Cartographies
Chapitre 1
~ Le Dernier Jour d'un Condamné ~
Ma mère me regardait préparer mes affaires. Elle était adossée à ma porte bleue roi. Les bras croisés comme à son habitude, montraient nettement sa contrariété.
-Tu sais.. Ça me déplaît que tu partes si longtemps à l'étranger...
Elle s'assit sur mon lit défait, encombré par des dizaines et des dizaines de vêtements vaguement pliés. Elle était arrivée ce matin, avait débarquée dans ma cuisine tel un courant d'air. Elle n'avait que brièvement abordé le sujet de mon départ. Mon père m'avait prévenu qu'elle n'avait pas criée joie à mon projet.
-Maman... Tu sait très bien que ça va aller. J'y suis déjà allé, et combien de temps y étais-je resté ? Rappelle-toi .Et puis tu te souviens quand je suis parti en Syrie ? Tu avait tellement appréhendé mon départ que t'en étais tombée malade. Je pars aux Etats-Unis, maman ! Ça ne risque rien là-bas !
Je me redressais et pris ma mère dans mes bras. Son odeur emplissait mes narines, et je resserrais mon étreinte. Je savais ce qu'elle ressentait, avec sa voix tremblotante. Mais c'était pour moi une étape importante dans mon cursus. Il fallait que je fasse ce duplex de longue durée. J'étais obligé. Et j'étais confiant, c'était l'essentiel.
-Tu m'appelle hein ? Tu me le promets ?
-Oui dès que j'y serais.
-Je suis si fière de toi mon fils.
Elle tourna les talons et repartie vers la cuisine de mon petit appartement parisien. Je l'avais acheté dès que mon contrat avait été renouvelé, dût un déménagement de l'émission. Il était stratégiquement bien placé, dans un quartier calme, un peu riche tout de même. Après tout, c'était le XVI°... Quand je l'avais visité la première fois, c'était la structure qui m'avait charmé. Il avait la taille parfaite, situé au 3 ème étage. En revanche l'intérieur était écœurant. Des tapisserie dorées du sol au plafond. J'avais conclu assez vite qu'il fallait que je refasse la décoration. Pendant mes congés, des amis et des collègues étaient venus me donner un coup de main. Notamment mon patron, Yann Barthès. Il avait débarqué, comme ça, un beau matin, en gilet bleu marine, jean gris serré, avec sous le bras une petit tas de viennoiseries. Je ne pu m'empêcher de sourire en me remémorant ces moments. Je venais d'y emménager, et je le quittait déjà pour l'autre coté de l'Atlantique Ce n'était pas sérieux.
Je regardais ma montre, il me restait encore 2 heures avant mon rendez-vous au studio. Mon départ était programmé dans deux jours. J'avais largement le temps de finir mes bagages. Je rejoignis ma mère dans la cuisine, elle regardait son portable en faisant défiler un article.
-T'as vu ça ? Une explosion a eu lieu dans la Cosmetic Valley.
Je me rapprochait pour lire l'article . Effectivement, un accident s'était produit près d'Orléans. Apparemment juste quelques blessés, et de cause inconnu. Ma mère rinça sa tasse et se leva:
-Bon, moi, faut que j'y aille. Je dois aller déposer des documents à l'agence de presse. Gros bisous mon chéri, je t'aime fort fort fort.
-Moi aussi maman.
Après m'avoir enlacé, elle ouvrit la porte et s'engouffra dans les escaliers de mode haussmannienne de mon immeuble. Je la savais dévastée à l'intérieur, mais je ne pouvais rien y faire. Un message illumina l'écran de mon portable. Une photo de Quentin, avec Éric en caleçon tenant une affiche avec écrit grossièrement " NE PARS PAS MARTIN". Cette photo dessina un sourire sur mon visage. Toujours fourrés ensemble ces deux la, pour les meilleures comiques.
J'ouvris la porte de mon frigo. Il ne restait qu'une bouteille de lait à moitié vide, une bol remplit de pâtes de la veille et... Ah tiens. Un plat surprise de ma mère. Je savais bien qu'elle n'aurait pu s'empêcher de semer les plats préparés par mon père partout dans ma cuisine. Sur l'îlot, caché par une corbeille de fruit pleine de pommes et d'oranges, fraîchement remplie par une main maternelle, se trouvait un plat débordant de cookies.
