Auteur : Midwintertears
Titre : La vie intérieure
Pairing : encore et toujours Ron/Draco
Genre : Romance/Drama, enfin, il me semble…
Rating : T
Illustration : http : /i67 . servimg . com/u/f67/13/67/83/79/coraza10 . jpg (retirez les espaces, sinon, il y a un lien dans mon profil, dans le paragraphe intitulé "Illustrations de fics")
Avertissement : slash & lime dans la deuxième partie
Disclaimer : Tout est à JKR, vénérons-la, et moi je ne touche pas d'argent pour cette histoire.
La vie intérieure
Prologue
Le vent était franchement froid, il s'engouffrait sous les vêtements de Ron, le faisant frissonner. Samedi matin. L'air était humide, et la fraîcheur rougissait les joues, surtout en altitude, à son poste de Gardien, devant les trois anneaux de Gryffondor qu'il devait protéger. De là, il avait un superbe panorama où il pouvait observer les mouvements de tous les autres joueurs. Ceux-ci filaient comme des flèches rouges et vertes, se disputant le Souaffle, évitant les Cognards, restant attentifs.
Soudain, le Vif d'Or apparut dans le coin de son champ de vision. Ron entreprit de ne pas y prêter attention, la petite balle dorée finirait bien par s'en aller et ce qu'elle deviendrait ne le concernait pas. Un Poursuiveur de Serpentard s'approchait dangereusement de ses buts. Il fronça les sourcils, prêt à l'affronter si aucun de ses coéquipiers ne récupérait le Souaffle d'ici là.
Le Vif d'Or semblait trouver amusant de tourner autour de la tête du rouquin. Agacé, celui-ci fit mine de la chasser d'un geste nerveux de la main. Mais l'objet ailé continua à tournoyer comme un moustique ayant repérer son futur repas. Le Poursuiveur se rapprochait, et aucun de ses trois adversaires Rouge et Or ne semblait en mesure de l'empêcher d'accéder aux buts. Ron sut qu'à partir de ce moment-là, son rôle commençait. Il fit abstraction de l'insecte doré et se prépara à la confrontation.
Et confrontation il y eut.
Mais ce ne fut pas un affrontement mais une collision, ce ne fut pas un choc des talents mais un choc tout court. Et ce ne fut pas un Poursuiveur de Serpentard, mais un Attrapeur.
—Dégage Weasley !
Malfoy avait repéré le Vif d'Or, et était cette fois certain qu'il l'aurait avant Potter. Mais sa victoire reposait sur sa rapidité, et fonçant à toute vitesse vers le rouquin, il ne put pas l'éviter pour se saisir de la balle ailée.
Le choc fut terrible, Ron n'eut pas le temps de se rendre compte de ce qui lui arrivait, quand le corps de Malfoy heurta violemment sa tête, le plongeant dans l'inconscience totale…
Première partie
Quand Ron se réveilla, l'ambiance était humide mais chaude.
Il était trempé jusqu'aux os, mais les rayons du soleil le réchauffaient doucement. Il cligna des yeux. Il ne comprenait pas où il était. Il lui sembla qu'il était couché sur quelque chose de mouillé et pâteux, comme de la boue. Était-il tombé sur la pelouse du terrain ? Non, il faisait trop chaud, et il ne sentait aucune présence de gazon.
Des sons. Des sons étranges, mais relaxants. Un bruit d'embruns qui se brisent sur une plage, et au loin, des petits coups sourds, allant par deux, se répétant…La mémoire lui revint : le match. Comment cela s'était-il terminé ? Ils avaient gagné ? Et lui, il était où ? A l'infirmerie ? Définitivement, non.
Il ouvrit les yeux pour de bon. Comme il était allongé sur le côté, sa joue trempait dans une flaque. Il se releva sur un coude. De l'eau rouge. De la boue rouge. Non, du sable rouge ! «Mais qu'est-ce que c'est que ça ?» pensa-t-il, «C'est…c'est…du sang!»
Paniquant un peu, il ne redressa pour se mettre à genoux. Il écarta de son visage une mèche de cheveux poisseuse et pleine de sable. Non, ce n'était pas du sang, juste de l'eau normale. Il leva la tête. Le ciel était bien rouge lui, et l'eau se contentant de refléter la couleur du ciel, elle prenait une teinte sanglante sous celui-ci. Ron se releva complètement, sa tenue de Quidditch intégralement trempée. Il observa le décor alentour. Devant lui, une plage rouge, derrière lui, une mer rouge qui se perdait dans l'horizon. Il pataugeait à marée basse.
Il plongea sa main pour prendre une poignée de sable. «C'est quand même fichtrement rouge…une sorte d'argile, peut-être? Non, l'argile n'a pas cette consistance… Nom d'un vampire, où je suis? Sur Mars ou quoi? Je sais que Transplaner n'a jamais été mon truc, mais de là à me retrouver sur une autre planète sans l'avoir voulu…Quoi que…je ne vois aucun soleil…rien qu'un ciel rouge et lumineux, mais pas d'astre…Que ça soit la Terre ou Mars, il faut une étoile…Mais alors, où est-ce que je suis, bon sang?»
Au bout de la plage, se trouvait une forêt d'arbres épais aux feuilles vermeilles. Et toujours ce son étrange, deux petits coups, puis deux petits coups, puis deux petits coups…
—Harry ? lança-t-il.
