Notes des auteurs : Voici donc notre nouvelle fiction, un an après Love Addiction. En espérant qu'elle vous plaise autant. Attention, l'univers est bien différent ! (Lors des dialogues, les pensées des héros figurent en italique) Pardonnez-nous pour l'édition, on avait laissé traîner beaucoup trop de fautes !
Inori
Année 3011, le monde tel qu'il était n'existe plus. Un millénaire auparavant la nature a déployé toutes ses forces dans le seul but de faire comprendre à l'Homme que, non, malgré ce qu'il pensait, il n'était pas tout puissant. Typhons, cyclones, tsunami, séismes... Il ne se passait plus une semaine sans qu'une catastrophe n'ait lieu, emportant avec elle des bribes de l'arrogance humaine. La surface terrestre s'est modifiée, les continents ne sont plus que des petites îles éparses, perdues dans l'immensité de l'océan. Les Hommes ont vu leur population décroître, tout comme leur espérance de vie. Rares sont ceux qui ont la chance de vivre plus d'un demi-siècle, si tant est que l'on puisse considérer cela comme de la chance, les humains dépassant ce stade ne le pouvant que grâce aux vampires.
Oui, les modifications apportées par la nature à la Terre sont telles que de nouvelles espèces sont apparues. Parmi elles les vampires, suceurs de sang au comportement partiellement animal. Mais malgré ces « défauts », un vampire peut choisir de transformer un humain pour le faire vivre aussi longtemps que lui. Il devient ainsi la source du pouvoir de « son » vampire. Ce lien apporte au calice une longévité et une régénération sanguine accrues, ainsi qu'une meilleure condition physique, plus de résistance, plus d'énergie. Le vampire, lui, y trouve une source de nourriture de bien meilleure qualité, en contrepartie, il devient dépendant du sang du son calice. Inconvénient largement compensé, car ce lien offre au vampire une meilleure résistance au pouvoir des gakis.
Les gakis sont la deuxième espèce que la fureur de la nature a renvoyée à la surface de la Terre. Physiquement identiques aux humains, ils possèdent la même durée de vie qu'eux. De plus, deux gakis ne donnent pas naissance à un autre gaki. C'est la nature elle-même qui choisit un humain, le plus souvent, ayant à peine vingt ans, qu'elle transforme en gaki. Cette sélection entraîne une faible population de gakis comparée à la race humaine ou même vampirique. Ces deux éléments les empêchent d'avoir la main mise sur le monde, malgré l'avantage qu'ils possèdent sur les vampires. Le psychisme des gakis s'est modifié au point qu'ils peuvent, sur une simple impulsion mentale, débrider provisoirement les pulsions meurtrières des vampires, leur ôter une partie de leurs capacités de réflexion, les contrôler. Cet élément ajouté au fait qu'un gaki possède une force physique équivalente à celle d'un vampire en fait un bon moyen de défense.
Cette histoire se déroule sur ce qui était anciennement la grande île d'Honshu, au Japon. Aujourd'hui, sa superficie atteint à peine la moitié de ce qu'elle était, il y a un millénaire. Le nord de l'île a sombré dans les profondeurs des océans à la suite d'un séisme un peu plus puissant que les autres. Les moyens de transport permettant de relier les villes de l'île entre elles ne sont plus fonctionnels. Il y a 300 ans de cela, un typhon ravageur a détruit les dernières lignes encore en fonctionnement. Chaque ville survit alors indépendamment de ses voisines. La partie ouest de Tokyo en est un bon exemple. La totalité de la ville est peuplée par les restes de l'humanité, plus assimilables à des dégénérés qu'à des humains. Ils errent dans ce qui reste de Tokyo. Les seuls humains encore sains d'esprit vivent dans l'ancien quartier de Shibuya. Ils ne sont pas très nombreux, juste assez pour survivre.
