Forks

Pov Bella

Tranquillement allongée sur le lit de ma chambre, j'attends patiemment que le jour se lève.

Je n'ai pas réussi à fermer l'œil de la nuit, trop stressée par les résultats de mon concours qui doivent arriver, d'un jour à l'autre.

Angela les a déjà reçus et je commence à perdre patience.

Je soupire.

Je m'habille et que descends préparer le petit déjeuner pour mes parents.

Je m'appelle Isabella Swan, mais je préfère Bella, j'ai 21 ans et je viens de passer mon concours de sapeur pompier professionnel, ce qui est loin de ravir mes parents.

Je me souviendrais toujours du jour où j'ai dit, à mon père, quel métier j'ai choisi.

Il a failli faire un arrêt cardiaque. Sa petite fille qui aime tant lire et qui, depuis des lustres, était destinée à une ennuyeuse carrière de bibliothécaire, a décidé subitement de se mesurer aux dangers d'une vie de pompier.

Lui est Shérif, dans une minuscule bourgade où la seule chose intéressante qui s'y passe, c'est la voisine qui hurle quand la musique est trop forte.

Il a bien essayé évidemment de me dissuader, mais je suis du genre têtue. Ma mère, elle, était trop sous le choc pour tenter quoi que ce soit quand je lui ai annoncé au téléphone. Ou peut-être espère-t-elle que j'échoue aux épreuves de sélection draconienne et aux épreuves sportives tuantes.

J'avoue. Ca a été dur. J'ai souvent été à deux doigts de lâcher prise.

Mais nos instructeurs étaient des gens motivants, qui parlaient avec une telle passion, que je la vivais moi aussi.

C'est donc à force de persévérance que j'ai réussi les tests physiques.

"Le mental est plus fort que le corps."

"Si votre tête décide, votre corps est capable."

Je finis juste de préparer le petit déjeuner, quand la sonnerie retentit.

Mon cœur se met à battre à toute vitesse. Je cours jusqu'à la porte, Jake, le chien de ma famille sur les talons.

Le facteur se tient là, tranquillement.

-J'ai un courrier à remettre à Mademoiselle Swan.

-C'est moi.

J'attrape Jacob par le collier le faisant reculer, il n'est pas très copain avec les facteurs.

-Tenez. Je signe la feuille du reçu et ouvre précautionneusement la lettre.

Le facteur n'a pas bougé, et il a un petit sourire en coin.

-Je peux savoir ce que vous attendez ? Demandai-je.

-Et bien. Il paru un instant gêné. Ne soyez pas fâché mais toute la ville a parié, si oui ou non la fille du Shérif va réussir.

Je lui arraché l'envellope des mains, le cœur au bord des lèvres.

Mes larmes brouillent complètement ma vue quand je lis le mot surligné en gras.

« Reçue »

Folle de joie, je saute au cou du pauvre Mike, hurlant de bonheur.

-Mince, je viens de perdre 50 dollars avec mon père. Souffla-t-il embêté, je le fusille du regard et ferme la porte au nez.

Non mais, il se prend pour qui celui-là !

Mon père, alerté par mes cris, est le premier à descendre, me félicite avec une grimace comique.

Puis Sue, sa femme , me prend dans ses bras et me serre tout contre elle.

Les autres documents sont les copies de mes résultats. Je m'impressionne moi-même. Je n'ai pas été si nulle que ça aux épreuves sportives et je m'en suis excellemment bien sortie dans la théorie

La première personne que j'appelle, est Angela. C'est elle qui m'a fait découvrir ce métier. Elle est depuis toujours fascinée par les soldats du feu et m'a au fil des années, contaminée si je puis dire.

Elle hurle en apprenant que moi aussi, j'ai été reçue.

-Rejoins-moi au café, qu'on fête ça ensemble.

Puis j'appelle ma mère et son mari, Phil. Elle est sous le choc, elle pleure, et notre conversation ne dure pas longtemps.

Une petite heure plus tard, je rejoins ma meilleure amie dans le seul café de Forks, qui fait aussi restaurant. Elle m'attend à notre table habituelle, un grand sourire sur ses lèvres.