Peut-être n'était-il pas seul.
—Harry ? Hermione ? Ginny ?...Maman ?
Personne ne lui répondit.
Maintenant qu'il était établi qu'il était dans un endroit inconnu, visiblement seul, et sans moyen pour rentrer chez lui (et sans la moindre idée de la direction à prendre pour y parvenir), il ne lui restait qu'une chose à faire: explorer. Il décida de commencer par longer la plage pour voir si le paysage changerait. Peut-être découvrirait-il une ville, ou une quelconque marque de civilisation humaine. Ainsi, il se mit en route, prenant à droite, et marcha le long des vagues.
Le temps passa. La montre de Ron ne fonctionnait plus, l'eau l'avait sans doute déréglée, mais il savait qu'il marchait depuis des heures. Il ignorait s'il était le soir ou le matin, l'absence de soleil ne lui permettait pas de déterminer à quel moment de la journée il se situait. D'ailleurs, la nuit tombait-elle dans un tel endroit? Il commençait à avoir faim et soif…
Tout en cheminant, il réfléchissait en scrutant la forêt. Le plus grand mystère, finalement, ce n'était pas de savoir où il était, mais comment il était arrivé là. Ses derniers souvenirs, c'était Malfoy volant vers lui à toute vitesse, près de le percuter. Comment de là s'était-il retrouvé sur une plage dans une contrée inconnue? Un phénomène magique avait du se produire, il devait avoir été téléporté dans une autre dimension ou quelque chose dans ce genre-là. Il regretta de ne pas être plus attentif en classe, peut-être qu'un de ses professeurs en avait parlé un jour…
Il lui sembla qu'il marchait depuis une éternité quand enfin il vit quelque chose. Une grille en fer noire, hérissée de pointes. Enfin, des humains, ou du moins, des êtres dotés d'intelligence et donc en mesure de répondre à ses questions!
Il accourut au grillage, ses chaussures émettant des bruits spongieux. Il arriva à la grille. Fermée. «Et merde!». Il regarda à droite et à gauche, pour voir s'il ne pouvait pas la contourner, mais les arbres étaient trop touffus et trop rapprochés, ils formaient des palissades infranchissables. Ron entreprit de se calmer, il devait y avoir une cloche, ou quelque chose pour signaler la présence au maître des lieux. Même pas. Dernière solution, il sortit sa baguette, et se prépara à lancer le sort qui déverrouillait les serrures…
Il n'eut pas besoin d'y avoir recours.
—Enfin, tu es là !
Ron se retourna et vit Draco Malfoy, sourire aux lèvres. Un sourire chaleureux et sincère, différent du rictus narquois qu'il arborait ordinairement.
—Enfin, tu es là ! répéta Malfoy.
Il se jeta sur Ron et le serra dans ses bras à l'en étouffer.
—Mais qu'est-ce qui te prend? grommela le rouquin, je veux bien que voir un visage connu dans ce monde bizarre soit rassurant, mais de là à…
—Enfin, tu es arrivé, mon Amour, je t'attendais depuis si longtemps…depuis des années, même…
—Euh…tu as pris un coup sur la tête?
Malfoy se détacha de Ron et lui prit la main, toujours souriant.
—Viens, rentrons à la maison, maintenant…ma maison…notre maison...
Alors que Ron se faisait la réflexion qu'une dimension parallèle où Malfoy l'aimait était particulièrement flippante, celui-ci sortit une clef de sa poche et s'en servit pour ouvrir la grille.
—Où as-tu trouvé cette clef, Malfoy?
—«Malfoy» ? Mais pourquoi tu ne m'appelles pas «Draco» ?
—Ben…Nous ne nous sommes jamais appelés par nos prénoms! Il faut un certain degré d'intimité pour ça…
—Nous sommes pourtant très intimes en ce moment.
—Malfoy, tu te sens bien? Moi, intime avec toi?
—Il faut pourtant que ça soit le cas pour que tu te trouves ici, dit malicieusement Draco.
Ron eut la désagréable impression que contrairement à lui, Malfoy savait tout de cet endroit. Et ça lui donnait dans l'idée que c'était peut-être lui le responsable de ce qui lui était arrivé.
—Nous nous trouvons dans un endroit très privé pour moi, il faut donc que nous soyons intimes pour que tu y viennes et pour que je t'y accepte…
—Il n'a jamais été dans mes intentions de venir ici, dit froidement Ron, c'était un accident.
—Oh.
Les yeux de Draco s'assombrirent, et il sembla à Ron que le ciel en faisait de même.
—Mais c'est où ici ? Tu le sais ?
—Nous sommes dans mon cœur.
—…
Ron fronça les sourcils.
—Ton cœur? C'est quoi cette blague? Et ton foie, je peux aussi le visiter ou c'est fermé le samedi?
—Les jours n'ont pas beaucoup de sens, ici. Et je ne te parle pas de cœur au sens organique, mais au sens métaphorique.
—Désolé, mais chez toi, le mot «cœur» ne peut que désigner le morceau de bidoche entre tes deux poumons qui passe son temps à pomper ton sang visqueux, à moins que celui-ci ne soit en réalité du vitriol. Mais le cœur en temps que symbole des sentiments, de l'amour et cetera, ça chez toi, il n'y en a pas!