Ce groupe d'humains entretient des relations que l'on pourrait qualifier d'amicales avec les vampires, qui occupent le quartier de Roppongi. Cette entente étant exclusivement due à la présence d'esprit des leaders actuels des deux clans : Yara Tomoyuki et Takaki Yuya. Ce dernier, du haut de ses 526 ans, sait à quel point il est important pour les vampires de conserver de bonnes relations avec les humains encore sains d'esprit, ces derniers étant la source de leurs calices. Le fait que Yara soit le calice d'un des vampires du clan de Takaki, ajouté au comportement des vampires non liés, qui acceptent de se nourrir chez les dégénérés, permet la pérennité de ces bonnes relations, qui durent depuis à peu près une cinquantaine d'années.
Pour ce qui est des relations gaki-humains, elles ne sont pas vraiment définissables. Les gakis préférant rester dans leur quartier de Shinjuku plutôt que d'errer parmi les humains. Il n'y a donc pas grand-chose à en dire. Restent les vampires et les gakis, une sorte de trêve implicite s'est déclarée entre les deux. Pourtant leur passé commun est jonché d'affrontements plus ou moins violents. Mais depuis peu, un demi-siècle, tout au plus, les leaders des deux clans ont décidé de réduire les confrontations, ceci permettant aux deux groupes d'évoluer un peu plus sereinement. Malheureusement, le clan des gakis s'est récemment scindé en deux entités. L'une occupant la partie ouest du quartier, ayant pour leader Takizawa Hideaki, respecte encore les règles implicites de la trêve. La deuxième, occupant la partie est, a soif de pouvoir. Le fragile équilibre qui maintenait Tokyo hors du chaos est menacé.
-l-
Cela fait maintenant deux semaines que Kawai s'est blessé au genou. Je le revois tombant du haut du toit de notre Refuge. Une des tôles s'était déplacée, il a voulu la remettre en place, ce qu'il a réussi. Mais il n'a pas eu le temps de redescendre avant que le typhon menaçant n'éclate. Il était en train de descendre lorsqu'une branche l'a déséquilibré. Je me rappelle avoir fermé les yeux pour ne pas voir la fin de sa chute. Heureusement, sa blessure n'est pas trop grave, mais elle est suffisamment importante pour qu'il ait encore mal lorsqu'il essaie d'utiliser sa jambe. Et puis le jeune Juri est tombé malade peu après, toujours à cause de ce typhon. En plus, on est en rade d'antidouleurs et autres médicaments. Il faut aller renouveler la réserve chez notre fournisseur, hors de Shibuya.
Et j'étais l'un des seuls disponibles pour accompagner Goseki. Je suis hors du Refuge, hors de Shibuya, planqué derrière un vieux bidon de je ne sais trop quoi, dans un coin de rue, pour surveiller les arrivées des dégénérés. C'est la première fois que je mets les pieds hors du Refuge, et même si c'est très euphorisant ça ne me rassure pas du tout. En plus, j'ai l'impression que ça fait une éternité que Goseki est entré dans le taudis qui me fait face. La nuit va bientôt tomber. J'aimerais vraiment décamper avant qu'il ne fasse noir. Je n'ai pas franchement envie de servir de déjeuner aux vampires qui traînent dans le coin. Allez ! Dépêche-toi Goseki ! Je ne peux pas m'empêcher de remuer. Je sais très bien que ce n'est pas discret, mais je n'arrive pas à me réfréner. J'ai un sale pressentiment.
– « C'est bon, on y va ! Je sursaute en entendant Goseki. Pardon, j'ai été plus long que prévu. Allez, on y va, vaut mieux pas qu'on traîne !
– Hai. »
Il me passe un des deux sacs à dos qu'il porte, lourd, et très lourd. On se met en route, il va nous falloir une bonne heure pour rentrer, chargés comme on est. Je commence à avoir mal aux épaules, et ça ne fait que 15 minutes que l'on est parti. Mon pressentiment ne s'est pas estompé, et la tombée de la nuit qui approche n'arrange rien.