Je réchauffait dans une assiette les pâtes, et dévorait mon déjeuner en quelques minutes. Il fallait que je me dépêche, j'allais être en retard. Et mon patron tenait à ce que je sois présent pour cette dernière émission, auprès de toute l'équipe. Bien que le printemps recolorait Paris peu à peu, la fraîcheur persistait. Une petite veste, un dernier coup d'œil, et je fermais la porte derrière moi.
J'avais l'ancienne voiture de mon père, ni trop vieille ni trop technique. Étant souvent en déplacement pour le boulot, je n'utilisais plus la voiture, et je ne voyais pas trop l'intérêt d'en acheter une nouvelle.
Apres avoir posé le plat de cookies et le panier de fruits sur les sièges arrières de la voiture bleue, je m'installais sur le siège usé du conducteur. Je pensais fort à ce que j'allais dire à toute l'équipe, des adieux peut être. C'est vrai que je n'allais pas le revoir pendant des lustres. Mon cœur se serra. Adieu Éric, Valentine, Hugo et Yann… Je n'avais jamais pensé ressentir cela face à mon départ imminent. 6 mois… C'était beaucoup trop. Ma mère avait raison.
J'appuyais mon front contre le volant. Je ne pouvais plus faire marche arrière. Les frayeurs de ma mère m'avaient contaminées, insérant des idées noires et malheureuses devant mes yeux, se glissant dans mes veines. Je tournais soudainement la clef et mis le contact. Conduire allait sûrement me faire oublier cette peine grandissante.
En passant sur le pont Mirabeau, la tour Eiffel se dressa de toute sa grandeur devant moi, la fin d'après midi lui donnant cet air faussement rouge. Durant mon enfance et une bonne partie de ma carrière, je l'avais presque oubliée, l'apercevant à longueur de journée. Elle était devenue un simple dessin dans le décor parisien. Depuis, maintenant que je voyageais, elle était devenue un monument lourd de symboles à mes yeux.
La Rue des Cévennes, encadrée d'immeubles blanc, donnait une aspect métaphysique à ce que devait être ma dernière visite sur le plateau de l'année. Peut être que tout cela était dans me tête. Pourtant j'étais persuadé que le blanc immaculé des immeubles faits de carrelage était plus vif, que les blocs étaient plus hauts, toisant la petite rue sinueuse. Le parc Citroën, qui longeait l'arrière des studios, regorgeait de souvenirs, passés avec mes collègues. Je secouait la tête, me forçant a cesser ces souvenirs pathétiques. Je ne partais pas définitivement. Je serais de retour pour Février prochain.
Malgré mes absences répétées, une place de parking m'était toujours réservée. Je ne doutais pas que le personnel avait prit l'habitude de voir cette délimitation vide. D'un coup d'œil, je visualisais qui était déjà là. Les véhicules de Yann, de Camille et d'Etienne étaient côte à côte, espacés par la place de Vincent, vide. Plus loin, la moto de Valentine et le scooter d'Hugo brillaient sous les lumières orangées des néons du parking.
-Salut Martin ! Prêt pour ta dernière ? lança Etienne quand il me vit débarquer dans la salle commune. Il était assit sur un fauteuil bordeaux, sirotant un cappuccino dans les gobelets argentés de la machine à café. Dans sa verste en jean, couvrant un T-shirt révélant légèrement son esprit d'enfant qui ne voulait pas grandir, il lisait un magazine, attendant surement l'appel pour rentrer dans sa loge.
-Hey ! Ça va... Tu me croiras jamais... Depuis ce matin, ça ne fait que se dégrader.. Ma mère à débarquée dans mon appart, en me demandant de rester.. Maintenant je me pose vraiment la question.
-Tu te sens comme pris dans un dilemme ?
