La fin de l'hiver approchait, les arbres commençaient peu à peu à reprendre leur verdure, et le soleil se couchait paisiblement sur Tokyo. Un jeune homme marchait dans une rue marchande en cette fin de journée, vers une petite épicerie. Il avait une allure tout à fait soignée, son pantalon ne comportait pas un pli, ses chaussures étaient aussi propres qu'à leur achat, et son objet chanceux du jour, un petit canard en plastique, était parfaitement posé au creux de sa paume. Malgré ces quelques années entre le lycée et sa troisième année d'étude à la faculté de médecine, absolument rien n'avait changé chez Midorima Shintaro. Il était tout aussi perfectionniste qu'avant, voir plus encore.
Cela faisait seulement quelques semaines qu'il était de retour à Tokyo, après avoir effectué un échange universitaire à Osaka d'une durée de deux ans. Il avait désormais son propre appartement, dans lequel il avait pu emménager il y a quelques jours, ce qui voulait donc dire qu'il devait désormais faire lui-même ses courses. Tout s'était très bien déroulé, il s'était organisé de façon à ne rien oublier en faisant un tour de tout l'habitat pour réfléchir à ce qu'il lui fallait acheter tout en le notant sur un carnet qu'il garda précieusement sur lui, et qu'il utilisa tout au long de ses achats. Tout semblait être parfaitement maîtrisé, jusqu'à ce que Midorima réalise enfin qu'il lui manquait quelque chose. Quelque chose de très utile dans certaines circonstances.
L'ancien joueur de la Génération des Miracles avait tout simplement oublié d'acheter du papier toilette. Sa rigueur exceptionnelle dans chacune de ses actions lui avait fait défaut cette fois-ci.
C'est pourquoi à dix-neuf heures, le jeune homme aux cheveux verts si particuliers se retrouva en pleine rue à la recherche de cette supérette qu'il avait mis un temps fou à trouver quelques heures plus tôt. Au bout de vingt longues minutes de recherche et de réflexion, il se retrouva face à ce qui occupait ses pensées, l'épicerie. Soulagé, il entra enfin dans le petit commerce, et soudain il se rendit compte de ce qu'il devait faire : acheter un paquet de rouleaux de papier toilette, et uniquement cela. Mais il ne pouvait pas acheter juste ça, se serait beaucoup trop gênant pour lui, de passer à la caisse et de rentrer chez lui avec seulement du papier toilette à la main ! Non, il fallait qu'il trouve quelque chose à acheter en plus, ne serait-ce que pour essayer de le camoufler.
Il prit un petit panier à l'entrée et se dirigea vers le rayon papeterie, après tout, c'est toujours utile d'avoir des stylos et des crayons de papier en plus. Surtout si un certain brun vous pique vôtre crayon porte-bonheur en plein examen... Ensuite il se décida à prendre quelques produits ménagers, qu'il avait également oublié de prendre lors de ses premières courses – décidément ce retour à Tokyo l'avait quelque peu déboussolé -, et enfin, il avança vers le fameux rayon, qu'il redoutait légèrement.
Il essayait de garder une expression naturelle et détachée, mais il jetait tout de même quelques regards sur les côtés, afin de vérifier qu'il n'était pas suivi ou autre. Contenant son stress il continua d'avancer sans regarder devant lui, jusqu'à ce qu'il soit arrêter dans sa démarche, par une masse de cheveux noirs, une tête et demie en-dessous de lui. Le jeune étudiant ne savait plus où se mettre. Lui qui cherchait à ne pas se faire remarquer dans ce rayon bouscule une personne à cause de son inattention. Prêt à présenter ses plus plates excuses il s'écarta et baissa la tête pour pouvoir regarder la personne devant lui, mais finalement aucun son ne sortit de sa bouche. Seul ses yeux s'écarquillèrent et sa bouche s'entre-ouvrit légèrement de surprise.