Goseki s'arrête d'un coup, se retourne vers moi, me fait signe de ne pas faire de bruit. On entend comme un bruit de métal qui cogne. « Cours ! » Pas besoin de me le répéter. Je n'hésite pas et me lance à la suite de Goseki qui a déjà deux, trois mètres d'avance. Je le savais, je le savais ! J'aurais pas dû venir. J'ai beau courir vite et être moins chargé que Goseki, il va plus vite que moi. J'essaie de ne pas perdre le rythme. Merde, merde, merde ! Aller tu va me faire le plaisir de courir un peu plus vite ! Aller ! Je sais qu'ils se rapprochent, ou alors ce sont de nouveaux dégénérés qui sont arrivés par les ruelles adjacentes. Raaah, tout ce que je sais, c'est qu'ils sont proches. Je les entends. Aaaaaaaah. Goseki commence à faiblir, je le rattrape. On court côte à côte. Mais ça n'empêche pas que j'aie l'impression qu'ils sont trop près. Je le savais...
Une ombre passe à ma gauche. Je frissonne, inconsciemment je m'arrête. Goseki continue. J'entends une espèce de cri étranglé derrière moi. Je me retourne. « Senga, qu'est-ce que tu fous ? » Je ne comprends même pas ce que me dit Goseki. Je ne vois que lui. Ses cheveux tombent devant son visage, mais je peux voir ses yeux fermés. Les miens descendent le long des traits fins de sa mâchoire. Ses crocs sont plantés dans la gorge de l'un de nos poursuivants, sa main gauche tirant les cheveux du dégénéré pour maintenir sa tête. C'est comme si... je pouvais voir chaque gorgée de sang qu'il aspire. Il a l'air si... heureux ? Je crois que j'ai arrêté de respirer. Ma bouche reste entrouverte. J'ai l'impression de vivre à travers lui, même si je ne me nourris pas de sang ! Ses yeux s'ouvrent lentement jusqu'à se poser sur moi. Je ne peux pas détacher mon regard du sien. Je suis comme hypnotisé par cet être. Je voudrais bouger, mais je n'y arrive pas. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive. Il relève doucement la tête, lâche le corps qu'il tenait. Je sens un frisson me parcourir. Il s'essuie sensuellement la bouche. Je tremble un peu plus. Faut que je respire ! Il esquisse un mouvement dans ma direction.
« Senga ! Bouge ! » Je sens que Goseki me tire par le bras. Je ne veux pas partir, je veux rester là. Je sais que je ne devrais pas rester, mais il m'intrigue tellement. Je secoue la tête alors que Goseki est en train de me traîner derrière lui, mes jambes bougent toutes seules. Je... Je ne comprends plus rien. Je me retourne plusieurs fois pendant notre course, plus rien. Pourtant, j'ai l'impression qu'il n'est pas loin.
-l-
J'aime cette sensation de liberté, j'aime chasser le dégénéré à la nuit à peine tombée. C'est l'heure où ils sortent le plus, à croire qu'ils le font exprès. Mais là, je ne vois rien, pas l'ombre d'un repas à l'horizon. Je me tourne vers Fujigaya, il me regarde en souriant, toujours. « On bouge, j'ai l'impression que ça s'agite un peu par là ! » J'acquiesce d'un signe de tête. On se déplace rapidement. Ah tiens, deux humains ! « Ils ont l'air pressé ces deux-là ! » Je tourne mon regard vers Fujigaya. Il a une fâcheuse tendance à énoncer des faits évidents ! J'entends un bruit. Je me retourne pour voir quatre personnes qui poursuivent les petits humains. « Oh, et voilà le buffet qui arrive ! » Je souris à la remarque de Fujigaya. Pas besoin d'en dire plus, on file à leur secours.
Je frôle le plus jeune des deux humains, il frissonne. J'inspire profondément, il a une petite odeur sucrée, enivrante. Je me jette sur ses poursuivants. Les dégénérés ne sont vraiment pas résistants, en deux ou trois coups ils sont déjà à terre. C'est à peine amusant. Je garde le dernier pour me nourrir. Je plante mes crocs dans sa jugulaire. La faim commençait à se faire vraiment sentir. Je sens que quelqu'un me regarde. Je n'aime pas qu'on m'observe manger. Je sais que c'est un des deux humains de tout à l'heure. Je ne suis pas sûr, mais je dirais que c'est celui que j'ai frôlé. Je prends encore une grande gorgée avant d'ouvrir les yeux. Je ne sais pas qui il est, je me demande s'il a déjà mis les pieds ici auparavant. Il est plutôt beau... pour un humain. Il frissonne. Je relève la tête et laisse tomber mon repas. Je m'approche de lui. Il commence à trembler. Celui qui l'accompagne lui prend le bras et l'entraîne.
