Eeeet c'est le come-back de ma série d'OS Patron x Hippie MPREG ! :D
Bonjour mes chéries, ici la Biche et oui, vous avez bien lu, je ressors mes petits OS du placard parce que...
Holy crap. Ils me manquaient, voilà ! TwT
Bon et d'un autre côté, vous avez été assez nombreuses à m'en parler durant la Japan Expo, ou en privé (Hein, HippiqueAndYDeaLD ? :p) ce qui m'a grandement motivée alors...Voilà, remise en ligne de mes deux premiers OS, et une suite prévue pour bientôt. :'3
Bon sur-ce ne perdons pas de temps, on y va !
Rating : T, pour yaoi, MPreg, vulgarité Patronesque,...
Disclaimer : Bah le Patron et le Hippie ne m'appartiennent toujours pas quoi ! XD Pas plus que SLG et Mathieu donc voilà, seuls les OS sont de moi.
Playlist :
Stairway to Heaven – Led Zeppelin
What is Love ? - Lea Michelle
Étrange – Dobacaracol
Chandelier – Sia (Ou version Sam Tsui)
Allez... Bonne (re)lecture, mes chéries. :)
Je ne m'attendais pas à ça
Il n'oserait pas le regarder en face, si l'occasion venait à se présenter à nouveau. Ou… Du moins plus. Tout plutôt que de recroiser l'éclat de la lumière se réfléchissant dans ses lunettes de soleil et sur son crâne fraîchement rasé.
Non, comment aurait-il pu de toute façon, après ce qu'il s'était passé ? Après ce qu'il savait ?
… Il ne le pouvait tout simplement pas. C'était aussi simple que ça.
Assis au bord du canapé de la maisonnée Sommet, son chapeau fétiche posé nonchalamment sur la tête et déjà son troisième joint de la journée à la main, il regardait les autres s'affairer, vaquer à leurs occupations, tous trop pressés pour s'intéresser à lui. Comme d'habitude. Un jour de plus, comme il y en avait déjà tant eu, et comme il y en aurait encore toute une flopée d'ici à ce que leur dernier souffle ne se décide à venir.
Il secoua lentement la tête à cette idée décidément trop sombre pour lui, souriant béatement comme il le faisait toujours. La fumée qui s'échappait du petit cylindre incandescent de papier et d'herbes lui montait à la tête, lui titillait les narines, l'invitant à tirer une bouffée de plus, prêt à lui offrir un aller simple pour le pays des licornes, des couleurs, des sensations et de la douce folie qui était la sienne, loin de toutes les mornes priorités de la vie réelle. Il était mieux ainsi, dans les vapeurs de quelque drogue, l'esprit libre de tout tracas. Pendant un temps du moins, car au final, la réalité le rattrapait toujours. C'était inévitable.
Et en l'état actuel des choses, la réalité lui déplaisait. Énormément. A peu près autant que le moment où il réalisait qu'il n'avait plus rien à consommer, synonyme d'une courte période de sevrage le temps de faire jouer de ses relations pour s'en procurer de nouveau un plein carton, sans annotation ni adresse, livré la plupart du temps par celui que tous connaissaient comme étant le plus grand criminel que la Terre ait porté. Cette si belle planète, si bleue, si ronde, si verdoyante par endroits… Bleue, comme une orange… Tant mutilée par la main de l'Homme, cette chose égoïste et dépourvue de reconnaissance, de loin la créature la plus indigne dont elle ait pu enfanter.
Ouais… Pauvre Terre. Elle avait été mal inspirée sur ce coup-là.
Le Hippie laissa s'échapper d'entre ses lèvres l'épaisse fumée blanche qu'il venait de tirer du joint à cette pensée, un étrange sourire à la fois mélancolique et hilare sur les lèvres. Très mal inspirée même, c'était fou de se planter à ce point quand même !
Sérieusement, les poissons, les oiseaux, les ornithorynques, les hérissons et les protées, ça suffisait pas ? Ça lui avait réellement semblé si vital que ça de rajouter l'abomination qu'était l'être humain au milieu de ce charmant tableau ? Comme si tout aurait été trop parfait pour subsister sans lui ?
C'était peut être ça au fond. Sans l'Homme le monde aurait peut être été trop parfait, voire ressemblant au Nirvana pour pouvoir continuer d'exister sans une quelconque once d'ombre, de mal.