-Je suis si fière de toi Bella. Je te l'avais dit que tu t'en sortirais comme un chef, je suis impatiente d'être à la semaine prochaine, qu'on reçoive nos affectations et surtout de prendre part à la cérémonie de remise des casques ! Tu penses que tu seras prise où ?

Je lui souris doucement et lève les épaules.

-Je ne sais pas. Peu importe, tant que je peux me rendre utile.

Jessica vient alors à nous, avec son sourire le plus hypocrite.

-Félicitations Bella. C'est vraiment extraordinaire, qui aurait pu croire au lycée que les choses allaient tourner ainsi?

Pas elle en tout cas. Jessica était la star du lycée et moi, complètement transparente et banale.

Je suis de taille moyenne, fine mais avec des formes, des yeux chocolat et de longs cheveux bruns.

Rien de bien extraordinaire. Je n'ai eu que très peu de petits amis et aucun de vraiment sérieux. J'ai d'ailleurs perdu ma virginité à 17 ans, Jessica, Mike et d'autres copains du lycée m'ont forcé à les suivre à Port Angeles avec de fausses cartes d'identité. Nous avons pu boire de l'alcool, beaucoup trop. De l'homme qui m'a pris ma virginité, je ne me souviens pratiquement de rien, sauf d'une magnifique paire d'yeux verts.

Aujourd'hui, que moi, je suis promue à un brillant avenir et à sauver des vies, elle, est enceinte de l'idiot de service qui nous sert de facteur et serveuse dans ce ridicule snack.

-Merci Jessica, nous prendrons comme d'habitude, s'il te plait.

Je lui rends son sourire, alors qu'elle part chercher avec nos commandes.

-L'autre avantage de nos affectations, c'est qu'on ne verra plus cette hypocrite.

-Tu ne sais pas comme j'ai hâte.

Nous trinquons donc toutes les deux, avec nos verres d'eau, à un futur rayonnant.

La semaine qui suit, s'annonce forte en émotion. Nous sommes retournées à l'école, en vue de recevoir nos casques.

Cérémonie solennelle qui marquera notre entrée dans le monde des pompiers.

Respire Bella.

Calme-toi.

Il appelle mon nom et je m'avance. Le commandant me remet mon casque et me félicite.

Je lui rends un pâle sourire et rejoins les rangs.

Ensuite, chacun est reçu dans son bureau et évidemment je passe la dernière.

Calme Bella.

Le commandant arrive et me sourit, il me fait signe de le suivre et de m'asseoir.

Je suis gênée et stressée.

-Isabella, je suis très heureux de vous voir porter cet uniforme. Je vais être franc avec vous, jusqu'au bout, je n'étais pas sûr que vous étiez faite pour être pompier. Vous avez eu beaucoup de difficultés et j'étais persuadé que vous abandonneriez bien avant, je suis heureux que vous m'ayez donné tort. Vous avez montré qu'en situation de crise, vos collègues pouvaient compter sur vous. Dans notre métier, c'est le plus important. Nous avons longtemps débattu de votre affectation et finalement une opportunité s'est offerte à nous. Vous allez incorporer l'unité Nord de Seattle, sous le commandement du capitaine Cullen. Mes félicitations.

Je lui serre la main et sors, collant contre mon cœur mon affectation, je suis heureuse.

La brigade nord de Seattle est très bien réputée et je pourrai, sans problèmes, aller voir mes parents, pendant mes jours de permission.

C'est donc heureuse et comblée que je m'endors ce soir-là.

Seattle

Pov Edward

6h30.

Café.

Noir.

Bien serré.

Deux sucres.

C'est dur quand même.

Nuit blanche, totalement.

Normal.

Quand on est capitaine de la section intervention et secours aux accidents et blessés de la brigade des sapeurs pompiers de la section nord de Seattle, les nuits de garde sont toujours blanches.

J'ai juste eu le temps de monter dans mon appartement privé, au dessus de la caserne, pour prendre une douche, enfiler un uniforme propre et caresser mon chat.

Donald est mon seul compagon. Je suis célibataire. Coureur, mais sans plus. Pas vraiment envie de me caser. Peur, surtout.

J'ai trop vu de familles brisées en quelques secondes par la mort brutale d'un ou plusieurs de ses membres.

