Me revoici avec un three-shot (est-ce que ce mot existe ?), et oui, c'est un Dramione ! J'ai écrit ce texte pour me changer les idées, pendant l'écriture d'une fanfiction (un autre Dramione) plus longue, que j'attends d'avoir finie pour poster.

J'espère que cette courte fanfiction sans prétention saura vous mettre un sourire aux lèvres !

Enjoy !


Drago Malefoy et Hermione Granger n'avaient toujours été unis que dans le conflit, c'était bien connu. Le Serpentard et la Gryffondor étaient opposés en tout point par leurs amis, leurs origines, leurs valeurs et leurs personnalités ; il était logique qu'ils se détestent. Il était aussi normal que la seule interaction qu'ils puissent avoir soit une dispute, cela était même attendu.

Pourtant ce soir-là, si quelqu'un était passé dans le parc de Poudlard, il n'aurait pu s'empêcher de voir l'harmonie qui les entourait pendant qu'une douce brise les enveloppait, formant une bulle de protection autour d'eux. L'obscurité tendait à confondre leurs corps, la tête de Drago reposant sur les genoux de la jeune femme, les doigts de celle-ci se perdant dans les cheveux du jeune homme. Tout était calme, silencieux, idéal ; seuls les bruits de la nature encore en éveil résonnaient.

Drago dormait, et Hermione pensait. Comment en étaient-ils arrivés là ?

Ce matin encore ils s'étaient insultés de tous les noms… Comment une relation aussi litigieuse pouvait-elle évoluer si vite en une entente si intense, en un calme si évident ? Etait-il vraiment possible de trouver ce qui nous a toujours manqué là où on n'aurait jamais pensé chercher ?

Hermione ne put s'empêcher de sourire, amusée par une pensée aussi niaise. Elle qui s'était toujours moquée du romantisme excessif et des histoires à l'eau de rose se sentait maintenant bien bête sous ce ciel étoilé, tandis qu'elle caressait les cheveux de celui qu'elle avait toujours considéré comme son ennemi. Tous les deux formaient un tableau digne des plus belles scènes d'amour, terriblement clichées mais tellement touchantes par leur force et leur réalité.

Mais si cette scène rayonnait plus que tout autre, c'est parce qu'elle était complètement inattendue, étrange, absurde, et pourtant tellement vraie.

Ce matin, il l'avait bousculée. Ils s'étaient énervés, insultés, blessés : mais comment auraient-ils pu imaginer qu'un simple conflit puisse être aussi destructeur que fructueux ?


Une dizaine d'heures plus tôt

Hermione ne pensait qu'à une chose : il fallait qu'elle rejoigne Harry et Ron, et vite ! Ils devaient absolument cacher le livre avant leur sortie à Pré-au-lard. Alors qu'elle avançait d'un pas résolu dans les couloirs du château, croisant plusieurs étudiants qui se préparaient à partir dans le petit village marchand, elle aperçut le regard du Serpentard qu'elle détestait le plus. Celui-ci la toisait avec mépris, comme à son habitude, mais elle n'y fit pas attention, ayant mieux à faire.

Drago ne put qu'être vexé par le manque de réaction de la Gryfondor : pas un regard en l'air par lassitude, pas une rougeur de colère sur ses joues, pas la moindre pique à son attention... Non, elle l'avait tout bonnement et simplement ignoré, et il n'y avait rien de plus humiliant (à part peut-être quand elle l'avait frappé en 3e année… mais c'était une autre histoire). Il ne pouvait pas la laisser faire. Juste avant qu'elle n'arrive à son niveau, il se plaça devant elle pour la forcer à réagir ; mais contrairement à ce qu'il avait prévu, elle était tellement concentrée qu'elle ne s'arrêta pas un seul instant. A la place, elle le laissa lui rentrer dedans sans même y faire gaffe, puis repartit sans ralentir.

« Eh, tu pourrais faire attention où tu vas, je vais être obligé de désinfecter ma cape par ta faute ! » pesta-t-il dans son dos.

Hermione lâcha un soupir. Qu'il était agaçant ! Ne voyait-il pas qu'elle était pressée ?