… Il n'empêche pas que quelques tremblements de terre et un tsunami de temps à autre, ça aurait largement suffit !
… T'en as trop pris Gros, sans déconner. Vraiment trop.
Il regarda Maître Panda passer devant lui, le nez plongé dans le cahier au sein duquel il rédigeait toutes les chansons de sa rubrique, et lui adressa un sourire franc, doux en voyant l'homme en kigurumi lever les yeux du carnet pour le saluer d'un geste de la main. Il l'aimait bien, le Panda. Il était gentil, même si le dernier épisode de SLG l'avait exposé sous un jour nettement moins meilleur et une bien plus sale gueule, et il respectait la nature lui ! Et puis, il lui accordait un peu d'importance, ça changeait de ceux qui, en ces lieux, ne le voyaient un peu que comme une plante aussi verte que celle qu'il fumait à longueur de journée.
Oui, vraiment, c'était un chouette petit, le nouveau.
Pas comme tous ici, du moins.
Le Hippie remis son chapeau en place, distraitement, avant de se décider à se lever pour aller rejoindre son cher refuge, le Combi vert mousse qui stagnait dehors. Son cocon, son univers.
Au moins là bas, il aurait la paix. Pas de regard, pas de manifestation de leur pseudo-sainte société de consommation.
Pas de fausse humanité, pas de tentative de sourires puant l'hypocrisie. Juste lui et son voyage dans un monde bien haut delà de ce que les autres ne pourraient jamais connaître. Un monde de saveurs et de couleurs. Parfait.
Enfin, à l'odeur d'herbe brûlée et aux couleurs délicieusement psychédéliques, plus exactement.
Il ne le sentait pas.
Le Prof s'était réveillé avec le sentiment que quelque chose n'allait pas, et malgré tout ses efforts, cette idée ne lui était pas sortie de la tête. Il n'arrêtait pas d'y repenser, inlassablement.
Pourtant, il avait fait ce qu'il avait à faire Il était allé délivrer la fatale sentence qui l'avait accueillie dans son semblant de laboratoire au premier concerné, oui.
S'il avait du se faire violence pour le faire ? Oui.
S'il aurait préféré se taire et oublier tout ça ? Oui.
S'il avait été déchirant de voir un de ses homologues s'effondrer devant lui, face à ses mots qu'il avait pourtant voulu les plus rassurants et les plus doux possibles ? Oui.
S'il avait pleuré en retournant dans son petit laboratoire improvisé ?
… Définitivement oui. Et en maudissant la raison de tout ce bordel, en passant.
Parce que les gens lui parlaient. Tous. Ils se croyaient être les seuls à le faire, et pourtant, au final, il était celui qui en savait toujours le plus dans la maison grâce aux aveux des uns et aux ragots des autres. La Science Infuse, en bref.
Mais là, pour la peine, il aurait bien aimé ne pas avoir à savoir ça. Nan, réellement.
Mais qu'est-ce qui avait bien pu lui passer par la tête, à l'autre psychopathe en noir ? Hein ? Les vacances d'été avaient-elles suffit à lui griller assez de neurones, qu'importe par quel délicieux et illégal moyen il serait passé pour un tel résultat d'ailleurs, pour en arrivent là ?
Oh. De toute façon, que pourrait-il trouver à dire, s'il allait le mettre au parfum et en profiter pour lui secouer les puces ? C'était leur problème, pas le sien. Même pas le leur en passant, seulement celui de leur homologue. Il en aurait rien à foutre, lui. Toujours utiliser, toujours profiter, puis sourire, allumer une cigarette, tourner les talons et s'enfuir comme un lâche. Pas d'attache, pas d'avenir. Pas d'espoir.
Profiter. Et abuser du bonheur éphémère offert par des corps sans noms à ses yeux car nombreux, infiniment trop nombreux, jusqu'au point de rupture, jusqu'à la brisure, jusqu'à ne plus rien pouvoir y trouver. Jouer avec les âmes, les sentiments, les cœurs et la chair, jusqu'à tout consommer, jusqu'à tout réduire en cendres. Vouloir, prendre, jouir et détruire.
Il était écœuré par un mode de vie aussi malsain et aussi décousu. Vraiment.
