Voici le début de ma nouvelle fanfiction sur le Seigneur des Anneaux. Je ne change pas mon thème de prédilection et je reste sur la famille de Pippin. On peut parler de suite de l'Enfance d'un Thain car j'en reprend les personnages ainsi que l'histoire familiale que j'y ai mis en place, mais il s'agit d'une histoire indépendante, qui se passe quelques années après la Guerre de l'Anneau.
Home is Behind, traduit par la Maison est derrière dans la VF, est le premier vers de la chanson que Pippin chante à Dénéthor dans le Retour du Roi, dans cette scène d'une rare intensité émotionnelle, portée par la voix cristalline de Billy Boyd (quoi, j'en fais des tonnes ?). Enfin bref, vous aurez reconnu la référence, j'en suis sûre !
Petit disclamer de début de fic : l'univers de la Terre du Milieu appartient à Tolkien et mis à part quelques personnages de mon propre cru, tout est à lui !
Bonne lecture !
Chapitre 1 La nouvelle génération
- Ce n'est pas vrai, ça !
Une vague de fureur s'éleva en Merry. Il se détourna de son chemin pour se diriger à grandes enjambées vers son bureau dont la porte ouverte ne présageait rien de bon. Il était presque arrivé quand, confirmant ses doutes, deux enfants s'enfuirent de son bureau par la porte entrebâillée. Il ne put les rattraper mais reconnut sans peine la frimousse blond-roux de son fils et la tignasse noire jais de son meilleur ami Paolo, l'aîné de l'illustre Sancho. Sale gamin de père en fils depuis des générations.
Merry décida de donner de la voix :
- J'ai déjà dit que je ne voulais pas voir d'enfants dans mon bureau !
Mais Eomeriadoc et Paolo avaient déjà disparu dans le jardin. Ça ne servait à rien ! Merry soupira et secoua la tête. Et puis il tendit la main et se saisissant de la poignée de la porte de son bureau, il amorça le geste qui aurait dû donner un parfait, bruyant et effrayant claquage de porte, quand il fut saisi d'un doute. Il poussa la porte au lieu de la fermer et suivant le mouvement de la poignée, il entra dans son bureau.
Et il était là, effectivement. Petite silhouette assise par terre, au pied de la bibliothèque, dans le coin de la pièce, les genoux remontés, un grand livre ouvert posé dessus et le nez plongé dedans, quasiment invisible dans le grand bureau du Maître du Pays de Bouc.
Merry eut un sourire attendri et fit doucement :
- Faramir…
Le jeune Hobbit leva aussitôt la tête mais ne releva pas pour autant.
- Mon oncle ?
- Tu n'as pas entendu ce que je viens de dire ?
- Si, que tu ne voulais pas voir d'enfants dans ton bureau.
Merry resta interloqué et bredouilla :
- Et… Et tu ne te sens pas un peu concerné ?
- Non, expliqua Faramir d'une voix douce, tu ne veux pas voir d'enfants ici parce qu'ils font des bêtises, qu'ils cassent des objets, qu'ils mettent du désordre, et qu'ils fouillent. Moi, je ne fais que lire tranquillement !
Conserver son autorité quelle que soit la pertinence de la réponse. Sans élever la voix, Merry reprit :
- Sors de là, Faramir !
Sans un mot de contestation, sans essayer de discuter, Faramir se leva et passa devant lui, ni le menton levé, ni les yeux baissés. Il lui tendit juste le livre qu'il lisait et sortit de la pièce.
- Au revoir, mon oncle !
- Au revoir, Faramir !
Merry le regarda s'éloigner en souriant. Un sacré petit bonhomme ! Il n'avait que six ans. Il aurait à peine dû savoir lire. Et il lisait déjà mieux et plus qu'Eomeriadoc qui avait le double de son âge. Plus intelligent que la moyenne ? Non, pas forcément, mais plus curieux. Pas la même curiosité que son père au même âge, non, mais curieux de savoir, curieux d'apprendre. Comme s'il faisait exprès de ressembler à l'autre Faramir…
On aurait pu le croire fils de sa tante Prima ou de son oncle Rex à cause de cet amour du savoir, mais son physique confirmait suffisamment sa paternité. Même cheveux, même nez, même bouche que son père. Parfois Merry croyait revoir Pippin au même âge. Il avait hérité ses yeux et la forme de son visage de la branche Long-Cleeve. Estella disait –et elle avait raison- qu'il avait pris les meilleurs traits de chacun de ses parents.
Sa soif de connaître ne faisait pas lui un jeune Hobbit moins espiègle que son père au même âge. Au contraire même, car il ajoutait l'astuce à l'espièglerie pour sortir des problèmes –comme à l'instant- . Il était peut-être plus obéissant et respectueux mais pas pour autant plus sage ou plus calme qu'un autre enfant. C'était un Touque. Plus un Long-Cleeve.
Merry se sentit soudain très vieux. Vieux au point de pouvoir comparer un enfant de six ans à ses parents qu'il avait aussi connu à cet âge-là. Il se laissa tomber dans un fauteuil et rejeta sur son bureau 'les caractéristiques de la branche des Forts', le livre de Faramir. Si on commençait à vouloir comparer Faramir, alors autant le comparer à Eomeriadoc.
Fils uniques, héritiers des plus hautes fonctions hobbites, fils de héros, Eomeriadoc et Faramir se ressemblaient … en théorie. Mais pas dans les faits. Eomeriadoc, au contraire de Faramir qui ramenait des 18 sur 20 qui laissaient Pippin assis dans son trône, ramenait, lui, des Fierpied, des crapauds dans ses poches et des mots des professeurs.
Mais – à part les Fierpied-, c'était ça un Brandebouc. C'était ça un enfant Hobbit. C'était ça le modèle de fils le plus répandu. Eomeriadoc était le fils qu'il avait imaginé, dont il avait rêvé et aussi celui qu'il l'avait poussé à devenir, jours après jours, punitions après punitions, récompenses après récompenses, leçons de morale après leçons de morale. Amour après amour.
Le jour-même de sa naissance, Eomeriadoc avait refermé sa petite main sur le doigt de son père et Merry, sous le rire de bonheur d'Estella, avait renoncé à forcer le petit à le lâcher. Le temps qu'Eomeriadoc déplie sa main dans son sommeil, il était resté assis sur le lit d'Estella, la main dans le berceau. Ce fut pendant ces quelques minutes et à jamais qu'Eomeriadoc fit sceller à son père un pacte entre eux-deux. Indicible pacte d'un père envers son fils.
Cette impression étrange qu'Eru vous accordait un autre vous-même pour en faire ce que vous n'aviez pas réussi à être, pour vous rattraper. Et Eomeriadoc suivait pour l'instant tout à fait le chemin que Merry voulait le voir prendre. Il s'était toujours montré à la hauteur de son père, de sa famille, de son époque. Il avait le caractère vif de sa mère et … disons… le sérieux de son père ! S'il ne devait un jour que rester qu'un seul Hobbit sur terre, Merry aurait tout donné pour que ce soit Eomeriadoc. Pour qu'il vive.
- Merry !? Mais qu'est-ce que tu fais encore là ?
La voix d'Estella, sur le pas de la porte, le tira de ses pensées et il se leva d'un bond en s'écriant :
- Le Messager du Roi ! Je … je l'avais oublié !
- Dépêche-toi ! Vite !
Il passa devant sa femme sans vraiment la regarder. Le Messager s'était annoncé pour 14h et Merry était en train d'y aller quand la porte entrouverte de son bureau l'avait arrêté en chemin. La dernière fois qu'il avait regardé l'heure, il était 13h45 !
