Happy Halloween! Je suis de retour pour vous jouer un mauvais tour, ahah. Behind the Beast fête ses deux ans. Cette fois, à la question trick or treat... Je réponds trick.

(Ou pas ; mais l'ambiance sera creepy. Un peu.)

Je commençais à trouver le temps long sans parution... Et cette fic traînait, tout scénarisée, dans un tiroir depuis deux ans, alors...

Disclaimer : tous les personnages (sauf mention contraire) appartiennent à Hidekaz Himaruya.

Pairing : PruAus

Genre : Drama/Romance ?

Rating : je vais dire T parce que je ne sais pas encore jusqu'où ça ira.

Résumé : Roderich Edelstein a récemment emménagé à Berlin et découvre avec effroi que son voisin est effrayant. Il ne sort jamais de son appartement, vit constamment dans l'obscurité. Les légendes le disent vampire. Ce que Roderich ne croit pas du tout, bien sûr. Mais quand l'homme mystérieux commence à jouer de la musique en pleine nuit, Roderich se retrouve bien malgré lui fasciné par l'habitant et sa musique hypnotique...

Playlist YouTube : /playlist?list=PLiAGOJyChRm12ekuh7C5NTRhu_7KK3fbh Elle est extrêmement importante, je vous conseille vraiment de l'écouter pour vous mettre dans le bain creepy/expérimental/rock/classique de la chose.

En particulier, The Taste of Blood de Jozef van Wissem et SQÜRL est le "main theme" de la fic.

Petite dédicace à Bey0nd qui m'a tirée d'un mauvais pas en me suggérant ce titre !

J'espère que vous aimerez. Bonne lecture !


Next Door Symphony

Chapitre I

Août 2016.

Magnifique. Vraiment magnifique. « Ascenseur hors-service ! » Bien sûr ! C'était typique.

Oh, tout ça commençait vraiment mal. Bien que, à première vue, ç'avait été un cadeau de la Providence, quand Roderich cherchait désespérément un appartement à Berlin. Et il avait trouvé ce modeste mais confortable et élégant studio, pour un loyer ridicule. Exactement tout ce que l'Autrichien souhaitait. Avec une propriétaire sympathique, polie, joviale et tout ce qu'il y avait de plus fréquentable.

Mais les choses avaient changé.

Roderich, qui n'avait vu dans son appartement que la relative proximité avec son lieu de travail, avait découvert avec effroi qu'il devrait utiliser les U-bahn et S-bahn dès qu'il aurait besoin de voyager dans la ville. C'était la conséquence de son immeuble décentré par rapport à tout le reste -la gare, l'aéroport, le centre. Rien que pour son trajet du jour entre la Hauptbahnof et son logement, il s'était perdu. Trois fois.

Et maintenant, quand enfin il avait franchi le seuil de la porte du bâtiment, il découvrait que l'ascenseur était en panne. Il occupait le cinquième étage, bon sang... ! Heureusement que ses meubles et son piano l'avaient précédé et qu'un déménageur avait tout monté dans son appartement... Il n'aurait pas supporté de monter et descendre un nombre incalculable de fois pour amener toutes ses caisses là-haut.

Il soupira et ramassa ses valises, qu'il avait lâchées de frustration et de choc. Il grommela entre ses dents serrées des malédictions à l'adresse de l'immeuble, de la ville, de l'Allemagne. Il avait gravi trois marches de l'escalier tortueux lorsqu'une porte grinça au rez-de-chaussée, dans son dos.

« Herr Edelstein ! » l'appela la voix claire de la propriétaire.

Il se retourna vers elle et la vit sur le pas de la porte de son appartement. Elle était probablement en train de dresser sa comptabilité, elle portait ses petites lunettes de lecture sur le nez. Ses épais cheveux bruns étaient noués distraitement en un chignon lâche et énorme. Elle lui souriait, aimable.

« Bonjour. » la salua Roderich.

« Bonjour ! Vous avez fait bon voyage ? »

« Jusqu'à Berlin, oui... » fut-il tenté de répondre.

« Ça s'est bien passé. » approuva-t-il finalement. « Seulement quelques désagréments dans les transports en commun berlinois à déplorer. »

Il passa délibérément sous silence son piètre sens de l'orientation. Bien entendu, ce n'était pas la faute des métros s'il s'était perdu, mais de là à l'avouer...

