Base : Bleach

Genre : romance, angst

Statut : sans vouloir être décevant, il n'y aura pas quarante chapitres

Rating : pas pour les enfants (y'a des gros mots) walller... on va dire M.

Pairing : Byakuya/Renji (et l'inverse)

Disclaimer : naaaooonnn ! ils sont pas (pleure) mais alors pas du tout (snirfle) pas du tout à nous (ooouuuiiinnn) mais à Tite Kubo et lui seul (va mettre fin à ses jours).

NA : voici la suite (chose promis, chose due) de Sept jours pour guérir... avec de belles références et (on espère) toujours autant d'humour.


QUARANTE JOURS ET UNE RECHUTE !


Le déni I

« Tu ne coucheras pas avec un homme comme on couche avec une femme, c'est une abomination »

Lv. XVIII, 22


Isane hésita quelques secondes avant d'en parler à son capitaine mais elle devait bien la tenir au courant de tout ce qui se passait dans son hôpital. Absolument tout, même le pire. Surtout le pire.

- Capitaine, un grand nombre de patients s'est plaint du bruit de cette nuit.

- J'imagine cela sans peine, Isane, murmura le capitaine, l'air absent.

Le capitaine Unohana serrait les poings dans les manches de son kimono. Mobilisant tout l'empire qu'elle avait sur elle-même, elle s'était empêchée de crier, de cogner qui que ce soit, de détruire du mobilier, de tuer des malades (enfin surtout un en particulier) et de faire chanter un capitaine. Mais il ne fallait pas pousser non plus. Elle adressa un sourire rassurant à Isane.

- Dis-leur que c'était un cas de blessé particulièrement récalcitrant.

- Hem... certes capitaine, mais nous n'avons pas eu de patient à traiter cette nuit.

- Bien sûr, mais eux ne sont pas censés le savoir.

Sans laisser à son premier officier le temps de protester contre l'odieux procédé, Unohana lui passa une main apaisante sur l'épaule en souriant de toutes ses fossettes, du genre de sourire qui aurait sans peine transformé Aizen en Heidi-petite-fille-des-montagnes.

- Il en va de la tranquillité de notre hôpital et ce ne sera qu'une faute vénielle.

- Oui capitaine, fit Isane, une lueur d'adoration sans borne au fond des yeux.

De son côté, Unohana avait très envie de passer ses nerfs sur un de ses blessés. Un blessé en particulier. Un blessé qui, de toute façon, s'en sortait tout le temps : autant en profiter et lui mettre la raclée qu'il méritait. La bonne nouvelle c'était que si l'action de la nuit avait été à la mesure du bruit émis, ses points de suture avaient dû tous lâcher les uns après les autres, ce qui lui permettrait de faire un peu de couture. Du point de croix sur un ouvrage vivant et hors d'état de se défendre. Cela avait de quoi relaxer n'importe qui.

Les quelques shinigamis qui croisèrent sa route firent un écart de deux bon mètres, se demandant qui était cette femme à l'air cruel qui hantait l'hôpital et ressemblait étrangement au capitaine Unohana.

Renji était resté allongé sur le dos, les yeux perdus dans le ciel clair, les bras croisés sous la nuque, il savourait l'instant. Sans penser à rien, il comptait les oiseaux qui passaient, les feuilles mortes emportées par le vent et les nuages, eux aussi emportés par le vent (ou si ce n'était pas ça, il n'avait pas d'autres explications). Et il était bien, sans penser à rien. Pourquoi fallut-il que le capitaine de la quatrième division choisisse ce moment de plénitude pour venir le voir ?

Elle entra sans frapper et si Renji avait été un peu plus perspicace, il aurait tout de suite deviné qu'il ne fallait pas énerver quelqu'un avec un tel sourire faussement apaisant. Mais, non content d'être sur son petit nuage post-nuit de folie, Renji est aussi demeuré congénital, et dénué de toute perspicacité.

- Lieutenant Abarai.

- Hem... bonjour capitaine.

- Bonjour ? Ha oui, c'est vrai. Moi aussi je souhaite que ce jour soit bon. Je n'ai pas besoin de vous demander si la nuit aussi a été bonne. Étant entendu que tout a été entendu et par tout le monde.