Le garçon en blouse tournait en rond dans son laboratoire, essayant en vain de trouver une occupation pour s'aérer l'esprit et ne plus penser à tout ça. Ça ne le concernait pas, ce n'était pas ses oignons. Ça ne l'avait jamais été d'ailleurs, et puis, il n'était pas venu le voir pour ça à la base, le Hippie !
Alors pourquoi une obsession pareille, bon sang ! Y avait-il seulement une raison au fait que cette nouvelle ne pouvait pas le laisser tranquille ?
… Oui, bien sûr qu'il y en avait eu une. Et une sacrée inquiétude même ! Ça touchait sa famille quand même, sa fratrie !
Et puis zut, on parlait pas d'une anémie ou d'un rhume !
La question n'était pas de savoir si ça le touchait en fait.
Le scientifique s'était arrêté net de marcher, les yeux exorbités derrière ses lunettes. C'était ça en fait, le problème majeur dans l'histoire. Bien plus encore que de la gravité de ce qui arrivait à leur si cher écologiste qui n'avait les pieds sur terre qu'environ trois jours par an. Bien plus encore que de se dire que le pauvre Hippie allait avoir du souci à se faire pour expliquer tout ceci au plus pourri d'entre eux, si seulement il acceptait déjà ne serait-ce que de remarquer sa présence. C'était qu'il ne savait pas comment pareille chose avait pu arriver, c'était improbable ! Impossible !
C'est impossible physiquement parlant, même génétiquement ! On a le même ADN ! Le même corps ! Nous l'aurions su si on avait la seule particularité physique capable de provoquer un tel miracle ! Alors diantre, pourquoi ?
Le Prof remercia intérieurement Mathieu de leur avoir rasé le crâne quelques jours auparavant, pour le bien de l'émission. Il se serait réellement arraché les cheveux sinon, pour la peine.
Il n'avait pas su quoi répondre au « pourquoi ? » du Hippie quand il avait fini de lui annoncer la nouvelle. Et ça le rendait malade, d'avoir du se contenter d'un simple « Il est des choses que nul ne peut expliquer pour le moment, pas même moi...».
C'était pas une réponse ça.
Et le Hippie, lui, était Dieu seul savait où dans la maison, probablement aussi perdu que ce que le Prof pensait qu'il devait l'être en ce moment. Il n'avait jamais vu quelqu'un d'aussi secoué, d'aussi stupéfait… Jamais…
Et pire encore, il n'aurait jamais cru possible de voir son ami anti-capitaliste se mettre à pleurer dans ses bras, l'étreignant maladroitement, gauchement, en lui parlant du Patron de la façon dont il l'avait fait. Avec un tel désespoir. Avec une telle détresse dans la voix.
Et pourtant avec un tel respect qu'il n'avait rien trouvé à lui reprocher, après sa tirade. Ni son inconscience, ni une quelconque connerie qu'il aurait pu faire, ni même son côté un peu niais et rêveur sur les bords. Et encore moins les sentiments qu'il avait tenté de lui décrire entre deux déchirants sanglots. Surtout pas, pour le coup !
C'est surréaliste. Ça ne peut pas arriver, tout ça… C'était si irréel…
Le scientifique lissa un pli sur sa blouse de la main, sans même le regarder. Il était nerveux. Préoccupé. Il avait peur pour le Hippie. Autant les autres, dans une situation du genre, il aurait dit qu'ils n'avaient qu'à se débrouiller, autant lui…
Bah c'était le Hippie quoi. L'élément de la maison qu'on avait presque tendance à oublier tant il était discret et surtout celui qui avait toujours tendance à voir le verre plus à moitié plein que l'inverse…
Et la sorte d'homme brisé qu'il avait vainement essayé de rassurer n'était pas le Hippie qu'il connaissait.
C'est pas bon du tout ça, putain.
Il devait en parler.
Mais à qui ?
Le Prof prit dix secondes pour y réfléchir puis soupira bruyamment et se décida à quitter son antre, d'un pas vif.
Il était temps de le mettre face à ce qu'était réellement la vie, l'autre abruti en costard.
Première cigarette de la journée, du café bien noir comme il l'aimait, et tout ça après une nuit passée avec Tatiana, sa préférée. Que demander de plus ?