« Le voyage a dû vous fatiguer... ? »

Roderich se remémora brièvement sa journée. Elle avait commencé trop tôt. A Vienne. Il avait passé quelques nuits chez ses parents, puisque son ancien propriétaire avait déjà trouvé un amateur pour louer l'appartement que l'Autrichien abandonnait. Rien que ça l'avait mis de mauvaise humeur. Lui qui s'était juré de ne plus rien leur demander, encore moins de l'aide...

Mais c'était terminé. Pour l'année à venir, et -si tout allait bien- les années futures, Roderich habiterait Berlin. Aussi longtemps que l'Universität der Künste, et en particulier le département musical, le garderait parmi le corps enseignant.

« Je suis épuisé. » approuva finalement Roderich.

« Désolée pour l'ascenseur. » s'excusa la propriétaire, comme si c'était de sa faute. « J'ai appelé le réparateur, mais il ne pourra pas venir avant plusieurs jours. »

De mieux en mieux, vraiment.

« Je suppose que je dois voir ce désagrément comme une opportunité de garder la forme... ? »

Elle rit.

« Voulez-vous venir prendre un peu de repos avant d'attaquer l'escalier ? J'ai préparé du thé. »

Il pesa un instant le pour et le contre. Le contre se résumait à un tout petit objet : sa montre, qui lui indiquait que l'après-midi était déjà bien avancé et qu'il n'avait toujours pas déballé ses cartons. Le pour se composait des deux -lourdes, très lourdes- valises remplies de vêtements qu'il devrait monter à la seule force de ses bras.

« Avec plaisir, Frau Hedervary. »

Il suivit la jeune propriétaire et son sourire resplendissant dans l'appartement propret du rez-de-chaussée, où il avisa bien vite le canapé confortable. Elle l'invita à s'y asseoir, ce qu'il fit aussitôt après avoir laissé ses valises dans l'entrée de l'appartement, pendant qu'elle se rendait dans la cuisine claire et impeccable récupérer le thé qui infusait, ainsi que quelques biscuits. Elizabeta le rejoignit ensuite au salon en papotant gaiement de choses et d'autres. Roderich y prêtait peu attention, drapé qu'il était dans sa mauvaise humeur et ses préoccupations concernant son déménagement. Elle ne s'arrêta dans son babillage qu'à l'occasion d'un coup de sonnette. Intriguée, elle s'excusa auprès de son dernier locataire en date et alla ouvrir.

Roderich avala une gorgée de thé, entendant la rumeur d'une conversation joyeuse tenue dans l'entrée et d'une invitation pour le thé. Elizabeta Hedervary réapparut bientôt suivie d'un homme aux cheveux blond vénitien. Un chapeau entre les mains, il arborait un style vestimentaire pour le moins décalé. Une veste de costume rouge, manches retroussées jusqu'aux coudes sur une chemise blanche. Voyant. Roderich trouva cela assez intéressant... Lui qui ne portait que des costumes foncés pour éviter d'attirer l'attention sur lui.

Roderich se leva pour saluer le nouvel arrivant, il tendit la main et l'homme la serra.

« Bonjour. Roderich Edelstein. »

« Ah oui ! Vous êtes celui du cinquième ! Enfin... Le Téméraire du cinquième, quoi. Enchanté. Vladimir Ionescu. »

Roderich se rassit, Vladimir et Elizabeta chacun dans un fauteuil individuel, face à lui.

« Téméraire... ? » répéta Roderich.

« Vous avez osé louer l'appartement vide. »

« C'est ce qu'on fait généralement, avec les appartements vides. » rétorqua Roderich, sourcils froncés.

Elizabeta jetait vers Vladimir un regard d'avertissement. L'homme n'en fit rien et se lança dans ses explications.

« Celui-là est spécial. Hein, Liza ? Il n'a pas été loué plus de deux mois depuis dix ans. »

« Et ? Qu'est-ce que vous sous-entendez, une sorte de... Malédiction ? »

« Oh, pas du vôtre ! Celui de votre voisin, en revanche... »

« Vladimir ! » intervint Elizabeta, mal à l'aise. « Ça suffira. »

« Qui est mon voisin ? » demanda Roderich, intrigué.

Les réponses fusèrent en même temps.

« Un musicien. »

« Un vampire ! »

Roderich faillit recracher sa gorgée de thé.

« Un vampire ?! » répéta-t-il, amusé de la crédulité de son interlocuteur.