Au moins, j'ai son nom : Senga. « Nika-chan, tu feras attention, tu grognes ! » Je me tourne vers Fujigaya. Je ne comprends pas pourquoi je suis si contrarié. Il pose sa main sur mon épaule. « Il t'intéresse dis moi ? Tu veux les suivre ? » Je ne réponds pas et le devance. Il m'indique « Par les toits. » Je me fie à ce qu'il me dit. Arrivé en hauteur, je vois le petit humain se retourner. « Ils ne regardent jamais sur les toits, tous les humains sont comme ça, ils n'y pensent jamais... » Fujigaya rigole derrière moi. Je sais que la frustration perce dans ma voix. Je me concentre sur ce Senga. Je sens l'énervement grimper alors qu'il se retourne de temps à temps. Lève les yeux ! C'est quand même pas compliqué ! Je respire profondément. J'ai toujours un peu plus de mal que les autres à maîtriser mes instincts. D'après Fujigaya, ça serait dû à mon jeune âge. J'ai plus l'impression que c'est mon caractère de base. Après tout encore humain, j'étais déjà impulsif et difficile à calmer. Mais là, c'est pire qu'avant. Cet humain...
– « Tu sais Nika-chan, si tu lui sautes dessus, ça ne sera pas à ton avantage !
– Hee !?
– Je savais que j'aurais ton attention comme ça. Il suffit que j'aborde des thèmes tendancieux pour attirer ton attention ! Ses épaules tressautent légèrement, il est content de sa blague...
– Hoy !
– On aurait dû amener Hasshi avec nous. Ça lui aurait fait du bien de voir des humains encore sains d'esprit. Takaki s'entête à dire qu'il est encore trop jeune. D'accord, quatre mois pour un vampire c'est ridicule, mais je persiste à penser qu'il est vraiment temps qu'il fasse sa première sortie !
– Humm »
Tout en discutant, enfin, Fujigaya monopolisant la conversation, comme à son habitude, on continue de les suivre. Je ne sais pas pourquoi, mais je préfère être sûr qu'il rentre bien. On ne sait jamais. Ils arrivent à leur Refuge. Je reconnais Yara à l'entrée. J'attends d'être sûr qu'il est à l'intérieur avant de pouvoir détourner mon regard. « C'est bon ? On peut rentrer ? » Fujigaya et son impatience... « Hai... » On se remet en route. Je ne peux m'empêcher de repenser à lui, les veines de son cou, saillantes, palpitantes... Respire ! J'ai vraiment du mal à me calmer. J'ai beau respirer le plus calmement possible, rien n'y fait !
J'entends Fujigaya feuler. C'est pas bon. « Gakis. » C'est le seul mot qu'il murmure dans un grognement un peu plus sonore que les autres. On file, vite. C'est pas le moment de se faire avoir. Rapidement, on s'éloigne d'eux. Je respire un peu mieux. Par sécurité, je jette un coup d'oeil à Fujigaya. Il met toujours énormément de temps à récupérer dès que l'on croise des gakis. Je ne sais pas pourquoi, il doit bien y avoir une raison. Mais personne n'en parle jamais, à croire que c'est un sujet tabou. À chaque fois que l'on aborde le thème des gakis, il s'éloigne. C'est le seul moment où il ne sourit plus. Je sais pertinemment qu'il s'est passé quelque chose d'assez grave pour qu'il soit dans cet état. On arrive enfin à Roppongi. Yokoo se précipite sur nous.
– « Ça va ? Vous êtes resté longtemps dehors !
– Oui, on a fait un détour par Shibuya, histoire de faire passer le temps ! Je devine les regards inquiets de Yokoo vers Fujigaya suite à ma réponse.
