Le Bestiaire fantastique de Xenophilius Lovegood

Joncheruine

Description : qui ne connaît pas (même sans en avoir jamais vu) les joncheruines ? Cet insecte minuscule (tellement minuscule, d'ailleurs, qu'il faut, pour le voir, un lorgnospectre comme celui donné en prime à l'achat d'un numéro du Chicaneur en 1996) a la malencontreuse habitude de s'introduire dans le cerveau des humains par les oreilles et d'y embrouiller les idées. Le joncheruine est pourvu de quatre ailes qui produisent un bourdonnement presque inaudible, mais très caractéristique. Le corps de la créature est noir, ce qui a sans doute inspiré l'expression moldue « avoir les idées noires ». Pour éloigner les joncheruines, rien de mieux que les boucles d'oreilles en radis, car la seule odeur de cette racine provoque chez l'insecte des flatulences nauséabondes dont ils sont eux-mêmes incapables de supporter la senteur. J'admets que les boucles d'oreilles en radis ne conviennent pas à tout le monde, en particulier aux messieurs. Après bien des recherches, mon père a découvert que la bonne humeur et le rire constituent aussi des répulsifs très efficaces. Enfin, si, malgré toutes les précautions prises, des joncheruines réussissent à s'introduire dans votre tête, deux moyens existent pour les en chasser : d'abord, vous pouvez secouer la tête comme vous le faites pour déboucher une oreille dans laquelle l'eau s'est introduite durant une baignade; ensuite, si vous vous trouvez dans un endroit où secouer la tête serait mal vu, vous pouvez tout simplement bâiller ‒ les joncheruines seront tellement insultés par votre réaction qu'ils déguerpiront aussitôt. Le climat de morosité dans lequel baigne le monde actuel constitue un terreau très favorable au développement des joncheruines. Plus il y aura de joncheruines, plus le nombre de leurs victimes augmentera, rendant ainsi le monde encore plus morose. Il faut donc à tout prix rompre ce cercle très vicieux. Souriez, riez et restez positifs si vous ne voulez pas que notre planète finisse jonchée de ruines.

Anecdote : comme chacun sait, mon père a inventé un appareil pour éloigner les joncheruines et permettre ainsi aux gens de se livrer en toute quiétude à des travaux de l'esprit. L'appareil consiste en une reproduction du diadème de Serdaigle auquel sont fixés deux cornets qui émettent des ondes répulsives. On place l'appareil sur sa tête et on est ainsi protégé contre ces vilaines bestioles. La production en série de cette protection s'est cependant révélée trop compliquée, bien des gens hésitant par ailleurs à la porter dans un lieu public ‒ comme une bibliothèque ou une salle d'étude de Poudlard. Des recherches approfondies ont toutefois permis à mon père de mettre au point un sortilège pour protéger plusieurs personnes à la fois. Il s'agit simplement de lever sa baguette et de prononcer la formule suivante : quod tibi fieri non vis, alteri ne feceris (ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse). Ce sortilège a pour effet de créer des joncheruines de joncheruines ‒ autrement dit, des insectes proportionnellement aussi minuscules pour les joncheruines que celles-ci le sont par rapport à nous, ces petites pestes s'introduisant dans la tête des joncheruines et leur pourrissant la vie. Résultat : les joncheruines quittent les lieux à tire-d'aile et n'y remettent plus les pattes.