Blam !
Le bruit tira House de son sommeil et le fit se dresser sur son fauteuil. La crispation typique d'un bâillement commença à traverser son maxillaire inferieur et lui fit ouvrir tout grand la mâchoire tandis qu'il plissa les yeux en essayant de voir ce qui se passait.
Apparemment quelqu'un venait de laisser tomber sur son bureau « Fondamentaux d'anatomie humaine » un lourd pavé de 3 400 pages et qui avait produit à merveille son effet de réveil matin brutal.
Enfin matin…
« Bande de sadiques » dit House encore à demi endormit à l'intention de son équipe qui le fixait « Vous n'avez pas honte de malmener un infirme ? »
« On a un cas » dit Foreman sibyllin
« Vous savez quoi ? on a qu'à dire que le grand jour ou vous prenez votre indépendance et que moi je vous observe de loin, la larme à l'œil, et avec la fierté d'un père c'est aujourd'hui d'accord ? »
« House… » Répondit le neurologue « C'est une patiente à vous »
Le premier réflexe de House aurait été d'envoyer une boutade bien senti à Foreman. Mais deux raison lui firent renoncer à cette idée : petit un, il était encore suffisamment dans les vap pour qu'aucun bon mot ne lui vienne à l'esprit, et petit deux, Foreman était bien trop malin pour lui dire ça si ce n'était pas sans une bonne raison. Sauf qu'une bonne raison ça voulait dire des ennuis en perspective, et pour House ça voulait dire qu'il était temps pour une bonne rasade de Vicodine.
Cameron lui tendit le dossier qu'il attrapa du bout des doigts. Il en entama la lecture, et lança de temps à autres des petits coups d'œil a l'équipe : il n'aimait pas le regard inquiet qu'ils avaient, et la lecture du dossier le conforta dans cette impression. Dans un geste theâtral au possible, House reposa le dossier sur le bureau et se laissa glisser dans son fauteuil.
« Ecoutez-moi jeunes gens : ce dossier est celui d'une patiente qui à besoin de tout SAUF d'un diagnostic… »
"Elle veut que vous preniez les décisions médicales si elle n'en est pas capable" dit Foreman pragmatique
"Mouiii... et là visiblement vu son score de Glasgow de (il regarde le dossier) Yahoouuu : neuf ! et bien oui il semble clair que quelqu'un va devoir prendre quelques décisions, mais en l'occurrence j'ai une sieste à finir. Vous n'aurez qu'a me réveiller à la sortie du prochain Star Wars ?"
« Ça ne vous fait rien !? » Coupa Cameron dans un mélange de hargne et de déception
« Ça devrait ? » répondit le diagnosticien
Chase et Foreman l'avaient prévenue : House avait un cœur de pierre.
« Je croyais pourtant que vous aviez tissé des liens et que… »
« Cette jeune femme est là parce que quelqu'un lui à donner la raclée de sa vie : os brisés, hématomes, peut être une perforation abdominale et un trauma crânien ! Vous croyez que si je lui tiens la main et que je repense très fort aux bons moments je vais soudainement découvrir qu'elle a une angiopathie congénitale ? »
Un silence glacial emplit le bureau. Cameron fusilla son patron du regard dans l'attente d'une réaction de sa part tandis que ses deux collègues attendaient que l'orage passe. La jeune femme n'obtenant pas le résultat escompté, elle tenta une autre approche, moins frontale.
"House... suivre ce dossier ça sera toujours une bonne excuse pour ne pas faire de consultation et..."
"Vous savez comment je l'ai rencontrée ?" coupa House le regard perdu dans le vide.
"Pardon ?"
"Cette jeune femme dont vous voulez tant que je m'occupe, vous savez comment je l'ai rencontrée ?"
"Je... je ne vois pas où vous voulez en venir et..."
"C'était sans doute la pire journée de consultation que j'ai eut à faire de toute ma vie de médecin. Je suis tombé quasiment à la suite sur 5 ou 6 personnes qui s'imaginaient avoir une MST parce qu'ils n'étaient pas capable de mettre une capote..."
House se leva et fit quelques pas vers la fenêtre en traînant la jambe. Il attrapa sa balle bi colore et la malaxa comme à son habitude. Sans se retourner vers son équipe, il continua son histoire.
"Elle avait rien du tout... juste des chlamydias : un peu d'amoxicilline et c'était plié !"
House attrapa son flacon de Vicodine et avala un comprimé comme si sa prochaine phrase allait le faire souffrir.