« C'est toi qui viens de me rentrer dedans, crétin ! » gronda-t-elle en continuant de marcher sans se retourner : elle espérait qu'il n'aurait pas le temps de lui répondre. Mais cela était sans compter la détermination de Drago qui s'empressa de la suivre et de répliquer en haussant la voix, offusqué par ce qu'il venait d'entendre.

« Comment elle m'a appelé la sang de bourbe ? »

Ne pouvait-il pas lâcher l'affaire deux secondes ? Elle poussa un soupir et se retourna finalement, déjà fatiguée par ce qui allait suivre.

« La Sang de bourbe, comme tu dis, est juste à côté de toi, pas besoin de lui parler à la troisième personne. Et je t'ai appelé crétin, mais je peux trouver autre chose si tu veux ! Qu'est-ce que tu préfèrerais entre sale fouine, fils à papa ou troll sans cervelle ? »

« Ne vas pas allumer un feu que tu ne serais pas capable de contenir Granger… »

« Ouh, Malefoy fait dans les métaphores maintenant ! Désolée de casser ton délire, mais tu ne me fais absolument pas peur. »

« Ah oui eh bien… »

Alors que Drago cherchait quelle réplique cinglante lui assurerait qu'elle ne puisse plus se permettre de l'ignorer à l'avenir, il remarqua à quel point la jeune fille s'accrochait au livre qu'elle tenait entre les mains. Ledit livre ne lui rappelait aucun dont il avait eu besoin pour les cours, et l'absence de titre sur la couverture lui parut étonnant…

« C'est quoi ça ? » lui demanda-t-il finalement d'un ton suspicieux, tout en pointant du doigt le livre mystérieux.

« Rien. » s'empressa-t-elle de répondre, en resserrant sa prise sur l'objet. Drago sourit malicieusement.

« Vraiment ? Dans ce cas, ça ne devrait pas te poser de soucis que je le prenne pour voir ce que c'est, j'imagine ? »

Sans même lui laisser le temps de répondre, il s'avança et tira vers lui la partie supérieure du livre qui dépassait des bras d'Hermione. Celle-ci tenta de résister à la force de Drago, en vain. Il réussit à faire glisser le livre de ses bras en quelques instants, puis fit quelques pas en arrière pour inspecter l'objet.

« Eh rends moi ça ! » protesta-t-elle en se rapprochant de lui pour essayer de lui reprendre son livre. Drago s'amusait à le tenir en hauteur avec son bras tendu, et vu qu'il faisait une bonne tête de plus qu'elle, elle se trouvait bien incapable de le récupérer.

« Alors voyons voir… Serait-ce, à tout hasard, un livre interdit ? Ça m'en a tout l'air… »

Il se recula encore pour pouvoir baisser le bras et ainsi inspecter la couverture.

« Malefoy… » bouillonna-t-elle, la main désormais serrée sur sa baguette dans sa poche.

« Alors, qu'avons-nous là ? »

Au moment-même où Drago avait ouvert la première page du livre, Hermione profita de son manque de concentration pour réagir. Elle leva sa baguette et cria : « Accio livre ! ».

Le livre commença immédiatement à s'envoler des mains de Drago, mais ce dernier ne voulut pas se laisser faire et attrapa les pages de la fin du livre pour essayer de le ramener à lui. Cependant, le sort était tel que l'objet ne s'arrêterait pas de bouger tant que Drago ne l'aurait pas lâché, ce qui n'était pas son intention… au lieu de ça, le Serpentard laissa – plus ou moins volontairement – les pages et la couverture de fin qu'il tenait dans sa main se déchirer, tandis que le reste du livre atterrit dans les mains d'une Hermione consternée. Mais qu'est-ce que ce crétin venait de faire ?

Ce fut bien évidemment ce moment que leur cher professeur Rogue choisit pour apparaitre de nulle part à côté d'eux.

« Qu'est-ce qu'il se passe ici ? Vous détruisez du matériel scolaire ? » tonna-t-il de sa voix grave et menaçante. Hermione ne put que baisser les yeux, confuse. Comment était-il possible d'avoir autant de malchance en si peu de temps ? Drago, lui, y vit une belle opportunité.

