Coucou à tous,
Alors voilà cette fic que certains attendaient (et réclamaient ^^), j'espère que vous aimerez !
Titre : Les Madusiècles III - Wonderwall
Disclaimer : Les personnages sont propriétés de JKRowling, la chanson Wonderwall est du groupe Oasis et reprise par Ryan Adams.
Rating: Entre K et T selon les chapitres
Précision : Le résumé ci-dessous reprend les principaux éléments des deux premières fics, tout ce qu'il est nécessaire de savoir pour comprendre celle-ci, qu'on l'on est pas lu ou complètement oublié les histoires précédentes.
Bonne Lecture !
Résumé : Madusiècles I (We were friends) et II (Trop gentille pour toi, Potter) : Lors de leur première année, Dumbledore et McGonagall découvrent que James et Lily sont les Madusiècles mais décident de garder le secret jusqu'à leur arrivée à maturité. La légende raconte que, dans des temps Antique, deux déesses décidèrent de donner leur vie pour permettre aux hommes de se protéger eux-mêmes des puissances néfastes. Leur pouvoir fut scellé dans une âme et celle-ci fut scindée en deux morceaux, deux sorciers exceptionnels apparaissant à chaque génération et détenant un pouvoir exceptionnel en présence l'un de l'autre.
Lily Evans a une mère alcoolique parfois violente (Dorina), un père irresponsable appréciant un peu trop les jeunes filles (Evan), une grande sœur (Pétunia) qui est amoureuse depuis plusieurs années d'un certain Aubrey, moldu au courant de l'existence de la magie et meilleur ami de Vernon Dursley, et un petite frère (Timothy), également sorcier. A Poudlard, Lily devient rapidement la meilleure amie des Maraudeurs. A l'âge de quatorze ans, elle accepte d'embrasser James Potter car celui-ci manque d'expérience avant son premier rendez-vous avec une fille plus âgée.
Lors de leur rentrée en cinquième année, James se drogue à son insu et fait une déclaration d'amour à Lily qui le croit avant qu'il n'oublie tout dès le lendemain matin. A la fin de la même année, James et Lily sortent secrètement ensemble pendant plusieurs mois avant que Katinka, une ex petite amie de James, ne dise à Lily que celui-ci l'a trompée. Lily décide de rompre tout lien avec James qui, n'ayant en réalité rien fait de mal, ne comprend pas.
Peter Pettigrow est un membre actif des Maraudeurs et sort longuement avec une jeune fille du nom d'Olga avant de rompre avec elle car il ne l'aime pas vraiment, en fin de compte.
Remus Lupin est tombé sous le charme de la nouvelle infirmière, Poppy Pomfresh, qui ne semble rien remarquer. Il sort un moment avec Heather, la meilleure amie d'Olga, qui couche avec lui car elle est curieuse de voir la différence que cela fait avec un Loup-garou.
Sirius Black, souvent maltraité à son domicile, a une aventure avec la jeune prof de Défense contre les Forces du Mal, Levina Gibbon dont le vrai nom est en fait Léa-Maria Silvermann, l'ancienne meilleure amie de Bellatrix. Elle a rompu tout lien avec cette dernière après être tombée enceinte à l'âge de seize ans de Mortimer Dubois et abandonné leur fille, Noémy. Au moment où Sirius révèle à Severus Rogue l'emplacement du Saule Cogneur, Dumbledore découvre la liaison entre l'élève et le professeur et renvoie celle-ci.
Durant les vacances d'été précédent la sixième année, Lily ne parle plus à James car elle pense qu'il l'a trompée, fait qu'il ignore complètement, Remus, très mal dans sa peau, ne parle presque plus aux Maraudeurs et encore moins à Sirius qui lui-même découvre que son père mène une double vie avant que sa mère, furieuse de la trahison, lui efface la mémoire. Timothy et Evan Evans meurent dans un accident.
Part I : There are many things that I would like to say to you
Wonderwall
Chapitre 1 : Yesterday
La gare était encombrée en ce premier septembre. Des gens couraient en tout sens autour de parents faisant leurs adieux à leur précieuse progéniture, un petit garçon pleurait de peur face à l'immense locomotive rouge emmenant son grand frère loin de lui pour une année entière alors que plus loin résonnaient disputes, recommandations de dernière minute et retrouvailles joyeuses des amis séparés par l'été. La voie 9¾ regorgeait de son effervescence habituelle, telle un dernier petit moment d'insouciance préservé au milieu d'un monde en guerre.
Même le temps semblait avoir décidé de faire une pause pour cette occasion particulière. Il faisait beau, ensoleillé, les nuages ayant pris leurs vacances pour la journée. A croire que Voldemort lui-même pouvait comprendre l'importance d'une trêve quand les adieux avaient d'autres raisons plus réjouissantes qu'une mort.
Enfin, elle arriva.
L'été avait fait son œuvre. Son nom n'avait certes pas changé mais elle n'était plus la même personne. Charismatique, sûre d'elle, ensorcelante, éblouissante dans sa petite robe blanche, Lily Evans passa le mur secret de la voie 9 ¾ avec l'élégance et la grâce d'une fée. Elle avait bronzé, s'était affinée. Ce n'était plus une jeune fille mais désormais une femme qui s'avançait, perchée sur ses talons noirs, savamment coiffée, maquillée au juste ton.
L'œil conquérant, très consciente que les changements de son corps l'avaient menée à un changement d'attitude radical, elle observa la foule autour d'elle telle une reine observe sa cour. Elle n'appartenait plus à ce monde-là, elle les surpassait tous. De ses jambes brunes et bien galbées à la peau encore crémeuse de son décolleté, son sourire blanc ou ses yeux pétillants, tout en elle respirait la féminité et transpirait d'érotisme.
Ses mains fines et parfaites assurèrent l'équilibre de son sac à main sur son épaule. Elle jeta un regard à ses ongles peints dans un rosé translucide ravissant et sourit, condescendante envers cette populace de mâles la fixant avec délice. Elle pourrait bien s'habituer à ce genre de regards. Serrant les fesses, ce qui ne faisait que rendre délicieuse la courbe de son cambré, elle s'avança vers le train, ses bagages flottant derrière elle. Un rictus orna ses lèvres lorsqu'elle aperçut ces pauvres petites choses suer sang et eau pour traîner leurs malles à la force du bras.
Personne n'avait sa classe. D'aucun, sauf lui.
« Je t'ai manqué, princesse ? » murmura sa voix rauque dans son cou alors qu'il l'attrapait par la taille. Ses lèvres charnues se déposèrent dans sa nuque, là où ses cheveux finissaient, à la naissance de son dos. Un délicieux frisson de plaisir lui remonta l'échine et elle se retourna.
« Atrocement mon amour » susurra-t-elle à James Potter avant de l'embrasser tendrement puis d'effacer d'un geste du pouce la trace brillante qu'elle avait laissé sur sa lèvre supérieure.
Ils étaient enfin réunis et égaux. A présent, elle n'était plus cette pauvre préfète au regard fuyant, cette petite chose, mignonne certes mais qu'était-ce d'être mignon quand on était la petite amie de James Potter ? Lui si beau, si grand, si fort. Adulé de tous, respecté, admiré, écouté. Et elle, qui le suivait, cachée derrière son ombre à jamais.
Oh non, ce temps-là était terminé. Elle était Lily Evans, fière, droite, arrogante et ambitieuse. Elle ne se cachait plus à présent, ne se dérobait plus mais au contraire, assumait, un à un, chacun des regards que les autres élèves posaient sur son couple mythique, son couple parfait.
Elle, qui avait su trouver en elle la beauté et la distinction nécessaires pour que personne, jamais plus, ne demande ce qu'un garçon comme James faisait avec une fille – une préfète ! – comme elle. Elle qui désormais adoptait la prestance souhaitée, l'hypocrisie semblant si adulée, le sourire parfait, le corps parfait, l'attitude parfaite.
Il avait de charisme et de charme ce qu'elle avait de sérieux. Elle avait de beauté et de vanité ce qu'il avait de plaisant. Ils étaient ensemble, ne formant qu'une même étoile brillante. Oh qu'elle comprenait à présent sa personnalité, qu'elle savait aujourd'hui les raisons qui l'avaient poussé à se conduire de la sorte.