"Sauf qu'a ce moment là, elle a fondu en larme et elle à fait une crise de panique... c'est à ce moment là que j'ai compris qu'elle avait été victime d'un viol. Et histoire de rajouter une délicate touche de mélo à tout ça, son agresseur avait eut la gentillesse de lui laisser un petit cadeau à livrer sous 9 mois"
L'équipe connaissait l'histoire, tout du moins les grandes lignes en se basant sur le dossier et ce que le Dr Wilson avait bien voulut leur confier. Alors pourquoi ce déballage de sensiblerie si peu courant chez House ?
"Sans que je sache pourquoi, elle a cristalliser sa souffrance sur moi et n'a voulut parler à personne d'autre... comme un p'tit chiot qui croit que la première chose qu'il voit c'est sa maman !"
House retourna s'asseoir et reprit le dossier en main. Tandis qu'il le lisait de nouveau, il questionna l'équipe.
"On sait dans quelles circonstances c'est arrivé ?"
"Elle est arrivé par les urgences y'a 3/4 d'heure. Elle est partie direct au bloc" répondit Chase "On risque de ne pas pouvoir lui parler avant un moment"
"Je suis sur que nos chers amis de la police vont se faire un plaisir de la questionner à notre place si elle se réveille un jour : une blanche qui se fait cogner sa fait désordre, n'est ce pas Foreman ?"
Eric se demandait si cette pique gratuite est un bon ou un mauvais signe pour la suite.
"On fait quoi alors ?" demanda Chase qui semblait visiblement lassé d'attendre
"Allez chez elle : vous y serez plus utile qu'ici vu votre manque total d'intérêt pour ce dossier !"
Chase bouillonna intérieurement. Comme les autres il était un sujet de moquerie pour House, mais là c'était autre chose que l'habituel jeu sadique auquel le docteur se livrait avec tout le monde. Il laissa exploser sa colère sans aucune retenue.
"Y'a 5min vous n'aviez pas plus d'intérêt que ça pour ce dossier, mais il suffit que Cameron vous fasse les yeux doux et que vous ayez un peu de mélancolie pour que ça devienne votre seul et unique but dans la vie ? Ben vous savez quoi ? MOI je m'en cogne de cette fille : ce qu'il lui est arrivé est bien dommage mais moi je suis médecin, pas policier ! alors si ça vous amuse de savoir si le sol de sa cuisine est maculé de sang ou bien si un voisin peut vous décrire les hurlements qu'elle à poussée, et bien ne vous privez pas, mais moi j'arrête !"
"Et si je vous vire !" menaça House
"Me virer ? Combien de fois les uns les autres ont à été viré puis reprit par vous ? vous détestez le changement et nous sommes les seuls sur qui vous pouvez un tant soit peu compter dans la mesure ou nous sommes tous assez fou pour vous suivre docilement..."
"Vous l'avez dit vous même je n'aime pas le changement, alors si mon docile petit Chase décide de continuer à faire sa crise d'adolescence et bien je ne m'infligerai pas sa présence de chiot qui fait pipi partout dans le bureau : c'est clair ?!"
House n'attendit même pas la réponse de Chase. En fait il s'en moquait. Il se moquait d'a peut prêt tout si ce n'est de cette question qui le taraudait : Pourquoi Eve avait elle tenu à ce qu'il soit celui qui prenne les décisions pour elle ?
La jeune femme avait de la famille, des gens sans doute bien plus proche d'elle que lui et qui aurait été largement plus légitime. Le docteur laissa échapper un soupir : il savait pourquoi. Il voulait se leurrer lui même, mais c'était difficile de ne pas voir la vérité, et plus dur encore de l'accepter.
Il avait son confident dans l'épreuve la plus traumatisante de sa jeune existence, et lui avait confié un de ses secrets les plus sombres. Son esprit digressa un moment : pourquoi cette jeune fille en particulier et pas une autre ? pourquoi pas Cameron ? qu'est ce qui fait qu'a un moment donner dans la vie, vous croisez quelqu'un auprès de qui vous pouvez poser une part de votre fardeau ? Était ce parce qu'ils avaient tous les deux une blessure au cœur qui avait besoin d'être apaisé ? ou bien tout simple ce fichu hasard qui distribue les cartes de l'existence sans plus de raison qu'il ne les reprends ?
House était un pragmatique, et au bout du compte il pensait rationnellement que tout cela n'était que le fruit d'une série d'événement totalement chaotique sur laquelle il n'était pas possible d'avoir le moindre contrôle. Cette pensée le terrifia : elle le ramena a l'une de ses angoisses les plus profondes.
Dans la vie quoi qu'on fasse, aussi habile et préparé soit on, il arrive toujours un moment ou on perd le contrôle et ou le torrent peut nous emporter en un claquement de doigt.
La colère de Chase était retombée. Il émit un soupir et attrapa l'adresse de la patiente dans le dossier, puis se dirigea vers la porte d'un pas lent et incertain.
"Chase" Appela House "Prévenez les urgences que je la prend en charge"
