J'ai terminé cette série il y a plus d'une semaine maintenant et en dépit de l'incommensurable frustration que la fin de cet anime m'a inspiré, Ghost Hunt m'inspire à mort. XD C'est marrant que je fanfique sur une série chez laquelle je compte autant de défauts (fin bâclée, manque de frissons, pas de Naru x Mai, etc… Ma review complète à trouver sur mon blog Tsundere) mais que voulez-vous, avant de me lancer dans l'histoire de ma seconde BJD, je devais faire une transition. Un scénario rapidement trouvé, ma muse qui n'était pas partie en RTT… J'avais tout pour commencer !

Prêts à me suivre dans ma nouvelle enquête policière ? J'espère ne pas m'être trop rouillée depuis mes fics Yami no Matsuei.

On passe au plot, comme d'hab, vous connaissez la procédure maintenant.

¤ Genres ? : Comme l'anime. De l'angst principalement(même si je juge que c'est très dur à l'écrit) et un peu de romance. Parce que j'aime ça. T.T

¤ Sérieux ou portnawouak ? : Toujours très pointilleuse, c'est toujours du sérieux. Je respecte comme je peux les caractères.

¤ Pairing ? : Evidemment ! Vous pensez quand même pas qu'avec ce vide intersidéral de Naru x Mai dans l'anime, j'allais laisser les choses comme ça ? Nan ! Et puis dans 9/10 cas, la motivation principale de l'écriture de mes fics, c'est faire une pairing XD

¤ Ca dure longtemps ? : Comme d'hab. Environ 10 chap de 3 pages et demi Word avec marges rikiki. Je n'ai pas encore fini à la publication de ce premier chap.

¤ Repère temporel ?: Après la fin de l'anime. Si vous n'avez pas tout vu, regardez directement la dernière affaire.

¤ Spoilers ? : Sur l'anime et le secret de Naru, oui. Après, il faut savoir que je me suis spoilerisée par accident sur le manga et donc, sur le secret complet de Naru. Mon salaud, comment tu as pu nous cacher ça ? Je n'en tiens pas compte dans ma fic MAIS j'ai agencé les choses comme si j'en avais tenu compte, histoire que ceux qui savent puissent s'y retrouver. Z'avez suivi ? Non ? Bon, en gros, pas de spoiler si vous ne connaissez que l'anime.

¤ Reviews appréciées ? : C'est ce qui fait que votre humble servante continue d'aimer son travail.

¤ Autre chose à déclarer ? : Je n'ai pas encore pris le temps de lire les autres fics GH présentes sur le site, mais je compte le faire quand j'aurai fini d'écrire. Donc, s'il devait y avoir des ressemblances avec d'autres fics, c'est purement fortuit. Je ne me permettrais pas de copier (et encore moins de publier par derrière, c'est stupide).

NOTE DE L'AUTEUR

J'ai volontairement décidé de ne pas faire intervenir Yasuhara. Pourquoi? C'est déjà dur et chiant de jongler avec six protagonistes en même temps alors sept...

J'espère vite vous voir après grâce au bouton du bas !

Un petit chapitre introductif pour vous présenter l'état d'esprit des protagonistes.


(ξ) MIROIR ALTERE (ξ)


File 1 : Retour avec détours

Tout commença dans un petit quartier tranquille en périphérie de la capitale japonaise. Loin du cœur de Tôkyô et de son effervescence permanente, la ruelle était calme, balayée par une douce brise de ce début d'été. C'était la fin juin et la saison des typhons. Mais heureusement, le pays était aujourd'hui épargné par les tempêtes et profitait d'un ciel radieux et d'une agréable douceur dans l'air.

En ce samedi matin, nombreux tokyoïtes s'étaient rendus dans le centre-ville pour faire du lèche vitrine, d'autres en profitaient pour s'occuper de leur petit carré de jardin. Certains même travaillaient ; il n'y avait pas d'heures pour l'activité dans la ville qui ne dormait jamais. Ce n'était pas ici le cas pour une jeune fille qui rêvassait devant la fenêtre de sa chambre, assise derrière son bureau. Quelques livres et cahiers scolaires de seconde année de lycée s'étalaient en pagaille devant elle mais elle n'y prêtait plus attention après les deux heures qu'elle leur avait déjà consacrées. Un crayon dans la bouche, cette adolescente de dix-sept ans aujourd'hui préférait contempler le ciel azur et trouver des formes dans les nuages qui passaient à la portée de son regard acajou.