Mais elle l'adorait, elle l'aimait. Elle avait changé pour être à sa hauteur et maintenant, oui maintenant, tout le monde voyait ce qu'eux seuls savaient par le passé. Ils étaient James et Lily, Potter et Evans, et jamais, personne, ne s'assemblerait mieux qu'eux deux.
Ils déposèrent leurs affaires dans le compartiment des garçons. Sirius, un rictus supérieur aux lèvres, la fixa d'un regard si lubrique qu'il la fit rougir. Loin de se démonter, elle lui sourit avec autant d'assurance en retour et si Remus en fut choqué, il évita de le montrer autant que Peter.
Ils traversèrent ensuite le Poudlard Express, main dans la main, comme les souverains venant saluer leur foule. Arrivés au bout de couloir, sous la lumière vacillante crachotée par un vieux néon et s'accordant si peu avec leur sublime harmonie, James l'attrapa par la taille et la colla contre la paroi glacée. Il la détailla lentement des yeux tandis qu'elle se mordillait les lèvres, redevenue timide et joueuse pour lui seul. Ses mains se posèrent sur sa taille fine puis remontèrent doucement vers son visage.
« Tu vas m'embrasser ou je vais devoir aller chercher un pauvre garçon pour te remplacer ? » lui demanda-t-elle en l'attrapant par les pans de sa chemise pour plaquer leurs lèvres ensemble. Il la pressa contre le mur, elle enroula sa jambe autour de ses hanches et tout cela était tellement délicieux, tellement parfait, qu'un gémissement passa ses lèvres roses en quelques secondes.
Il sourit, si amusé de cette situation, de sa frustration, de la leur. Merlin, cela faisait trois jours qu'ils ne s'étaient plus vu, trois jours qu'il redoutait cette dernière rentrée, l'aurore de leur septième. Trois jours qu'il redoutait sa décision finale, le choix qu'elle ferait. Trois jours qu'il s'interrogeait – et qui d'autre que Lily Evans le ferait réfléchir et douter ainsi ? Septante-deux heures de torture pour elle et pour lui, Septante-deux heures au cours desquelles leur avenir s'était scellé.
Il l'avait vue, sûre, triomphante sur le quai, et son cœur s'était arrêté. Car elle avait sa grosse malle l'accompagnant, car elle était magnifique et qu'elle l'avait choisi, lui. Elle l'avait choisi et cette pensée était tellement grandiose qu'il la saisit brusquement par la taille, la surprenant en mettant fin à leur sensuel échange, et qu'il la fit tourner en l'air autour de lui, en riant, laissant tomber son masque de froideur parfaite pour exprimer toute sa tendresse et son amour pour Lily.
Parce que voilà, elle l'avait choisi.
Se réveiller comme une fleur. S'il y avait bien une expression qui ne s'appliquerait jamais à elle, c'était bien celle-là. Comme une fleur. Bon, une fleur très fainéante alors, très lourde genre tournesol, qui loin de se relever comme si elle venait à peine de se coucher se laissait rouler de son lit sur le sol en espérant que le choc lui donnerait l'adrénaline pour ouvrir les yeux.
Fixant sa moquette abimée par les années à quelques centimètres de son nez, Lily bailla et se demanda si elle trouverait la force d'appuyer sur ses bras pour se redresser ou si elle allait rester allongée à plat ventre sur le sol. C'était une option attrayante. Elle pourrait peut-être rouler jusqu'à la salle de bain ?
Respirant profondément, et avalant par là sûrement quelques fibres textiles et autres bactéries peu ragoutantes, elle se redressa sur ses genoux et remonta péniblement sur son lit. Elle résista vaillamment à l'envie de se recoucher dans ses draps chauds et moelleux, sachant que si elle le faisait, elle devrait à nouveau s'étaler sur le sol dans cinq minutes et cette perspective ne l'enchantait guère.
Elle repensa à son rêve, celui où elle s'était transformée en bimbo vaniteuse le temps d'un été, celui où elle était la nouvelle minette de James Potter, son meilleur ami, et dans lequel le simple fait de poser ses lèvres sur lui la mettait dans une transe de désir difficilement surmontable quand elle ouvrait les yeux le matin. Si au moins, son fantasme avait lieu dans un endroit plus intime, où elle pourrait aller jusqu'au bout de son envie, mais King's Cross ? Autant avouer directement ses penchants à l'exhibition.
Il n'y avait pas que le côté 'tension sexuelle frustrante' qui l'ennuyait. Après tout, à dix-sept ans, elle ne s'en inquiétait pas plus que ça. Le fait que son prodigieux partenaire de rêve soit James, malgré leur amitié, n'était pas foncièrement étrange au vu de leur passé commun. C'était juste… de la mélancolie. Et puis, James était le genre de garçon sur lequel il était très facile de fantasmer.
Non, ce qui la dérangeait vraiment dans ce rêve était ce besoin de se sentir supérieure. Elle n'avait jamais été – ou désiré être – une bombe sexuelle, elle n'avait jamais sous-estimé ses camarades, elle n'avait jamais ressenti le besoin d'être meilleure qu'eux ! Et ce détail était plus perturbant que juste étrange, car elle ne s'était jamais vue comme quelqu'un qui apprécierait d'écraser les autres ou d'attirer leur convoitise …
« LILY ! A TABLE ! »
Grimaçant, Lily jeta un coup d'œil à son réveil matin et avisa qu'il était déjà midi. A côté du petit objet où l'heure clignotait en gros chiffres rouges trônait une lettre que la jeune fille aurait pu réciter par cœur tant elle l'avait lue et relue au cours des jours précédents. Et aujourd'hui était venu le temps de prendre une décision. Elle y avait longuement pensé, pesé le pour et le contre, dressé la liste des avantages et inconvénients mais, au fond d'elle, elle avait toujours su.
Il lui avait fallu trois jours pour en arriver à cette conclusion – septante-deux heures exactement – mais elle était aujourd'hui sûre et certaine que partir faire sa formation à Phénix ne serait que bénéfique pour elle. Après tout, elle savait qu'elle serait, d'une manière ou d'une autre, Médicomage. Depuis ses six ans, elle voulait devenir médecin et ce n'était sûrement pas cette année qu'elle allait changer d'avis.
Oui, Lily Evans, ex-future préfète-en-chef de Gryffondor, ne retournerait pas à Poudlard cette année, elle s'en irait à Phénix, Arizona, USA, pour assurer sa future carrière. Même si pour cela, elle devait quitter tous les autres pour un an.
S'emparant d'une plume qu'elle plongea dans un pot d'encre qui traînait sur son bureau, elle signa de son nom le bas du parchemin, acceptant cette offre inattendue et s'engageant irrévocablement.
Le cœur lourd d'entrevoir les Maraudeurs s'éloigner d'elle sous l'aile du hibou qui venait de s'envoler, elle descendit à la cuisine, trouvant sa mère et sa sœur déjeunant.
« Tu tires une de ces têtes Lily ! » s'exclama Pétunia en voyant sa petite sorcière préférée se servir une crêpe. La jeune femme se sentait de bonne humeur ce matin, en bien meilleure forme qu'elle ne l'avait été ces derniers mois. Et pour cause, aujourd'hui, Aubrey, son petit ami depuis maintenant cinq ans (avec entre-coupures et ruptures diverses et multiples de durées variables) avait enfin accepté de lui faire rencontrer sa famille au grand complet. Il était temps.
« J'ai accepté » articula difficilement la jeune rousse. Le dire tout haut rendait les choses réelles. Elle se sentait horrible, une lâche fuyant au loin juste avant que ses rêves se réalisent. Elle avait passé des années à travailler d'arrache-pied pour être nommée préfète-en-chef, s'était fait une joie de retourner à Poudlard pour une dernière année et elle avait dû travailler si dure pour réinstaurer sa relation privilégiée avec les garçons après les évènements de leur cinquième année… Et voilà qu'elle partait sans même savourer les fruits de son labeur. Sa sœur, remarquant son trouble, posa sa main sur son épaule.
« Mais… ce n'est pas une bonne nouvelle ? » demanda Pétunia, un peu perdue alors que Lily acquiesçait d'un air malheureux.
