- Happier, Partie I :
Huit heures dix tapante, pas d'avance et pas de retard. C'était son truc à elle de respecter les horaires, quand elle était en retard elle se transformait en véritable monstre, prête à frapper et mordre à n'importe quel instant de la journée. Mais aujourd'hui je ne l'avais pas retardée et on était à l'heure. C'était déjà sympa de la part de Santana de m'avoir déposée, alors bon, je pouvais bien passer au travers de ce petit… défaut.
Elle m'avait jeté de sa voiture pour aller se garer un peu plus loin, il n'y avait plus de place sur le parking qui affrontait la bouche béante du hall d'entrée du lycée. Ce que je ne savais pas c'était que tu dominais cet endroit de ton mètre soixante-cinq. Non, je n'avais pas remarqué ce détail qui m'obsédait, j'avais simplement dirigé mon attention sur le couple que formaient Tina et Mike. Depuis le début de leur couple, je ne pouvais m'empêcher de sourire en me disant qu'il était mignon ensemble. Je me rappelais encore la panique qui avait envahi le visage du jeune homme quand sa copine avait failli le larguer en début de seconde. Ça faisait maintenant trois ans qu'ils étaient ensemble.
Et c'est en posant un pied sur les marches que j'avais repérée ce qui m'effrayait le plus, toi.
Lovée dans ses bras de quaterback, tu souriais doucement. La malice de ses yeux contrastait avec l'amour inconditionnel que tu lui portais. Je l'avais aimé moi aussi. Enfin, je m'en étais persuadée. Mais toi, tu avais cette façon de l'aimer, de l'adoucir, de le protéger. Et il te couvait de son regard d'idiot en retour. Tout ce que je pouvais faire, c'était glisser des regards mordants de rage dans sa direction. Vous étiez assis tranquillement sur l'un des petits murets qui longeait l'entrée principale.
Le soleil commençait déjà à taper en ce début mai sur notre bled nommé Lima. J'avais encore dû mal à y croire…
Cadrant mon regard sur ta silhouette, je ne pouvais empêcher ma gorge de se serrer. Tu avais eu la magnifique idée de porter un chemisier blanc ainsi qu'un short en jean. Dans cette tenue, même la plus prude des filles du lycée t'aurais sautée dessus. Mais toi, tu n'avais d'yeux que pour cet idiot sans avenir au sourire aussi craquant qu'enrageant.
Tu n'avais d'yeux que pour mon ex. Ironie tragique peut-être bien.
Je pouvais t'entendre rire aux imbécillités niaises que débitées le jeune homme. Tu étais bien la seule à réussir cette exploit. Mais tu étais amoureuse, tout simplement. Tu avais cette façon de rigoler en sa compagnie, cette façon que tu ne révélais jamais en la compagnie du Glee Club. Non, tu ne le réservais qu'à Finn, ce rire qui te rendait encore plus attrayante.
Ton premier regard t'avait trahie. En un millième de seconde à peine j'avais compris : C'était lui, et ça serait toujours lui. Peu importe qui se présenterait, peu importe qui serait assez fou pour venir te chanter la sérénade, te faire la cour, ce serait toujours cet imbécile heureux.
J'avais été stupide comme toujours. Mais comprend moi, j'avais pris peur tout simplement. Et j'étais la digne héritière du clan Fabray. Et toi tu étais Rachel Berry, celle dont même les plus gros losers du lycée avaient rigolé à gorge déployée. Par ta faute, j'avais dû rejoindre un club de chant, j'avais couchée avec le meilleur-ami de mon copain, j'étais tombée enceinte, j'avais accouchée d'une magnifique petite fille que je ne voyais jamais, et enfin, Finn m'avait larguée dans une voiture après un enterrement.
La grande classe en soit.
Larguée pour tomber encore un peu plus sous ton charme précisons-le.
Prenant une respiration lente, je fis quelque pas en direction de la porte, implorant un Dieu quelconque de me rendre invisible, mais ça ne servi à rien. Car, dans un léger signe de la main accompagné d'un sourire timide, tu me saluas.
J'avais presque oublié ce détail : nous étions des amies à présent.
J'avais perdu mes moyens avant de faire tomber mon cahier d'histoire.
Merde.
Tu fronçais les sourcils, t'excusant du bout des lèvres et déjà prête à venir à ma rescousse. Je te détestais pour tout ça.
Le ramassant à la hâte, je me faufilais entre la masse d'élève. Je pouvais déjà discerner ton regard blessé. Mais je n'y pouvais rien, c'était comme ça, je n'avais aucune légitimité. Aucune.
Je n'en avais jamais eu en vérité. Mais je faisais comme si.
Je faisais comme si on pouvait être amies, je faisais comme si nous pourrions un jour rigoler tranquillement dans un petit café tout en se remémorant nos vieilles années de lycée. J'avais toujours était un peu naive…
Et je comprenais aussi qu'en faisant chuter mon cahier, je me rendais de nouveau ridicule. J'avais toujours eu l'air stupide à tes côtés. Mais toi, près de lui, tu rayonnais d'une joie incompréhensible.
