La Marionnette
Le Docteur insère délicatement la clef dans le minuscule remontoir et la tourne une fois, deux fois, trois fois, puis une quatrième pour faire bonne mesure. Un bruissement de mécanique bien huilée se fait à peine entendre. Il enlève l'objet, le glisse dans sa poche, et s'éloigne d'un pas.
La marionnette ouvre les paupières, et tourne la tête vers lui. Son mouvement est à peine saccadé. L'expression des yeux bruns devient légèrement méprisante.
« Eh bien, Docteur, murmure-t-elle. Nous nous rencontrons à nouveau.
– Heureux de te revoir, mon vieil ami. Mon cher Maître. »
Le Maître lève un sourcil.
« Depuis quand m'appelles-tu ainsi ?
– Depuis… »
Le Docteur se tait, la gorge un peu nouée.
« Peu importe, finit-il. Tu es là, n'est-ce pas l'essentiel ? »
Le Maître regarde autour de lui.
« Je vois, marmonne-t-il. Ton TARDIS. Ta camelote déglinguée. Qu'est-ce que je fais ici, au fait ?
– C'est… c'est chez toi désormais.
– Tu plaisantes ! Il n'en est pas question ! »
Le Maître se dirige d'un pas sec vers la porte. Il s'arrête devant elle et, sans se retourner, commande d'un ton sans réplique :
« Ouvre-moi ça. »
Le Docteur appuie sur la manette et les battants s'écartent. Mais rien ne se passe. Le Maître ne sort pas. Au bout de quelques secondes, la marionnette fait entendre un petit déclic. Son torse bascule. Elle s'incline et s'immobilise.
« Il va falloir que j'augmente l'autonomie, marmonne le Docteur. De beaucoup. »
Il s'approche de la mécanique, et la redresse. Les yeux toujours ouverts du Maître ont perdus toute expression.
La main du Docteur caresse doucement le cou, à l'endroit du remontoir. Il ressort la clef de sa poche et hésite avant de l'insérer à nouveau.
La marionnette-Maître s'anime au moment le Docteur pose les lèvres sur les siennes.
« Doc… » commence le pantin.
Il se tait aussitôt. Ses yeux se ferment.
« Docteur… reprend-il dans un souffle.
– Chut, lui murmure celui-ci, en déboutonnant la stricte chemise à col droit. Nous n'avons pas beaucoup de temps. »