« Désolé monsieur je n'aurais pas dû rester... Oh Shin-chaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaan ! » Cria la personne qui venait de se faire bousculée « Ca alors ! Qu'est-ce que tu fais ici ? C'est du PQ que tu cherches ? » lui demanda-t-il en rigolant et en lui tendant l'un des paquets qu'il tenait dans les mains
« Ne te méprends pas. » Dit l'étudiant en médecine tout en détournant les yeux et en redressant ses lunettes sur le haut de son nez « Je faisais simplement quelques... » il marqua une courte pause avant de terminer sa phrase « Courses. »
Décidément, en plus de bousculer quelqu'un, il fallait qu'il connaisse cette personne ! Oha asa l'avait bien prédit, aujourd'hui n'était pas un jour très chanceux pour les Cancer. Du moins, c'est ce qu'il pensait sur le moment.
« Et puis toi, que fais-tu ici ? » questionna Midorima, tout à fait surpris de voir cet ancien camarade vêtir le tablier de l'enseigne.
« Je travaille ici depuis deux ans, pour pouvoir payer mes études et mon appart' ! Comme mes parents ne pouvaient plus m'aider j'ai décidé de me prendre en main ! » répondit-il plein de fouge et d'entrain, toujours avec l'un de ses grands sourires qui le caractérisaient tant.
Le futur médecin ne répondit rien. Il se contenta simplement de fixer son regard émeraude sur le visage du brun qui lui offrait un beau sourire. Et il se surprit à discrètement sourire lui aussi. A croire que l'expression joviale du jeune employé était contagieuse.
« J'suis désolé je dois retourner travailler, mais ça serait vraiment cool qu'on se revoit ! Tu sais comme au lycée ! » proposa le brun « Attends, je vais te laisser mon numéro comme ça on pourra s'organiser un p'tit truc. »
Il posa tout ce qu'il avait dans les bras sur l'étagère la plus proche pour sortir un stylo de la poche de son tablier, puis il prit la main de Midorima sans aucune résistance de la part de celui-ci et nota son numéro de téléphone portable.
« Bon j'vais te laisser ! Et oublie pas le papier toilette ! » dit le jeune vendeur en lui lançant un paquet que son interlocuteur récupéra parfaitement « A la prochaine Shin-chan. »
Et il partit tout en sifflotant un air de ce qui semblait être pour Midorima, une chanson du groupe OLDCODEX. Décidément malgré ces années d'absence, Takao non plus n'avait pas changé d'un pouce. Il était toujours égal à lui-même. L'étudiant regarda sa main où se trouvait le numéro de son ancien coéquipier, avec à côté un petit smiley, ce qui ne l'étonna guère. Puis il se décida à passer en caisse, papier toilette en main.
Deux jours passèrent depuis cette rencontre plus qu'inattendue à la supérette. Midorima, qui était maintenant en week-end, se décida à envoyer un message au brun, lui demandant s'il était disponible dans l'après-midi pour se retrouver dans un petit café pas loin de son appartement. Et pour la première fois depuis un petit moment, il avait légèrement peur, de la réponse qu'il allait peut-être recevoir de la part de Takao. Allait-il au moins lui répondre ?
Il secoua rapidement la tête, reprenant ses esprits. Ca ne lui ressemblait pas de s'inquiéter ainsi, et ça ne ressemblait pas a son ancien camarade de ne pas répondre.
Une sonnerie, puis deux. Takao lui avait répondu. Après ce qui lui avait semblé être une éternité il ouvrit son téléphone pour lire rapidement la réponse qu'il attendait.
« Yoo Shin-chan ! Je t'attends au café pour 15h :p »
Une expression de satisfaction se forma sur le visage du jeune homme aux cheveux verts. Il ouvrit ensuite le second message :
« Et j'espère que le papier toilette t'as bien été utile xDD »
Non, là c'était trop. Il ferma rageusement son portable et rougissant de honte, et il se leva pour aller se préparer de quoi déjeuner.