—Ça me fait beaucoup de peine, ce que tu me dis là…
Ron remarqua le ciel était encore plus sombre, le rouge devenait un bordeaux tirant vers le noir.
—Si le terme «cœur» ne te convient pas, poursuivit Draco, la mine déconfite, tu préféreras peut-être te dire que nous sommes dans mon cerveau.
—Ha ha, mais ça non plus, ça n'existe pas chez toi, Malfoy! Et avant que tu ne passes en revue toute ton anatomie, il te manque aussi les tripes et les couilles!
—Tu es vraiment très cruel avec toi, gémit Draco dont les yeux devenaient brillants, cet endroit est…mon esprit…ma conscience…mon âme…
—Tu es dépourvu de toutes ces choses, Malfoy, c'est toujours ce que j'ai pensé…
Deux larmes rouges roulèrent sur les joues de Draco. Ron trouvait la situation de plus en plus étrange.
—Malfoy, qu'est-ce qui t'arrive, tu es blessé ?
—Pourquoi tu me dis ça? Alors que moi je t'aime de tout mon cœur!
—Non, si tu as un cœur, tu t'en sers pour me haïr! Tout comme moi je te hais!
Le bruit étrange que Ron entendait depuis le début s'intensifia, devint plus puissant et plus rapide. Le rouquin l'identifia enfin: c'était un battement cœur, « boum-boum, boum-boum ». Le ciel était à présent noir et une pluie drue se mit à tomber. Les larmes de Draco étaient au moins aussi abondantes que l'averse, et ses épaules étaient secouées par les sanglots.
—Pourquoi es-tu si méchant avec moi? Pourquoi?
Ron paniqua, la scène avait quelque chose de surnaturel. Un vent se leva, leurs cheveux furent trempés. Curieusement, l'atmosphère restait chaude.
—Que ce passe-t-il? fit Ron effrayé alors qu'il n'avait pas peur de l'orage en temps normal, Malfoy, il faut qu'on rentre…cette grille, elle indique l'existence d'un bâtiment, n'est-ce pas ?
—Pourquoi, pourquoi, pourquoi ? répétait Draco.
Ron prit les devants et passa la grille, empruntant le chemin de terre qui menait effectivement à une grande bâtisse qui faisait un peu penser à un manoir. Il se mit à courir pour s'abriter, mais à mi-chemin, il s'arrêta et regarda derrière lui. Draco n'avait pas bougé d'un millimètre, il pleurait de toutes ses forces des larmes sanglantes, la mâchoire crispée dans sa douleur, des éclairs écarlates jaillirent derrière lui.
«Je ne vais quand même pas le laisser tout seul dans la tempête! Je sais que je ne l'aime pas, mais tout de même, j'ai l'impression que c'est dangereux.»
—Malfoy! Viens! Il faut se mettre à l'abri!
Comme Draco ne se décidait pas à réagir, Ron rebroussa chemin et saisit son ennemi de toujours par le bras, l'obligeant à courir avec lui jusqu'à la demeure. La porte s'ouvrit en grinçant, et ils se glissèrent à l'intérieur. Tout était tendu de velours rouge. «Bizarre, si vraiment cet endroit est l'âme de Malfoy, je m'attendait à une déco un peu plus…Serpentard…». Il jeta un œil audit Malfoy, qui n'arrêtait pas de pleurer.
—C'est toi qui as fait ça ?
—Pardon ?
—La tempête. C'est parce que tu es triste qu'elle a éclaté? On est dans ton cœur, alors, tes émotions influencent la météo, c'est ça?
Draco hocha la tête en continuant à sangloter.
—Je ne te connaissais pas si pleurnichard…je sais que ça arrive à tout le monde de pleurer, mais c'est pas du tout ton habitude de le faire autant, pour aussi peu, et surtout devant moi…
—Contrairement à ce que tu sembles croire, j'ai des sentiments, et ici, ils sont exacerbés. Je sais que le Draco de l'Extérieur est un vrai bloc de glace, que c'est ce que les autres perçoivent, mais ce n'est pas du tout ce qui est dans son cœur…dans son cœur, il y a moi, et il me cache, il me dissimule, de peur d'être jugé. Alors, à l'inverse, je m'autorise à être extrêmement sentimental et émotif. La moindre parcelle de tristesse peut provoquer cette réaction exagérée…
—Donc, je dois éviter de te faire du mal, sinon je risque de finir noyé sous la mousson…écoute, je suis désolé de t'avoir blessé, mais le Draco de l'Extérieur, comme tu l'appelles, c'est une véritable punaise, il est ignoble avec moi et avec mes amis, et je le déteste…
—Je sais que je parle de lui comme s'il était une personne distincte de moi, parce que c'est plus pratique pour s'exprimer, mais en réalité, nous sommes le même individu. Moi, je suis juste la représentation de tout ce qu'il tient à cacher, je suis ce qu'il est vraiment.
—Et tu te jettes sur moi en m'appelant «mon Amour»! Comprends que je sois un chouïa déconcerté …
—C'est parce que je suis amoureux de toi, Ron.
—Comment ça?