À ces mots, le cerveau de Renji se mit automatiquement en mode « pause », oubliant absolument tout ce qui se passait à l'instant, s'était passé, se passerait un jour ou l'autre. Il ne restait en lui plus que deux choses : la nuit passée, en particulier ce qui s'y était passé, et la dernière phrase de Unohana, en particulier la perspective d'avoir été « démasqués » par tout le monde, même s'ils n'avaient pas fait grand chose pour se cacher, dans le fond. Présentant au capitaine un air parfaitement neutre, il hocha simplement la tête.

- Je suis mort.

- Pas encore. Dans cet hôpital, c'est moi qui en décide.

Et il sombra dans le néant.

Il lui aurait été impossible de dire combien de temps s'était écoulé après ces mots, une heure, une minute, une journée ? Toujours est-il que tous ses neurones se reconnectèrent miraculeusement au moment où une aiguille lui transperçait la peau du ventre.

- HAAAAAAÏÏÏÏIEEUUUH !

Il essaya vainement de se débattre mais deux solides infirmiers le maintenaient sur le matelas, ses jambes liées par une sangle.

- Du clame, beugla un des gorilles. Plus vous bougez, plus cela sera douloureux.

- Vous aviez raison capitaine, murmura Isane en notant quelque chose sur une feuille déjà couverte de caractères. Son état catatonique était passager.

- Effectivement. Mais n'oublie pas que la catatonie du patient interdit formellement l'usage d'un anesthésiant. C'est comme ça qu'on finit par les tuer.

- Parce que là, vous êtes en train de me soigner peut-être ?

- Du calme, Renji, si tu t'agites trop ça fera encore plus mal, intervint Isane ingénument.

Il détourna les yeux de l'air impassible de Unohana. Le capitaine en ressentit une légère pointe de satisfaction perverse. Toutefois, elle n'agissait pas pas pur sadisme, il était réellement très dangereux de mettre un homme déjà en état d'inconscience sous anesthésiant. De la même manière, une douleur mesurée avait toujours eu un effet excitant (au sens médical du terme, bien entendu) et l'avait réveillé sans laisser d'effets secondaires.

Elle trancha d'un geste sec le fil qui dépassait, ce qui arracha un nouveau grincement étouffé au blessé, et elle le dévisagea d'un œil scrutateur.

- Bon, vous ne me semblez pas trop affaibli.

- Si vous le dites, couina Renji, la voix coupée.

- Néanmoins, l'isolement total s'impose.

- C'est vous qui savez.

- Encore heureux. Isolement total, insista-t-elle encore.

Renji lui adressa un regard de chien battu pendant quelques secondes et puis renonça. De toute façon, le mieux pour lui était d'obéir et se taire, en attendant que quelque chose se passe.

- Oui m'dame.

Abandonnant toute idée de faire autre chose que ce qu'on lui ordonnerait, Renji acquiesça alors que les infirmiers s'apprêtaient à partir. Et puis une lueur de résistance brillant dans ses yeux mi-clos.

- Heu... capitaine ?

Le sourire crispé de la shinigami lui fit presque oublier la terreur que provoquaient les attitudes polaires de Kuchiki. Décidément ces capitaines, il devaient être choisi pour leur aura pétrifiante, ce n'était pas possible autrement. Bref, prenant son courage à deux mains, Renji affronta Unohana du regard. Hé ho ! Il avait déjà défié mister freeze, c'était pas une bonne femme qui allait lui faire peur !

- Au fait... hem. Si je ne peux voir personne, je pourrais avoir heu... des occupations ?

Unohana le foudroya du regard. Qu'est-ce qu'il s'imaginait ? Qu'elle lui fournirait des gogo danseuses ? Il n'en avait pas eu assez comme ça ?

- J'avais un jeu de go les premiers jours, est-ce que vous m'autorisez à...

- Ho... bien entendu, acquiesça-t-elle, plutôt soulagée. Mais vous n'aurez personne avec qui jouer, lieutenant.

- Oui oui, je sais bien. Mais... heu... je refais des parties apprises, bafouilla-t-il. Parce que parler du jetage de pierres entre les lattes du plancher n'était pas la meilleure chose à faire vu l'air passablement agacé du capitaine ce matin-là.

Elle le gratifia d'un regard suspicieux avant d'acquiescer.

- Je vais voir ce que je peux faire.

- En fait, c'est le goban d'Izuru Kira. Je suis sûr qu'il sera ravi de me le prêter à nouveau.

- Bien.