Et pour la première fois depuis quelques temps, le vert arborait un air de réelle satisfaction. Il sifflotait gaiement tout en cuisinant. Mais il ne comprenait pas vraiment pourquoi... Après tout, il revoyait simplement un ami, rien de plus. Oui c'est bien ça, un simple ami qu'il a connu au lycée, et qui a su lui tenir compagnie au-delà du terrain d'entraînement de basket.
Finalement, il avait vraiment hâte de le retrouver cet après-midi !
Quinze heures retentissait sur la montre à cristaux liquides d'un jeune homme brun, se tenant face à un petit restaurant. A vrai dire, il venait d'y arriver et cherchait du regard son ex-camarade de classe qui l'avait invité à boire un café ici. Et il était plutôt étonné de ne pas le voir, lui qui n'était jamais en retard où que se soit. Enfin si, une fois, à un entraînement de basket, parce que le brun avait malencontreusement cassé son objet chanceux du jour – une figurine de castor en porcelaine , il a donc dû accompagner le vert en acheté de toute urgence un nouveau, ce qui les avaient retardés pour leur entraînement quotidien de basket. A l'évocation de ce souvenir, Takao ne put s'empêcher de rire, surtout en repensant à ce cri de désespoir qu'avait poussé Midorima en voyant la figurine brisée en milles morceaux au sol !
C'est finalement après deux petites minutes de recherche active qu'il trouva l'objet de ses pensées, à l'ombre d'un arbre. Il comprenait mieux pourquoi il ne l'avait pas directement repéré, il se fondait totalement dans le décor. Et là le brun explosa de rire en se tenant le ventre à cette pensée, ce qui fit légèrement sursauté quelques passants, mais surtout le joueur de la génération miracle qui leva d'un coup son regard vers la source de ces rires. Soudainement il sentit quelques rougeurs sur son visage en le voyant rigoler ainsi, et rapidement, il baissa la tête pour éviter qu'une quelconque personne le voit dans cet état, un peu trop vulnérable à son goût. Il n'était pas du tout habitué à se laisser dépasser par ses émotions, alors hors de questions qu'on le remarque !
Quelques secondes plus tard, il s'avança calmement vers la façade du café, là où l'attendait le petit brun tout en souriant. Ils se saluèrent brièvement et entrèrent sans plus tarder dans l'établissement, où il s'installèrent près d'une fenêtre donnant sur la rue commerçante dans laquelle ils se trouvaient. Après avoir commander chacun de quoi se sustenter, ils échangèrent de simples formalités, puis ils commencèrent à discuter de tout et de rien. Se racontant de petits événements plus ou moins marquants de ces deux dernières années durant lesquelles ils avaient perdu tout contact.
Puis machinalement au cours de leur discussion, Midorima posa sa main gauche parfaitement bandée sur le côté de la table, seulement au même moment, Takao posa sa main droite au même endroit. Leurs doigts s'effleurèrent alors involontairement. Ils restèrent ainsi quelques instants à se fixer, puis brusquement, le vert tourna la tête et enleva sa main de la table pour la poser sur sa cuisse, et à peine trois secondes plus tard il s'excusa poliment en se levant, prétextant devoir se rafraîchir aux toilettes.
Lorsqu'il se retrouva face au miroir, il fut surpris de voir de nouvelles rougeurs sur ses joues.
Ce contact l'avait plus que chamboulé, il ne s'attendait absolument pas à cela. Il secoua vivement la tête pour se changer les idées, ne comprenant pas vraiment ce qui lui arrivait. Il posa ses lunettes sur le bord de l'évier et se passa un rapide coup d'eau sur le visage afin de se rafraîchir et surtout de diminuer cette chaleur au niveau de ses joues.