« Je ne crois pas qu'il s'agisse du matériel scolaire habituel monsieur, je ne l'avais jamais vu auparavant. C'était pour m'assurer qu'il s'agissait d'un livre autorisé par la bibliothèque que je l'ai pris à Granger, et cette dernière a voulu me l'arracher de force par un sort ! Cela cache quelque chose à mon avis… »

« Voyons voir ça… » dit-il en récupérant les feuilles restées entre les mains de Drago.

Alternant son regard entre le livre abimé qui se tenait entre les mains d'Hermione, et les quelques pages qu'il tenait dans ses mains, Rogue eut un rictus.

« Alors comme ça vous vous baladez dans la réserve interdite, miss Granger, et en plus vous vous permettez d'abimer ce que vous y trouvez… Cela fera 50 points en moins à Gryffondor, et votre sortie à Pré-au-lard est annulée, bien évidemment. »

« Mais… mais c'est pas juste ! C'était aussi de sa faute ! »

« Pas de discussion Miss Granger. A moins que vous ne vouliez que je rajoute un mois de détensions avec moi à votre punition ? »

« Non monsieur… » bredouilla-t-elle.

« Très bien, alors rendez-moi ce livre. »

D'un coup de baguette, Rogue répara le livre et le rangea dans une de ses poches avant de s'apprêter à repartir. Mais heureusement pour Hermione, Rogue n'était pas le seul professeur à se balader dans les couloirs ce matin. En effet, un chat noir avait suivi une partie de la scène au bout du couloir… Si McGonagall avait tout d'abord eu l'intention de laisser son collègue se charger de cette histoire, elle ne pouvait décemment pas laisser une de ses étudiantes subir une injustice.

Se retransformant en elle-même, la directrice des Gryffondor s'avança vers le petit groupe avant que Severus ne s'en aille. Elle savait qu'elle ne pouvait pas remettre en question l'autorité d'un de ses collègues, mais elle ne laisserait pas sa meilleure élève prendre tout à la place du jeune Malefoy. Dès qu'Hermione l'aperçut, elle eut un regain d'espoir, tout en appréhendant la réaction que pourrait avoir son professeur de métamorphose en apprenant qu'elle avait volé un livre interdit.

« Alors comme ça tu accuses mon élève d'avoir abimé un livre, Severus ? Pourtant, Miss Granger est sans doute l'élève de Poudlard la plus respectueuse envers les livres… »

« Eh bien il faut croire qu'elle a oublié tous ses principes, ainsi que les règles de Poudlard, stipulant bien l'interdiction de s'introduire dans la réserve interdite. » rétorqua-t-il.

« Certes, il est sûr qu'il faudra qu'on reparle ensemble du respect du règlement, Miss Granger... » commença-t-elle en regardant Hermione avec sévérité. « Mais il faudra également que tu parles avec M. Malefoy ici présent, de l'interdiction d'insulter d'autres élèves, de leur voler leurs affaires, et d'abimer du matériel scolaire, puisqu'il a largement participé à la destruction dudit livre. »

Severus Rogue incendia Drago du regard en entendant ce qu'il avait fait à la jeune fille avant qu'il n'arrive. Son filleul pouvait vraiment se montrer immature par moment… Il ne le défendrait pas face à Minerva. Quelle que soit sa punition, il le mériterait.

« Et que proposez-vous comme contrepartie alors ? »

« Une annulation de sortie à pré-au-lard, et 20 points en moins pour Serpentard. »

Les deux professeurs hochèrent la tête d'un air entendu, Rogue se retourna d'un coup de cape, et McGonagall fit un léger sourire à Hermione avant de se retransformer en chat et de continuer sa ballade dans le château.

Hermione était ravie. Bien sûr, elle avait été prise sur le fait en train de contourner le règlement, mais la résolution de la situation était largement en sa faveur, en dehors des points perdus.

Rater une journée à pré-au-lard ne la dérangeait pas tant que ça, elle pourrait toujours passer la journée à travailler et elle avait eu le temps de lire ce qui l'intéressait dans le livre avant que Rogue ne le récupère (tant pis pour Harry, il devrait juste faire confiance à sa mémoire). Par contre, Malefoy était vraiment embêté par cette interdiction, et vu que tout avait commencé par sa faute, ce n'était qu'un juste retour des choses !

« Sale Sang de bourbe ! »

« Super originale comme insulte Malefoy, je ne m'y attendais pas ! » répliqua-t-elle, un sourire aux lèvres.