—Le Draco de l'Extérieur ne veut pas l'avouer, ça fait partie des choses qu'il cache, mais il est raide dingue de toi depuis pas mal de temps. A chaque fois que tu étais dans les parages, ici, ça se remplissait de feux d'artifices et d'étoiles filantes, il y a même un soleil brûlant qui apparaissait! Mais lui, il ignore son cœur qui bat à en exploser dans sa poitrine et dirige vers toi son visage froid et cruel, t'insulte, te joue des sales tours,…mais ce n'est qu'une façade.
Ron avait envie de vomir.
—C'est une plaisanterie? dit-il, incrédule.
—Non. Ici, je suis incapable de mentir, je suis par ma nature forcé à être toujours sincère.
—Je vois…je suis fatigué…
—Tu veux dormir? J'ai une chambre pour toi, justement.
—Oui.
Ron pensait que s'endormir était le meilleur moyen de se sortir de là, il se réveillerait probablement en découvrant qu'il avait rêvé et rirait bien de son imagination trop productive.
—Tu veux peut-être manger, aussi? Et te laver, changer de vêtements, tu es tout sale…
—Je veux bien me changer, mais par contre, je n'ai plus faim…
—Fais comme tu veux, mon Amour!
—Ne m'appelle pas comme ça!
oOoOOOoOo
Ron entra dans la salle de bain. Heureusement, la baignoire n'était pas rouge. Avoir l'impression de se baigner dans du sang ne lui plaisait pas. D'ailleurs, il aperçut un pot de bain moussant d'une belle couleur carmin, mais se refusa à l'utiliser. Il tourna le robinet et commença à se déshabiller, ôter ses vêtements pleins de sable fut un véritable soulagement.
Alors qu'il entrait avec délice dans l'eau bien chaude, il laissa son esprit vagabonder un peu. Son imagination était décidément fertile, il allait se sentir vraiment idiot quand il se réveillerait, d'avoir pu faire un rêve aussi stupide! Le cœur de Draco Malfoy…enfermé dans le cœur de Draco Malfoy…un microcosme entier dans le cœur de celui qu'il honnissait de tout le sien…n'importe quoi…une plage, une mer, un ciel rouge, une grille, une maison…tout ça dans le palpitant de ce crétin…définitivement n'importe quoi. Et Malfoy amoureux de lui, là comme ça…ça, c'était le pire!
Ses cheveux étaient imprégnés de sable, il se résolut à les laver, même si le shampooing avait la même couleur que le bain moussant. Il eut l'impression de se laver la tête avec du ketchup. S'il avait été moldu et cinéphile, il se serait pris pour Carrie.
En sortant du bain, il remarqua qu'un pyjama pourpre avait été préparé pour lui. De la soie. Très doux.
Quand il entra dans la chambre qui lui était réservée, il constata qu'un feu crépitait dans la cheminée. Quelle ambiance agréable! Mais ce serait encore mieux quand il se réveillerait dans son dortoir de Gryffondor, avec Harry dans le lit voisin.
Sur cette idée réconfortante, Ron s'endormit.
oOoOOOoOo
Des bruits de pas s'approchaient furtivement de son lit. Ron s'amusa à deviner de qui il s'agissait: Harry, Neville, Dean ou Seamus? Qui que ce soit, dans quelques secondes, il allait le secouer pour lui dire que s'il ne se levait pas, il serait en retard en cours…
—Bonjour, mon Amour! Tu as bien dormi?
Ron ouvrit les yeux et se redressa en sursaut. Draco était là, avec son sourire chaleureux, un plateau chargé de bacon grillé, de pain et d'œufs brouillés dans les bras. Ron était toujours dans la chambre en velours rouge.
—Je t'apporte ton petit-déjeuner, mon Amour!
Ron resta un moment interdit. L'odeur de la viande lui vint aux narines et il se rendit compte qu'il était mort de faim. Mais non, quoi! Il ne pouvait pas être encore en train de dormir! Ce n'était pas vrai, hein? Il était toujours en train de rêver, n'est-ce pas?
Il se pinça le bras pour vérifier.
—Aïe !
—Mais pourquoi t'as fait ça? demanda Draco déconcerté.
—Je croyais que je faisais un cauchemar, mais…oh, non, alors tout est réel?
—Et bien…oui! Quelque chose ne va pas?
—Mais…j'ai pas envie d'être là, moi! Je veux rentrer chez moi, retrouver mes amis et tous les gens que j'aime!
—Je ne fais pas partie des gens que tu aimes?
—Ben non, tu le sais quand même?
Draco baissa les yeux et sembla à nouveau triste. Ron sentit qu'il allait encore pleurer.
—Pourtant, on pourrait être heureux, tous les deux, mon ange adoré…
—Beurk…
—Quoi? Tu n'aimes pas que je t'appelle «mon ange adoré»? Tu trouves que ça fait cucul?
—Non…enfin, si, mais c'est pas le problème! Le problème c'est que…
—C'est que tu ne m'aimes pas.
—Oui, je sais, il ne faut pas que sois méchant avec toi, mais je suis désolé, je ne peux pas m'empêcher de te détester…
Une larme coula sur la joue de Draco, on aurait dit une traînée de sang, comme s'il était blessé à la glande lacrymale. Ron soupira. D'un côté, il se sentait mal de lui faire de la peine, car le Draco de l'Intérieur était beaucoup plus sympathique que celui de l'Extérieur, mais il n'allait non plus faire semblant de filer le parfait amour avec lui, l'idée le rebutait trop.