« Je… je vais devoir tous les quitter. Tous mes amis. Je ne reverrai jamais Poudlard » murmura la jeune fille en ravalant la bouffée d'émotions qui menaçait de l'envahir. Ce n'était pas tant la perspective du départ qui la mettait dans cet état que l'ambiance lourde entourant l'approche de la date anniversaire de la mort de son frère et de son père. En ce moment, sous le toit des Evans, chaque détail était suffisant à provoquer une crise de larmes.
« Allons, allons » Sa mère la prit dans ses bras, geste suffisamment rare pour être souligné, et lui tapota malhabilement le dos « Tu t'en feras de nouveaux. C'est fini ma belle. Tous les souvenirs sont remplaçables »
Lily fronça les sourcils et leva les yeux vers sa mère qui passait son temps à s'enliser dans la nostalgie des moments passés. C'est en voyant ses yeux rouges et gonflés, sa lèvre pendouillant grossièrement vers le sol et le relent de Vodka emprunt dans son haleine qu'elle comprit qu'elle avait, une fois de plus, abuser de la boisson.
« Maman » la gronda-t-elle, essuyant ses yeux. Sa tristesse de tout plaquer pour le bien de son avenir passait au second plan devant les problèmes de sa mère. « Tu as encore bu ! »
« Un peu, Lily, ce n'est- » tenta Dorina, cherchant à éviter le regard perçant d'une fille qui ne pouvait comprendre sa douleur.
« Ce n'est pas en buvant que tes problèmes s'envoleront ! » s'énerva Lily en se relevant
« Mais chérie ce que- »
« Et ça ne fera certainement pas revenir papa et Tim ! »
« Tu ne comprends pas que- »
« Non ! Non je ne comprends pas maman ! Pourquoi tu te détruits comme ça ? Ca fait plus de dix ans que ça dure, maintenant ! »
« Tu ne connais aucune de mes raisons ! »
« Bien sûr que si ! Tu crois quoi, que je n'ai rien ressenti moi ? Tu crois que mon petit frère est mort il y a à peine un an et que je l'ai oublié en dix jours ? Tu crois que je n'ai pas eu envie moi aussi d'oublier à quel point c'est horrible de perdre la moitié de sa famille en une journée ou même à l'atrocité qu'a été leurs morts ? »
« Tu ne peux pas comprendre – ce n'est pas ton fils qui s'est vidé de son sang à tout juste neuf ans ! »
« C'était mon frère aussi ! Maman, je ne te demande pas de prétendre que rien n'est jamais arrivé mais tu dois aller de l'avant, sortir, rencontrer des gens, aller voir un groupe de deuil, je ne sais pas mais tu ne peux pas continuer comme ça ! »
« Ne me parle pas sur ce ton, Lily ! Tu n'as pas- » essaya encore sa mère, tentant de se remettre sur ses pieds
« Mais regarde toi ! Tu ne tiens même pas debout ! »
« STOP ! » s'écria soudain Pétunia, faisant tourner les regards vers elle. « S'il vous plait, ne criez pas, s'il vous plaît » Elle semblait effrayée, sa voix tremblait légèrement et elle était devenue totalement blême. Elle n'avait jamais supporté les cris et les disputes, il semblait qu'entendre sa mère crier encore et encore ramènait de douloureux souvenirs à sa mémoire. Avec des yeux qui s'exorbitèrent encore un peu plus, elle fixa un point derrière sa sœur. Lily se tourna et aperçu une chouette noire qui semblait lui sourire d'une manière affligée.
« Meriddyn, c'est toi » Lily fut soulagée, il était arrivé plus d'une fois qu'elle fasse, involontairement, léviter les objets quand elle s'énervait contre sa mère et le ministère ne manquait jamais de le lui faire remarquer. De plus, sa sœur, qui malgré tous ses efforts restait sceptique au contact de la magie, prenait des jours à oser la regarder à nouveaux dans les yeux sans avoir peur qu'elle lui saute dessus ou la fasse exploser ou la transforme en crapaud… Lily ne savait pas exactement de quoi elle avait peur.
Elle s'approcha de l'animal et défit la lettre qui était à son pied. Comme elle s'y attendait, elle venait de James (puisque c'était son nouveau hibou) qui l'invitait, comme chaque année, à passer une partie des vacances chez lui avec Sirius. Pétunia, qui avait lu par dessus son épaule – les deux sœurs ne se cachaient pratiquement rien – sourit et enserra Lily par les épaules.
« C'est le moment où jamais, Liloune » murmura-t-elle « profite d'eux cet été et puis tu partiras le cœur léger »
« Mais » se défendit Lily « Et toi ? Je n'ai pas envie de ne pas te voir des vacances alors que je vais partir toute l'année prochaine. On ne se verra même pas à Noël ! »
Pétunia secoua la tête d'un air dérisoire. « Tu sais, la tante d'Aubrey a ce joli cottage en France, sur la côte atlantique, et » Elle voulut ajouter quelque chose mais il y eut un grand bruit à côté d'elles, elles accoururent de l'autre côté de la table et trouvèrent Dorina Marchewski endormie, la face contre les carreaux blancs, ronflant légèrement. « Et je pense qu'il va falloir la porter en haut »
Acquiesçant, Lily se pencha, attrapa sa mère par en dessous d'un bras tandis que Pétunia la prenait de l'autre côté. Doucement, elles avancèrent vers le salon puis, comprenant que ce serait hors de leur portée que d'amener le corps à son lit, elles la déposèrent doucement dans le fauteuil et Pétunia jeta une couverture sur Dorina en souriant d'un air blafard.
La rouquine, loin d'adhérer à ce défaitisme chronique des Evans, commença à ouvrir toutes les armoires de la cuisine une à une, puis celles du salon, avant de regarder dans l'établi puis la buanderie. C'est dans l'armoire encastrée dans le mur au dessus de la porte menant à la cave – cet endroit que les trois femmes, étant trop petites pour l'atteindre, n'utilisaient jamais – qu'elle retrouva les bouteilles d'alcool. En fait, ce n'était pas juste une faiblesse que leur mère aurait eu un jour matin de céder à la tentation.
C'était prémédité et réfléchi, elle avait même passé son temps à transvaser la boisson prohibée dans des bouteilles opaques de lait ou dans de veilles bouteilles d'eau.
Pétunia l'observa un instant interdite tandis qu'elle déversait tout le contenu dans l'évier, avant de se saisir elle-même d'une bouteille et de faire la même chose.
« Ca fait longtemps qu'elle a recommencé ? » demanda Lily, les yeux fixés sur le tourbillon que formait l'alcool en étant aspiré par la conduite.
« Peut-être un mois après la mort de Tim »
« Mais…» commença Lily, visiblement choquée. « Pourquoi tu ne m'as rien dit ? »
« Tu étais à Poudlard » Pétunia porta la main à son visage et elle s'aperçut qu'elle pleurait. « Le jour où je me suis retrouvée ici, toute seule avec maman… je veux dire, j'ai commencé la fac l'année passée, je me suis plongée dans le travail dès que j'ai pu – à un tel point que j'ai été première de classe, moi, alors qu'il m'a fallu deux ans pour réussir la terminale. J'avoue que je ne me suis pas occupée de maman comme j'aurais dû, avec sa santé fragile et »
« J'aurais dû être avec vous » la reprit aussitôt Lily, sa gorge se serrant. Elle n'arrivait pas à enlever cette image de sa tête, cette image de son petit frère tellement trognon agonisant après l'accident de voiture… Aucun enfant ne devrait jamais mourir, et certainement pas d'une façon si horrible. « C'est une épreuve qu'on aurait dû traverser en famille, toutes les trois »
« Tu avais tes amis et tes études, et moi aussi »
« Et maman n'avait personne »
Les deux filles se regardèrent un instant, puis elles jetèrent le reste des plastiques à la poubelle, prirent leurs sacs et sortirent. Pétunia tourna à gauche, vers le métro et Londres, où son petit ami Aubrey s'impatientait déjà sûrement, et Lily prit à droite, se rendant en bus à Little Purpose, à la cheminée municipale qui était le chemin le plus court vers le monde sorcier.