« Je te la répèterai en boucle jusqu'à ce que tu comprennes à quel point tu n'as pas ta place ici. Quand je raconterai à mon père ce que tu m'as fait… »

Son sourire disparut. Qu'il se moque de son sang pour lui faire croire qu'elle était soi-disant inférieure à lui, elle s'en moquait maintenant, ayant bien compris que le sang ne jouait en aucun cas sur les qualités d'un sorcier. Mais par contre, quand il était question de se sentir à sa place, Hermione avait toujours été moins à l'aise…

Depuis qu'elle avait reçu sa lettre, elle s'était acharnée à apprendre par cœur chaque livre concernant le monde magique qu'elle avait pu se procurer. Elle avait eu besoin de rattraper tellement de choses par rapport aux enfants né-sorcier qui avaient toujours vécu dans l'univers de la magie ! Elle avait toujours fait de son mieux, mais c'est comme quand on essaye d'apprendre une langue : on aura beau faire de son mieux, il reste toujours certaines choses qui nous échappe lorsqu'on n'est pas natif…

Alors qu'elle commençait à se sentir mal à l'aise, elle vit Malefoy qui lui souriait d'un air victorieux. Il avait dû voir qu'il l'avait blessée et s'en réjouissait ; elle ne se laisserait pas faire.

« Je me fiche de ce que tu peux penser. Je préfère largement être né-moldue que de n'être définie que par mon nom et mon sang. » finit-elle par rétorquer.

« Qu'est-ce que tu racontes ? » grinça-t-il.

« La vérité. Tu sais ce que tu es en fait, Malefoy ? Du rien, du vide, un simple nom. »

Elle vit les yeux du blond s'agrandir sous la colère, mais elle ne s'arrêta pas là. Il n'aurait pas dû la provoquer… Avant qu'il ne puisse répliquer, elle le devança et explicita sa pensée.

« Tu ne t'es forgé aucune idée par toi-même, tu n'as pas de véritables amis, aucune ambition personnelle, tu ne remets jamais en question ce avec quoi on t'a bourré le crâne depuis tout petit ! Tu es un éternel passif, toujours à menacer d'appeler son père quand ça se passe mal, mais jamais capable d'assumer ses erreurs et ses faiblesses. Tu n'as aucune raison d'être fier… Tu es pathétique. » cracha-t-elle avec véhémence.

Pendant tout son discours, Drago sentit son pouls s'accélérer. Comment pouvait-elle se permettre de le provoquer ainsi ? Et pourquoi avait-il tant de mal à trouver une réponse pour la contredire ?... Il ne lui restait qu'une chose à faire, ce qu'il faisait à chaque fois qu'il se sentait en position de faiblesse, à savoir : s'en prendre directement à elle pour ne pas avoir à se défendre de ses attaques.

« Ah parce que tu crois que tu es mieux que moi ? Tu te crois vraiment intelligente ? Tout ça parce que tu es capable de réciter des bouquins par cœur et que ça te permet d'avoir des bonnes notes ? Personnellement, je n'appelle pas ça de l'intelligence, mais avoir une bonne mémoire. C'est sûr que c'est utile, mais le raisonnement aussi c'est important, et je ne t'ai jamais entendu exposer une véritable réflexion pendant un cours, ou n'importe quand d'ailleurs. »

Après avoir déversé son venin, sa gorge lui piquait encore. Pourquoi n'allait-il pas mieux ? Les mots de la jeune fille résonnaient encore et encore dans sa tête : du rien, du vide, un simple nom. Etait-ce vraiment tout ce qu'il était ? C'était vrai qu'il ne contredisait jamais son père, il en avait bien trop peur. Mais ne se remettait-il jamais en question pour autant ?... Il aurait aimé pouvoir dire non, que c'était faux, mais il n'y arrivait pas. Et en voyant le regard de la Gryffondor, il aurait voulu se réjouir. Il voyait bien qu'il l'avait touchée, qu'il avait réussi à lui faire mal. Alors pourquoi cela ne le faisait-il pas se sentir mieux ?