Ouais, franchement, il ne lui manquait guère plus à bien y penser.
Si, éventuellement, que le gamin baisse le son de sa console de jeu, à laquelle il jouait tranquillement installé sur la chaise à côté de lui dans la cuisine, complètement déconnecté de la réalité qu'il ne rejoignait de temps à autre que pour mordre dans son croissant. Mais ça, il savait qu'il n'aurait pas droit à pareil honneur, puisqu'au mieux, il n'aurait qu'une cinglante remarque de la peluche géante qui était penché sur ses paroles de chansons, une tasse de thé de bambou fumant devant lui. « Chacun sa liberté, Patron, on vient pas te chercher des noises quand tu fous le bordel à trois heures du matin avec une de tes filles sans identité, alors t'es gentil et tu la fermes. Ou tu sors.».
A choisir il préférait faire avec, et que tout aille au mieux pour tout le monde. Ça serait très bien comme ça, la journée commençait bien après tout.
… Enfin il pensait qu'elle commençait bien.
Ça, c'était avant que le Prof ne débarque dans la cuisine en furie, cherchant visiblement quelqu'un des yeux en marmonnant tout un tas de mots qu'il n'arrivait pas à saisir, pour peu que les dires du scientifique lui eussent été accessibles et l'eussent intéressé. Hors, on y était pas encore, quelque soit le cas sur lequel on se penchait.
- Il est où le Patron ? J'ai quelque chose à régler avec lui, lança-t-il soudainement, de façon parfaitement audible, n'ayant visiblement pas remarqué sa présence. Et en effet, à en juger par sa voix, il lui en voulait, allez savoir pourquoi.
Le Patron soupira, puis prit le temps de tirer une taffe, voire même deux, avant de se décider à s'avancer du coin de la cuisine dans lequel il avait calé sa chaise, relativement peu enclin à se prendre des remontrances dans la figure de bon matin. Qu'est-ce qu'il pouvait bien lui vouloir, Quatre Yeux ?
- Nettoie tes hublots de temps en temps, ça changera. Tu m'veux quoi ?
- Toujours aussi aimable à ce que je vois.
- T'as qu'à pas me sauter dessus à onze heures du matin. Bon accouche, tu voulais me parler ?
Le Panda et le Geek avaient interrompu leurs activités, fixant les deux antagonistes avec surprise. Enfin, surtout le Prof en fait. Il ne lui arrivait jamais de venir se frotter au Patron, il n'était pas connu pour être une personnalité dotée d'un fort caractère après tout… Pour qu'il sorte de ses gonds comme ça, ça devait être grave, au minimum.
- Tu as vu le Hippie récemment ?
… Hein ?
Le Patron fixa le scientifique avec de grands yeux ronds derrière ses lunettes noires. C'était quoi ça ? Pourquoi lui demander ça à lui, qui passait la moitié de sa vie dehors ? Et puis il faisait bien ce qu'il voulait, le Hippie ! C'était pas lui qui allait le surveiller, au pire, le Panda ou Mathieu s'en chargerait, il était grand quand même.
Alors pourquoi venait-on lui demander ça, à lui ?
- Je me demande bien pourquoi tu me demandes ça tiens, la peluche serait déjà plus à même de te répondre que moi je parie, répondit-il en haussant les épaules, pas plus intrigué que ça. Non, je ne l'ai pas vu aujourd'hui, si c'est ta question. Il doit sûrement planer dans son bus, pourquoi ?
- Oh, je pensais juste que tu pourrais être le premier à t'enquérir de ce qu'il devient, dernièrement. Le Prof avait insisté sur le dernier mot, appuyant ses deux mains sur la table en le regardant avec intensité à travers ses lunettes. N'ai-je pas raison ?
- J'ai une tête à jouer les mères Thérésa et à surveiller un junkie à longueur de journée, sérieusement ?
- Sincèrement, oui. A moins d'être un lâche, ce dont je ne doute pas une seule seconde te connaissant un minimum !
Lui, un lâche ? Le Patron avait froncé les sourcils à cette remarque. D'où se permettait-il de lui jeter ses petites remarques comme ça ? En tout impunité, en plus ! Il tenait réellement à ce qu'il s'énerve ou quoi, le binoclard ?