Mai Taniyama n'avait pratiquement pas changé depuis ses dernières péripéties paranormales. Ses cheveux chocolat avaient légèrement poussé pour arriver maintenant à ses épaules et elle avait pris deux centimètres en plus, à sa grande joie car elle se trouvait un peu petite. Elle avait néanmoins tout conservé de son dynamisme débordant et de sa bonne humeur que l'on lui connaissait. Depuis le mois d'avril, elle était en seconde année au lycée et avait entamé une petite vie d'étudiante sans histoire.

Elle eut un faible soupir alors qu'elle baissait les yeux.

_ Oui… « Sans histoire »…

Il n'y avait désormais dans la vie de Mai plus rien qui faisait qu'elle se couchait le soir en se disant « Il n'y a qu'à moi que cela peut arriver ». Il n'y avait plus d'enquête. Plus de cas étranges. Plus de phénomènes effrayants. Plus de baito. Plus de… lui.

Mai serra un poing de colère rancunière alors que ce souvenir pénible se rappelait à sa mémoire. Elle se souvenait de cette journée comme si elle l'avait vécue la veille. Le jour où tout ce qu'elle aimait avait disparu. Ou plutôt… s'était « dissout ».

Après le cas du restaurant Yoshimi, alors qu'il était encore alité dans sa chambre d'hôpital, Naru avait dit quelque chose qui avait jeté un silence immédiat dans la pièce. Tout le monde était présent. Rin qui ne le quittait jamais, Bô-san qui plaisantait sur les talents cachés de leur big boss, Ayako qui réprimandait le bonze pour ses gamineries, Masako qui guettait le jeune homme hospitalisé avec calme, cachée derrière une longue manche de son kimono, John qui essayait de calmer Bô-san et Ayako en train de se chamailler et Yasuhara qui s'amusait de tout ce joyeux bazar. Mai était évidemment présente elle aussi. Toujours là pour se faire du souci pour les autres et encore plus pour cet étrange être qu'était son employeur, celui-là même que son cœur avait choisi.

Elle était d'ailleurs à ses côtés lorsque Naru avait observé tout ce petit monde, le regard plus fermé que d'ordinaire.

_ C'est une bonne chose que vous soyez tous ici, j'ai une annonce à faire.

_ Tu nous engages tous officiellement dans la SPR ? lança Bô-san avec un rire amusé. Depuis le temps qu'on bosse ensemble.

_ Non, au contraire.

A ces mots, l'inquiétude de Mai grimpa d'un cran.

_ Que veux-tu dire, Naru ? demanda-elle avec une certaine appréhension.

_ Pour un temps indéterminé, la SPR sera fermée.

Hormis Rin et Masako qui savaient garder la tête froide, tous les occupants de la chambre bondirent de leur siège.

_ Quoi ?!

Naru ne s'offusqua par de la réaction de ses collègues et opina du chef avec résolution.

_ Vous avez bien entendu. Et par conséquent, l'équipe est dissoute, expliqua-t-il avant de se reprendre. Enfin… par « équipe », je parlais surtout de Mai qui est ma seule employée officielle.

Le silence intervint à cet instant précis. La brutalité et le caractère inattendu de la nouvelle étaient tels qu'ils avaient mis tout le monde à quia, même Mai qui n'avait pourtant pas la langue dans sa poche quand il s'agissait de protester ou de donner son avis.

Ayako fut la première à digérer la chose et demanda au nom de tous la raison d'une telle décision, appuyée d'abord par Bô-san puis par Mai qui montait déjà au créneau :

_ Tu veux dire que je suis virée ?

_ Disons qu'il s'agit plus là d'un « chômage technique », mais nomme la chose comme bon te semble, répliqua le jeune homme avec son jansénisme habituel.

_ Ne joue pas sur les… !

_ Naru, pourquoi fermer la SPR ? demanda John d'un air interloqué.

Le silence revint et chacun attendit la réponse du chef de l'agence. Il fronça les sourcils, visiblement courroucé d'avoir à se justifier devant eux. Bah, après tout, il leur devait au moins cela.

Naru retint un soupir las et affronta les cinq regards inquisiteurs braqués sur lui.

_ J'ai à faire en Angleterre et j'ignore quand je rentrerai. Si je rentre un jour.