C'était un grand bâtiment qui se dressait fièrement au milieu d'un bois clairsemé. Pour y accéder, il fallait emprunter un petit chemin, boueux et noueux, éviter les branches cassées qui barraient la route et rendaient l'accès difficile. Malgré les obstacles, Lily adorait cet endroit… tout y semblait plus calme, serein… beau.
Elle tourna sur la gauche, monta la légère pente, enjamba une fourmilière et un oiseau vint se percher sur son épaule. Les animaux qui habitaient autour de Simplex Caritas étaient pour la plupart apprivoisés. Ils aimaient les contacts humains et allaient jusqu'à les rechercher quand ils jugeaient le ou la sorcière digne de confiance.
Lily sortit un morceau de pain sec de son sac – elle en prenait toujours quand elle venait ici – et le lui tendit. En un coup de bec, le volatile s'en empara, puis frôla la joue de Lily de son aile comme pour la remercier du geste. Elle passa ses doigts souples sur le plumage soyeux et noir de l'animal, se demandant quelle race d'Augusty il était, puis haussa les épaules. Cette semi-forêt serait le cauchemar d'un botaniste – il n'y reconnaîtrait ni végétaux, ni animaux, tous magiques par nature.
Lily jeta un regard autour d'elle, il lui restait une vingtaine de mètres à parcourir avant d'atteindre le grand portail de fer forgé et de se faire accueillir chaleureusement par Catulle et Capsule, deux gros chiens baveux et affectueux à qui Lily soupçonnait vaguement que l'on ait administré du lait de Fléreur quand ils étaient chiots, ce qui expliquerait leur caractère doux malgré leurs canines tranchantes et leur corpulence certaine. Elle repéra un petit banc sur la gauche et s'y assit, respirant l'oxygène et la nature par tous les pores de sa peau.
Il y avait tellement de souvenirs attachés à cet endroit qu'elle s'étonnait de ne pas encore sentir ce sentiment de mélancolie prendre vie en elle, se rappelant la manière dont elle et les garçons étaient montés jusqu'à la cime de cet arbre – là-bas, le cinquième à gauche – et que Peter avait fait une chute de trois mètre de haut.
Juste derrière ce haut fourré, en haut sur la gauche, il y avait une petite clairière exposée plein sud, avec une sorte de marre, plutôt une source naturelle qui jaillissait du sol… Le plus formidable était la température de l'eau… 35°. Même en hiver. Une fois, alors qu'elle passait une partie de ses vacances de noël dans cette maison, ils s'y étaient baignés, et il avait neigé. Elle se souvenait de l'étrangeté de l'eau chaude sous elle et de la neige qui caressait doucement le haut de son corps et sa tête. Elle et Remus avaient été malades pendant près de quinze jours après ça.
Il y avait aussi le jour où Sirius s'était cassé le bras, juste trois mètres en aval, quand il s'était pris pour Tarzan et avait raté sa liane. Elle ne savait pas si le plus drôle avait été de le voir tomber ou de serrer les dents pour ne pas reconnaître s'être fait mal. Il avait refusé d'aller se soigner pour 'ce petit bobo' et après, il avait été interdit de sortie pendant trois jours.
Et puis, ce petit banc en bois. Elle se souvenait avec une étrange netteté s'y être assise avec James en cinquième année, pendant les vacances de Noël. Elle voulait discuter avec lui, mettre au clair ce qu'il se passait entre eux. A la place, il l'avait faite danser sous la neige, dans une ambiance on ne peut plus romantique…
Bien, il ne fallait pas penser à cela. S'il y avait une chose que Lily refusait de garder dans son passé, c'était bien celle-là : avoir en quelques sortes accepté l'amour de James – ou ce qu'il pensait être de l'amour deux ans plus tôt. Avec un été un peu moins tragique que celui qu'elle avait vécu après, il y avait fort à parier qu'aujourd'hui, ils ne serraient plus amis tous les cinq. A cause de cette pseudo-amourette à laquelle elle s'était laissé prendre. S'il y avait bien une chose que Lily refusait, c'était de repenser à cette terrible erreur d'être un jour sortie avec James.
« Lily chérie, qu'est-ce que tu fais là ? » La voix de madame Potter, qui était en train de gravir le sentier, la fit sursauter. Elle se retourna pour apercevoir la femme s'accrocher un peu plus à son balai – le moyen le plus sûr pour rentrer à Simplex Caritas sans se retrouver couvert de boue.
« Bonjour madame Potter » murmura Lily quand celle-ci atterrit à ses côtés « Je voulais voir James »
« Il dort sûrement encore » La femme jeta un coup d'œil à sa montre qui indiquait déjà deux heures de l'après-midi. « Depuis que Sirius habite avec nous, il ne se lève jamais avant le début de l'après-midi. »
« Je… Je vais attendre un peu alors » dit Lily en prenant un des paquets des bras de la mère de James et se mettant en route avec elle vers la maison. « Si ça ne vous dérange pas »
« Tu es toujours la bienvenue » Elle sourit, puis lui donna une tape amicale sur l'épaule. « Alors, j'ai appris que tu as été sélectionnée pour aller à Phénix l'année prochaine ? »
Lily acquiesça, surprise qu'elle soit au courant. « J'avais presque oublié avoir envoyé ma candidature » avoua-t-elle en regardant le cerisier fleuri au fond de l'immense parc. Ce cerisier était toujours fleuri – été comme hiver.
« Ce voyage à l'étranger est une vraie chance » Madame Potter sortit sa baguette et composa un geste compliqué, une sorte de chorégraphie muette du poignet qui désactivait l'alarme anti-intrus. « Pour tout t'avouer, je fais partie du comité de sélection »
« J'ai été pistonné malgré moi alors ! » rit Lily, suivie par son aînée. Bientôt, la maison apparut à leurs yeux, imposante et immense. Toute une partie de la façade gauche avait été repeinte en rouge. C'était étrange, cela ressemblait à une maison de poupée laissée à l'abandon par une petite fille ayant grandi trop vite.
« Il y a beaucoup de grandes chances que tu aurais été prise même si je n'avais pas fait jouer mes relations… »
« Et dire que je vous prenais pour quelqu'un d'honnête »
« C'est vrai » la charria-t-elle « En réalité, tu étais dernière de la liste »
« Vous mentez aussi mal que votre fils ! »
Les deux femmes échangèrent un regard et rirent de bon cœur. Elles passèrent la porte d'entrée et déposèrent leurs sacs de courses dans le vestibule, tandis qu'Eléonore retirait l'imper qu'elle avait passé pour sortir.
« Trêve de plaisanteries Lily, ton dossier était vraiment impressionnant, quasiment parfait » Elle eut une drôle de moue « Je me demande comment cela est possible vu tes… fréquentations » D'un geste du menton, elle montra la direction de la chambre de James.
« Le tout est de ne pas se faire prendre » assura la jeune fille en observant Elfie et Elfus, les deux elfes de maison de Simplex Caritas, prendre les commissions pour les amener à la cuisine où elle et madame Potter les suivirent. « C'est vrai que ça a été une réelle surprise de recevoir cette lettre »
« Pour être vraiment honnête Lily, j'ai été très surprise par ce que j'ai découvert dans ton dossier. Si je ne te connaissais pas personnellement, j'aurais presque tendance à penser que tu es le genre de fille à passer tous tes après-midis à la bibliothèque et à fuir les contacts sociaux. »
Lily éclata de rire « Moi ? Rat de bibliothèque ? » La femme lui jeta un regard en coin, puis éclata elle aussi de rire. « Ce serait comme James détestant le Quidditch ! »
« Ne ris pas ! Quand il avait cinq ans, James avait juré que jamais il ne jouerait à ce "sport dangereux aux règles barbares et sauvages" »
« Oh… et bien, pour sa défense, j'allais beaucoup à la bibliothèque en première »
« Et maintenant, tu passes tes journées dans le dortoir des garçons » Madame Potter leva les yeux au ciel, avant d'ironiser « C'est beau, la jeunesse »
« Elle vous ennuie la jeunesse » lui répondit une voix grave venant du couloir. Sirius apparut, habillé d'un pantalon de nuit lui tombant sur les hanches. Il se frotta la tête, bailla. « 'Lut Lil »
« Merlin Sirius, ne fais-tu jamais le moindre effort pour être présentable ? » s'exclama madame Potter en se couvrant les yeux « Moi qui croyait que mon fils incarnait le manque de pudeur à l'état pur ! »
Le jeune homme haussa les épaules. « Mes affaires sont dans la chambre de James et comme il faut que je passe par la cuisine pour y aller, autant déjeuner en même temps ! »
La mère de James souffla et s'en alla en levant les yeux au ciel. Sirius n'en prit même pas note – il savait qu'au fond, madame Potter l'appréciait beaucoup, même s'il ne se tenait pas toujours correctement. Lily arqua un sourcil, avant de lui lancer par-dessus la table une banane.