– On a croisé deux humains, on les a suivis jusqu'à leur Refuge. Takaki-san est rentré entre temps.
– Autre chose ? Je ne pense pas qu'il soit nécessaire que j'ajoute quelque chose. Le fait que l'on ait croisé des gakis se lit sur le visage de Fujigaya. Il part s'isoler, sans ajouter un mot de plus. Une raison au fait que vous les ayez suivis ?
– Ils étaient poursuivis par des dégénérés. On a préféré s'assurer qu'ils rentraient bien chez eux. Ce n'est pas la première fois que l'un d'entre nous fait ça.
– Oui, c'est certain, mais en général on se contente des dégénérés. On les suit un temps, mais rarement jusqu'à leur Refuge... Je ne vois pas où il veut en venir, s'il ne voulait pas qu'on les suive si longtemps, il ferait mieux de nous le dire directement.
– On parlait avec Fujigaya, on n'a pas vraiment fait attention. Je jette un coup d'oeil à Fujigaya. Il est de dos, mais je peux dire qu'il est tendu. Je distingue le bruit d'un briquet que l'on referme, puis un filet de fumée au-dessus de sa tête, il se calme à sa façon. Oui, on aurait dû être plus vigilant, à cause de ça, on a failli croiser des gakis. On est parti sans se poser de questions !
– Puis-je savoir qui a remarqué la présence des gakis ?
– Fujigaya.
– Tu n'as rien senti ?
– Je ne crois pas. Je ne vois pas où il veut en venir.
– Je pense que j'ai compris. Takashi-kun, assieds-toi s'il te plaît. Je n'ajoute rien et vais m'asseoir dans un des fauteuils. Takaki-san s'installe en face de moi. Il invite les autres à s'asseoir d'un geste de la main. Fujigaya, viens aussi. Ce dernier relève la tête et vient s'installer à côté de moi. Il a l'air d'aller un peu mieux. Takaki-san reprend la parole. Je ne vais pas y aller par quatre chemins. Takashi-kun, je pense que tu as trouvé ton calice.
– Hee ?! Je me tourne vers Fujigaya. Il me sourit. Mais, mais, comment c'est possible ? Je... Fujigaya, tu n'en as pas ! Enfin...
– Oui et ? Je finirais bien par trouver le mien. »
Ils continuent à discuter, alors que je me perds dans mes pensées. Ce petit humain serait donc mon calice ! Je laisse mon dos se reposer contre le dossier. Je le revois, perdu dans cette ruelle sombre... si tentant. Je comprends un peu mieux. Le fait que je ressente son regard posé sur moi, son odeur si douce, la faim qui m'a envahi au moment où j'ai posé mes yeux sur lui, mon exaspération lorsque je l'ai perdu de vue. Mais...
– « Il n'acceptera jamais !
– C'est sûr, ce n'est jamais simple d'avoir à abandonner ceux avec qui l'on vit. Il faut accepter le fait de ne plus les voir aussi souvent qu'avant, de cesser de vivre avec eux, et surtout... »
Tsukada s'arrête, j'ai l'impression que le fait d'être loin de son calice lui pèse. C'est vrai qu'en temps normal, il devrait vivre avec nous, mais comme il est le leader actuel de son clan... Je fixe le mur face à moi. Quand même, c'est étonnant que je trouve mon calice alors que ni Fujigaya, ni Takaki-san n'ont le leur...
-l-
On arrive enfin au Refuge, c'est Yara-san qui nous attend à la porte. Alors qu'on est à l'intérieur, il reste un peu à l'entrée, pour être sûr que nous n'avons pas été suivis, je présume. Yara-san se dirige vers moi.
– « Que s'est-il passé ?
– Je... On s'est fait poursuivre en partant. Et...
– Et Senga s'est arrêté en pleine course, au moment où des vampires sont arrivés. J'ai dû aller le secouer pour qu'il bouge !
– Je... C'était la première fois que je voyais ça. Je... Je sais pas ce qu'il s'est passé... Je. Yara-san m'interrompt.
– Qui ?