—Je sais que tu vas encore nous faire un orage, mais…oh, et puis, j'avais oublié, on est à l'intérieur, je m'en fous de s'il pleut ou pas…alors, autant être honnête avec toi, car il vaut mieux que tu comprennes rapidement que je ne t'aime pas! Tu me dégoutes!
Draco émit un sanglot, et la fenêtre s'ouvrit, laissant entrer une bourrasque violente qui emportait la pluie du dehors avec elle. Ron se retrouva trempé dans son lit et fouetté par le vent comme si on lui passait un kärcher en pleine figure.
—D'accord, d'accord ! capitula-t-il, Malf…Draco…je t'aime bien, okay? Arrête ça, s'il te plait!
Comme Draco ne semblait pouvoir se contrôler, le rouquin prit une décision qui le répugnait, mais qui était nécessaire. Il sortit de son lit et, bravant la tempête, il s'approcha de Draco. Celui-ci releva son visage ensanglanté vers lui, intrigué. Ron le prit doucement par les épaules.
—Je t'aime bien…murmura-t-il.
Il déposa un baiser sur sa joue. Intérieurement, il était dégoûté. Mais Draco sembla changer d'humeur immédiatement. La tempête se calma, le vent tomba, la pluie cessa. Le ciel devint plus radieux, plus orangé, et quelques étoiles scintillantes apparurent sur la voûte.
—C'est d'une parfaite niaiserie! râla Ron alors que Draco se pelotonnait contre lui en souriant bêtement, tu n'aurais pas pu faire pire que ça!
Les étoiles se mirent en mouvement pour former les mots «I love you Ron».
—Là, tu as fait pire!
Draco étant serré contre lui, Ron sentait les pulsations de son cœur battre contre lui, mais celles qu'il entendait provenaient du dehors. « Boum-boum, boum-boum… ». C'était presque amusant de se dire que le Draco de l'Intérieur avait un cœur lui aussi, enfin, un myocarde, mais c'était pas mal comme mise en abime.
—Je vais manger, dit Ron.
Il en profita pour se détacher de Draco et s'installa sur le lit pour dévorer son petit-déjeuner.
—C'est délicieux, tu remercieras tes domestiques!
—C'est moi qui l'ai fait, je n'ai pas de domestique.
Ron parut étonné.
—Je ne suis pas un petit prince gâté comme le Draco de l'Extérieur!
—Je voudrais te demander, il n'y a que nous ici? Il n'y a pas d'autres êtres vivants?
—Si, mais uniquement des animaux et des plantes, et ils sont exclusivement destinés à nous faire vivre, en nous fournissant nourriture, oxygène, et tout l'écosystème dont nous avons besoin. Tu ne pourras pas développer une relation affective avec un des animaux, d'ailleurs, il n'y a ni chat, ni chien, ni hibou, ni une autre espèce qui, dans notre culture, n'est pas utilisée pour l'alimentation…
—Bref, si je veux de l'affection ou tout simplement quelqu'un à qui parler…
—Tu devras te contenter de moi, oui.
«Super!»
Cette perspective était peu réjouissante. Vivre éternellement en huis clos avec Draco Malfoy, comment ça aurait pu l'être?
—Une autre question: quand est-ce que je pourrai partir?
—Et bien…euh…jamais. On ne peut pas partir d'ici, c'est aussi simple que ça. J'en suis navré.
Donc, Ron était condamné à passer l'éternité dans le cœur de Draco. Maintenant, il n'en doutait plus, tout cela était bien réel, quelque chose de magique s'était passé et voilà qu'il était coincé ici jusqu'à la fin des temps. «Prisonnier» se dit-il, «Je suis devenu le prisonnier de Malfoy! Il me garde ici contre mon gré!». Mais pourquoi faisait-il ça? La réponse était simple: Draco aimait Ron et savait que celui-ci ne pouvait pas l'aimer en retour, alors, il avait décidé de l'emprisonner en lui pour se donner l'illusion qu'il lui appartenait. Et avec un peu de chance, le captif finirait sans doute par l'aimer, n'ayant d'autre compagnie humaine que la sienne.
Et Ron ne pouvait rien faire contre cela. A moins que…
—Je vais m'habiller, dit le rouquin, tu veux bien sortir? Tu comprends, je ne me suis pas encore habitué à toi, et donc, ça me gêne un peu que tu me regardes…
—Pas de problème, je m'en vais...il y a plein de vêtements dans les armoires, tu peux les prendre.
—Merci.
Draco se retira. Ron commença par faire ce qu'il avait dit à Draco: s'habiller, tout en s'étonnant que tous les tissus étaient, une fois de plus, de diverses variations de rouge. Ensuite, il fit ce qu'il n'avait pas dit à Draco: enjamber le rebord de la fenêtre et sauter dans le jardin. Pas une seule fleur décorative, rien que des légumes, des fruits, et toutes sortes d'herbes comestibles ou médicinales. Il fit le tour de la propriété en prenant soin d'éviter toutes les fenêtres, afin que Draco ne le voie pas.
Il avait décidé de fuir. Il devait bien y avoir un moyen de s'échapper! S'il était entré, il pourrait ressortir, il suffisait de trouver le vortex, la fissure dimensionnelle,…enfin le passage par lequel il était venu!
