Le 31 mai, en France et dans d'autres pays, c'est la journée des fratries !
Alors, je sais. Tout le monde s'en fiche x3
Mais, comme vous le savez, la fraternité, c'est ma vie.
Alors voici cinq textes commémorant mes cinq fratries préférées; j'aurais voulu faire dans la diversité mais, malheureusement, ce sont toutes des paires de frères. Pour équilibrer, j'ajouterai potentiellement d'autres petits textes plus tard (ceux que j'avais prévus mais pas eu le temps d'écrire).
Alors bonne fête des frères et sœurs !
Merci à toutes les fratries qui m'ont fait vibrer, rêver, espérer, méditer, pleurer (et pulvérisé le cœur) depuis toutes ces années. Qui m'ont inspirée, aidée à m'évader, soutenue, soulagée. Et merci à toutes ces AMV et chansons de frères et sœurs qui ont bercé toutes mes rêveries et nourri mes histoires et mes émotions.
Merci à mon frère d'être... mon frère :'3
Merci à Mario et Luigi pour avoir réveillé cet amour des fratries en moi pour la toute première fois.
(merci à Rima et à Senpai de partager cet amour avec moi :3)
Merci à Vincent et Théo van Gogh à qui j'ai beaucoup pensé ces derniers temps.
Et... je vais arrêter ici avant que tout cela ne devienne beaucoup trop niais. Mais merci !
"Naoto est un enfant un peu difficile", avait-il souvent entendu dire de lui. Il n'était pas difficile. C'était juste qu'il ne savait pas se maîtriser. Il se mettait en colère, et alors cette... puissance floue et instable qui se trouvait dans sa tête explosait, brisant les vitres, les tasses, et les veines dans le nez des enfants qui se moquaient de lui. Ses parents ne comprenaient pas, ils ne s'expliquaient pas d'où venait cette force brutale qui habitait leur enfant. Et, ceci mis à part, ils ne concevaient pas que leur fils puisse être aussi turbulent et emporté. Elle était une femme douce et calme, lui, un homme patient qui savait se maîtriser. Ils ne comprenaient pas que leur enfant soit aussi impulsif. Ils ne comprenaient rien à rien.
Naoto s'assit sur la chaise, comme la voisine qui le gardait depuis la veille le lui avait demandé. Mais bientôt, il ne put conserver son calme et, s'aidant de ses paumes et de ses genoux, il se hissa sur le rebord de la fenêtre qui donnait sur la rue. La voisine lui avait dit que sa maman rentrerait d'un instant à l'autre, alors il voulait la voir arriver. Il voulait se hausser sur la pointe des pieds pour ouvrir la porte et courir vers elle. Il voulait voir ce qu'elle tiendrait dans ses bras...
Soudain, un bruit de moteur et des crissements de pneu se firent entendre plus haut dans la rue et le petit Naoto se colla un peu plus à la vitre, même si la dame lui avait dit de ne pas mettre ses doigts sur le verre... Le véhicule arriva bientôt devant la maison et se gara dans l'allée. L'enfant bondit de son siège et se précipita vers la porte d'entrée. La voisine l'ouvrait déjà pour saluer les parents du petit garçon, mais il se précipita entre ses jambes et fonça vers la voiture. Il s'arrêta à temps pour ne pas se cogner à la portière qui s'ouvrait. Le coeur battant, il observa l'escarpin verni qui en sortait, puis la jambe de sa mère et enfin, son corps tout entier. Il avait envie de se jeter dans ses bras, mais surtout, il avait envie de voir plus distinctement le petit paquet qu'elle tenait contre elle.
"Maman ! Maman, je peux voir le bébé ? s'écria l'enfant sans prendre le temps de saluer ses parents.
-Eh bien, quel enthousiasme, rit le père en sortant de la voiture par l'autre côté, et en venant prendre son fils dans ses bras.
-Je veux le voir, Papa ! Je veux le voir ! insista petit Naoto en se tortillant dans ses bras pour apercevoir son nouveau petit frère.
-Patience ! Arrête de gigoter, je vais t'approcher de Maman."
Petit Naoto remarqua alors le grand parapluie que son père tenait et dont il abritait sa mère et le nouveau-né. L'enfant n'avait pas remarqué avant cet instant qu'il neigeait.
C'était vrai, après tout; il pouvait neiger tous les jours au mois de décembre, et aussi pendant janvier et février, mais ce n'était pas tous les jours qu'on avait un petit frère. Petit Naoto se pencha dans les bras de son père pour le regarder. Sa mère, qui le tenait avec précaution contre sa poitrine, le lui tendit enfin pour qu'il puisse mieux l'observer. Son petit frère était une créature minuscule, constata petit Naoto, émerveillé. Il avait une petite tête toute ronde, une petite bouche surprise, de grands yeux bruns tout étonnés de voir le monde, et des petits cheveux châtains qui rebiquaient au niveau de ses minuscules oreilles. Le bébé s'agitait doucement dans les bras de leur mère, et contrairement aux autres enfants, il ne semblait pas avoir peur de petit Naoto. Au contraire.