« Et tu dors où, comme ça ? »
« Jardin » Il regarda le fruit bizarrement, il ne lui semblait pas comme d'habitude, puis haussa les épaules et se mit à l'éplucher. « Avec les chiens » rajouta-t-il avec un air penaud qui ne prit pas avec Lily.
« Pauvres Catulle et Capsule »
Sirius releva vivement la tête, avant de grimacer et de cracher la banane dans l'évier « C'est quoi ce truc ? »
« C'était pour jeter Sirius, la poubelle est juste derrière toi ! » Puis, elle grimaça aussi, avant d'éclater de rire. « Tu es assez idiot pour manger une banane noire ? »
« Va réveiller le ronfleur, la rousse » coupa-t-il en bougonnant. « Il est encore dans la tente »
« Je ne veux même pas savoir ce qu'il fait dans une tente » Lily secoua la tête et sortit dans le jardin arrière de la maison. D'habitude, la vue s'étendait jusqu'à l'horizon, on distinguait des montagnes et des prés, parfois, quand le ciel était dégagé, des vaches et des moutons. Et tout au loin, sur la droite, la fin de la forêt. Mais aujourd'hui, une grosse tente fuchsia trônait au milieu de la pelouse et, à voir les traces d'herbes mortes, brunes et écrasées à côté, elle avait été déplacée à plusieurs reprises…
Lily ouvrit le battant de la tente, s'apprêtant à rentrer dans quelque chose d'immense, aux dimensions sorcières (qui associé à Potter frôlait la démesure) mais il s'agissait d'une simple tente moldue, matière anti-pluie et anti-vent.
Les trois mètres carrés de la délimités par la toile étaient recouverts d'une multitude de couvertures, chaudes, légères, bariolées ou de l'armée, s'emmêlant dans tous les sens pour former un matelas de fortune. Lily sourit. Cela avait quelque chose de charmant et ce devait être assez confortable !
Et bien sûr, au cœur de la pagaille, James Potter dans toute sa gloire, dormait étalé de tout son long, la bouche grande ouverte. Il ne ronflait pas vraiment, c'était plus doux, plus régulier. Le ronflement est saccadé, bruyant, il semble venir de tellement loin qu'on a mal à la gorge pour le ronfleur… Non, James… ronronnait. Oui, c'était plutôt ça. Un léger bruit rauque de fond accompagnant la respiration.
Lily voulut avancer et s'agenouiller à côté de lui pour le secouer mais elle se prit un pied dans la couverture et tomba en plein sur son torse, récoltant un juron de surprise dans l'oreille.
« Bordel, #*!#=*#*§ ?#^^_ »
« Excuse-moi » Lily se repoussa vivement sur le côté, se mordant pour ne pas rire en voyant la tête de son ami qui venait se faire réveiller par elle lui tombant dessus; elle ne doutait pas qu'il devait exister des méthodes moins douloureuses, peu importe à quel point il était dur de réveiller un Potter.
« Lily ? » James se releva à moitié, les yeux à peine ouverts et de toute façon, dépourvus de leurs lunettes. Et Lily, n'y tenant plus, éclata de rire. Il bailla et s'étira en se laissant retomber en arrière. « Je le savais »
« Tu savais quoi ? Que tes couvertures étaient un piège à jeunes filles en détresse ? »
« Que tu ne pouvais résister à mon corps d'ange endormi » affirma-t-il avec une moue suggestive, ne tenant pas compte de la mine dégoûtée de la préfète.
« Le jour où je te considérerai comme un ange Potter, Sirius aura moins de retenues que moi »
« Rentre les griffes Evans, je viens juste de me faire réveiller en douceur » James et Lily se regardèrent un instant silencieusement dans les yeux, abandonnant leur jeu du 'je t'aime moi non plus' habituel pour une minute. Puis la jeune fille sourit doucement. « Tu vas bien ? »
« Pas mal » Ne pas se sentir coupable de vouloir partir en Amérique quand elle voyait à quel point il se souciait d'elle – ce n'était pas tant la question que sa manière de la regarder, la douceur qui habitait toujours son regard quand il posait les yeux sur elle. C'était si difficile. Elle allait partir. Abandonner James Potter, ses yeux noisette et sa répartie adorablement stupide. Il allait lui manquer énormément. Peut-être plus que tout le reste. Elle soupira et il fronça les sourcils.
« Tu es bien pensive trop tôt le matin » fit-il remarquer en se mettant à genoux pour se rapprocher d'elle qui était toujours couchée sur le dos. « Quelque chose que je peux faire ? »
« Te brosser les dents quand tu me parles avec le visage aussi près du mien ? » Avec un sourire amusé, Lily le repoussa de l'autre côté de la tente et se releva. Elle retourna dans le jardin, un instant aveuglée par la lumière du soleil, et aperçut deux énormes masses, l'une noire, l'autre blanche, se diriger droit sur elle en aboyant, tous crocs dehors…
« Non… » s'entendit-elle murmurer alors que Catulle lui sautait dessus et se mettait à lui lécher le visage. Capsule s'était arrêté au dernier moment en voyant la jeune fille tomber en arrière sous le poids de l'attaque canine. Puis, comme s'il avait jugé la résistance physique de la rousse suffisante, lui sauta également dessus.
C'est avec un juron de douleur étouffé qu'elle le reçut. Un éclat de rire résonna à sa droite. « Chacun son tour, préfète »
Mauvaise idée. Les deux chiens relevèrent la tête en entendant leur maître – dont le visage de décomposa soudain. Il recula et Lily aurait juré qu'ils avaient échangé un regard avant de braquer sur James.
Deux gros dogs comme eux n'avaient jamais su résister à l'appel de la léchouille.
Lily se remit sur ses pieds, suivie par James qui repoussa les chiens avec force, et les adolescents firent leur chemin vers la cuisine à leur tour.
James n'avait pas pu s'empêcher de remarquer qu'elle l'avait accusé de ne pas être un ange, et non pas de ne pas pouvoir résister à son corps…
« T'as reçu ma lettre ? » demanda James en se tartinant de la confiture sur un toast. Il était trois heures trente, les deux jeunes hommes dînaient. Bien sûr, Lily n'aurait jamais osé leur rappeler que c'était le genre de chose qu'on faisait vers midi plutôt…
« Oui, mais je n'ai pas eu le temps de répondre » Elle croqua dans sa pomme. « J'ai eu une petite altercation avec ma mère – elle a recommencé à boire »
James échangea un regard avec Sirius. « Donc tu as laissé ma chouette patienter dans ta chambre sans un regard ? »
« Non, elle veille sur ma mère » répondit la jeune fille ironiquement « James, c'est un oiseau » Puis, voyant qu'il la fixait toujours avec cet air imprenable, elle se tourna vers Sirius « Dis-le lui toi ! »
« Meryddin est rentrée à la volière il y a une heure, je l'ai vue en envoyant une lettre à Klarisse »
Les deux autres arquèrent un sourcil « Et qui est Klarisse ? »
« Mon ex fiancée » Sirius dut rire devant leur air « Vous savez, mariage arrangé, tout ça, je lui ai envoyé une lettre parce que maintenant, je vais rester célibataire jusqu'à la fin de ma vie et sans parents sur le dos »
« Tu es incapable de te passer de filles » remarqua Lily
Sirius sourit « Ma chère Lily, sache que les filles, c'est bien pour passer le temps, mais en dehors de ça… »
Avec une mine offusquée, elle retourna vers James « C'est ce que tu penses aussi ? »
Il avala sa tartine, puis regarda alternativement ses deux amis avant de déclarer : « Ca dépend quelle fille »
Et Sirius se bidonna avant de reposer un œil plus sérieux sur Lily. « Ceci était encore une remarque semi-philosophique de ce vieux Cornedrue pour te faire remarquer à toi, Lily Evans, que si tu sortais avec lui, ce serait bien plus qu'un passe-temps »
Lily perdit aussitôt son air jovial et bon enfant pour poser un regard sévère sur celui-qui-avait-quitté-la-maison « Je crois que tu te trompes mon cher Black, car James sait très bien que je ne sortirai plus jamais avec lui »
« Plus jamais ? » demanda Sirius, visiblement surpris. Lily posa un regard sur James, également étonnée qu'il n'ait rien dit sur le momentanément eux à son meilleur ami et s'aperçut qu'il avait l'air blessé. Elle détourna la tête, sachant qu'il était blessé à chaque fois qu'elle était catégorique sur ce point – mais il devait comprendre, c'était juste la vérité sur ce qu'elle ressentait.
