- Daryl ?!
- Quoi?!
- On ne peut pas les laisser là bas ! On doit y retourner.
- Non Beth ! Ils nous rejoindront plus tard, continue de courir.
...
J'halète, ça fait maintenant plus de 4 heures que nous courrons, nous avons semé la horde de marcheurs qui entouraient la prison et nous semblons à présent en sécurité.. Enfin on ne peut jamais en être sûr. Daryl semble exaspéré de me voir courir si lentement, mais c'est pas comme si je pratiquais le jogging régulier avant que tout ça n'arrive. Lui en revanche il paraît dans son élément, il court comme une flèche tout en tuant les marcheurs qui croisent notre chemin, dans une synchronisation parfaite. Je suis contente d'être avec lui, il est fort, il sait se battre. J'ai une petite chance de survie avec lui. Malgré tout, il m'impressionne, je crois même que j'ai toujours eu un petit peu peur de lui, vous savez, c'est le style redneck un peu bourru, qui ne parle jamais de lui mais qui a cette façon de vous regarder comme si vous n'étiez qu'une morte en sursis... Mais je ne pense pas qu'il soit comme ça, au fond de lui. On a tous vu comment il a cherché Sophia jour et nuit, en risquant sa propre vie, encore et encore. Il n'a jamais abandonné alors même qu'il ne lui avait sûrement jamais parlé quand elle était encore dans leur groupe... Mon groupe. Celui que je viens de voir disparaître, peut-être pour toujours.
Je n'avais pas encore eu le temps de vraiment y repenser depuis que nous avions fui, l'instinct de survie est une chose incroyablement puissante. Mais maintenant que nous ralentissons la cadence, tout me revient en mémoire : l'arrivée du gouverneur, la panique, mon père attaché avec Michonne devant les grilles, puis le coup fatal.. Je crois que je savais que je ne reverrai pas vivant mon père mais mourir comme ça ? Décapité ? Comme une éxecution publique ? Aucun mot n'est assez fort pour décrire ce qu'il s'est passé, ce que j'ai ressenti. Je me suis mise à tirer et à pleurer mais à l'intérieur c'est comme si je me noyais, je n'arrivais plus à respirer, j'avais envie de vomir, de m'évanouir, de hurler pour toujours... Un mélange de tout ça, et c'était trop à supporter. Je ne sais même pas par quel miracle j'ai pu m'en sortir, c'est comme si mes jambes avançaient toutes seules, jusqu'à ce que je me retrouve avec Daryl. Grâce à lui j'ai réussi à me concentrer uniquement sur ma survie.
- « On va camper ici. » me lance-t-il en me sortant de mes pensées.
Il me montre un petit coin encerclé par les arbres dans la forêt. Mais là, arrivent quatre mordeurs. Je panique intérieurement et regarde Daryl, en moins d'une seconde il arme son arbalète et tire, la flèche lui arrive directement dans l'œil et il tombe lourdement par terre. La scène passe au ralenti devant mes yeux et je suis incapable de réagir. C'est le moment que choisit le deuxième rôdeur pour m'attraper le bras, Daryl se bat avec le troisième mordeur et ne peut pas m'aider. Je recule par instinct mais butte dans un arbre, j'essaie de le repousser de toutes mes forces, mais mes muscles ne valent pas grand chose contre un rôdeur affamé. Je vois Daryl se tourner vers moi après avec achevé son marcheur, il marmonne quelque chose et arrive en courant. Il tue mon assaillant une seconde avant que celui ne parvienne à me mordre l'épaule. Je soupire de soulagement quand arrive le quatrième marcheur, prêt à mordre la nuque de Daryl, et ça il n'en est pas question ! Sortie de mon état second je saisis le couteau de Daryl à sa ceinture et balance mon bras par dessus son épaule et atteins directement la tempe du marcheur. Daryl, qui s'était légèrement poussé vers le côté, me remercie du regard.
- « Finalement, ce n'est peut être pas le meilleur endroit pour camper » je lui lance sans parler trop fort.
- « Il faut qu'on se dirige vers la route, et rapidement, le soleil va se coucher dans une heure ou deux » il me répond.
Il me fait signe de le suivre, et on reprend notre chemin un peu plus tranquillement que tout à l'heure. On doit ménager nos forces, on n'a que deux bouteilles d'eau et pas de nourriture à part une barre protéinée dans mon sac.
Mon esprit s'envole à nouveau vers notre groupe. Je sais qu'ils sont vivants, peut-être pas tous, mais on sait ce que c'est que de perdre quelque personnes. C'est triste et inévitable à la fois. Une seule chose est sûre pour l'instant c'est que mon père est mort et qu'il ne reviendra pas. Je veux revoir Maggie, elle doit être anéantie elle aussi. On est séparées au moment où on a le plus besoin l'une de l'autre. J'espère au moins qu'elle est avec Glenn, il l'aidera à survivre et à s'en remettre. Non pas qu'elle ait vraiment besoin de quelqu'un pour survivre, elle fait partie des personnes les plus forte que je connaisse, c'est pour ça que je sais qu'elle est en vie.