De son côté, Takao lui se sentait seul et surtout stupide au beau milieu de cette salle de restauration. Il avait la tête entre ses mains et se lamentait mentalement. Il avait le sentiment d'avoir tout gâché. Si seulement il avait fait plus attention à ses gestes, cette situation ne serait pas aussi gênante, que se soit pour Midorima ou bien pour lui. Et maintenant il se demandait comment allait se dérouler la suite, comment allait agir son ami en revenant et comment lui aussi allait se comporter. Finalement, il reprit ses esprits et se redressa sur sa chaise. Il ne devait pas se laisser abattre, au contraire ! Pour la première fois depuis un long moment il retrouvait l'homme qui avait hanté ses pensées depuis son arrivée au lycée, et il devait tout faire pour lui faire oublier ce léger incident. Il bu une grande gorgée de son jus d'orange et se dit qu'il devait lui parler de cette soirée qu'organisait Kise, avec qui il était resté en contact. Il allait lui proposer de l'y accompagner, après tout, il y aura tous ses anciens camarades de Teiko ! Il commença alors à réfléchir à une technique subtile et délicate, pour faire passer la nouvelle à son ami, connaissant son goût très peu prononcé pour ce type d'événements. Mais il se ressaisit bien vite, ça ne lui ressemblait absolument pas ! Il allait faire ça à sa manière, et lui en parler sans plus de cérémonies dès son retour.
En parlant du loup, il le voyait pointer le bout de son nez quelques secondes plus tard, et il se mit à lui sourire timidement, repensant soudainement au contact qu'ils venaient d'avoir.
Il s'était à peine assis correctement sur son siège que le brun passa directement à l'attaque.
« Tu sais Shin-chan, vendredi prochain il y a une fête organisée par Kise, et il y aura aussi les anciens membres de ton équipe à Teiko et quelques membres de Seirin ! Se serait vraiment cool qu'on y aille ensemble, nan ? Et puis comme ça tu pourras tous les revoir, comme tu viens tout juste de revenir ! »
Il acheva sa phrase en affichant un énorme sourire, essayant de convaincre un peu plus le vert avec cette arme. Il scruta impatiemment son visage, attendant une réponse, positive ou non.
« Et bien, je vais voir si je n'ai pas déjà quelque chose de prévu ce soir-là. » répondit-il avec son calme habituel.
« Géniaaaaal Shin-Chan tu vas voir ça va être trop bien cette soirée ! »
Rapidement, le jeune brun passa un bref coup d'oeil sur sa montre qui affichait déjà dix-huit heures, ce qui le fit se lever précipitamment de sa chaise. Le vert ne comprenant pas vraiment ce qui se passait, l'interrogea du regard, et la réponse qu'il attendait ne tarda pas à venir.
« C'est pas possible je vais être en retard au travail ! Désolé Shin-chan mais on se reverra à la soirée, à plus ! »
« Attends mais j'ai jamais dit que...»
Il lui laissa de quoi payer sa consommation et s'enfuit en courant vers la supérette dans laquelle il travaillait, sans lui laisser le temps de finir sa phrase.
« ...Je viendrai »
Et il se laissa retomber sur sa chaise, quelque peu dans l'incompréhension. Une soirée, chez Kise ? Ca ne l'enchantait pas vraiment. Mais se serait tout de même une nouvelle occasion pour passer un peu plus de temps avec Takao.
Ce rendez-vous avait été beaucoup trop court à son goût. Il aurait pu rester assis là à l'écouter raconter ses histoires pendant des heures. Parcourant chaque détail de son visage, comme ses yeux rieurs, son nez fin et sa bouche parfaitement dessinée. Tout le fascinait chez lui, mais ça, il ne l'avouerait jamais devant lui. Il avait beaucoup trop de fierté pour le dire. Voyant les minutes passer, il se décida à partir. En se levant il remarqua que le brun aux yeux de faucon avait oublié son écharpe. Finalement sa vue n'était pas infaillible. Il la prit et sortit enfin de l'établissement.
Et instinctivement, il la sentit. Il resta quelques instant à humer l'odeur qui se dégageait du morceau de tissu, et sourit paisiblement. Cette odeur semblait l'apaiser, et il ne se lassait pas de la sentir. Il se mit alors en route vers son appartement et discrètement, il enroula l'écharpe autour de son cou.