L'équipe médicale sortit, et Isane eut juste le temps de lui adresser un petit signe de la main, plein de compassion et de sympathie.

Une fois seul, Renji observa avec curiosité et douleur les nouveaux points de suture. Il se rendit compte avec horreur qu'il commençait à entretenir avec ces bouts de fil des rapports non dénués de tendresse. Cet hôpital avait sur lui un effet des plus terrifiants. Et les points lui tiraillaient la peau du ventre, accompagnés d'une douleur intolérable. Si on lui avait demandé son avis, il aurait pu jurer qu'il avait effectivement besoin d'anesthésiant.

Tout ça parce qu'il avait couché avec quelqu'un dans une chambre d'hôpital. Bon, d'accord, ils avaient peut-être été un peu bruyants, vu le lieu et l'heure. Il avait même peut-être été trop actif pour un convalescent. Voilà ce que c'était d'avoir un capitaine irresponsable.

Il l'avait eu. Enfin, pensa-t-il un peu honteux mais fier de lui quand même. Depuis le temps qu'il en rêvait, qu'il se demandait à quoi pouvait ressembler Kuchiki sans le vernis du capitaine, et sans les vêtements aussi, mais c'était accessoire. Depuis le temps que cette dangereuse fascination lui faisait mal, il se sentait enfin léger, libéré de cette obsession. Il l'avait vu et ça avait été bien.

Mais maintenant. Rien.

C'était triste à dire mais il se sentait vidé, sans force et sans volonté. En fait, ça lui avait toujours fait ça, il était capable de poursuivre une obsession avec la plus grande pugnacité mais une fois son but atteint, une fois qu'il avait ce qu'il voulait, il ne parvenait pas à se sentir encore intéressé par cela. Comme si seule l'attente, la frustration, le désir comptaient, la satisfaction signant la fin de sa passion. Il avait déjà connu ça, des années auparavant, et depuis, il s'était juré de ne plus se prendre de passion pour qui que ce soit. Il avait dû oublier l'épisode « serment à vie de ne plus remettre ça » avec Kuchiki, ou plutôt, il n'avait tellement pas cru à la passion pour lui qu'il s'était trouvé devant le fait accompli à la dernière seconde. La seule excuse qui lui venait à l'esprit c'était un « j'l'ai pas fait exprès » terriblement adulte.

Et il sentait, comme à chaque fois, son esprit se détacher de tout, vagabonder loin de cette chambre et loin des souvenirs de la nuit. Il pensait aux pierres de go, à Rukia qui devait mourir d'envie de le tuer, aux oiseaux qui passaient au dessus de l'hôpital depuis le matin dans l'encadrement de sa fenêtre. Il pensait à tout sauf à Kuchiki et ça ne lui manquait pas le moins du monde. De toute façon il le savait depuis longtemps, il était inconstant et ne comptait pas changer de sitôt. Ce qu'il aimait, il l'aimait, ce qu'il admirait, il l'admirait, ce qu'il craignait, il le craignait mais l'objet de ses élans passionné mourait avec l'assouvissement de ses désirs. Et puis il ne lui servait à rien : il était consigné pour une durée indéterminée, et si Unohana avait compris avec qui il avait passé la nuit, il n'était pas près de remettre ça.

Il ne s'en voulait même pas, ne se sentait pas coupable. C'est vrai quoi, il n'avait rien promis, rien juré et n'avait pas dit une seule fois qu'il l'aimait. La coupable langueur qui le prenait était son état naturel après une nuit passionnée, quelle que soit la personne qui l'avait partagée avec lui, pas un signe de regret ou quoi que ce soit dans ce genre. Parfois il se sentait triste de ne pas savoir aimer un amant comme il avait su aimer ses amis, ou celle qu'il considérait comme sa sœur. Et puis la tristesse passait, tant qu'il pouvait rêver à une nouvelle étreinte, un glacial capitaine qui ferait bien l'affaire.


Byakuya ferma les yeux

Contre toute attente, il avait atrocement mal. Oui, contre toute attente, parce qu'il s'estimait parfaitement capable de supporter... ce que son intellect refusait maintenant de nommer, bref, il pouvait supporter ça (physiquement au moins, mentalement, c'était une toute autre histoire). Mais alors pourquoi est-ce qu'il n'arrivait pas à trouver de position confortable pour s'assoir ?