« C'est la légende qui s'est développée dans l'immeuble. » expliqua Elizabeta avec un soupir avant que Vladimir ne fasse plus de ravages. « C'est un misanthrope, c'est tout. Un musicien. Il a des horaires décalés, et donc... Il... Bon, je vous ai dit lors de la visite que l'isolation sonore était à refaire... Ça passe pour la plupart des sons usuels, mais vu que c'est un musicien, il... Il arrivera que vous l'entendiez jouer en pleine nuit. Je pense que vous pouvez comprendre ça, Herr Edelstein, étant vous-même musicien. »

« J'aurais préféré en être avisé avant d'emménager. » avoua Roderich, un peu plus froidement. « Et ensuite ? Dois-je m'attendre à finir vidé de mon sang dans les deux mois ? C'est certainement ce qu'il est advenu des anciens locataires, n'est-ce pas ? »

Le ton de Roderich était ironique, mais sa voix était si posée et son expression, si noble, que ces interlocuteurs ne remarquaient jamais qu'il les insultait en soulignant l'absurdité de leurs propos par les siens.

« Roderich -permettez que je vous appelle Roderich?- je vous assure que je m'y connais, en vampires. »

« Ah oui. »

« Oui. Dracula, tout ça. Le nôtre, hé bien ! Figurez-vous que personne ne l'a jamais vu. Il ne sort jamais ! »

« Comment ça... ? Mais, vous, Frau Hedervary, vous avez sûrement dû le voir... Pour la location de l'appartement... »

« Non... En fait, il m'a contactée par téléphone... Je vous parle de ça, il y a dix ans ! Il habitait Munich mais devait monter à Berlin, il avait vu l'annonce dans un journal et voulait l'appartement. Il a refusé de le visiter, il m'a assuré que la dimension indiquée lui convenait, qu'il n'était pas exigeant pour le reste. Il m'a payé un an de loyer d'avance et... Je n'ai pas pu refuser. Je trouvais ça louche. Alors, je me suis renseignée sur lui il n'a aucun casier. Nulle part. L'homme invisible. Je ne l'ai toujours pas vu. »

« Vous voyez, Roderich, c'est louche ! En plus de ça, les volets sont toujours fermés. L'appartement est plongé dans l'obscurité. De la musique résonne en pleine nuit... Et on ne l'a jamais vu sortir, ni croisé dans l'escalier, ou pris l'ascenseur en même temps que lui... ! »

Roderich roula des yeux et termina sa tasse de thé. Au moins, ces rumeurs saugrenues expliquaient le loyer ridiculement bas. Il se leva et Elizabeta l'imita, anxieuse.

« Je vous en prie, Herr Edelstein, ne prenez pas ces ragots au sérieux... ! Ce sont plutôt des blagues qui circulent parmi les locataires, mais, sincèrement, il n'y a pas de quoi s'inquiéter... »

« Je ne m'inquiète pas. » assura Roderich avec un sourire un peu forcé pour cacher son épuisement. « Mais j'ai énormément de cartons à déballer. Merci pour le thé. Bon après-midi ! »

Il sortit de l'appartement avec la bénédiction d'Elizabeta et un hochement de tête compréhensif, avant que le débat reprenne entre Vladimir et elle. Le nouveau locataire lâcha l'affaire en soulevant ses valises et en se préparant mentalement -non sans un long soupir- à gravir les cinq volées tortueuses d'escaliers.

Il arriva devant la porte de son appartement en sueur sous son costume et à bout de souffle. Il déposa ses valises et régula sa respiration, ses yeux s'aventurant malgré lui vers la porte opposée à la sienne. A côté de la sonnette, une étiquette. Beilschmidt. Roderich dénicha sa clef dans la poche de son pantalon, ouvrit la porte et s'engouffra dans l'entrée.

Face à lui, les toilettes. Le court couloir débouchait ensuite sur une salle de séjour où ses meubles et cartons étaient rassemblés, au milieu. Une porte donnait sur la cuisine, un peu petite mais qui ferait l'affaire. Près de la grande porte vitrée qui menait à un étroit balcon, la table de salle à manger serait du plus bel effet. La porte de sa chambre était entrouverte on y avait placé comme demandé son lit, sa bibliothèque et une garde-robe quelconque. Il dédaigna tout cela et ne fit que quelques pas dans le salon, pour ôter un drap recouvrant un demi-queue couleur d'ébène, verni. Ses doigts coururent sur les touches sans émettre le moindre son. S'il s'y mettait maintenant, il ne se préoccuperait plus de l'aménagement... A contrecœur, il s'éloigna et s'attaqua aux premières caisses.

oOo

Il ne vit pas le temps s'écouler. Il avait passé des heures la tête et les mains dans des cartons un peu endommagés par le voyage en camion, entre des tasses, des bouquins, des bibelots insignifiants qu'il décidait bien souvent de jeter. Son appartement prenait forme. Il avait tant bien que mal positionné les meubles comme il le souhaitait. Tellement absorbé dans sa tâche que, lorsqu'il regarda à nouveau dehors, la nuit était tombée depuis un moment. Il ne se rappelait même pas avoir allumé les lampes -geste automatique effectué mécaniquement quand le besoin s'en était fait sentir.