« Pas, je veux dire, nous ne sortirons pas, jamais ensemble. »
La tension dans la pièce monta d'un coup et James finit par se lever en déclarant « C'est vrai, les filles sont des jouets attrayants »
« James Potter ! Que viens-tu d'oser dire ? Ce n'est pas ainsi que je t'ai élevé jeune homme ! » La voix de madame Potter les fit sursauter tous les trois. Eléonore s'avança dans la cuisine, dardant son fils d'un regard sévère. « J'espère pour toi que mes oreilles ont eu une malfonction momentanée !»
« Maman » pesta le jeune homme « C'est juste des filles »
« Idiot » grinça Lily sans écouter le sermon que Madame Potter commença à faire aux deux garçons qui la fixaient d'air absent. Elle sortit dans le jardin et respira calmement, essayant de se vider l'esprit de la potterstory… enfin, aujourd'hui, c'était plutôt un potterdrame.
La chose était simple : rien n'était jamais simple quand il était question de sa relation avec James. Il fallait toujours qu'il sous-entende plus ou moins que Lily lui manquait, dans le sens d'une petite amie. Et il fallait toujours qu'en retour, elle se montre méchante, odieuse avec lui, parce que c'était sa seule défense honnête.
En étant juste avec elle-même, Lily savait qu'elle pourrait parfaitement sortir avec James Potter et aimer cela. Ils étaient amis, il était beau garçon, désirable, appréciable, aimant. Elle s'amusait avec lui comme avec personne et elle se surprenait souvent à rêver de lui, et parfois – bien plus dramatique – à rêver de lui devant lui. Et ce n'était jamais pour vanter les vertus de leur amitié.
Oui, Lily Evans aurait pu désirer James Potter dans tous les sens qu'une jeune fille de 17 ans peut donner à ce terme. Ils auraient pu sortir ensemble et être heureux. Elle en voulait à son esprit et avait son esprit. Car ils étaient amis. Elle en voulait à son corps, car le corps de James Potter était l'incarnation même de la luxure. Teint mat du début d'été, peau tendue et fraîche, muscles fins mais légèrement saillant, puissant, protecteur, chaud, rassurant, appétissant. Oh oui, Lily détestait James pour la troubler autant avec son physique. Car sans cela, elle aurait parfaitement pu se contenter de son amitié.
James Potter et Lily Evans auraient pu être un couple, et un merveilleux couple. S'il n'y avait pas eu le passé. Car Lily Evans avait déjà donné trois fois sa chance à James et à chaque fois, il faisait tout s'écrouler.
Bien sûr, la première fois, ce n'était pas vraiment un essai. C'était juste un baiser. Un foutu et stupide baiser. Et il fallait être stupidement idiot et borné pour penser qu'il s'agissait juste d'un baiser. Jamais Lily n'avait senti son corps en fusion comme cette après-midi, dans le salon surchauffé de Simplex Caritas. Mais c'était le premier baiser de James et il ne savait pas ce que c'était réellement d'embrasser, que ce tout premier baiser serait de loin différent à tout ce qu'il connaîtrait après.
Lily ne lui en avait pas voulu. Elle ne s'était pas montrée très résistante à refuser de l'embrasser à 14 ans et elle le regrettait. Car savoir qu'elle avait été la première à embrasser James était quelque chose la gonflant d'orgueil. Il fallait être sourd pour ne pas entendre toutes les conquêtes du jeune homme vanter ses dons quand il s'agissait d'embrasser. Inéluctablement doué.
Mais après, il avait attrapé la grosse tête et était sorti avec les filles quasiment par camion, sans se soucier de leur nom mais bien du succès qu'elles lui apporteraient. Il utilisait les filles comme il avait utilisé Lily pour obtenir ce foutu premier baiser. Ils s'étaient disputés, elle avait pardonné.
Puis il y avait eu dans le train, juste avant la cinquième. Il l'avait complimentée. Il lui avait dit qu'il allait arrêter de sortir avec n'importe qui. Il lui avait avoué qu'il croyait être en train de tomber amoureux d'elle. Il lui avait dit qu'il voulait construire quelque chose de réel, de solide, de sérieux. Et elle l'avait cru.
Ils s'étaient embrassés pendant presque deux heures. Oh oui, il était vraiment doué. Et oh oui, elle avait adoré et chérissait encore ces deux stupides heures. Ils avaient échangé bien plus que de la salive et des mots. Des promesses. Des sentiments. Et il avait pris de la drogue. Et il avait tout oublié.
Elle s'était promis de ne pas, jamais, lui pardonner de s'être joué d'elle. D'avoir promis d'arrêter de sortir avec n'importe qui et de recommencer ça juste une semaine après sa sortie de l'infirmerie. Mais il avait oublié. Il n'était pas lui-même. Alors, elle aussi avait oublié ses mots. Elle avait effacé ce moment de sa mémoire. Elle avait refusé de sentir la douleur en elle. Il n'était pas dans son état normal, il ne pensait pas ce qu'il disait. C'était la seule raison pour laquelle il avait cru à un moment l'aimer. Rien d'autre. Alors, elle était passée à autre chose. Son amitié était déjà beaucoup.
Et il y avait la fin de la cinquième. Encore une autre chance. Encore un autre espoir. Deux mois. Ils avaient été ensemble secrètement pendant deux mois. Les plus intenses de sa vie. De la passion, de la fusion, des vrais sentiments. Elle y croyait. Vraiment. Elle aurait pu tomber amoureuse de lui définitivement.
Et il l'avait trompée. Elle ne savait pas avec qui, ni combien de fois. Mais il était allé avec une autre fille et elle savait ça seulement parce qu'une camarade de maison les avait surpris, lui et cette autre fille. Et Kat l'avait dit à Lily, sans savoir qu'elle la blessait. Combien de temps cela aurait-il duré encore ? James lui avait officiellement demandé de sortir avec lui le lendemain de cette révélation. Encore couvert de la sueur de cette autre. Jamais elle ne s'était sentie si misérable, sale, abandonnée.
Elle l'avait haï. Détesté. Elle avait abandonné ses amis à cause de lui. Elle l'avait perdu à jamais. Elle le savait. Et jamais – jamais – elle ne pourrait lui pardonner. De s'être joué d'elle. De l'avoir trompée. De lui avoir menti. Alors qu'il savait à quel point la trahison était ce qu'elle détestait le plus chez les autres depuis que son père avait quitté sa mère pour sa maitresse. Il était au courant de tout mais n'avait pourtant pas hésité à l'humilier et l'abuser. Elle le détestait toujours pour ça. Son cœur avait été brisé, piétiné, arraché, moulu et dévoré. Il ne restait rien en elle. Elle était désespérée.
Et son frère était mort. A neuf ans. Tué par un stupide accident de voiture causé par un pont qui s'était écroulé. Son père aussi. Le même jour. Une semaine avant la rentrée. Elle avait été forte, elle avait vu le cercueil taille enfant s'enfoncer dans le sol, elle avait pleuré, en silence comme les autres. Elle avait détruit toute sa chambre. Et elle ne pouvait plus compter sur personne qu'elle-même.