Il trouva la remise et y pénétra. Un balai! Génial, c'est justement ce dont il avait besoin, car il se rappelait du temps qu'il avait passé sur la plage la veille et ne voulait pas errer de cette manière encore aujourd'hui. Il ramassa le véhicule, s'attendant à trouver un Nimbus 2001. Mais c'était un Eclair de Feu. Logique, on était dans le cœur de Draco, celui-ci pouvait y posséder ce qu'il voulait, et cela n'étonna pas Ron qu'il convoite le balai de Harry, un balai si réputé! Lui-même nourrissait une certaine jalousie vis-à-vis de son meilleur ami, entre autres parce que le binoclard possédait des objets hors de prix comme celui-là, des objets que quelqu'un comme Ron ne pourrait jamais se payer!
Fier de sa trouvaille, il sortit de la remise et fila jusqu'à la grille, qu'il passa, en espérant que Draco ne l'avait pas repéré. Une fois sur la plage, Ron énonça «Debout!» et enfourcha l'Eclair de Feu, puis il décolla et continua à longer la plage, cette fois à toute vitesse.
Alors qu'il volait, il se demanda ce que Draco pouvait bien être en train de faire. Ron se l'imagina assis dans son salon, attendant sagement que son «Amour» vienne l'y rejoindre après s'être habillé. Il allait être déçu, mais tant pis…
Au bout d'un quart d'heure, il devait avoir parcouru une belle distance, mais ne voyait toujours aucune porte de sortie. Il commençait à désespérer quand enfin, il aperçut quelque chose.
Une grille. La grille. Celle de la maison de Draco.
Il était revenu à son point de départ.
«Non!»
Pour être sûr, il tira sur le manche du balai pour diriger celui-ci vers le haut, pour prendre de l'altitude. Il monta, monta,…jusqu'à être suffisamment éloigné de la terre pour avoir une vue d'ensemble. Ses soupçons furent confirmés.
«Une île! Je suis sur une île!»
Après cette découverte et ce temps précieux perdu, il ne lui restait plus qu'une seule direction à choisir: le large. Peut-être la sortie était-elle de l'autre côté de la mer. Après tout, il s'était réveillé échoué sur la plage, comme si les flots l'y avaient porté. Cela devait signifier qu'il venait d'un endroit du côté de la mer.
Il donna une impulsion à l'Eclair de Feu et vira vers l'eau, qu'il survola. Il s'élança au-dessus des vagues, sous le ciel pourpre. La ligne d'horizon était presque imperceptible, le rouge de l'eau se confondait avec celui du ciel. Ron songea que la sortie devait être très loin, et c'était plutôt décourageant, mais il tint bon et poursuivit sa route.
Bientôt, il ne put plus voir la plage en regardant derrière lui. Juste de la flotte à perte de vue. Il se demandait si la sortie existait vraiment, où si comme Draco le lui avait dit, il était impossible de sortir de cet endroit, un peu comme avec le légendaire Triangle des Bermudes. Que devait faire Draco à ce moment-là, tiens? Il devait s'inquiéter. Il devait avoir trouvé le temps long. Il devait s'être posé des questions. Il devait avoir frappé à la porte de la chambre, se demandant comment on pouvait mettre autant de temps pour s'habiller, surtout que Ron Weasley n'était pas vraiment le genre à se pomponner pendant des heures. Il devait avoir ouvert la porte. Il devait avoir constaté son évasion. Il devait avoir compris.
Il devait se sentir triste, du coup. Il devait être effondré de douleur.
D'ailleurs, le ciel n'était-il pas légèrement plus sombre, depuis quelques temps? Si. Même plus que «légèrement». Il était devenu carrément rouge foncé, mais Ron ne s'en rendit compte que sur le coup. Dans un endroit où le ciel est bleu, cela se produit aussi. Comme lorsqu'on se met à lire à la lumière du jour au travers d'une fenêtre, et que le temps passe sans qu'on remarque que la nuit tombe, que le ciel devient graduellement bleu marine puis noir, car les yeux s'habituent. Jusqu'à ce que quelqu'un n'arrive, n'allume une lampe près du lecteur et lui dise: «C'est mieux comme ça, non? Tu vas t'abîmer les yeux si tu lis dans le noir!»
Et quand Ron se rendit compte du changement de couleur, cela lui fit un choc. La pluie ne tarda pas à arriver, et le vent fit de même. Tout comme les éclairs écarlates. Et bien entendu, la mer devint furieuse, des vagues gigantesques se formaient et roulaient en grondant. Ron continua tant bien que mal d'évoluer dans ce paysage infernal. Malheureusement, rien qui ressemblait à la porte de sortie n'apparaissait dans ce camaïeu pourpre, vermeil, écarlate, carmin et cramoisi.
De nouveau, il était trempé, et il se sentait minuscule et vulnérable devant la houle qui le poursuivait. Des rouleaux immenses naissaient et s'écroulaient autour de lui, en l'éclaboussant. Et toujours aucun salut en vue. Il commençait à se laisser gagner par la fatigue et par le désespoir, même l'Eclair de Feu semblait en avoir marre de lutter.