– Fujigaya pour sûr et l'autre, un grand brun, je n'ai pas bien vu.
– Hum, en général, Fujigaya traîne avec Nikaido.
– Maintenant que tu le dis, oui, ça devait être lui, mais... »
Je n'écoute plus ce qu'ils disent, dépose mon sac à dos et vais m'asseoir dans un coin. Nikaido... Je le revois dans la ruelle. Si... si beau !? Heee ! Je me relève brusquement. « Je vais me coucher ! » Je me dirige vers la pièce qui nous sert de dortoir et m'installe dans mon lit. Je ne suis pas sûr de beaucoup dormir. Dès que je ferme les yeux, c'est lui que je vois. La scène passe en boucle devant mes yeux. Ses mains, son regard... Je... J'ai beau essayer de comprendre, je n'y arrive pas. Je... je suis comme attiré irrésistiblement par lui...
J'ouvre brutalement les yeux. Je... J'ai chaud. Qu'est-ce que... ? Je... Je suis dans mon lit, au Refuge. Dire que j'avais réussi à m'endormir. Ses yeux... C'est tout ce dont je me souviens. Je crois que je rêvais de... lui ? Faut que je me lève. Je dois boire. Je sors doucement du dortoir. Il est vraiment tard, personne n'est debout. J'entre dans la cuisine, je me sers un verre d'eau, le boit d'une traite. Ça fait du bien. En repartant, je remarque que la porte vers le toit est ouverte. Je vais voir ce qui se passe. En me rapprochant, je distingue des voix. Je reconnais celle de Goseki, je crois qu'il parle avec Yara-san. Je m'approche encore un peu.
– « Non ! Je ne peux pas l'accepter !
– Tu n'as pas le choix Goseki !
– Je ne veux pas !
– Pour le moment...
– Comment peux-tu seulement l'accepter ? Sans rien dire ? Ne rien faire !
– Je n'ai pas le choix Goseki ! Ce n'est pas quelque chose que l'on contrôle et contre lequel on peut lutter ! Vous vous verrez moins, ça sera différent, mais vous n'avez pas le choix ! Quoi Goseki doit partir? Je ne comprends rien !
– Je... J'ai peur que ça se passe mal.
– Ne t'inquiète pas. Est-ce que j'ai des problèmes moi ?
– Tu n'es pas parti ! Tu es toujours avec nous !
– Ça, c'est un coup du sort, je n'allais pas laisser mon clan sans leader ! Et puis au final, on y arrive plutôt bien comme ça. Même si ce n'est pas toujours simple. La situation est complètement différente. Quoi ? Goseki ? Un calice ?
– Je le sais, mais avec Nikaido, connaissant... »
Je... Je ne veux pas en entendre plus ! Je me précipite dans le dortoir et retourne dans mon lit. Non ! Ce n'est pas possible ! Goseki, le calice de Nikaido ? Je... Je sais ce que ça signifie. Goseki va partir avec eux, lui et Nikaido... ils passeront tout leur temps ensemble... et moi ? Je... Je ne veux pas ! Pourquoi ? Pourquoi Goseki ? Et Nikaido ? D'accord, je ne connais pas Nikaido, mais je croyais que... j'aurais aimé que... ce soit moi. Je... Je crois que je suis... jaloux. Non ! Je n'ai pas le droit ! J'entends la porte du dortoir s'ouvrir. Je ferme les yeux, je ne veux pas qu'ils sachent que je suis réveillé. Goseki passe devant mon lit, et s'arrête. Il soupire. Je me force à respirer doucement. Il s'éloigne. Je lui en veux. Je n'arrive pas à étouffer ce sentiment. Je... Va falloir que je me fasse une raison. Je ne le reverrai pas. C'est Goseki qui aura cette chance. C'est lui qui va partager sa vie maintenant. Je soupire. Je me sens mal. Je me recroqueville sous ma couverture. Je ne comprends vraiment pas ce qu'il m'arrive, je devrais être content pour lui. J'essaie de respirer calmement, je n'y arrive pas. Je ne peux pas m'empêcher de penser à lui.