Mains à la taille, il balaya son appartement du regard, debout au milieu de son séjour qui ressemblait enfin à quelque chose, avec un canapé face à la télé et un fauteuil attenant, non loin de la table qu'il avait placée exactement à l'endroit voulu. Au moins, il prendrait ses repas en face d'une vue assez enviable sur un place verte de Berlin...

Il marcha vers la cuisine, ouvrit le frigo pour y trouver des bouteilles d'eau et des vivres non périssables -cadeau de bienvenue d'Elizabeta. Il ouvrit une boîte de choucroute et la plaça sur la taque à induction. Il ne lui restait plus qu'à attendre que ce soit mangeable.

Et alors il l'entendit.

Une guitare, peut-être une basse... ? Roderich n'avait jamais été doué avec les instruments modernes. Mais c'était un son qui lui fit froid dans le dos, peut-être parce que son appartement n'était que faiblement éclairé et qu'il était seul dans un lieu presque inconnu.

Aigu et hypnotique, strident sans déranger... Juste assez pour interpeller. Du luth. Il n'en avait jamais entendu jouer dans une composition de ce genre... Indéniablement rock. Expérimentale ?

Et bientôt une batterie vint accompagner les accords, battre une mesure anarchique et à la fois régulière. Mélange des genres.

Il y avait une... Une ambiance, une atmosphère à ce morceau de musique nouveau. Roderich n'avait jamais rien entendu de tel ! Mais il savait d'instinct que cette mélodie, ou plutôt cette suite de notes, aurait très bien pu se retrouver dans un film gothique, voire d'épouvante.

Les paroles de Vladimir lui revinrent en tête alors qu'il ne se sentait plus à l'aise dans son nouvel appartement. La musique semblait lui conférer un aspect menaçant, inquiétant, lugubre. Son estomac se contracta, il n'eut plus faim tout à coup.

« Les volets sont toujours fermés. L'appartement est plongé dans l'obscurité. De la musique résonne en pleine nuit... Et on ne l'a jamais vu sortir, ni croisé dans l'escalier, ou pris l'ascenseur en même temps que lui... ! »

« Un vampire. »

Roderich trouva refuge dans sa chambre et alluma le lustre du plafond. La lumière chassa les ombres, mais la confusion demeura dans son esprit. 23h25. Qui se mettait à jouer de la musique à une heure pareille ?

Il frissonna malgré lui.

Que diable Roderich avait-il encore fait pour mériter un voisin pareil... ?


Traductions

Herr : Monsieur (allemand)

Frau : Madame (allemand)

Notes

U-Bahn : équivalent du métro en Allemagne.

S-Bahn : équivalent du RER en Allemagne.

Donc, la scène est à Berlin ! Et pour une fois, je vais peut-être pas raconter trop de bêtises au sujet du décor...

Universität der Künste Berlin : Université des Arts de Berlin. C'est une des seules écoles artistiques d'Allemagne à avoir le titre d'université. Elle dispose d'un département dédié au piano. Rendez-vous sur le site udk-berlin . de pour en savoir plus !

La musique que Roderich entend est donc The Taste of Blood composée par Jozef Van Wissem et SQÜRL pour le film Only Lovers Left Alive. Je me suis d'ailleurs inspirée du personnage d'Adam pour celui de Gilbert, que vous découvrirez... Un jour~ Pour les besoins de l'histoire, on fait comme si la musique était une création personnelle...

Vladimir Ionescu est bien entendu Romania. J'ai choisi son nom de famille au hasard, aussi parce que c'est proche de Ionesco, un dramaturge roumain et français.

Cette fic sera pour ainsi dire un huis clos, mais il y aura au moins une guest-star par chapitre !

Merci pour votre lecture ! Une review ?

Chapitre 2 : le 15 novembre ! Et dès lors, on passe à un chapitre par mois.

A bientôt !