Fandom: Sherlock Holmes
Titre: Rachel
Pairing: Y'en a pas. A moins que vous n'en voyiez un entre Rachel et Watson. Mais dans ma tête y'en a pas
Rating: K+ Voire T. Je préfère ne pas prendre de risque, avec tout ce que les maladies mentales peuvent apporter d'inquiétant.
J'ai placé l'action en 1888, ce qui ne colle pas avec la chronologie des livres de Sir Arthur Conan Doyle, mais qui m'arrange à un point que vous ne pouvez pas imaginer en ce qui concerne les avancées de la médecine psychiatrique
Chapitre 1
Il nous est arrivé, à mon ami Sherlock holmes et à moi même, il y a quelques années de cela, en 1988, pour être précis, une histoire peu ordinaire. Bien que je sois désormais habitué aux histoires peu ordinaires, celle-ci m'amena à plusieurs reprises à m'interroger sur l'existence des Démons. Toutes les personnes qui avaient pu connaitre Rachel, de loin ou de près, se complaisaient à affirmer qu'elle était folle. Toutes, excepté Holmes. Il fut alors difficile pour moi de défaire le trouble qui s'érigea en moi. J'avais toujours eu confiance en mon ami. Mais il me revenait de faire un choix: suivre la raison du nombre ou celle de la sagesse que représente Holmes à mes yeux. A ma grande surprise, ce fut Rachel elle même qui m'apporta les réponses que je réclamais. Mais n'allons point trop vite, et laissez moi conter cette histoire depuis son commencement.
Je regardais obstinément le paysage qui défilait de l'autre coté de la fenêtre du fiacre. J'essayais de retracer notre route pour enfin deviner où nous nous rendions. En vain. Je n'avais décidément pas les facultés de déduction de mon ami Holmes. Celui-ci semblait dormir, assis sur la banquette face à moi. Je savais parfaitement qu'il ne dormait pas. En vérité, il m'attendait. Il savait à quoi je pensais et un léger sourire sur ses lèvres trahissait son contentement. Lassé, je finis par soupirer:
- Bien, j'abandonne. Ne pourriez vous point, Holmes, me dire enfin où nous nous rendons et pour quelle raison?
Le sourire de mon ami s'agrandit et il consentit enfin à ouvrir les yeux. Il se redressa et me demanda, regardant lui aussi par la fenêtre:
- Qu'avez vous déduit, pour le moment?
- Nous avons passé Gillingham et nous continuons vers l'Est. Je ne vois rien d'autre que le bord de mer, dans cette direction.
- C'est Juste. Nous nous rendons sur le bord de mer.
Je grimaçai:
- Sans doute pas pour y passer des vacances.
- Non. Pour un enquête, vous vous doutez bien. Un homme a été retrouvé sauvagement assassiné dans le comté de Kent. L'ami de celui-ci m'a contacté dans l'espoir que nous retrouvions l'auteur de ce meurtre.
- Et la police, dans cette histoire?
- Ils ont abandonné l'enquête.
- Vous pensez pouvoir réussir là où la police a échoué?
Je regrettai ma question à l'instant même où un sourire triomphant se glissa sur ses lèvres:
- Je l'ai toujours fait, jusqu'à ce jour...
- Qu'est-ce qui a posé problème, dans notre affaire, pour que la police s'en détourne?
- Un témoin. Une jeune fille a vu le meurtre dans sa totalité. Et elle a également réussi à identifier le tueur.
Je me redressai, fronçant les sourcils:
- Un témoin n'est-il pas censé faciliter l'enquête...?
- C'est le cas. Sauf que la demoiselle en question clame haut et fort que c'est un Démon qui a assassiné James Murray.
- Ceci est fâcheux...
- Je n'ai pas pu dire mieux que vous, mon cher Watson... C'est pourquoi j'ai préféré me déplacer jusqu'à la demeure de Sir David, afin de pouvoir rencontrer la jeune femme témoin du meurtre et découvrir les lieux par moi même.
Le fiacre s'engagea dans une allée menant à un riche manoir. Le terrain se terminait par d'abruptes falaises. Holmes remarqua avec un sourire moqueur:
- Voila un endroit bien dangereux pour qui veut élever des enfants... N'est-ce pas, Watson...?
Je ne pris pas la peine de tourner le regard vers lui:
- Ne viendriez vous pas de faire un sous entendu relatif à ma vie privée, Holmes...?
Il fit semblant de réfléchir puis me répondit, un sourire dans la voix:
- Je ne vois pas comment j'aurais pu oser insinuer quoi que ce soit concernant votre vie de couple. Vous savez parfaitement que ce n'est pas dans mes habitudes...