On arrive près de la route, et il y a une voiture sur le bas côté. On s'en approche et on découvre un mordeur à l'intérieur. Daryl le tue rapidement et avant que nous ayons eu le temps de vérifier l'intérieur, des grognements parviennent à nos oreilles. Une horde se rapproche. Après un regard entendu, on monte dans le coffre, c'est la seule échappatoire possible, et Daryl referme le coffre avec son bandana. On peut apercevoir la horde à travers l'interstice, ils sont tellement nombreux... On aurait jamais pu s'en sortir sans cette voiture. Il va falloir un bon moment avant qu'ils soient tous partis. Je le regarde, il est concentré et ne laisse rien paraître à part peut être une grande fatigue, émotionnelle et physique. Il est toujours celui qui arrange les choses pour tout le monde, qui fait tout pour qu'ils se sentent en sécurité, et je l'admire pour ça. Mais pour l'instant, c'est difficile de penser à autre chose qu'à la horde qui n'attend qu'un signe de notre part pour nous dévorer vivant. Je me concentre aussi et sort mon couteau, le plus discrètement possible, pour le diriger vers l'interstice comme le fait Daryl avec son arbalète.
Le temps passe, les rôdeurs sont toujours là. Ceux-là ne viennent pas de la prison, ils sont beaucoup plus nombreux. La tension ne décent pas dans le coffre, on est coincés ici ensemble, l'un contre l'autre, chaque muscle contracté, prêts à réagir à n'importe quel moment. La nuit est tombée depuis plusieurs heures maintenant et j'ai l'impression que nous sommes ici depuis une éternité. Mes muscles commencent à me faire souffrir horriblement, et dehors les mordeurs percutent toujours la voiture, mais moins nombreux, à présent.
Je regarde Daryl, il est si fort, il est totalement immobile, il n'a pas bougé une seule fois. Je sais que c'est dur pour lui aussi, mais il reste impassible. Il ne me regarde pas, c'est comme si je n'existais plus, il est trop concentré sur ce qu'il se passe à l'extérieur. Peu importe, sa présence me rassure.
Le jour commence enfin à se lever, il doit être aux alentours de 6h. On est à la fin de l'été, le soleil se lève encore tôt. Il me semble que ça fait au moins trente bonnes minutes que je n'ai pas entendu de bruit. J'interroge Daryl du regard, il hoche la tête et défait le nœud qui ferme le coffre. Nous essayons de sortir tant bien que mal. Chaque partie de mon corps est douloureuse. Je pense qu'il ressent la même chose que moi, mais lui le cache mieux. Je manque de vaciller mais il me rattrape de justesse par la taille et me fait m'asseoir sur le rebord de ce maudit coffre. Il me lance un regard et je rougis de honte. Comment puis-je être aussi faible ? Il se retourne et va récupérer tout ce qu'il peut dans la voiture, dès que je me sens mieux je le rejoins.
Il n'y a pas grand chose, juste une bouteille d'eau et quelques débris qui vont nous servir à installer des protections autour de notre futur campement. On repart sans un mot, épuisés par la nuit que nous venons de passer.
Ça semblait tellement étrange d'être si proche de lui. Je crois que je le vois un peu différemment maintenant, comme si je pouvais voir un peu plus à travers lui. Il reste tout de même impressionnant et inaccessible. J'ai l'impression qu'il se fiche complètement de moi, et qu'il ne compte pas m'accorder un peu d'attention. Peut être qu'il ne me pense pas digne de marcher à ses côtés. Et ça me fait presque mal d'imaginer qu'il pourrait penser ça, mais, après tout, il a peut être raison.
Nous trouvons un endroit qui a l'air tranquille et on installe le campement. Puis nous décidons d'aller trouver de quoi manger. Ça doit bien faire 24 heures que nous n'avons pas mangé, et il va nous falloir des forces pour affronter la suite.
Je commence à cueillir des baies et ne sais pas trop où les mettre. Daryl s'approche derrière moi mais je décide de l'ignorer, s'il ne veut pas me parler, je vais pas faire d'effort pour lui. Il me tend son bandana, je réfléchis rapidement puis le prend. Cela ne sert à rien de jouer aux gamines capricieuses, on est tous les deux bien au dessus de ça.
Au moment où je retourne au campement, je le vois dépecer quelque chose, mais je ne vois pas ce que c'est. Je m'approche... Mon Dieu ! C'est un serpent ! Une vague de dégoût me saisit mais je n'ai pas le droit de faire la difficile. Et puis je sais que si il a ramené ça, c'est qu'il n'a sûrement pas eu le choix.
Le temps passe, nous mangeons notre repas (enfin moi je fais plus semblant qu'autre chose mais peu importe) et il ne m'adresse toujours pas la parole. Je me concentre sur le feu, et pense à mon père. Il avait toujours été là pour moi, et c'est tellement dur de se dire que je ne le verrai plus jamais. Je ne sais pas où est mon groupe, ou combien de mes amis s'en sont sortis mais je ne veux pas abandonner. Je sais que eux je peux les revoir. En attendant, la douleur est trop dure à gérer, et je sais ce qui peut m'aider.
- « J'ai besoin de boire. » dis-je à l'homme qui concentre toute son attention sur le serpent, et qui joue soigneusement à m'ignorer.
Il me balance sa bouteille d'eau sans même me regarder.
- « Non j'ai besoin d'alcool. »
