce regard. Il semblait lui lancer un défi. Harry fut frappé par la couleur de ses yeux qui brillaient d'un vert étincelant et un sentiment de malaise s'installa en lui. Il fut soudain pris d'un léger sentiment de panique. Et si ce garçon, un peu plus vieux que lui, était en train de lire dans ses pensées par légilimancie ? Juste à ce moment là, le garçon reposa les yeux sur son appareil et se mit à tapoter frénétiquement les touches du téléphone. Avait–il détourné les yeux par hasard où avait–il compris que Harry se doutait de quelque chose ?
Le soir venu, les Dursley discutaient avec passion pendant le repas. Dudley, comme a son habitude s'était assis sur deux chaises du côté opposé de son cousin.
—– Tu te rends compte ? D'aussi honnêtes gens et voilà ce qu'est devenu leur fils. Un véritable voyou ! Si je m'attendais à ça ! J'espère au moins qu'il ne fera pas d'histoire dans le quartier.
—– Ou qu'il n'essaiera pas d'entraîner notre Dudlinouchet dans ses méfaits. Là dessus Pétunia tenta de prendre la main trop épaisse de son fils.
—– Oui, enfin… Mr Breakspell est avocat tout de même, et l'un des meilleurs. Je n'aimerais pas m'opposer à lui dans une affaire de justice. Cela dit, s'il s'avère que son brigand de fils s'approche de Dudley, il verra ce qui lui en coûtera.
—– C'est tout de même étonnant qu'ils aient si bien réussi avec leur fille et pas avec lui.
—– Tu l'as dit toi–même ma chérie. Quand le sang est mauvais, on ne peut rien y faire.
Un silence s'installa et instinctivement, les Dursley regardèrent furtivement Harry. Celui–ci ne s'en souciait guère, il était habitué à ce genre de commentaires. Les Dursley commençaient d'ailleurs à manquer cruellement d'originalité à son sujet. Mais Harry remarqua que Dudley écoutait avidement ses parents, ce qui était assez inhabituel venant de sa part. Le sujet avait commencé à l'intéresser.
—– D'ailleurs j'espère bien que tu ne chercheras pas à le rencontrer, mon garçon, dit précipitamment Vernon à Harry. Il ne faudrait en aucun cas qu'il sache quoi que ce soit te concernant. Si jamais je vous surprends ensemble à comploter quelques mauvais plans…
—– J'ai bien vu comme il te regardait, tout à l'heure, continua sèchement Pétunia.
—– Comment s'appelle–t–elle encore ? coupa Dudley.
—– Qui ça, mon chéri ?
—– Ben, heu… notre nouvelle voisine… (il devint un peu rouge)
—– C'est Elisabeth Breakspell. Une charmante dame, bien de chez nous. Elle m'a dit qu'elle avait grandi à Middletown. C'est là que ton père et moi nous sommes connus, mon Dudly chéri.
—– Naaaan… Je voulais dire… sa fille ! (et là il devint vraiment écarlate)
—– Oh, heu...C'est Victoria, je pense.
Dudley avait les yeux ronds. Les voisins avaient passé leur après–midi à emménager et ils y étaient encore occupés quand Dudley était revenu à la maison en début de soirée. Il avait alors aperçu Victoria et en était resté stupéfait. Il semblait bien que leur nouvelle voisine ne lui était pas indifférente.
—– Ah ah, fils ! Te voilà devenu un homme, beau et rigoureux comme ton père ! Tu es à présent en âge de t'intéresser à la gente féminine. Tout à fait moi à ton âge. Surtout que cette petite représente un bon parti !
Pétunia parue offusquée. Harry ne savait pas si c'était parce que l'oncle Vernon sous–entendait qu'il avait été un coureur de jupons dans sa jeunesse –ce qui l'aurait grandement étonné– ou parce que Dudley regardait une fille… lui, son cher petit Dudlinouchet à elle.
—– Tu oublies bien vite son vaurien de frère, répliqua Pétunia. Je ne voudrais jamais d'un beau–fils de ce genre.
—– Ah… heu… oui, bien sûr, bien sûr.
Dudley et Vernon redevinrent sombres et Harry eut du mal à réprimer un sourire. Dudley venait de lui offrir un sujet de moquerie supplémentaire, et comme pour l'histoire des fleurs ou de la voiture, Vernon ne savait s'il devait penser du bien ou du mal de ses nouveaux voisins.
Une semaine s'était écoulée. Harry n'avait pratiquement plus vu Earvin, son étrange voisin. Celui–ci s'enfermait dans sa chambre, tous volets fermés en écoutant ce que les Dursley appelaient de la « musique de sauvages ». Plusieurs fois ses parents lui avaient demandé de baisser le son, de peur d'être mal accueillis par leur nouveau voisinage. Le garçon avait fini par mettre des écouteurs sur ses oreilles et ne dérangeait plus personne. Harry ressentait le désir étrange de se méfier de cet obscur jeune homme. Depuis le retour de Voldemort, il avait sorti le scrutoscope que lui avait offert Ron à son anniversaire voici trois ans déjà. L'appareil, destiné à mettre en garde contre les actes de malveillance et les personnes suspectes, n'avait pas bougé et, par conséquent, aucune menace ne se profilait pour le moment. Il n'avait donc aucune raison de s'inquiéter à moins, bien entendu, que son ennemi potentiel fût tellement puissant qu'il puisse annihiler à distance les effets de l'appareil magique. Bien que cette hypothèse paraissait farfelue, Harry restait continuellement sur ses gardes. Mais sa raison lui conseilla d'éviter impérativement de plonger dans la paranoïa.