Je n'étais que celle qui t'observais de loin, cachée dans l'ombre de sa silhouette de géant.
J'étais et je serais pour toujours une hypocrite amoureuse.
Les ordres d'automates qu'envoyait mon cerveau à mes jambes me guidèrent directement au casier 403. Je ne savais même pas ce que je cherchais exactement à faire. Mais apparemment, mon état d'esprit brouillon avait déjà alerté le radar de porcelaine.
Qu'est-ce que je le détestais, je le détestais d'avoir été présent à cette fichue soirée que tu avais joyeusement concocté pour fêter je-ne-sais-plus-quoi. Soirée à laquelle l'alcool avait coulé dans mes veines, jusqu'à, aux alentours de trois heures du matin, avoir raison de moi. Alors complètement bourrée, je m'étais écroulée dans les premiers bras venus. Et j'avais fini par cracher le morceau.
Kurt Hummel. Bon, j'aurais pu faire pire à vrai dire… J'aurais pu tomber dans les bras de ton mec, mais non, je suis tombée sur le garçon le plus gay de ce lycée, et qui en plus, m'appréciait un minimum pour ne pas tout révéler à la foule.
Sacrée chanceuse que j'étais !
Me souriant, il attrapa mon bras de force et me fit traverser les couloirs bondés, sans une parole ou même un regard. Non, il savait très bien que de toute façon je n'aurais rien fait. Je n'étais plus que l'ombre de la garce froide et distante de première année. Au plus grand désarroi de Santana.
Je pensais que la vérité à cet instant été la suivante : Je ne l'empêchais pas de me trimballer dans tout lycée, car je savais pertinemment que je n'aurais pas pu articuler un mot sans avoir l'impression de m'effondrer et de replonger. Mais la vérité était bien plus... simple : je n'avais juste pas le courage de le stopper. C'est lui qui décidait de quand et où, me déposer.
Alors, au bout d'un petit moment, il s'arrêtait.
Je comprenais en un regard qu'il nous avait guidés sous les gradins. Personnes ne traînaient ici depuis que les Shanks c'était fait renvoyés. Comme quoi, fumer des joints n'était pas si légal que ça à Lima.
Zut.
« Je suis désolé Quinn, sincèrement. » avait-il dit dans un mince filet de voix, à peine perceptible.
Sans un regard, j'avais soigneusement déposé mon sac ainsi que mon cahier d'histoire sur le sol. Puis, je m'étais assise. La peur qui était venu frapper mes jambes m'épuisait, elle m'étreignait douloureusement la poitrine.
« Moi aussi je le suis. »
C'était à l'entente de ma voix brisée qu'il venait s'agenouiller devant moi, se retrouvant à ma hauteur de nouveau. Ses mains étaient directement venu trouver les miennes, comme si tout ceci était naturelle, qu'il avait l'habitude de le faire.
Le pire, c'est qu'il commençait vraiment à en avoir l'habitude avec moi.
« Un jour, tu le ressentiras aussi, un jour tu tomberas amoureuse à ton tour, profondément. Et tu vivras avec cette personne, heureuse, il me fixait avec ce regard emplit de bonne volonté, d'espoir.
- Il n'y a qu'avec elle que je supporterais de vivre heureuse, Kurt… » Mes mots avaient légèrement vrillés sur son prénom.
J'avais toujours eu peur de la vérité, mais je ne pouvais plus me cacher, et ça je l'avais très bien compris. Je pouvais seulement la supporter, l'assumer et surtout la contrôler, cette foutue vérité. Mon père m'avait toujours défendue de pleurer en publique, cela rendait les gens pitoyable. Mais maman elle, eh bien en cet instant elle devait être fière de moi pour la première fois de sa foutue misérable vie. Je ne pouvais même pas cligner des yeux sans que des larmes viennent inonder mes joues.
Ils n'y avaient que les bras de Kurt pour me soutenir un minimum. Mais qu'est-ce que j'espérais encore, hein ?
Rachel aimait Finn d'un amour infini. Moi, j'aimais Rachel d'un amour incompréhensible, destructeur. Finn aimait Rachel.
Le schéma classique, imparable et irréversible. Putain.
Alors je n'avais rien à faire. Je n'étais rien face à votre amour. Je n'avais jamais été que celle qui t'avais jeté des slushies en première année et qui t'avais blessés par bien des façon en seconde. Oui, j'étais Quinn Fabray, et toi, tu étais Rachel Berry, ma victime préférée. Il n'y jamais eu que ça entre nous. Et puis, enfin, j'aimerais te souffler une idée : je n'étais pas conne tu sais ? Car je les avais vu ces sourires, qui étaient tellement plus grands, bien plus grands que ceux que nous avions rarement partagés. Même les souvenirs amaigris de ton sourire n'était rien face à ces souvenirs à lui.
Malgré tout cela, je pouvais encore me réconforter en me disant que personne ne t'avais blessée comme je l'avais toujours fait. Et que personne n'allait jamais t'aimer comme moi je le faisais, depuis la première fois où j'avais eu le malheur de croiser ton regard noisette, depuis bientôt trois ans, sans interruption, sans crise cardiaque continuelle et sans putain d'interruptions.