Le cœur de Mai se serra subitement dans sa poitrine.

Après une courte pause, le garçon détourna le regard. D'indifférence ou par réticence à devoir s'expliquer, Mai ne sut le dire.

_ Ne me questionnez pas sur le pourquoi, cela ne regarde que moi, anticipa-t-il, à croire qu'il connaissait la curiosité de ses partenaires. Merci à tous pour votre collaboration.

Et ce fut tout ce qu'il dit ce jour-là. C'était bien du Naru, ça. Froid, sec, sans fioriture, implacable et sans appel. Sur le coup, Mai n'avait pas tout de suite réalisé qu'il allait s'envoler très loin d'ici et qu'elle ne le reverrait sans doute jamais plus. Alors, bien sûr, n'écoutant que ses pulsions, elle l'avait harcelé de questions et de reproches. Comment pouvait-il leur annoncer cela avec autant de brutalité ? Ne pouvait-il pas attendre d'être au moins rétabli avant de leur jeter ce genre de chose au visage ? Etc.

Et bien sûr, Naru n'avait rien répondu. Aussi stoïque et muet que le roc qu'il était. Il n'avait pas daigné la regarder en face lorsqu'il la remercia pour son courage et son aide lors des enquêtes. Ce fut la goutte de trop. Pourquoi ne la regardait-il pas ? Comment pouvait-il l'ignorer après tout ce qu'ils avaient vécu ensemble ? Depuis leur rencontre, elle n'était que l'assistante bruyante qui réparait une dette ?

Elle avait donc serré les poings pour calmer ses tremblements, le cœur martelant sa poitrine avec un burin glacé.

_ Naru, idiot ! Je te déteste !

Elle avait ensuite quitté la chambre à grands pas, sans se retourner. Les appels de Bô-san dans le couloir ne l'avaient pas retenue car elle ne voulait montrer à personne les larmes de dégoût qui rayaient ses joues rouges de colère.

Ce ne fut qu'une fois rentrée chez elle que la jeune fille comprit qu'elle avait été une fois de plus trop rapide en besogne. Quelle idiote. Pourquoi s'était-elle si vite emportée ? Naru était dans son droit de s'en aller s'il devait partir à l'étranger pour des affaires personnelles. Il avait le droit de fermer la SPR comme il avait le droit de la congédier parce qu'elle n'aurait désormais plus rien à faire pour lui. Il allait partir loin d'elle, elle ne le reverrait peut-être plus. Elle ne lui avait pas tout dit sur elle et sur ce qu'elle ressentait. Oui, car malgré tous les défauts qu'elle pouvait attribuer à son impérieux patron, Mai était amoureuse de lui. Qu'elle le veuille ou pas. Elle ne pouvait pas le laisser partir sans lui avouer ses sentiments ! Non ! Elle ne se le pardonnerait jamais !

Hélas, le lendemain, lorsqu'elle se rendit à Shibuya, Mai se heurta à la porte fermée et aux volets roulants abaissés de la SPR. Après renseignement auprès des voisins, elle eut la douloureuse surprise d'apprendre que Naru et Rin s'étaient déjà envolés pour l'Angleterre. Sans prévenir personne. Sans adresse. Sans numéro de téléphone. Sans message. Sans rien. Naru était sorti de sa vie avec le même silence que lorsqu'il l'avait pénétrée. Quand elle pensa à la détestation que Naru lui inspirait en cet instant, Mai s'aperçut avec horreur que par rapport à la veille, elle le pensait vraiment. Quelque chose s'était déchiré dans son cœur. Elle rentra vite chez elle et évacua sa rage en se répétant que ce type n'était qu'un horrible personnage et qu'elle ne voudrait plus jamais le revoir.

Un an s'était écoulé depuis la fermeture de la SPR et les choses avaient repris leur cour. Ce qui avait changé par rapport à l'époque de son assistanat, Mai n'écoutait plus que d'une demi-oreille les histoires de phénomènes bizarres qu'elle aimait tant autrefois. Malgré ses réticences, elle ne pouvait cependant pas s'empêcher de se dire « C'est peut-être un poltergeist ? » ou encore « Il suffirait de savoir si la température de la pièce est plus basse que d'ordinaire » quand elle entendait autour d'elle des élèves parler de choses inexpliquées. Ce qui lui rappelait Naru et la SPR la rendait amère, elle préférait s'en tenir éloignée. Ce qu'elle avait voulu conserver de cette période, c'était les autres membres de l'équipe. Ils étaient en quelque sorte sa seconde famille et Mai ne souhaitait pas leur tourner le dos à cause de Naru. Elle avait gardé contact avec Bô-san qui la conviait de temps à autre à ses concerts. C'était son grand frère de cœur, elle l'adorait. Parfois, elle se laissait même à regarder les interventions médiumniques de Masako à la télévision.