Et ce n'est que le début.

Il referma les yeux, consterné par ce qu'il en arrivait à penser. C'était certainement une des pires choses qu'il s'était dit depuis des années. Ce n'est que le début. Parce que ça allait recommencer en plus ? Avait-il réellement passé cette nuit, ou bien avait-il rêvé, ou cauchemardé, ou était-ce le pur produit d'un fantasme trop honteux pour être nommé ? Comment avait-il réussi à se retrouver en une telle situation ? Il avait couché avec un homme, avec un subordonné en plus. En plus, c'était Renji Abarai. Pas que ce soit une circonstance aggravante, mais bon... si en fait, quitte à se compromettre avec un homme, autant qu'il s'agisse d'un spécimen raffiné et de haute extraction, mais il avait fallu que ce soit Renji.

Le pire c'était qu'il commençait à réaliser à quel point il était le seul responsable de cela. D'abord, les circonstances : c'était lui qui était venu le voir, qui l'avait approché, qui avait commencé à jouer, qui avait toléré les effleurements et autres choses qui lui paraissaient maintenant les pires inconduites.

Pire, il portait l'entière responsabilité morale, à ses yeux. Son vice capitaine venait du Rukongai, de ses zones les plus insalubres et Dieu sait ce qui se passe dans ces quartiers. Pas étonnant que ses mœurs s'en ressentent. Renji avait fait ses classes dans la division de Aizen et Ichimaru, deux personnages dont Byakuya connaissait maintenant les déviances morales, qui sait ce qu'ils avaient eu le temps d'inculquer à leurs hommes, du point de vue des principes de bienséance. Sans compter qu'il avait atterri dans la onzième division en fin de compte, et là, il ne voulait même pas savoir ce qui s'y passait au quotidien. La rumeur voulait que tous les shinigami de cette division soient cantonnés dans des dortoirs communs, sans la moindre intimité, se pliant toujours aux exigences du groupe. Son indignation faisant le reste, Byakuya Kuchiki imagina des choses bien lointaines de l'esprit de caserne qui régnait chez Kenpachi. C'est bien simple, Zaraki Kenpachi n'avait même pas conscience que les chambrée masculines pouvaient faire un tel scandale dans un esprit aussi coincé que celui de Kuchiki.

Bref, arrivé finalement à la conclusion qu'il était inévitable que son vice-capitaine mène une vie dissolue, que le contraire serait impensable, qu'il était même surprenant que ça ne ce soit pas manifesté plus tôt, Kuchiki se laissa submerger par la culpabilité.

Non. Il n'avait pas compris ce qu'il faisait, il avait agi inconsidérément, et voilà où il en était : nulle part.

Il se leva en ravalant une grimace. C'était insupportable, comment aurait-il pu s'en douter ? Mais s'il avait su, il n'aurait certainement pas laissé Renji prendre autant de libertés. Et quand bien même il eût tout ignoré des effets secondaire de cette nuit, il n'aurait jamais dû laisser ceci arriver. Il aurait dû. Mais il l'avait fait tout de même. Curieux comme les regrets sont toujours les premiers arrivés sur les « lieux du crime ».

C'était bien décidé, direction l'hôpital et explications sans discussion avec son officier. Un : ça n'aurait jamais dû se produire, deux : ça ne se reproduira jamais, trois : ça ne s'est jamais produit. Altération de la réalité en trois étapes, mais dans son esprit, il avait de loin le pouvoir de décider de quoi le passé, le présent et le futur étaient fait. Il était Byakuya Kuchiki et on ne le contredisait qu'à ses risques et périls.

Ceci dit, et toutes bonnes résolutions prises, il considéra comme plus sage d'attendre de pouvoir marcher normalement, et non pas comme quelqu'un ayant... oui, « un manche à balai dans le cul » était une image triviale mais fidèle à son impression actuelle. Bref, attendre que la douleur commence à s'estomper et tromper son ennui et sa honte en faisant semblant de s'intéresser aux monceaux de dossiers qui prenaient, lentement mais sûrement, possession de son bureau. Faire diversion, au moins jusqu'au lendemain, éviter la confrontation, reprendre le dessus... bref, se dégonfler. Mais quand on s'appelle Byakuya Kuchiki et qu'on ne peut plus s'asseoir pour cause de nuit agitée avec un subordonné, on n'est plus à ça près.

A SUIVRE...