Je m'assied à ma place et regarde la porte.

Jasper n'est jamais en retard.

Mais là c'est moi qui suis à l'avance.

Jasper Hale est mon équivalent, dans la section intervention au feu.

Capitaine, lui aussi.

Le voilà.

Nuit blanche pour lui aussi.

On s'est retrouvé, pendant la nuit.

On va en parler.

A notre façon.

Peu de mots, mais les bons.

Après, débriefing avec les hommes.

On se connaît bien.

6 ans, qu'on bosse ensemble, et 10 de plus qu'on se connaît.

De plus c'est mon beau-frère. Il a le courage incroyable d'avoir épousé ma petite soeur Alice.

Parfois, je me dis que c'est plus facile d'aller affronter des flammes de 8 mètres que le petit bou de chou survolté qui nous tient lieu, respectivement, de soeur et épouse.

Mais sans elle, la vie serait moins belle!

Il s'installe en face de moi et je lui tends son mug.

Pour lui c'est café long, une touche de lait et pas de sucre.

Il me sourit.

Pale sourire.

Après ce qu'on a vu cette nuit, difficile de faire autrement.

Il me donne les chiffres.

Il commence toujours par ça.

Se raccrocher à des faits, c'est important :

« La brigade a été contactée à 2h03 par un appel non identifié encore, nous

signalant un départ de feu dans l'immeuble situé au n° 5 de Jefferson avenue.

L'équipe n° 8 est arrivée sur les lieux à 2h11 et a immédiatement appelée du

renfort. Les équipes 5 et 3 les ont rejoint.

L'immeuble a brûlé dans son intégralité. 19 civils évacués par nos soins, 3

chiens et 6 chats. »

Je prends le relais, parce que ça devient trop dur.

« Appelé en renfort, j'ai envoyé 5 VSAB* sur les lieux. 14 civils ont été pris en

charge. Un est décédé dans le VSAB, 3 ont été déclarés morts aux urgences. Deux

sont actuellement en soins intensifs, service des grands brûlés »

« C'était une sale nuit »

« 15 personnes ont été sauvées Jazz… »

« Oui. Peut-être bientôt plus que 8 »

Nous finissons nos cafés.

Débriefing.

Nos hommes sont silencieux.

Comme toujours après une intervention ou des vies humaines n'ont pu être sauvées.

Je regarde Laurent.

Il fixe le mur. C'est lui qui a sorti la vieille dame déclarée morte dans l'ambulance.

C'est un cadavre q'il a porté sur son épaule, le long de l'échelle, et je sais à quel point cette échelle peut paraître immense dans ces moments là.

On les laisse parler.

Puis on leur donne les consignes.

Les gars les plus touchés moralement vont travailler 48h00 d'affilés.

Ils le savent.

Ils le veulent.

C'est comme après une chute de cheval.

Il faut se remettre en selle de suite.

Sinon on ne recommence jamais.

Après le débriefing on retourne en salle de commandement.

Paperasse.

Je hais la paperasse.

Mais c'est aussi ça notre boulot.

J'ouvre une enveloppe.

Ah, quand même, on nous envoie une recrue pour pallier le poste vide depuis prêt de 3 mois.

Je souris devant la bonne nouvelle.

Mon sourire se fige en lisant le CV de la recrue.

Une fille !

Ils nous envoient une fille !

Il n'y en a pas dans la caserne et là ils nous collent une fille !

La colère me noue la gorge.

Non mais c'est pas vrai !

J'ai 31 ans et depuis 6 ans que je dirige cette caserne, je n'ai jamais bossé avec des femmes !

C'est un métier dangereux bon sang !

Isabella Swan.

Non mais rien que son nom j'imagine une petite chose fragile.

Je souffle.

Elle arrive quand ?

Dans une heure.

Très bien.

Je vais le recevoir et lui présenter le travail sous un angle tellement noir qu'elle partira en pleurant.

Je regarde Jasper et lui tend le CV.

Il ricane.

Je me lève et me rend dans mon bureau.

Cette petite là ne fera pas long feu ici.


VSAB :

Véhicule de secours et d'assistance aux victimes