Vicky, elle, passait ses journées dans le jardin à lire un épais bouquin qui semblait la passionner. Son côté intellectuel n'avait en rien affecté l'admiration que lui portait Dudley qui ne cessait d'entrer et sortir de la maison, pour toute sorte de motifs. Il espérait sans aucun doute se faire remarquer par la jeune fille. Harry trouvait sa parade particulièrement ridicule et il devait se retenir de rire à chaque fois qu'il le voyait procéder. D'autant plus que la belle Vicky ne décollait pas les yeux de son ouvrage et Dudley aurait pu mourir à ses pieds qu'elle ne l'aurait probablement pas aperçu. Pétunia, paraissait dégoûtée de voir l'attention que son fils lui portait. Elle se demandait si elle ne préférait finalement pas la période où Dudley avait tendance à fuir la demeure familiale. Mais elle devait reconnaître malgré tout que Victoria avait un effet bénéfique sur son fils. Il ne rechignait plus à suivre son régime et passait moins de temps chez ses amis ou devant la télévision. Harry l'avait même surpris à faire quelques exercices de musculations dans le garage. Bien entendu, ce gros patapouf avait prétendu qu'il devait s'entraîner pour garder son titre de champion de boxe junior intercollèges du Sud–Est, catégorie poids lourds. Mais Harry se doutait bien que la véritable raison s'appelait Victoria.
Malgré ces moments d'hilarités, Harry conservait toutefois beaucoup de mélancolie en lui. Il avait en outre, d'autres choses à penser que de se préoccuper de son imbécile de cousin. A dire vrai, il commençait sérieusement à s'inquiéter de l'absence de nouvelles de Ron. Après la colère que Harry avait piqué au 12 du square Grimmaurd, le rouquin aurait dû se souvenir que Harry n'appréciait guère être tenu à l'écart des nouvelles du monde magique et surtout de ses amis. Les hiboux n'avaient pourtant pas manqué de défiler à Privet Drive, au grand désespoir des Dursley. Harry avait ainsi reçu du courrier de Hermione, Hagrid et même de Neville et de Luna Lovegood. Cette dernière lui avait envoyé une carte postale magique de Suède où elle était partie à la recherche du Ronflak Cornu. Mais rien de la famille Weasley. Or ce n'était pas dans leurs habitudes de l'ignorer. Et Harry s'étonnait que Ron ne se fût empressé de lui raconter la réaction de son frère Percy, suite à la révélation du retour de Voldemort.
Il recommençait donc à angoisser d'autant plus que depuis quelques jours, il se passait des choses véritablement étranges. En cherchant un livre de magie dans ses affaires, le sorcier avait fait glisser sa cape d'invisibilité hors de sa grande malle. Et à sa grande stupeur, il avait constaté qu'elle avait perdu une partie de son efficacité. Sa main, passée sous la cape, restait parfaitement visible, bien que translucide, comme s'il avait été un fantôme. Et Harry était persuadé que son balai manquait également de sa puissance habituelle malgré qu'il ne pouvait le tester. Même le monstrueux livre des monstres que lui avait offert Hagrid semblait somnoler plus qu'à l'ordinaire. Il n'avait pas essayé une seule fois de lui mordre les doigts, malgré les grognements énervés qu'il continuait à émettre. Enfin, même les fleurs du jardin semblaient flétrir de manière anormale. Harry avait d'ailleurs entendu sa tante dire à la voisine que c'était probablement Harry qui avait encore dû verser je–ne–sais–quel–poison, que ce vaurien n'avait décidément rien de bon en lui. Au premier abord, Harry avait pensé que Neville n'avait peut–être pas si bien réussi sa potion qu'il l'avait cru, finalement. Et combien même ce n'était pas le cas, les effets avaient peut–être une durée limitée et Harry avait donc rajouté un peu de lotion sur les fleurs. Mais depuis que des phénomènes étranges se produisaient dans sa chambre, il s'était mis à douter très sérieusement. Peut–être que l'origine du dépérissement des plantes relevait d'une toute autre nature…
C'est maintenant que Tonks aurait dû passer. C'est maintenant qu'il aurait voulu être avec Sirius. Il se décida à envoyer Hedwige à Dumbledore, Lupin ou n'importe quel autre membre de l'Ordre du Phénix pour leur expliquer ses craintes. Peut–être n'était–ce que le fruit de son imagination, mais depuis que le Seigneur Noir avait ressurgi, rien de devait être laisser au hasard. Harry monta quatre à quatre les escaliers qui le menaient à l'étage et s'enferma dans sa chambre. Il sortit un rouleau de parchemin de sa malle, non sans avoir jeter un coup d'œil sur sa cape d'invisibilité devenue inopérante. Trempant sa plume dans de l'encre verte indélébile, il réfléchissait déjà aux premières phrases qu'il enverrait au quartier général de l'Ordre.