Les jours défilèrent un peu trop vite au goût du vert, il redoutait ce vendredi soir qui arrivait à grands pas. Car oui, malgré ses petites simagrées, il avait accepté de s'y rendre. Notamment parce qu'il y retrouverait ses anciens camarades, mais surtout parce qu'il y allait avec un certain brun qu'il affectionnait tout particulièrement. Mais ça, il ne se l'avouera bien évidemment jamais.
Même si quasiment chaque jour de la semaine, il s'était rendu à la supérette dans laquelle le jeune brun travaillait sans avoir réellement besoin d'acheter quelque chose. Et c'est seulement après avoir traversé les rayons dans leur intégralité, qu'il sortait du magasin, les mains dans les poches et surtout une lueur de déception dans le regard. Déçu de ne pas avoir croisé, - inopinément - la personne qu'il souhaitait voir, de ne pas avoir plongé son regard dans ces orbes bleues, de ne pas avoir entendu son rire si adorable,... A chaque fois qu'il sortait de cette épicerie il était déçu, mais pas vraiment pour les mêmes raisons selon lui. Il tentait plutôt de se convaincre mentalement que se sentiment de vide dans son cœur était dû à l'absence de sa boisson préférée dans les étalages, ou bien les promotions effectuées sur tous les différents biscuits, sauf ceux qu'il aimait.
Oui, Midorima Shintaro était dans le déni le plus total de ses sentiments envers Takao.
Soudain une sonnerie retentit, c'était son portable, il venait de recevoir un message. Les battements de son cœur s'accélèrent en moins d'une seconde, rien qu'en imaginant un possible message du brun. Il délaissa rapidement ses cours de biologie pour reporter son attention sur son téléphone, les yeux rivés sur l'écran il attendait impatiemment de découvrir l'émetteur de ce message. Il lui a fallut moins d'une seconde pour accéder à sa messagerie, mais ça lui a semblé durer une éternité. Enfin quand il ouvrit le message, il s'affala sur sa chaise. Encore une fois, il était déçu. Ce n'était pas « Takao Kazunari » qui s'affichait mais « Kise Ryouta ». C'était très probablement à propos de la soirée qu'il organisait, et qui d'ailleurs était demain ! Le stress commença à monter quelque peu en lui, il ne voulait pas rater une des rares occasions qu'il avait de passer un peu de temps avec le jeune brun. Il ouvrit le message et le lu attentivement :
« Yoo Midorimacchi ! J'espère que ça va ! C'était pour te dire que la soirée commence à partir de 21h demain, et y a pas besoin de ramener quoi que se soit, tout est prêt ! (^_^) A demain ~ »
Il soupira. Décidément, le blond aussi n'avait pas changé, toujours fidèle à lui-même. Cependant, un petit quelque chose le dérangeait, il n'avait pas l'adresse de ce dernier. Il lui envoya donc un message.
« Bonjour Kise. Merci pour ces informations, mais je ne connaît pas ton adresse... »
Il appuya sur envoyer, et se remit au travail. Seulement, il eut à peine le temps de lire la première phrase de son cours que son portable sonna à nouveau.
« Aaah mais c'est pas un problème ça Midorimacchi, tu viendras avec Takao comme il connaît mon adresse ! Je vais le prévenir pour qu'il vienne te chercher(⌒▽⌒)»
Le vert ne savait pas comment réagir, il hésitait entre paniquer et se réjouir de la situation. Certes, il allait passer quelques minutes de plus en compagnie de Takao, - seul qui plus est – mais en même temps, il le sentait, il n'arriverait pas à agir comme à son habitude. Enfin, avait-il vraiment le choix ? Car le mannequin n'avait pas l'air décidé à lui révéler son adresse. Ca ressemblait de plus en plus à un plan élaboré par le mannequin pour qu'il soit seul en compagnie du brun. Mais non, ce n'était pas possible. A quoi bon faire ça ? Après tout, il n'y avait aucun signe apparent d'une quelconque attirance entre son ancien camarade de classe, et lui. Du moins, c'est ce qu'il s'évertuait à croire. Seulement depuis l'époque du lycée, certains signes, certains regards ne trompent personnes. Et encore moins Kise, lui qui détecte en un coup d'oeil si un sourcil a été épilé ou non. Mais ça, Midorima ne l'a jamais remarqué. Alors pour conclure cette discussion il lui envoya rapidement une formule de politesse et se replongea dans ses cours de biologie.