- Je me permet d'être en désaccord avec vous, sur ce point.
La voiture s'arrêta devant la porte d'entrée du manoir. Un homme grisonnant, propre sur lui, nous ouvrit la porte presque aussitôt.
- Bienvenue, Mr. Holmes! Je suis sir David, l'homme qui vous a contacté. Et le propriétaire des lieux.
Holmes descendit du fiacre et salua Sir David d'un signe de tête, ignorant la main que l'homme lui tendait. Mon ami semblant décidé à ne pas le faire, je pris l'initiative de me présenter et lui serrai la main:
- Enchanté. Je suis le Dr Watson, un ami de Mr Holmes. Je l'ai aidé dans nombre de ses enquêtes.
Sir David me regarda, à la fois surpris et soulagé:
- Un médecin? Puis-je vous demander quelle est votre spécialité?
- Médecine générale. J'ai un cabinet à Londres.
- Oh... N'auriez vous pas, par hasard, des connaissances dans le domaine des... Comment dire...? ... Des fous?
- Et bien, les malades mentaux sont un sujet particulièrement complexe... Mais j'ai entendu parler des travaux de deux médecins (1) concernant l'hystérie et qui se trouvent être forts intéressants...
- Cela suffira pour moi... Vous devriez voir Rachel.
Holmes sembla revenir parmi nous et stoppa sa contemplation de l'immense jardin:
- Rachel? Votre femme?
- Non. Ma fille. Enfin... Presque. Ma femme et moi avons trouvé Rachel à notre porte il y a vingt cinq ans de cela. Ce n'était qu'un nourrisson dans un couffin. Il y avait avec elle une lettre.
- Que disait cette lettre?
- "Sauvez moi"... A cette époque, nous essayions en vain d'avoir un enfant. L'arrivée de cette enfant fut saluée par la providence. Nous n'avons cessé de remercier Dieu depuis ce jour.
Il nous ouvrit la porte de sa demeure et termina:
- C'est d'ailleurs Rachel qui a été témoin du meurtre horrible de mon cher ami.
Nous pénétrâmes dans un salon richement décoré. Une femme d'une quarantaine d'année, installée dans un fauteuil, tentait de tromper son impatience en brodant. Elle leva la tête et son expression changea du tout au tout pour devenir à son tour soulagée. Elle posa son ouvrage, et se leva, lissant le devant de sa robe avec le plat de ses mains, signe d'une grande nervosité.
- Mr Holmes, enfin! Nous vous attendions avec tant d'impatience...
Mais mon ami était déjà plongé dans son travail, examinant chaque recoin de la pièce principale. Je me sentis obligé de rassurer cette femme à sa place:
- Veuillez excuser mon ami, Madame, mais rien n'est plus important pour lui qu'un mystère à résoudre. Je me présente, Dr John Watson.
Je vis dans ses yeux un reflet d'espoir mais il disparut bien vite, comme emporté par une idée plus sombre encore:
- Mon Dieu, notre ami... Mr Murray... Un drame terrible...
- Nous trouverons le responsable, Madame. Je peux vous en assurer.
Elle me sourit faiblement. Holmes, qui avait inspecté un des fauteuils, se releva d'un bond et demanda:
- Combien de personnes résident dans ce manoir?
- Nous ne sommes pas si nombreux, répondit Sir David. Ma femme et moi même; Hannah, notre fille de sang, âgée de dix neuf ans; Rachel, dont je vous ai parlé dehors; Miss Kraft, notre cuisinière; Mrs Leclay, la gouvernante de nos deux filles et Mr Splenton, le jardinier.
Holmes hocha la tête, absorbé par ses réflexions:
- Je souhaiterais, dans un avenir proche, m'entretenir avec chacun d'eux. Vous avez insinué le fait que Rachel avait perdu la raison... Comment cela s'est-il produit?
- Au sortir de ses vingt ans, le comportement de Rachel s'est considérablement dégradé. Elle avait toujours été une enfant charmante, obéissante, même si nous avons rencontré quelques difficultés lors de son adolescence, ce qui est, je pense du ressort de tous les parents du monde.
Holmes sourit et ajouta:
- N'est-ce pas, Watson...?
- Nous parlons de cette jeune Rachel, Holmes.
- Je ne vois pas de quoi d'autre nous pourrions parler... Continuez, Sir David.