Il se leva de sa chaise, venant adopter la même posture que son interlocuteur tout en tirant une taffe dont il prit bien soin de souffler la fumée en direction du visage du Prof. Simple commodité.
- Alors écoute-moi bien toi, je suis de bonne humeur, alors on va éviter de changer ça, d'accord ?
- Non. Y a des moments où il faut que tu assumes tes conneries.
- Mes conneries, tu dis ?
- Hé, Prof, t'y vas un peu fort la quand mê-
- Toi la prostituée japonaise, en veilleuse, ça ne concerne que lui et moi. Merci.
- Oui tes conneries, Patron. Tu nous as fait quoi là ? T'as perdu la tête ou quoi ! Le Hippie, merde ! C'était quoi l'idée, il est shooté le trois quart du temps, il s'en souviendra même pas ? Personne ne le croirait ? Il n'en parlerait pas, peut être ? Alors vas-y, parle, je t'écoute !
- De quoi tu…
L'homme en noir allait pour lui répondre de la façon la plus violente qui soit, du moins celle juste avant que les coups ne partent, lorsqu'il s'arrêta, interpellé par les mots de son homologue en blouse. Minute. Faire quoi au Hippie, au juste ?
… Oh bordel, pourquoi est-ce qu'il est allé parler de ça à l'autre foldingue à lunettes… L'idiot.
Oui, finalement, il avait raison le Prof. Il s'était bien passé quelque chose avec le Hippie. Ça faisait quoi… Deux mois ? Oh oui, facilement. La soirée de clôture de la saison 4. L'alcool, l'euphorie générale… Ouais, bon, il avait trouvé la soirée un peu bon enfant, sans filles ni réelles dérives à la Projet X, mais ça restait un brin correct. Une soirée sans histoire quoi. Puis quelques mots échangés, des esprits éméchés… Il était sorti fumer avec l'écologiste dehors, puis ils avaient partagé un joint ensemble, le Hippie s'étant senti d'humeur plus que généreuse ce soir-là, à la plus grande joie du criminel. Il l'aimait bien, le Hippie. Beaucoup même, contrairement aux autres qui l'insupportaient au plus haut point généralement !
Une chose était sûre en tout cas, ce n'était pas lui qui avait embrassé le Hippie en premier. Ni qui lui avait proposé d'aller dans son Combi, pour une fois qu'il ne prenait pas les devants… La suite, elle, se passait de mots. Ça avait été…
Le Patron eut envie de se mettre une gifle à cette pensée. Depuis quand donnait-il dans le sentimental comme ça ? C'était pas lui ça !
Et pourtant, ça avait été merveilleux. Vraiment. Simple, long, lent… Mais génial.
Et le Prof voyait ça comme un viol ? Mais où allait le monde, sans déconner !
Avant que le Prof ne se soit lancé dans un énième discours moralisateur et riche en critique, il l'avait attrapé par le col de sa blouse et plaqué contre le premier mur à disposition, poussant sans ménagement le Geek qui avait eu le malheur de se trouver au milieu et qui avait fini par terre, sa console dans les mains, encore sous le choc. Là, cette fois-ci, il était allé trop loin.
- Il t'a dit quoi au juste, le Hippie ? Réussit-il à articuler à peu près calmement, son regard de glace néanmoins pleinement perceptible à son interlocuteur de part son intensité et l'indignation qu'on y trouvait. Le Prof déglutit, mal à l'aise.
- Qu'il s'était passé quelque chose entre vous, et que depuis tu l'ignorais, que ça lui faisait du mal et-
- Et pour toi, parce que je « l'ignore », ça y est je l'ai violé c'est ça ?
- Je n'ai jamais dit ça voyons !
- S'il y a bien un truc que j'aime pas, c'est qu'on me prenne pour un con, Prof. Pourquoi tu penses ça de moi ?
- Parce que tu es peut être le plus grand des criminels qui ne respirent encore sur Terre ?
- Peluche, ta gueule.
- Quoi, ça te vexe ? Maître Panda s'était levé, clairement prêt à en découdre, les poings serrés. Si tu veux qu'on s'explique, lâche le pauvre Prof qui n'a rien demandé et on règle ça entre mâles, aller viens là !