A chaque fois que son grand frère était avec lui, bébé Naoya souriait et gazouillait. Et à chaque fois qu'ils entraient en contact physique, il le regardait fixement de ses grands yeux bruns si expressifs et si mystérieux. Petit Naoto ignorait alors ce que son petit frère voyait dans ces moments-là. Il ignorait qu'il avait déjà la faculté de percevoir son amour, sa solitude et sa tristesse.
Bébé Naoya était étendu sur un gros coussin qui paraissait vraiment énorme sous son petit corps potelé. Engoncé dans un pyjama blanc, il s'agitait doucement, essayant de mettre son pouce dans sa bouche. Des jouets de bébé jonchaient le sol : des livres d'images, des animaux en peluche, des hochets, des jouets à mâchouiller. Et aussi le cartable orné d'un ourson de petit Naoto, qu'il avait jeté par terre dès qu'il était rentré à la maison pour aller jouer avec son petit frère.
"Naoto ! Tu ne viens même pas chercher ton goûter ? l'appela sa mère depuis la cuisine."
Bien sûr que non ! Il y avait bien plus intéressant en rentrant de l'école qu'un fruit et des tartines de chocolat pour le goûter ! Il y avait, par exemple, son petit frère qui l'attendait.
Petit Naoto s'assit par terre et se pencha vers le bébé, qui sourit et gazouilla en le voyant, puis tendit sa minuscule main dans sa direction. Petit Naoto sourit et approcha l'un de ses doigts, que son petit frère saisit immédiatement. Et il recommença à le regarder de ses grands yeux bruns, si expressifs et si mystérieux. Petit Naoto ne savait pas comment ni pourquoi, mais à son si jeune âge, bébé Naoya le comprenait déjà. C'était même la seule personne qui semblait le comprendre.
oooooooo
Et petit Naoto finit par comprendre pourquoi.
Les petites mains de petit Naoya, âgé de deux ans, se tenaient à la chemise de son frère. De sa petite voix gazouillante, il babilla : "Comment c'est possible ? Comment c'est possible ? Comment c'est possible ?". Exactement ce que Naoto était en train de se demander. Le petit garçon de huit ans posa son regard sur son petit frère. Et il comprit exactement à ce moment-là que son frère était doté de pouvoirs, tout comme lui. Lui qui, d'ailleurs, venait tout juste de vraiment réaliser qu'il pouvait faire bouger des objets par la pensée.
Ils étaient donc liés par le même pouvoir qui dormait dans leur esprit, au même titre que le sang qui coulait dans leurs veines et la profonde tendresse qui les avait habités l'un pour l'autre dès les premières secondes. Ce fut ce pouvoir qui les précipita tous deux dans les mêmes tourments, l'abandon, la peur, l'enfermement, la solitude. Contre vents et marées, ils demeurèrent ensemble. L'un et l'autre, dans leur malheur, ils demeurèrent les seuls qui, mutuellement, se comprenaient.
oooooooo
Naoto, âgé de vingt-sept ans, foudroya avec son pouvoir les deux hommes et la femme qui avaient déjà essayé par deux fois de les anéantir. Les trois corps retombèrent lourdement dans le sable, la bouche grande ouverte et les yeux écarquillés d'horreur. Une horreur dirigée vers lui, qu'il méritait sans doute. Car il était devenu un meurtrier. Désormais, il était comme eux. Désormais, il était lui aussi un être méprisable, alors qu'il avait tout fait jusqu'à présent pour ne jamais ôter la vie aux gens qui suscitaient sa colère. En grande partie grâce à Naoya. Naoya qui devait bien le désapprouver tout autant que les autres, maintenant. Leurs parents, même sans rien comprendre, avaient eu raison d'avoir peur finalement.
Naoto se laissa tomber dans le sable, à bout de force et totalement anéanti par ce qu'il venait de faire. Un monstre. Il était un monstre.
"Je devais le faire, essaya-t-il quand même de se justifier, sans réel espoir d'être pardonné. Si je ne l'avais pas fait, ce serait eux qui nous auraient tués."
Et Naoya, âgé de vingt et un ans, qui abhorrait la haine et la violence, courut vers lui pour le prendre par les épaules, inquiet. Il le regarda tristement et pressa un peu son bras pour le réconforter.
"Oui, je sais, murmura-t-il doucement."
Même aujourd'hui, Naoya comprenait toujours. Et ce n'était pas seulement parce qu'il pouvait lire dans les pensées.