- Il y a un peu moins de cinq ans de cela, Rachel est devenue extrêmement violente. Et pas uniquement envers nous, ou envers notre personnel. Elle a commencer à s'entailler les poignets à cette époque. De plus, elle semblait avoir beaucoup d'énergie. Elle ne dormait presque plus, mais tenait toute la journée dans un état d'excitation incroyable. Nous l'avons présentée à trois médecins différents. Aucun n'a pu nous dire de quoi souffrait notre fille... Puis, soudain, elle a cessé toute activité, c'est enfermée dans sa chambre et n'a plus parlé à personne. Elle ne mangeait plus rien, dormait beaucoup, pleurait sans cesse... Après quelques mois, c'était reparti... Et ainsi de suite...
Mrs David retint un sanglot. Son mari la prit dans ses bras, la consolant de son mieux. Holmes en profita pour se rapprocher de moi et souffler à mon oreille:
- Qu'en pensez vous?
- Je suis ne suis pas spécialiste... Mais cette jeune femme semble souffrir d'un trouble bipolaire, dit manico-melancolicus (2). Mais quelque chose m'ennuie... Je devrais m'entretenir avec la malade.
- Il suffisait de le demander, mon cher ami...
Holmes s'éloigna de moi et demanda:
- Sir David, serait-il possible de rencontrer Rachel?
- Oui, soupira Mrs David... Veuillez me suivre.
Holmes me fit signe de l'accompagner. Il était évident que j'étais, aux yeux de tous, par mon statut de médecin, le plus habilité à discuter avec la jeune fille. Mrs David nous guida dans les couloirs du manoir, avant de stopper devant une porte. Elle frappa puis, sans attendre de réponse, entra dans la chambre. Nous entrâmes à notre tour et, par réflexe car je savais que Holmes me demanderait mon avis, je me mit à détailler Rachel de la tête aux pieds. Elle regardait par la fenêtre, nous tournant le dos. Elle portait une robe simple de couleur pourpre. Les manches, courtes, lui tombaient sous les épaules montrant que sa robe avait appartenu à une femme plus corpulente qu'elle. Mrs David, sans doute. Ses pieds étaient nus et les égratignures qui les marquaient m'apprirent sans difficultés qu'elle ne portait que rarement de chaussures, même lorsqu'elle sortait. De fines cicatrices, horizontales et verticales, couraient sur ses poignets. Mrs David s'approcha d'elle, posant sa main sur l'épaule de Rachel:
- Rachel... Regardez, ma chérie, vous avez de la visite...
Elle se retourna et dévisagea Holmes.
- Des hommes de la ville.
Sa voix me donna un frissons que je réussis tant bien que mal à réprimer. Son ton avait été frais et innocent, jurant avec son regard sombre apeuré, reflétant sa souffrance.
- Oui, mon enfant... De Londres...
Rachel inclina la tête sur la droite, me rappelant Gladstone, quand il était intrigué. Avec le recul, j'ai conscience que d'avoir comparé Rachel à notre chien fut une insulte à son égard mais, à cette époque, Rachel n'était pas encore celle que nous connaissons désormais, et ce fut la première impression que j'eus d'elle. Holmes sourit faiblement et demanda:
- Pourriez vous nous laisser seuls avec elle? Je pense qu'elle nous dira d'avantage de choses si vous n'êtes pas là.
Mrs David sembla hésiter mais finit par hocher la tête et quitta la pièce. J'aidai la jeune femme à s'asseoir sur le lit et rapprocha une chaise afin de m'installer à sa hauteur.
- Bonjour, Rachel...
Je m'étais efforcé de prendre un ton aussi doux et compréhensif que possible. La brusquer revenait à l'enfermer dans une prison de silence. Elle me regardait et je devinai qu'elle m'analysait.
- Bonjour...
- Tu sais qui nous sommes...?
Je ne m'étais jamais autorisé à parler de cette façon à un patient, et je ne me le suis plus jamais autorisé par la suite. Je ne sais pourquoi j'avais utilisé le tutoiement pour m'adresser à Rachel Peut être un message de mon subconscient. Toujours est-il qu'elle ne broncha pas quant à cette familiarité et fit non de la tête.
- Mon nom est John Watson. Et mon ami, c'est Sherlock Holmes.
Rachel jeta un regard à Holmes, qui se tenait poliment à l'écart de nous, puis reporta son attention sur moi.
- Vous êtes un médecin...
Il n'y avait pas eu l'ombre d'une question dans sa voix et je ne pus dissimuler la surprise qui dut traverser mon regard, car elle haussa les épaules:
- Père m'envoie beaucoup de médecins... Pourtant je ne suis pas malade. Je me sens bien. Vraiment.
Je lui prit les mains et les tourna, paumes vers le ciel, révélant ses cicatrices:
- Vous voyez ces marques? Ces plaies, que vous vous êtes infligées, sont la preuve que vous êtes malade.