Hermione de son côté avait été touchée au vif. Elle ne savait pas quoi répondre… Serait-il possible qu'il ait raison ? Comme le jeune homme un instant auparavant, elle se sentit incapable de se défendre, et cela la déstabilisa énormément. D'habitude, elle savait répliquer, elle était suffisamment intelligente pour ça. Mais était-ce vraiment de l'intelligence ?...

Pour ne pas lui montrer l'effet que ses mots avaient eu sur elle, elle préféra changer de sujet.

« Ah parce que tu fais attention à ce que je dis maintenant ? » avança-telle d'une voix légèrement tremblante.

« Ne vas pas trop te faire d'idées non plus, ta voix geignarde de miss-je-sais-tout est juste très dure à ignorer. »

Ça faisait mal, terriblement mal. Aussi bien pour la jeune fille que pour le jeune homme. Elle ne s'était jamais sentie aussi dépourvue de sa vie, et lui ne s'était jamais senti aussi lâche. Alors qu'il la vit rougir de colère, il préféra la couper avant qu'elle ne s'exprime. Il fallait qu'il précise une chose qu'elle se devait de savoir ; il ne pouvait pas la laisse croire n'importe quoi, et il ne se sentait pas prêt à l'entendre s'en prendre à lui de nouveau…

« Et puis si je n'ai pas de véritables amis comme tu dis, c'est parfaitement voulu. Les amis sont une faiblesse. » l'informa-t-il alors.

« N'importe quoi… Tu dis ça parce que personne ne voudrait de toi comme ami ! »

« Je pourrais être ami avec n'importe qui si je le voulais... »

« Ah bon ? Ce n'est pourtant pas Harry qui avait refusé ta si généreuse proposition d'amitié en première année ? »

« Espèce de sale sang de… »

Il s'arrêta dans son insulte, perplexe, puis souffla son dernier mot avec une expression indécise : « bourbe. »

Un trouble s'empara de lui ; tout cela était tellement étrange… Jusqu'à aujourd'hui, il n'avait jamais vraiment pris le temps de parler - enfin parler était un bien un grand mot – d'échanger des paroles avec cette fille, qu'il avait toujours dit détester de tout son être… Et pourtant, comme elle avait eu raison tout à l'heure en disant qu'il ne remettait jamais ses idées en question, aussi irrationnelles soient-elles ! Cette insulte qu'il lui assenait depuis trois ans semblait déjà n'avoir plus aucun sens…

Comment avait-elle fait pour appréhender aussi bien tous ses défauts ? Etait-il vraiment si facile à cerner que ça ? Il la vit toujours aussi rouge de colère, mais son regard était confus. Elle ne comprenait pas ce qu'il se passait, et Drago non plus à vrai dire. Ni l'un ni l'autre ne savait quoi dire.

Alors, pris par une soudaine envie face à cette situation qui le dépassait, il se mit à rire nerveusement. Tout ceci était tellement stupide, tellement absurde, tellement… drôle.

Après quelques secondes d'hésitations, elle le rejoignit, et leurs rires tout d'abord nerveux se synchronisèrent en une harmonie parfaite de soulagement et de légèreté. La mélodie ainsi créée avait quelque chose d'à la fois inédit et de familier à leurs oreilles… C'était beau. Quelque chose venait de changer en eux, sans qu'ils puissent expliquer ce que c'était, ils se sentaient libérés.

Leurs masques venaient de tomber : ils n'étaient plus une Gryffondor né-moldue et un sang pur Serpentard, mais juste deux jeunes capables de rire ensemble.

Drago réalisa quelque chose : il n'avait plus envie de la couper ou de changer de sujet. Désormais, il désirait parler avec elle. Mais d'où lui venait cette envie subite ? C'est comme si le fait qu'elle lui ait fait prendre conscience de certains de ses défauts lui donnait envie d'en savoir plus. A quel point le connaissait-elle ? Comment faisait-elle pour lui apprendre des choses sur lui auquel lui-même ne faisait pas attention ? Qu'avait-elle de si spéciale ? Il voulait la connaître, et il voulait qu'elle le connaisse pour autre chose que ses faiblesses. Il avait envie de lui prouver qu'il n'était pas que du vide, qu'il pouvait être mieux que ça.

« Dis le livre… Tu l'avais pris pour quoi ? » lui demanda-t-il donc avec curiosité, une fois leurs rires achevés.

« … Pour aider Harry. »

Elle semblait sur la défensive.