A présent, la SPR lui paraissait loin. Elle avait sa vie, ses études, ses sorties avec ses amies. Une vie normale en som…

La sonnerie de son téléphone portable la fit sursauter au point d'en lâcher son crayon. Depuis combien de temps rêvassait-elle ainsi ? Elle décrocha.

_ Allô ?

_ Mai… ?

Un sourire ourla ses lèvres. Cette voix jeune et grave, c'était Bô-san.

_ Bonjour, Bô-san. Comment ça va ?

_ Ca… Ca va.

Son sourire se fana. Il semblait mal à l'aise.

_ Que se passe-t-il ? Tu as une drôle de voix…

_ Mai… Je… Enfin… Je ne sais pas si j'ai bien fait de t'appeler, mais…

_ Quoi ? Quoi ? répéta-t-elle, le cœur affolé.

_ Naru-chan est revenu.

Trois malheureux mots suffirent à produire l'effet d'un black-out dans la tête de l'adolescente. Pendant un temps indéterminé, elle demeura figée, les yeux grands écarquillés et la bouche entrouverte. Un flot de pensées et de souvenirs la submergea.

_ Mai ? Mai, tu es toujours là ? s'inquiéta le bonze de l'autre côté de la ligne.

_ Ah ! Euh… Oui, oui… Je suis là… répondit la jeune fille en se passant la main dans ses cheveux avec nervosité. Tu… Tu en es sûr ?

_ Oui, je passais dans le coin et je l'ai vu entrer dans l'agence.

_ Ah…

Mai se trouva stupide de donner une telle réponse mais elle ne savait pas comment réagir. Elle avait toujours répété à qui voulait l'entendre que le départ de Naru ne lui faisait ni chaud ni froid, ce qui avait fini par être le cas grâce à l'action du temps qui passe, mais le fait d'apprendre son retour l'avait retournée comme une crêpe. Elle se maudit d'être aussi faible face à Naru. Il gagnait toujours, cela en devenait énervant.

Elle inspira un bon coup afin d'assurer sa voix au maximum.

_ Merci de m'avoir prévenue, c'est gentil, fit-elle avec sa bonne humeur ordinaire.

_ Euh… de rien, répondit son interlocuteur, étonné de l'entendre réagir aussi bien. Mais si ça ne va pas, n'hésite pas à m'appeler, hein ?

_ Mais oui, mais oui ! A plus !

Sur ce, elle raccrocha, le sourire déjà disparu. Revenu. Après plus d'un an d'absence et de silence complet, Kazuya Shibuya dit « Naru » était de retour à Tôkyô. Quel étrange état d'esprit était en train de s'emparer d'elle. Un mélange de haine ancienne, de rancœur d'il y a un an et de joie présente l'envahissait sans qu'aucun sentiment ne parvienne à dominer les autres. Mai serra le portable dans sa main et le ramena à ses lèvres, l'air pensif.

_ Que faire ? Aller le voir ? L'éviter… ?

Elle oscilla ainsi plusieurs minutes durant. Finalement, la curiosité eut raison d'elle. Elle voulait bien voir s'il avait un peu changé depuis tout ce temps et ce qu'il comptait faire avec la SPR. Ni une ni deux, Mai se leva de son bureau et se dépêcha de descendre l'escalier, direction le quartier de Shibuya.

Plus elle se rapprochait de l'agence, plus Mai se demandait si elle avait eu raison. Après ce qu'elle lui avait dit avant son départ, il ne voudrait sans doute pas la voir. Sans parler du fait que cette visite pourrait se traduire par une marque de faiblesse de sa part. Elle passerait peut-être pour une gamine girouette qui crie « Bon débarras » un jour et accourt vers lui un autre ? Et si ça se trouve, Naru l'avait complètement rayée de sa vie ?

Une démotivation subite assomma notre amie de tout son poids.