Elle fixa ses cicatrices et dit, de sa voix étonnamment enfantine:
- Ça? Ce n'est pas moi qui ai fait ça. C'est Helen.
- Helen? Qui est Helen?
Elle releva les yeux sur moi, semblant regretter ses mots, puis contourna habilement ma question:
- Elle est un peu méchante, parfois... Mais elle n'a pas eu une vie facile. Elle vient me voir, la nuit, et nous discutons pendant des heures entières de tout et de rien.
- Vous voyez Helen?
- Non. Elle se cache. Mais je l'entends si clairement que c'est comme si elle se trouvait à l'intérieur même de ma tête.
Je lui sourit et jeta un regard à mon ami, tentant de lui transmettre mes pensées sans un mot. Cette jeune femme était sans aucun doute malade. Mais quelque chose n'était pas normal. Mais, les sourcils froncé, Holmes était plongé dans ses pensées. Il s'approcha de nous et s'accroupit à côté de mon fauteuil. Rachel le fixa avec ses prunelles d'un bleu identique à celui du ciel lorsque le soleil disparait. Holmes effleura ses cicatrices du bouts des doigts et souffla:
- C'est donc Helen qui vous a fait ça?
- Oui.
- Elle a essayé de vous tuer?
Rachel hocha la tête.
- Vous a-t-elle dit pourquoi?
- Elle m'a dit que le Fantôme tuerait tous ceux qui sont à l'origine de son malheur. D'abord Frederick Murray, puis James Murray... Et Il terminerait par nous.
- Vous et Helen.
- Oui. Helen a dit que nous étions le dernier obstacle à sa vengeance totale. Alors, quand Frederick est mort, elle a essayé de me tuer. Parce que toutes les morts sont plus agréables que celle donnée par le Fantôme.
- Qui est le Fantôme?
- Je ne sais pas. Helen le sait. Mais elle a refusé de me l'avouer.
- C'est ce Fantôme que vous avez vu tuer James Murray.
- Oui. Mais il faisait nuit, je n'ai pas vu son visage. C'est Helen qui m'a dit qu'il s'agissait du Fantôme.
- Que s'est-il passé cette nuit là?
Je me sentis dans l'obligation d'intervenir:
- Pas ce soir, Holmes...
Il avait envie de me demander pourquoi mais mon regard suffit à le faire patienter: je ne dirais rien devant Rachel. Celle-ci se mordit la lèvre inférieure:
- Vous me croyez folle, n'est-ce pas...
Holmes resta silencieux quelques secondes puis sourit:
- Pas le moins du monde.
Le regard de la jeune fille passa plusieurs fois de Holmes à moi. Elle fronça les sourcils:
- Vraiment?
Sans lui répondre, il se leva et dit:
- Je pense qu'il est préférable d'écourter notre visite... Vous me semblez fatiguée...
- Oui, en effet...
- Nous nous reparlerons dans quelques jours...
Elle hocha la tête. Holmes me tapota l'épaule, signe que nous devions quitter la chambre. Nous nous retrouvâmes dans le couloir, vide. Mrs David était sans doute retournée au salon. Holmes s'adossa au mur:
- Qu'en pensez vous, mon ami? S'agit-il de votre manico quelque chose...?
- J'en doute... Elle en présente tous les symptômes. Il y en a en trop, même... La schizophrénie et les hallucinations ne font habituellement pas partie de cette maladie.
- Serait-il possible qu'elle soit victime de deux maladies?
- Je ne suis pas spécialiste en la matière, mais je ne pense pas qu'une telle chose puisse arriver (3)
- Rachel semble être une femme pleine de contrariété... Elle est malade sans l'être, témoin d'un meurtre sans être capable de désigner le coupable... D'ailleurs, pourquoi m'avoir empêcher d'aborder ce sujet?
- Rachel est instable. Elle peut à tout moment se retourner contre nous. Il vaut mieux attendre qu'elle ait acquis une plus grande confiance en nous, de façon à ce que ce retournement ait moins de chance d'arriver.
- Cela peut prendre beaucoup de temps...
- Ou très peu. Les malades mentaux sont imprévisibles.
- Bien... Retournons au salons pour retrouver nos hôtes. Si nous devons rester ici un moment, autant nous accommoder des lieux et des personnes qui y vivent.
(1) Charcot et Freud... Mes deux amis ^^
(2) D'après Théophile Bonet en 1686 et Baillarger en 1854
(3) En fait, c'est tout à fait possible. Mais ça m'arrange beaucoup. Et puis, Watson n'est pas censé tout savoir, en particulier sur la médecine psy qui, au 19ème, en est encore à ses (laborieux) débuts.
Impressions...?