Parce que son meilleur ami l'avait trompé. Parce que son frère et son père étaient morts. Parce que sa mère et sa sœur étaient dévastées elles aussi. Alors, elle était à nouveau passée par-dessus sa promesse. Elle s'était effondrée dans les bras de James. Comment aurait-il pu en être autrement ? Elle avait besoin de lui, vraiment de lui, son ami, pour l'aider à se relever et à se tenir droit. Elle n'avait jamais oublié la douleur ressentie quand elle avait appris sa trahison. Mais la perte et le deuil avaient été plus forts, elle n'aurait jamais survécu sans lui. Alors elle était allée dans ses bras.
Mais cette promesse, celle de ne plus jamais – jamais, jamais – sortir avec James Potter et lui confier plus que son cœur d'amie, elle ne la trahirait pas. Et plus tôt James comprendrait ça, plus tôt il passerait à autre chose, plus tôt il serait heureux. Mais ce ne serait jamais avec elle.
Même si elle aurait pu sortir avec lui et être heureuse de le faire. S'il n'y avait pas eu tout ça.
« Lily ? » La voix d'Eléonore Potter dans son dos la fit sursauter et la sortit de ses pensées. Elle s'aperçut avec horreur qu'elle était au bord des larmes et renifla piteusement alors que la mère de James posait sa main sur son épaule. « Ca va ? Je n'ai pas pu m'empêcher d'entendre le début de votre conversation, et tu sais, si tu as besoin de - »
« Merci madame Potter » La femme lui fit les gros yeux. Elle sourit « Eléonore. Mais ce n'est pas ce que vous croyez. Ce n'est pas – je ne suis pas amoureuse de lui ou quelque chose comme ça »
« C'est toi qui le dis Lily, pas moi » La femme tendit la main et lui caressa tendrement les cheveux. Lily avait beau profondément aimer sa mère, madame Potter était comme une deuxième mère pour elle. Dorina Marchewski Evans avait été tant de fois brisée, par son père, son mari, la mort de son enfant, qu'elle n'était plus en état de se conduire en mère digne de ce nom. Avec Eléonore, Lily pouvait se confier et avoir l'avis d'une autre femme sur des sujets qu'elle ne pouvait aborder chez elle.
« Je vous assure, je veux dire » La jeune fille souffla et reporta son regard sur le cerisier en fleurs. Elle avait toujours adoré cet arbre. « James et moi sommes amis »
« C'est mon fils Lily, il me parle » Les deux femmes s'assirent sur le balancier de la terrasse « de ses sentiments aussi »
« Je connais ses soi-disant sentiments ! » Lily, qui sentait la colère monter en elle, s'exhorta au calme. Eléonore ne lui avait rien fait à part mettre au monde son crétin d'ami. « A chaque fois qu'il les proclame, quelque chose doit forcément se passer ! Ses foutus sentiments qui ne l'empêchent pas de sortir avec une fille par semaine ! Ses foutus sentiments qui ne l'empêchent pas de se moquer de moi et d'être un stupide goujat ! » Elle expira, se frottant le front de la main « Je suis désolée, j'aime profondément votre fils, vous le savez, mais en tant qu'ami. Rien de plus. Et il ne pourra jamais y avoir plus. C'est tout »
« On ne choisit pas toujours de qui on tombe amoureuse »
« Et bien moi, je refuse de laisser ma vie être menée par un quelconque destin ! » Elle se leva, puis adressa un dernier regard à la femme « Je pars à Phénix à la fin de la semaine, je n'ai pas juste accepté l'année mais aussi le stage de préparation. Je vais passer une année entière aux Etats-Unis, et James aura tout le temps d'oublier qu'il m'a connue »
« Tu ne peux pas toujours faire taire ton cœur Lily »
« Je ne suis pas amoureuse de lui » se défendit encore la rousse. « Je ne le suis pas et ne le serai jamais, d'accord ? Je vais juste rentrer à l'intérieur, et lui dire la vérité sur mon départ et m'en aller. »
« D'accord Lily » Eléonore se leva à son tour et commença à revenir dans la maison « Mais n'oublie jamais qu'on ne regrette pas de suivre son cœur quand le moment vient, d'accord ? »
Lily soupira et remit ses cheveux correctement de la main. Elle détestait quand les gens essayaient de la forcer à faire des choses qu'elle ne voulait pas faire. Elle ne tomberait pas – jamais – à nouveau dans les filets de James. Et c'était tout. Fin de l'histoire, fin du drame. Et puis, ce n'était pas comme si James était vraiment amoureux d'elle, non ? S'il l'avait été, il ne l'aurait pas trompée ainsi… Malgré l'année qui s'était écoulée depuis, c'était une chose qu'elle peinait encore à accepter.
Elle n'avait jamais eu l'occasion de mettre les choses à plat, une fais pour toute, l'année précédente. Elle avait même fait tout ce qu'elle avait pu pour éviter cette confrontation et ignorait délibérément tout essai de James de remettre le sujet sur la table. Elle n'en avait pas la force, elle ne l'avait pas à l'époque et doutait de ne toujours pas l'avoir aujourd'hui. Elle ne pouvait pas l'entendre lui expliquer que ce n'était pas grave, que ça ne signifiait rien. Parce que ça avait tout changé en elle et qu'elle n'avait jamais plus été capable de faire confiance à quelqu'un depuis.
Madame Potter repassa sa tête à l'extérieur « Au fait Lily, je sais que tu ne veux pas le savoir mais tu as le droit de revenir sur ta décision de partir jusqu'au 30 août, tu n'es en rien obligée »
« Mais je vais partir » Lily passa son chemin dans la demeure et rejoignit les garçons dans la chambre de James. Elle avait été au village plus tôt dans la journée, téléphoner à la maison pour dire à sa mère qu'elle restait chez les Potter jusqu'à la fin de la semaine puis finir les vacances en Amérique. Elle reviendrait chez elle la dernière semaine d'août, avant de repartir. Définitivement.
Il restait juste à trouver un moyen de le dire à James.
Le soir venu, James, Lily, Sirius et Eléonore étaient attablés ensemble, attendant l'arrivée de William. James avait l'impression que quelque chose s'était passé entre sa mère et Lily, elles s'évitaient du regard et quand l'une croyait que personne ne la voyait, elle observait pensivement l'autre. De toute façon, les femmes, les filles et les gamines, toutes des êtres incompréhensibles.
« Et là, on leur dit que Kennedy est bloqué dans sa voiture et qu'un russe déverse de l'essence autour et qu'on fait une collecte pour l'aider. Et les automobilistes américains, ils se demandent : on donne un litre ou deux ? »
Eléanore rigola de la blague de Sirius, tandis que James se demandait qui était ce Kennedy et que Lily souriait. Au moins, l'ambiance était détendue… Elle avait passé une après-midi super mais n'était juste pas capable de dire la vérité à James. C'était infaisable. James était si joyeux, content, heureux. Et elle savait qu'elle allait lui briser le coeur.
La porte d'entrée s'ouvrit, révélant un homme grand et dont les cheveux étaient aussi incontrôlables que ceux de James, à peine plus clairs. Mr Potter salua tout le monde et s'assit alors qu'Elfus l'Elfe apportait les plats.
Le dîner se passa correctement, William se plaignant de la masse de travail au ministère avec Voldemort qui faisait de plus en plus de morts et de ces, je cite, foutus Aurors qui, en plus d'être soi-disant débordés, ne prennent pas le temps de remplir la paperasse et nous mettent, nous, en retard ! Will faisait partie du circuit de la justice magique, contrôleur principal des Aurors. Ce qui en clair signifiait qu'il traquait ceux d'entre eux qui n'étaient pas en ordre ou commettaient des irrégularités. Mais son travail consistait également à prévoir des examens et des formations de remise à niveau pour ceux-ci, ainsi que des contrôles médicaux et psychologiques. C'était l'arrière garde du ministère.
Bien sûr, médire contre les Aurors sous son toit était risqué, et pour cause : Eléonore était Auror. Elle avait réussi à se libérer deux jours de congé en cette seconde semaine de juillet pour profiter un peu du soleil et refusait bonnement d'entendre son mari critiquer ses collègues. Car justement, vu la masse de missions qu'ils devaient accomplir, c'était impossible de remplir la paperasse !
