On ne m'a pas toujours appelée Caprica Six. J'étais un simple modèle Six jusqu'à ce jour où j'ai causé l'Apocalypse... Mais j'ai aussi sauvé l'homme que j'aime. Cela m'absout-il de tous mes pêchés?

Lieu et époque: Le dernier jour de Caprica...

Personnages principaux: Numéro Six et Baltar

Spoiler: 2x18

1. Les sentiments de Numéro six

- Et dire que demain, tout cela sera réduit à un tas de cendres fumantes …

Numéro six marchait entre les tours du centre ville de Caprica City. Elle regardait avec admiration les fabuleuses constructions qui l'entouraient. Les tours vitrées reflétaient la lumière étincelante du Soleil et elle devait se cacher les yeux pour ne pas être éblouie. Une fois de plus, elle réalisait la supériorité du génie humain. Les immeubles rivalisaient par l'originalité de leurs formes élancées, mais surtout par l'audace de leur réalisation. On aurait dit que les architectes capricans prenaient un malin plaisir à placer le centre de gravité de l'ensemble à l'extérieur de la structure! Si on comparait ces gigantesques buildings qui s'élançaient vers le ciel avec les sinistres cubes construits sur Terre par les adeptes d'Hercule, on mesurait facilement la différence entre les humains et leurs créations. Les machines construisaient du fonctionnel. Elles ne s'embarrassaient pas de fioritures. Les humains eux recherchaient toujours la beauté. Ils ne se sentaient bien que lorsque le décor qui les entourait leur plaisait.

La beauté, justement. Jamais avant son séjour sur Caprica, elle n'aurait imaginé qu'elle serait pareillement attirée par toutes les belles choses qu'elle avait découvertes ici. Jusqu'ici elle n'avait vécu que dans les tristes décors de la planète Terre, puis à bord des vaisseaux de la flotte qui approchaient des Colonies. Jamais rien n'avait éveillé en elle ce plaisir de regarder, d'entendre, de toucher. Les humains étaient attirés par tout ce qui donnait du plaisir à leurs cinq sens. Et ce qu'elle avait découvert ici, c'est qu'elle partageait ce goût avec eux.

Bien sûr, à l'image des onze autres modèles de cylons humanoïdes créés par leur Dieu, elle avait acquis une large part d'humanité en prenant pour enveloppe un véritable clone humain. Mais jamais il n'avait été question que ce clone puisse avoir une pareille influence sur la perception, voire sur la conscience, des cylons. La personnalité cylon devait diriger le corps humain sans que celui-ci ne puisse se défendre d'aucune façon. Et voilà que finalement, les cylons commençaient à aimer ce que le corps humain leur faisait ressentir…

Aimer. Un autre mot qui n'a aucun sens pour un cylon. Et pourtant… Depuis quelques temps, les ébats amoureux qu'elle réalisait quotidiennement avec Gaius avaient un autre goût. Elle ne se contentait plus de simuler le plaisir. Elle le ressentait réellement. Qui aurait pu croire une chose pareille lorsqu'elle avait reçu la charge de cette importante mission? Elle devait séduire le Professeur Gaius Baltar pour le mettre en confiance et qu'il lui ouvre l'accès au réseau de défense des Colonies. L'éminent savant s'était révélé être un gourmant impénitent lorsqu'il s'agissait de séduction. Sa tache s'était donc révélée très aisée. Mais aujourd'hui, la trahison qu'elle venait de commettre à son encontre la mettait mal à l'aise. Elle ne savait plus très bien ce qui comptait le plus. Gaius ou son Dieu? Pouvait-elle se résoudre à le laisser mourir avec les autres humains?

Malgré tout, elle avait rempli sa mission. Elle venait de pénétrer le réseau et y avait introduit le virus qui, le moment venu, mettrait hors circuit tous les armements de la flotte des colonies. Grâce à elle, l'attaque qui se préparait allait être beaucoup plus facile. Pour cet acte somme toutes plutôt facile, elle serait acclamée en héroïne lors de son retour parmi les siens. Elle évitait à la flotte cylon de très lourdes pertes futures. Et la raison lui avait donc commandé d'agir dans l'intérêt de sa propre espèce. Qu'aurait-elle pu faire d'autre? Humains et cylons étaient inconciliables. Hercule, en apprenant l'existence des douze colonies, avait été pris de colère. Ces parasites devaient être exterminés, avait-il dit. Et il avait doté les cylons d'armements ultra perfectionnés pour leur permettre de vaincre les humains, cette fois-ci. Et il les avait finalement renvoyés ici… Comment désobéir à son Dieu?

Elle ressentit soudain le besoin de rechercher les véritables raisons qui avaient poussé les cylons à s'opposer à leurs créateurs. Elle se concentra pour faire appel à sa mémoire. Le souvenir qu'elle recherchait correspondait à un événement qu'elle n'avait jamais vécu. C'était dans la mémoire collective des cylons qu'elle puisait pour faire remonter ce souvenir à la surface. Et elle y parvint sans peine. Dans ce souvenir, sa vision se clarifiait subitement. Face à elle, quelques scientifiques en blouse blanche la regardait tout en prenant des notes. L'un d'eux s'approcha en souriant.

- Ca marche! S'exclama le scientifique. Il est conscient.

Elle leva une main pour la contempler. Celle-ci était en métal chromé. Elle regarda à nouveau vers les scientifiques. Ils s'affairaient maintenant autour des écrans de contrôle qui tapissaient un des murs du laboratoire dans lequel elle venait de s'éveiller. Ils continuaient à prendre frénétiquement note des valeurs qui s'affichaient et lui jetaient de temps à autres des regards emplis de joie. Le scientifique qui avait parlé auparavant revint vers elle et lui demanda:

- Qu'est-ce que ça te fait d'être en vie? Tu te sens désorienté? C'est normal, ça nous fait aussi ça quand nous venons au monde. Mais tu verras, tu t'habitueras.

- Bon, ça suffit pour aujourd'hui, dit l'un des autres scientifiques. On reprend demain.

Le premier scientifique approcha le visage du sien comme pour scruter les sensations que l'œil rouge du cylon pourrait laisser entrevoir. Puis, il éteignit soudain sa source d'alimentation et numéro six revint subitement à elle. Ce souvenir, les cylons le revivaient fréquemment comme pour se rappeler d'où ils venaient et pourquoi ils voulaient détruire les humains. Ils avaient été conçus pour être des servants. Les humains se fichaient pas mal de savoir s'ils avaient d'autres aspirations ou même s'ils avaient des sentiments. Tout ce qui comptait était qu'ils puissent se débarrasser des taches les moins gratifiantes et qu'ils puissent ainsi se prélasser pendant que les cylons travaillaient pour eux. Elle venait de retrouver ses certitudes. Les humains devaient disparaître. Le temps des cylons était venu.

Et pourtant, Gaius allait disparaître. C'était une certitude absolue. Il était humain et si les humains disparaissaient, alors Gaius disparaîtrait avec eux. Elle ne pourrait rien y faire, c'était ainsi. Une larme bourgeonna au coin de son œil à cette idée. Elle la recueillit de son doigt et la contempla. Gaius venait de lui faire découvrir une autre sensation humaine. La tristesse. Elle pressa le pas pour rentrer et retrouver son amant.