-Voila c'est ça. D'un côté je me rends compte que je part pour très longtemps. Et que Paris, ma famille et mes collègues vont peut être me manquer... Sûrement même. D'un autre, je sais que ne je pars pas seul, qu'il y a Clément avec moi... Aussi, je sais que j'y vais pour quelque chose... Je n'arrive pas à me décider.. Et puis de toute façon tout est déjà prêt. Le voyage est bouclé, les affaires sont préparées, tout est déjà payé.
-Et puis le public a déjà été averti du merveilleux duplex qui prendra place d'ici 6 jours. Tu ne peux pas négliger ça. Souviens-toi de ce que Yann avait dit.
-Qu'est-ce que j'avais dit ? Interrogea une voix, surgissant de nulle part, dans mon dos.
Je me retournais vivement, voyant mon patron déjà prêt. Il était déjà aller se changer dans sa loge, troquant un sans doute sweat a capuche contre une chemise blanche repassée à la perfection avec une veste bleue marine. Toujours avec ses yeux bleus, pétillants de malice, il regardait d'un regard encadré par des rides naissantes mais rieuses, une affiche postée par Éric et Quentin. Malgré ses yeux soulignés par des cernes constantes, la couleurs était toujours envoutante. J'avais l'impression que la couleur myosotis de son regard cherchait constamment à m'emprisonner. Ses cheveux, telles des vaguelettes pétrifiées venant lécher sont front, reflétaient un halo argenté autour de son crâne. J'avais vu, au fil des années l'apparition de cette couleur d'agent dans sa chevelure. D'abord, juste quelques mèches avaient blanchies, puis une couronne et, peu à peu, tout le reste avait suivi. Il avait finalement perdu ce brun chocolat qui lui allait tout aussi bien. Il souriait de coté, comme à son habitude, laissant se creuser un fossette profonde dans a barbe de trois jours qui avait adopté la couleur poivre et sel de sa chevelure. Il tenait dans sa main droite ses lunettes ainsi que deux stylos noirs, qu'il utilisait pour prendre en note ce que lui annonçait son oreillette acolyte.
Sans attendre la réponse, il se tourna et reparti vers les loges. Il s'arrêta dans l'ouverture de la porte et, tout en gardant le dos tourné, il s'adressa enfin à moi :
-Va te préparer, Martin. Louis viendra te chercher quand il sera temps pour toi de rentrer sur le plateau.
Puis, sans un mot de plus, il fut englouti par la lumière sombre du couloir des loges. Je n'en croyais pas mes oreilles. Rentrer sur le plateau ? Mais il n'avais jamais été question pour moi de passer devant les caméras ce soir ! Ma visite dans les studios était en l'unique but de faire mes aux revoir à toute l'équipe. Chamboulé je m'éloignais à mon tour de la lumière chaleureuse de la salle commune, laissant Etienne seul terminer son magazine.
Sortant de la loge dont Hugo m'avait vivement prêté la clef, je me suis surpris à inspirer encore une dernière fois cette odeur qui enrobait cet endroit. Je poussais la porte et entrais sur le plateau, à l'ombre des caméras.
- Hier, Président Ploum donnait sa première visite officielle en Russie, à son pote Vladoche...
Yann Barthès était appuyé sur son bureau, les mains en V, regardant attentivement le prompteur. Il lisait l'actualité, ajoutant des intonations à son gré, au feeling. C'est à ce moment là que ça se su. Toute l'équipe avait reçu le même ordre en même temps. Yann s'était arrêté, laissant sa phrase en suspens. Dans le public, certains croyaient à une plaisanterie de la part de la rédaction ou de la régie. D'autre regardaient sur les écrans le regard ahuri du présentateur, essayant de comprendre ce que son oreillette lui annonçait. Un voix mécanique ordonna alors l'évacuation immédiate de la salle. La dernière chose que je vis, ce fut le "ON AIR" s'éteindre à jamais.
Heyya ! Alors déjà je remercie la Bartheill Army pour tout le soutien, car s'est jamais facile de se lancer comme ça dans le "Grand Bain". Le Bartheill n'est pas trop présent pour l'instant *pas taper pas taper* car je souhaite le construire au fur et a mesure de l'histoire.
C'était le premier chapitre de Cartographies, et d'après mes plans il y aura en tout une petite dizaine, je sais pas trop, je verrais.
Des câlins et des ananas,
A.