Sirius plaisantait quand les piques fusaient, se disant que c'était fou que Will ait suivi la formation pour devenir Auror avant de dévier du côté obscure de la force comme le disait sa femme, il y avait de ça un peu plus d'un an, après un grave accident duquel il avait failli ne pas revenir. Mais les époux Potter ne regrettaient jamais leurs choix de carrière car même s'ils étaient presque adversaires juridiques maintenant et que leurs vies étaient perpétuellement en danger, ils s'étaient rencontrés grâce à la formation …
« Dis-moi James, toujours sûr de vouloir devenir Auror ? » demanda son père, en se réservant du poulet « Parce que ça signifie que j'aurai un droit de surveillance total sur toi… »
James grimaça. « Au moins, tu pourras me surveiller une fois dans ta vie autrement que par les lettres des profs ! » plaisanta le jeune homme en faisant référence aux plaintes répétées pour son mauvais comportement à Poudlard. Sa mère leva les yeux au ciel.
« Je ne suis pas sûre, ce serait moins risqué de suivre les traces de ton père que les miennes, non ? » s'inquiéta-t-elle, pour la cent millionième fois depuis qu'il avait avoué son plan de carrière. « Tirer dans les pattes des Aurors pour les empêcher de faire leur travail, ça peut être jouissif, non ? » questionna-t-elle avec un œil appuyé à son mari… qui éclata de rire.
« Et si on parlait d'autre chose ? » s'enquit James « Sirius par ex – ah non, il veut être Auror aussi bah Lily alors ! »
« La seule saine d'esprit, je sais » assura la jeune fille
« Soigner les gens plutôt que les arrêter, c'est noble » fit remarquer Sirius « Sauf quand on t'oblige à soigner les Mangemorts »
« Ca fait partie du job, et tout le monde a droit aux mêmes chances »
« Au fait Lily, félicitations ! » S'exclama monsieur Potter. Elle retourna un regard effrayé vers lui, voulant le prévenir de ne pas dire ça mais ce fut trop tard « J'ai appris que tu avais été acceptée à Phénix pour l'année prochaine… Ca va faire beaucoup un an à l'étranger sans tes amis, non ? »
« William ! » gronda directement sa femme « Comment peux-tu mettre les pieds dans le plat à ce point ? »
Mais ce qui se passait entre les adultes n'avait plus d'importance. James et Sirius fixaient Lily, silencieusement, fâchés qu'elle ne les ait pas prévenus. Et comme il fallait s'y attendre, James sortit de table en lançant rageusement sa serviette dans son assiette.
Lily soupira et se leva à son tour, s'excusant. Sirius secoua la tête en marmonnant sur la sympathie de se sentir aimé. Mais quand la rouquine se retourna vers lui, il sourit légèrement en murmurant « Va le rejoindre, il a plus besoin de toi. Après tout, la fille que j'aime n'est pas sur le point de s'envoler pour les States »
Lily fit son chemin dans la noirceur de cette nuit d'été, retrouvant James assis devant une petite marre de son jardin et jetant des pierres dedans. Ses mâchoires étaient crispées d'énervement et Lily percevait sa pomme d'Adam remonter à un rythme impressionnant dans sa gorge.
« James, je voulais te le dire, vraiment, je » Elle soupira et s'assit par terre, à ses côtés. « Je suis désolée »
« Tu pars ? » demanda-t-il rageusement, sans lever les yeux sur elle « Tu ne rentres pas à Poudlard en Septembre ? Tu… Tu nous abandonnes comme ça »
« C'est une expérience à ne pas manquer » Ne pas pleurer. Elle sentit sa gorge se serrer « C'est… Ils ont le meilleur circuit possible pour devenir Médicomage »
« Ici aussi ! » Il tourna la tête vers elle « Tu ne peux pas partir, ta vie est ici, en Angleterre à Poudlard. Avec nous »
« C'est la chance de ma vie; tu n'as pas le droit de me juger parce que je veux réaliser mes rêves »
« Tes rêves ? Partir à des milliers de kilomètres de nous… de moi ? Nous laisser là, juste- merde Lil, ils font des formations à Sainte Mangouste pendant les vacances – tu pourrais juste - »
« Abandonner Phénix ? »
« Ne pas m'abandonner ! » James fit un effort pour contrôler sa voix et ne pas crier sur elle. Ce n'était pas vraiment indiqué. « Je ne savais même pas que tu avais des rêves pareils ! »
« Il y a beaucoup de choses que tu ne sais pas sur moi ! »
« Pas faute de t'avoir tendu une oreille pourtant ! »
« Une oreille ? Qu'est-ce que j'en avais à faire d'une de tes stupides oreilles ? » D'un geste enragé, elle se remit sur ses pieds, bientôt suivie par lui. Ils se faisaient face à présent, chacun regardant l'autre avec toute la colère et la frustration que les années avaient mises entre eux « Avec toutes tes insinuations, tes commentaires ! Tu es d'un égoïsme exemplaire Potter ! Et non, si tu avais été à l'écoute, tu n'aurais pas- »
« Je n'aurais pas quoi ? Qu'est-ce que tu insinues que j'ai fait ? Il faut toujours –comme si j'avais fait une chose horrible »
« Comme si ? Comme si ! » Elle déglutit péniblement, son corps tendus sous les cris qu'elle poussait et le coup des mots qu'elle se prenait en pleine face « Tu vois ! Tu ne t'es même pas rendu compte de ce que tu me faisais, ça n'avait aucune importance à tes yeux ! »
« Mais de quoi parles-tu ? » Il se passa la main dans les cheveux « De quoi parlons-nous là, nom d'un botruc ? »
« Je ne veux plus avoir cette conversation ! » Elle fit demi-tour « Tu n'es même pas capable de – Je vais partir, je vais juste m'en aller, et tu ne peux rien y faire. Alors soit » sa voix se brisa, mais elle ne se retourna pas, et continua. « Soit je passe les deux jours qui me restent ici, avec toi, soit je rentre chez moi et nous laissons tout se finir ainsi »
« Dis-moi » Il se rapprocha d'elle, parlant d'une voix normale, juste tendue et nouée « As-tu, un seul instant, juste une fois, ressenti quelque chose pour moi Lily ? Ou bien quoi, ça t'amusait de me donner des espoirs et puis de m'abandonner sans une explication, sans un mot, et de revenir en pleurs ? »
La respiration de la jeune fille se bloqua, et avant qu'elle ait compris ce qu'elle faisait, elle se retourna et le gifla. « Ne fais plus jamais ça. Ne doute plus jamais que je t'ai aimé et NE PARLE PAS DE CE QUE TU NE SAIS PAS ! »
La main sur la joue, toujours atterré de sa réaction, il lui envoya un regard noir, cherchant délibérément à la blesser « Alors dis-moi ! Parle-moi ! Je suis là, Lily, je t'écoute »
« Je te pose encore une fois la question : dois-je rester ici et espérer avoir autre chose que des cris tout au long de la journée ou dois-je rentrer chez moi pendant que tu me détestes ? »
Il se mordit la lèvre, visiblement en proie à une fureur sans nom. Ses jointures étaient devenues blanches et ses yeux fous « Qu'est-ce que deux jours vont changer ? » finit-il par demander, d'une voix calme, excessivement calme. « Ce n'est pas en deux jours que ce que moi, j'attends depuis des années se produira, alors juste, rentre chez toi Lily. Oublions-nous, oublions tout »
Les larmes coulant abondamment le long de ses joues, la jeune fille reprit le chemin de la maison. « Il faut toujours que tu rendes tout impossible »
James l'observa rentrer et s'effondrer en pleurs dans les bras de Sirius. Il ferma les yeux et sentit des larmes salées coulées le long de ses joues, alors que le mot qui sortit de ses lèvres se perdait dans l'immensité de la nuit.
« Adieu… »
Yesterday, all my troubles seemed so far away
Now it looks as though they're here to stay
Why she had to go I don't know she wouldn't say
I said something wrong, now I'm long for yesterday
[The Beatles, Yesterday]