Le tonnerre gronda, et les battements du cœur de Draco s'accéléraient. «Malfoy, tu vas faire une attaque, si ça continue!» Une vague plus grande que les autres s'éleva, et Ron constata avec panique qu'il ne pourrait pas lui échapper. Elle s'effondra sur lui et l'envoya vers le fond de la mer. Quand il parvint à remonter à la surface, il vit des débris de bois et de paille flotter autour de lui, prouvant que l'Eclair de Feu avait été réduit en charpies. Et d'autres vagues rouges encore plus grosses s'annonçaient. «Je ne vais pas me noyer dans un verre d'eau, mais dans un verre de vin!» songea-t-il amèrement.
Et comme si ce spectacle n'était pas assez terrifiant, Ron aperçut quelque chose qui lui glaça vraiment le sang. Quelque chose de profondément vert dans tout ce rouge. Quelque chose de grand, d'écailleux, et nanti d'immenses yeux émeraude et d'une non-moins immense gueule hérissée de dents pointues.
«Putain! Mais c'est quoi ce truc? Un…un monstre marin?»
Il n'avait jamais vu une telle bête. Mais peu lui importait dans la mesure où il savait que sa fin était proche. Avec un peu de chance dans son malheur, il mourrait par noyade avant de connaître l'horreur de la dévoration. «Fantastique…après le cœur de l'autre crétin, je vais visiter l'estomac de ce machin! Finir digéré, j'en rêvais!»
La gueule ouverte du monstre se rapprochait de l'endroit où il était, aspirant l'eau comme un gouffre. Ron se résigna, c'était fini.
Il passa la barrière des dents.
Noir.
Il but la tasse.
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Il se réveilla. Sur la plage, une fois de plus. Il se releva avec peine et regarda vers la mer. Le monstre était accosté sur la rive, et Draco se tenait face à lui, agitant sa baguette.
—Hey! cria Ron, retrouvant ses forces, c'est quoi cette histoire? Je croyais que les animaux ici étaient destinés à nos repas? A moins que ce…cette chose ne soit comestible? Parce que de toutes façons, il ne semble pas avoir compris qui de nous deux devait manger l'autre!
Draco abaissa le bras qui tenait la baguette, et d'un geste souple du poignet, il fit disparaître le monstre géant dans une pluie d'étincelles vertes. Il se tourna alors vers Ron et courut jusqu'à lui pour l'étouffer sous son étreinte.
—Je suis trop content que tu sois revenu, mon Amour, tu m'avais manqué!
—Tu peux m'expliquer ce qu'il s'est passé, parce que j'y comprends que dalle!
—C'est moi qui ai invoqué ce serpent de mer, il n'est pas d'origine naturelle, et donc, il ne faut pas le considérer comme un être vivant au même titre que les autres animaux…
—Tu l'as invoqué…
—J'avais peur pour toi…et je ne supportais pas ton absence, alors je l'ai envoyé te chercher…Et il ne t'a pas avalé, il t'a juste mis en sécurité dans sa gueule pour te transporter…Mais tu vas encore devoir prendre un bain, tu es plein de vase…
Ron se sentit défaillir. La situation lui plaisait de moins en moins. Maintenant, il en était certain: il était fichu. Il avait essayé de se réveiller, mais ce n'était pas un rêve. Il avait essayé de s'enfuir, mais il n'y avait pas de sortie, et s'il tentait d'en trouver une, Draco envoyait un serpent marin géant pour le ramener. Il ne pouvait pas fuir l'amour. L'amour le rattraperait toujours.
oOoOOOoOo
—Alors, c'est bon?
—Délicieux, répondit Ron, et ce grand crû, excellent!
Le Draco de l'Intérieur était un excellent cuisinier, il fallait le reconnaître. Et il était doux, serviable et attentif. Il avait toutes les qualités qu'il manquait à son homologue de l'Extérieur. Dommage que ça ne soit un fêlé avec des tendances à la séquestration et une humeur plus que soupe-au-lait, et surtout nanti d'un contrôle météorologique assez spectaculaire. Le Draco de l'Extérieur, vu sous cet angle, était bien moins effrayant. Et bien plus humain.
Il manquait à Ron, celui-là. Tout comme Harry, Hermione et sa famille lui manquaient.
—Tu sais, finit par dire Ron à son vis-à-vis, tu as beaucoup de chance…
—A quel point de vue ?
—J'aime la vie.
—Et? fit Draco en fronçant les sourcils, c'est une bonne chose, mais je ne vois pas où tu veux en venir…
—Parce que je veux vivre. Je veux grandir, et ensuite, je veux vieillir. Je veux mourir vieux et moche, et me dire que j'ai vécu, et que c'est quelque chose de merveilleux. Même s'il m'arrive des sales trucs, je penserai toujours que ma vie en vaut la peine. Et c'est une chance pour toi que je conçoive mon existence de cette manière. Parce que tu m'as kidnappé et enfermé dans ton cœur, que tu m'as privé de ma famille, de mes amis, de ma liberté, et de mon destin, et tout ça pour je reste à tes côtés dans ton petit Eden cardiaque qui pour moi est plutôt un enfer! Si je n'aimais pas la vie, j'y aurais mis fin pour enfin me libérer de ton amour dont je ne veux pas!
—Tu veux dire…te suicider?
—Oui, mais je ne le ferai pas, et je resterai avec toi comme tu le désires. Tu as gagné, je suis à toi, même si c'est contre ma volonté.