_ Finalement, je ne vais pas y al…

Elle se tut. Depuis le temps qu'elle cogitait, elle avait déjà atteint les marches qui menaient à la SPR.

_ Je ne sais vraiment pas ce que je veuuux… se lamenta la jeune fille, dépitée.

Mai leva les yeux vers les fenêtres derrière lesquelles se trouvait le bureau de Naru. Les volets étaient remontés et les rideaux écartés pour laisser la lumière filtrer à l'intérieur. Son cœur doubla un battement mais elle n'était plus certaine de vouloir aller plus loin. Cela ne servait plus à rien.

Elle tournait les talons pour repartir lorsque la porte de l'agence s'ouvrit et qu'une voix grave familière l'arrêta.

_ Taniyama-san… ?

Mai fit volte-face et découvrit Rin qui se tenait sur le perron, visiblement surpris de la trouver là. Il n'avait pas changé en un an. Toujours très propre sur lui et élégant dans ses chemises blanches et gilets sans manches, le premier assistant de Naru n'avait pas l'air plus bavard et enjoué qu'autrefois.

Prise de court, Mai ne voulut pas paraître grossière et s'enfuir et préféra saluer poliment l'homme en s'inclinant.

_ Bonjour, Rin-san. Ca faisait longtemps.

Cette remarque ne servit à rien dans la tentative de Mai d'engager une conversation quelconque. Au contraire, Rin gardait un silence étonné et considérait la jeune fille piégée avec le sérieux que l'on lui connaissait. Et elle qui ne savait pas comment expliquer sa présence ici !

_ Euh… Je vois que vous êtes rentrés avec Naru… dit-elle avec un sourire crispé. Quelle coïncidence, hein ? Je passais dans le coin et…

_ Vous étiez sur le point d'entrer.

Les justifications de Mai se brisèrent avec perte et fracas. Elle était coincée.

_ Oui… enfin… J'ai vu les rideaux tirés, je pensais que… quelqu'un d'autre avait repris l'agence et…

A croire que Rin eut pitié de la choucroute dans laquelle patinait Mai avec grand mal, il l'invita à entrer car lui avait quelques courses à faire. De nouveau mise au pied du mur, l'adolescente n'eut pas le temps d'amorcer un début de pseudo mensonge car l'homme l'avait déjà doublée pour partir de son côté.

_ Toujours aussi chaleureux, Rin-san… maugréa-t-elle avec mauvaise humeur.

Cela dit, à présent, elle n'avait plus le choix. Naru n'était plus qu'à quelques pas d'elle. Et puis, n'était-elle pas venue en premier lieu parce qu'elle voulait simplement voir ce qu'il était devenu ? Elle avait le droit de revenir à l'agence si l'envie le lui prenait, enfin ! Et d'abord, elle avait tourné la page. Naru l'avait terriblement déçue et elle ne se laisserait plus avoir comme une adolescente sans discernement.

_ Exactement ! A nous deux !

Le moral et le courage retrouvés, elle gravit les quelques marches qui lui restaient et toqua trois petits coups sec à la porte avant de la pousser sans bruit.

L'agence se dévoila petit à petit devant elle et une bouffée de nostalgie remonta des abîmes de sa mémoire. Derrière l'odeur de renfermé, il restait celle du papier des livres qui occupaient la bibliothèque, le bois des meubles et le cuir qui recouvrait les fauteuils du salon dans lequel Naru et elle accueillaient leurs clients. Rien n'avait bougé depuis la dernière fois comme si l'année de fermeture de la SPR ne s'était jamais écoulée.

En faisant quelques pas à l'intérieur, Mai se revit, son petit plateau avec la tasse de thé fumant pour Naru, en train de traverser le petit espace « salon » avant de la déposer sur le bureau de son patron qui avait le nez dans ses dossiers. Tout lui parut proche et lointain à la fois. C'était étrange.

Arrivée à hauteur du bureau, la jeune fille passa son index dessus et recueillit une faible pellicule de poussière. Finalement, le temps avait passé.

Des pas qui venaient de la pièce voisine la firent se retourner. Arrêté dans l'encadrement de la porte, une feuille tapuscrite à la main, Naru dévisageait la visiteuse en silence.