« Ah tiens, c'est marrant ça, pourquoi ça ne m'étonne pas ? » Il lâcha un rire moqueur, mais s'arrêta net en voyant ses sourcils se froncer. Il ne voulait pas la blesser, il ne voulait pas la faire fuir. « Ça t'arrive de faire autre chose que d'aider les gens ? De faire quelque chose pour toi, juste parce que tu en as envie ? »

« Je lis des livres... »

« Tu ne fais pas ça uniquement pour avoir des bonnes notes ? Je parle de choses qui te plaisent vraiment, Granger, et ne va pas me faire croire que lire L'histoire de Poudlard en fait partie… »

« Mais si, j'aime lire ! » s'exclama-t-elle, avant de poursuivre plus calmement, sans trop savoir pourquoi. « Enfin c'est vrai que ce n'est pas pour ça que j'ai commencé à lire des livres sur Poudlard et sur la magie avant la première année, mais ce n'était pas non plus pour avoir des bonnes notes... Enfin dans tous les cas maintenant j'aime vraiment ça. »

Elle se mordit la lèvre pour s'empêcher d'en dire davantage : pourquoi lui avait-elle raconté ça ? Cette scène était tellement absurde ! Depuis quand Drago Malefoy et Hermione Granger rigolaient-ils ensemble ? Depuis quand le jeune homme s'intéressait-t-il à ses goûts ? Depuis quand prenait-il le temps de l'écouter ? Et surtout, depuis quand se sentait-elle à l'aise pour lui parler ?

« Si ce n'était pas pour avoir des bonnes notes, c'était pour quoi ? »

Elle le jaugea du regard. Bizarrement, il lui paraissait sincère et vraiment intéressé, comme si c'était une question qu'il s'était toujours posé. Ses yeux gris métalliques n'étaient plus moqueurs mais avenants, et elle avait l'impression que, pour une fois, il ne la jugerait pas. Elle ne se serait jamais doutée qu'elle ressentirait un jour le besoin de se confier à Drago Malefoy, et pourtant…

« Pour me faire accepter. Ce n'est pas facile d'arriver dans un monde inconnu, où tout le monde est prêt à vous dénigrer pour des origines que l'on ne peut pas contrôler… »

Elle le regardait et attendait sa réaction avec appréhension. Allait-il s'énerver ? Se moquer ?

Il n'en fit rien.

Au contraire, Drago était en plein conflit intérieur. Il s'en voulait et désirait se rattraper mais depuis quand un Malefoy s'en voulait-il de quoi que ce soit ? Il ne saurait dire si cette fille le révélait à lui-même ou le métamorphosait… Ce dont il était sûr, c'est qu'il se sentait désormais incapable de lui mentir.

« Je suis désolé. » finit-il par répondre avec difficulté, comme si ces mots lui brûlaient la gorge et la langue. « Tu as raison, j'ai tendance à ne jamais remettre en question ce que ma famille m'a appris, mais cela ne veut pas non plus dire qu'ils ont tort sur tout… »

Hermione était stupéfaite. Avait-elle rêvé ou venait-il bien de s'excuser et d'admettre son erreur ? Mais qu'est-ce qu'il lui arrivait… Le voir faire un tel effort sur lui-même la toucha beaucoup. Elle voulait lui montrer qu'elle pouvait en faire de même, elle voulait en faire de même.

« Eh bien tu as raison pour moi aussi… Je n'arrête pas de réciter des livres que j'ai appris par cœur, mais cela ne veut pas non plus dire que je suis bête… »

« Je n'en doute pas. » murmura-t-il, avant de lui sourire doucement.

Malefoy lui dirigeant un sourire qui ne soit pas moqueur ? Même dans un rêve elle aurait été incapable d'imaginer ça ! Mais qui était cette personne devant elle ? Et qui était-elle en train de devenir, elle qui avait toujours cherché à être la première de sa classe et qui aujourd'hui reconnaissait qu'elle n'était pas aussi maligne pendant les cours qu'elle aurait bien voulu le faire croire ?... Il se passait quelque chose de spécial, à la fois perturbant et tellement juste…

« Et toi, il t'arrive de faire des choses pour toi ? » lui demanda-t-elle finalement tout en restant sur ses gardes, s'attendant à ce qu'à tout moment il se mette à rire et à lui révéler qu'il se moquait d'elle depuis tout à l'heure.