—Je…je ne suis pas sûr de me satisfaire de ça…je t'aime, donc je veux que tu sois heureux!
—Je ne le serai jamais avec toi! Oh, et ne te remets pas à pleurer! C'est du chantage affectif! En fait, plus j'y réfléchis, plus je trouve que tu n'es pas…net.
Draco fixa son assiette sans y toucher. Il avait les deux poings serrés sur la table. Il semblait se concentrer.
—Qu'est-ce que tu fais ?
—J'essaie de ne pas pleurer. J'essaie de ne pas être triste. Je sais que tu ne veux pas que je fasse pleuvoir, mais que tu ne veux pas non plus faire semblant de m'aimer et d'être gentil avec moi. Et je comprends ta rancœur. Tu as raison, je suis pour toi une sorte de geôlier, c'est injuste ce que je te fais subir. Mais je ne peux rien faire pour inverser ça, alors je vais faire un effort et essayer de te rendre l'existence plus agréable. Plus de pluie, promis juré.
—Merci.
Ron se sentit tout de même touché. Draco voulait vraiment son bonheur et prenait sur lui pour y arriver. Il tentait de contrôler ses émotions pour lui plaire, ce qui était pour lui un exercice très difficile. Quand on songeait au fait que le Draco de l'Extérieur était passé maître en la matière et parvenait toujours à dissimuler parfaitement ce qu'il ressentait pour exposer au monde sa face de marbre…
«Peut-être que c'est moi qui suis injuste» pensa Ron, «Il essaie vraiment d'être gentil, je pourrais l'aider plutôt que de lui dire toutes ces choses cruelles…». Il respira profondément. Il n'avait de toute façon d'autre choix que de composer avec la nouvelle vie qui l'attendait. Faire la fine bouche n'aurait comme effet que de lui rendre le quotidien encore plus insupportable.
—En fait…je n'ai jamais voulu que nous soyons ennemis, le toi de l'Extérieur et moi. On se déteste plus parce que nos familles se sont toujours opposées, et que nos pères respectifs nous ont appris à mépriser l'autre…mais en dehors de ça…
Draco releva la tête et lui adressa un regard plein d'espoir.
—Je pense qu'on pourrait au moins devenir amis.
Ron se força à sourire, il fallait bien que Draco se sente encouragé.
—Oui, amis, poursuivit le rouquin, puisque nous sommes forcés à passer notre vie ensemble, si on pouvait apprendre à se connaître, et être amis, ce serait un bon point de départ, qu'est-ce que t'en dis?
—C'est une excellente idée, le soleil brille presque dans mon cœur rien que d'y penser!
—C'est entendu. Mais j'aimerais que tu me promettes de ne pas te comporter comme si nous étions un couple, mais comme si nous étions potes, d'accord? Et que tu arrêtes d'être mielleux et de me donner des surnoms gnangnans, ça me rappelle trop mon ex Lavande Brown, et autant te dire que c'était loin d'être ce qui me plaisait chez elle! Et de mon côté, je te promets de ne plus te blesser par mes paroles, d'accord?
—D'accord! dit Draco, j'aimerais te serrer dans mes bras, mais je n'en ferai rien, puisque tu ne veux pas.
—Merci.
—Je vais te donner quelque chose, ajouta Draco.
—Ah…?
Il se leva et alla fouiller dans un tiroir.
—Puisque tu acceptes de t'installer ici, je vais te remettre les clefs…chez moi, c'est chez toi!
—Des clefs? Mais s'il n'y a que nous, à quoi ça sert? C'est pas comme si on avait à craindre les cambrioleurs!
—C'est symbolique…
—Bon ben, ok, si tu le dis.
—Tiens, dit Draco en lui remettant un trousseau complet, celle-là est celle de la grille, celle-là de ta chambre, celle-là de la mienne, celle-là…
—Merci, je découvrirai ça tout seul!
—D'accord, mais celle-là est celle du grenier et…j'aimerais que n'y aille pas, d'accord?
—Je ne vois même pas pourquoi j'y irais…
En allant se coucher, ce soir-là, Ron était content de sa décision. Le mieux était encore de positiver, après tout, il était obligé de vivre ainsi, alors inutile de se morfondre, ça n'y changerait rien, autant tenter d'être heureux malgré tout. Peut-être que Draco pouvait devenir son ami, peut-être que sa compagnie serait agréable. Et au pire, il trouverait peut-être une activité ou l'autre qui le passionnerait et ferait passer le temps. Ou même, il adopterait un animal. L'idée de ne pas pouvoir en aimer un sous le prétexte qu'il était destiné finir dans l'assiette était inexacte, il lui suffirait d'en élever un depuis tout bébé pour que ça devienne son animal de compagnie, même si c'était un porc tout grassouillet. Ou alors il jardinerait. Ou il cuisinerait, ou il ferait le ménage, redécorerait la maison. Il ferait des jeux de société avec Draco. Ou il écrirait. Ou il dessinerait. Ou les deux. Il avait toujours rêvé de faire sa propre bande dessinée. Même si Draco serait son seul lecteur.
Il s'endormit. Sa routine dans le cœur de Draco Malfoy allait commencer.
La deuxième partie de ce two-shots sera publiée au plus tard dans une semaine.