Revoir Naru après tout ce temps donna à Mai l'impression de le découvrir pour la première fois. Elle le connaissait mais il dégageait encore cette aura de mystère et de lointain dont il avait fait son manteau. D'ailleurs, en parlant de manteau, il ne semblait toujours pas aimer la couleur si l'on en jugeait ses habits sombres. Un visage fin avec la froideur et la couleur du marbre, l'expression fermée sertie par des yeux turquins fixes et perçants, le jeune homme n'avait guère changé en un an, si ce n'était ses cheveux bruns qui avaient un peu poussé, effilant son regard hiératique d'un fin rideau sombre. Naru était aussi séduisant que par le passé, son charme ne s'était pas amenuisé. Cette pensée vit vaciller l'assurance de Mai qui en perdit ses moyens.

_ Salut, lui dit-elle d'une voix étrange.

Heureusement qu'elle n'avait pas espéré voir Naru surpris de la voir car elle aurait été déçue. Très peu de choses faisaient fluctuer les traits de ce visage impassible.

Après un silence, Naru continua son chemin jusqu'à son bureau.

_ Je ne pensais pas te voir ici.

Elle eut un sourire aigre. Pas de « Bonjour », pas de phrase banale comme on pourrait en entendre dans ce genre de situation. Il n'avait décidément pas changé.

_ Moi non plus, murmura-t-elle plus pour elle-même que pour lui.

Mai se tourna vers le garçon qui s'était plongé dans la lecture de son document. L'ambiance qui régnait dans ces lieux était curieuse. Elle retrouvait le même Naru qu'avant mais elle se sentait comme une étrangère près de lui.

_ Ton séjour en Angleterre s'est bien passé ? Tu as pu faire ce que tu voulais ? essaya-t-elle d'un ton plus refroidi.

_ Oui. Je n'avais plus rien à faire là-bas, alors je suis revenu.

_ Tu reprends donc ta place à la tête de la SPR ?

_ En effet.

Nouveau silence. Mai se surprit d'avoir pensé presque naturellement « C'est bien, ça. Tu n'aurais pas besoin d'une assistante qui porterait le matériel et te ferait du bon thé ? ». Qu'est-ce qui lui prenait ? Comme si les choses allaient redevenir comme avant. De plus, Naru ne l'avait engagée que pour rembourser une dette. Ce n'était pas comme s'il avait réellement besoin d'elle. Il avait déjà Rin.

L'adolescente contempla quelques instants son interlocuteur qui lui tournait le dos. Naru était grand, les épaules larges. C'était un signe de force disait-on. Et visiblement, de la force de caractère, il en avait encore. Ce n'était pas comme elle qui s'entendait penser qu'elle était quelque part contente de le savoir en forme mais également triste de le revoir aussi froid que jadis. Elle était décidément trop faible. Naru, espèce de manipulateur. Arrête de prendre l'ascendant aussi facilement sur les autres alors que tu t'en fiches.

Elle hocha lentement la tête et ajusta la bandoulière de son sac à son épaule en s'en retournant vers la sortie.

_ Bien… Je constate que ça a l'air d'aller pour toi et Rin-san. Bonne chance pour la suite, alors. Et… bon retour.

Alors qu'elle allait s'emparer de la poignée de porte, un bruit de papier légèrement froissé crissa dans le silence.

_ Mai.

Elle s'arrêta et jeta un coup d'œil derrière son épaule. Naru la regardait droit dans les yeux. Le contre-jour que produisait le soleil dans son dos rendait sa silhouette plus énigmatique que jamais.

_ J'ai reçu un cas. Veux-tu m'aider ?

La jeune fille écarquilla les yeux de stupéfaction et sans se l'expliquer, son cœur se mit à battre la chamade.

_ Euh… Je… Oui.

Sa bouche avait répondu avant son cerveau. Pire qu'un réflexe, à croire qu'elle n'avait attendu que cela. Il voulait bien la reprendre comme assistante ? Il ne lui en voulait pas de s'être comportée aussi puérilement la dernière fois ? Ou au contraire, profitait-il de la volatilité de son caractère pour se trouver quelqu'un qui puisse s'occuper des basses besognes ?

Quand elle retrouva toute sa tête, Naru était déjà reparti dans la pièce voisine comme si de rien n'était. Elle s'était fait avoir comme la dernière des débutantes et en beauté, je vous prie.

_ Raaaah! Ce type… !!


Eh oui, Mai. Personne ne peut rien contre Naru, il est trop fort. XD

Prochain chapitre : Découverte de l'affaire