Après plus de trente minutes de tentative, il se résolut à arrêter. Il n'arrivait définitivement pas à se concentrer sur son travail, il était obnubilé par la soirée. Il se posait tout un tas de question. Qui sera présent ? Est-ce que Takao viendra vraiment le chercher ? Et quelle tenue allait-il porter ?
Le vert n'en revenait pas, il était stressé à propos d'une simple soirée. Lui qui gardait toujours un calme olympien, même lorsqu'il passait des examens importants, angoissait comme un adolescent à l'idée de cette fête. Il jeta un rapide coup d'oeil à l'horloge accrochée au mur, qui indiquait déjà vingt-deux heures trente. Sachant qu'il n'arriverait pas à réviser, et qu'il ne voulait plus penser à cette fichue soirée, il se décida à aller dormir, espérant retrouver un peu de calme dans son esprit.
Huit heures. Le vert s'était réveillé il y a peu et regardait son téléphone portable depuis maintenant cinq bonnes minutes. Il avait reçu un message hier soir, et pas de n'importe qui : de Takao. Il avait relu ce message plus d'une dizaine de fois. S'attardant quelques instants sur le « Shin-chan » à chacune de ses relectures. Il aimait le voir utiliser ce surnom. Il ne lui avait jamais dit mais, c'était le seul surnom qu'il acceptait réellement. Cependant, il ne s'imaginait pas l'avouer face au brun, sa fierté l'en empêchait, comme à chaque fois.
Dans son message, le jeune homme indiquait un lieu et une heure de rendez-vous pour se rendre à la soirée. Et il avait choisi un lieu bien connu des deux, la supérette dans laquelle il travaillait. L'étudiant en médecine ne prit pas la peine de répondre, et se dirigea vers sa cuisine pour se préparer son petit-déjeuner. Et il se dit que ça y est, le jour tant redouté était arrivé, et il se rendait compte qu'il n'y était pas préparé du tout. Mais il était trop tard pour reculer, il n'avait plus le choix. Alors il passa la journée comme il pu, alternant entre révisions et lecture. Puis vers dix-huit heures, il commença à se préparer. Car même s'il ne voulait pas l'admettre, il voulait être un minimum habillé pour cette fête, et surtout pour Takao. Alors après s'être lavé, il resta un long moment devant sa penderie qui n'était pas très fournie, à se demander quelle tenue il allait revêtir. Ses hésitations durèrent un peu plus d'un quart d'heure, jusqu'à ce que son choix se porte finalement sur un pantalon en jean bleu foncé, une chemise cintrée blanche, et une veste de costume noire, rien de bien extravagant. Il avait passé plus d'une heure et demie à s'apprêter, et l'heure de rendez-vous fixée par le brun approchait. Il enfila ses chaussures et objet chanceux en main, il se mit alors en route vers l'épicerie. Tant pis s'il y arrivait en avance, de toute façon il n'avait pas grand chose à faire chez lui.
La nuit commençait à tomber progressivement, et le soleil laissait place à la lune. Le vert marchait d'un pas assuré le long de la rue marchande. Il se trouvait à moins d'une vingtaine de mètres du point de rendez-vous et sans s'en rendre compte, il pressait peu à peu le pas. S'attendant inconsciemment à retrouver le brun, malgré son avance de quelques minutes. Il n'était plus qu'à un ou deux mètres de la façade du magasin, quand son cœur se mit soudainement à battre beaucoup trop rapidement à son goût.