Sauf qu'il ne rigola pas, au contraire, il resta sérieux et se confia à elle.

« Evidemment… Apprendre à faire ce que je veux fait quasiment partie de mon éducation. Mais s'il fallait que je choisisse une seule chose, ce serait le quidditch. »

« Tu ne fais pas ça juste pour impressionner ton père ? » se moqua-t-elle gentiment.

« Nan, je fais ça juste pour embêter Potter ! » ironisa-t-il en rentrant dans son jeu, avant de répondre plus honnêtement. « Je sais que ça peut paraitre enfantin, mais j'adore jouer au quidditch. Quand je vole, je me sens plus libre que jamais, comme si je pouvais devenir n'importe qui ! Et le quidditch a la qualité de réunir le vol et la compétition, une autre chose que j'apprécie tout particulièrement. »

« Tu aimes la compétition, vraiment ? C'est étonnant ! » rigola-t-elle, sachant très bien qu'il ne vivait que pour ça. « Moi je déteste ça. Pas la compétition, tu t'en doutes, mais voler. J'ai le vertige, alors ce n'est pas en volant que je vais me sentir libre. »

« Quand est-ce que tu te sens libre du coup ? »

« Je ne sais pas… »

Face à son air meurtri, Drago sentit quelque chose se serrer en lui. Cette fille était tellement dans la dévotion, le perfectionnisme et dans le désir de se faire accepter, qu'elle n'avait jamais vraiment été libre… Bien sûr, lui aussi était dans le contrôle, mais il agissait toujours dans son intérêt, alors qu'elle se restreignait uniquement pour les autres. Il fallait remédier à ça. Il voulait la voir sourire et l'entendre rire à nouveau. Mu par un sentiment qu'il ne comprenait pas, il sut quelle était sa mission : il allait l'aider.

« Tu sais quoi ? Comme la journée est encore longue, on pourrait faire quelque chose dont tu as envie ? Pas une chose dont tu as besoin, mais une chose vraiment inutile, qui te plairait ! » lui proposa-t-il plein d'espoir.

De nouveau, il avait un sourire aux lèvres ; il était mignon quand il souriait…

« Visiter la bibliothèque ? » tenta-t-elle avec un grand sourire innocent.

« Sérieusement Granger… » la réprimanda-t-il d'un air contrarié, alors qu'en réalité, il était juste content de voir qu'elle n'avait pas refusé sa proposition.

« Eh bien, je ne sais pas moi, on pourrait marcher dans les jardins ? »

« Tu veux prendre l'air ? Tu ne trouves pas qu'il fait un peu froid ? » s'étonna-t-il. On était quand même en octobre.

« Si peut-être un peu, mais c'est vrai que j'ai lu tellement de chose sur Poudlard que je connais le château quasiment par cœur, alors que les jardins… »

« D'accord, on y va. »

« Mais qui t'a dit que j'avais envie d'y aller avec toi ? » le provoqua-t-elle, les yeux brillants. Elle le testait pour voir s'il était sincère, si tout ceci n'était qu'une grosse blague ou s'il avait vraiment envie de passer du temps avec elle.

Ça aurait dû l'énerver, mais en fait, il adorait ça... Ce jeu lui convenait parfaitement.

« Tu voudrais que je te laisse y aller seule alors que tu viens de me dire que tu ne connaissais pas les jardins ? Non, je suis trop gentleman pour ça, je ne voudrais pas que tu te perdes, tu comprends… »

« Drago Malefoy, gentleman… C'est dingue à quel point ça sonne faux. Mais c'est pas grave, je te suis. Par contre tu n'as pas intérêt à m'emmener n'importe où pour me faire une blague, je te préviens ! »

« Mais qu'est-ce que tu racontes ? Moi ? Avec des intentions aussi malhonnêtes ? C'est mal me connaître… »

Après avoir échangé un sourire complice, rassurés par leur réaction respective, ils allèrent chercher de quoi se couvrir pour pouvoir se diriger ensemble vers les jardins de Poudlard, leur pas s'accordant l'un à l'autre, et leurs paroles s'échangeant avec une même bienveillance inattendue...