Le Patron lâcha d'un coup le scientifique, partant derechef vers l'ursidé qui ne le lâchait pas du regard, cherchant clairement à l'intimider. Il allait lui taper dessus. Vraiment. Histoire qu'il apprenne un peu qu'ici, on ne lui tenait pas tête. C'était bien parti pour en tout cas.
Mais ça c'était avant que le Prof ne se décide à ouvrir la bouche.
Et ce que le criminel avait entendu lui avait coupé le souffle, littéralement.
- Il attend un enfant de toi, sombre crétin. Me demande pas comment, j'en sais foutrement rien pour une fois dans ma vie. Mais les faits sont là, il est venu me voir pour une prise de sang parce qu'il pensait faire une carence en fer, ou qu'il avait peut être pris un mauvais truc pour avoir autant de nausées… Je t'avoue comment, dis-moi, que la gueule que j'ai du tirer en réalisant ça aurait probablement valu des millions sur Internet, et aurait sûrement rejoint la grande et heureuse famille des Memes ? Hein ? Tu sais pas ? Ah ben tant mieux, continue de la boucler, ça changera pour une fois ! En attendant, il était clairement sous le choc quand je suis allé lui apprendre la « nouvelle ». Et la seule chose qu'il ait trouvé à me sortir, c'est de me dire qu'il voulait que tu arrêtes de l'ignorer après ce qui s'était passé, comme tu le faisais avant. Qu'il avait espéré que tu voyais un minimum d'intérêt dans sa personne, pour lui avoir accordé un tant soit peu d'affection… Et bah non, lui du coup il se retrouve en cloque et toi, tu t'en contrefiches ! Et dans le fond, le pire, c'est que ça ne me surprend même pas venant de toi ! Tu me dégoûtes, Patron.
… Quoi ?
Le criminel avait l'impression qu'on lui avait porté un violent coup à la tête. Mais genre, du style à lui avoir fracassé le crâne contre la bonne vieille table en chêne capable de résister à tout du salon.
Il ne comprenait plus rien, ne saisissait plus la moindre information, ne voyait plus rien même. C'était trop pour lui d'un coup. Son monde venait de s'écrouler, la Terre s'était arrêtée de tourner.
Il avait mal entendu, c'était pas possible.
… Ah non, vue l'expression abasourdie du Panda en face de lui, soit c'était vrai, soit ils avaient été deux à mal entendre à l'évidence.
Il chercha des yeux le gamin qu'il trouva toujours au sol, espérant trouver en lui une once de soulagement, avant de constater qu'il était en train de le fixer avec des yeux aussi ronds que des soucoupes, la mâchoire prête à se décrocher Pas besoin d'en voir plus, il ferma les yeux.
Oh bordel, mais c'était quoi ce foutoir…
- Et comment ça pourrait être possible, dis-moi, monsieur je-sais-tout ?
- Tu as envie que j'essaie vaguement de t'en coller une parce que tu sembles ne pas avoir réalisé que je t'ai dit que j'en savais rien, ou tu comptes encore penser pendant longtemps que je m'amuserais à dire un truc aussi improbable pour le fun, à onze heures du matin ?
Pas besoin de plus, réellement.
Là, pour la peine, le Patron ne savait plus quoi répondre. Ou faire même. Ni où se mettre d'ailleurs.
Ouais, même le corps à corps avec la table du salon, ça lui semblait moins violent d'un coup.
Qu'est-ce qu'il devait faire maintenant, au juste ?
Je dois lui parler, simple non ? C'est ce qu'on est censé faire, dans ce genre de situations, non ?
… Et dire qu'il avait été le seul avec qui il avait réellement eu la flemme de penser à un de ses sempiternels préservatifs à la banane, dans le feu de l'action… Pour le coup, c'était le cas de le dire, c'était lui le plus banané dans l'histoire. Ah, pour sûr, ils devaient bien se fendre la poire, les morceaux de latex enfermés dans sa commode !
Il se jura qu'il les brûlerait tous ce soir. Jusqu'au dernier, par désir de vengeance. Tous des traîtres !
Fais pas le con putain, et va le voir !
- Mais… C'est impossible…
Maître Panda était aussi blanc que les endroits qui l'étaient sur son kigurumi, alors qu'il cherchait de la main la première chaise à disposition pour s'asseoir. Lui aussi, sa conscience avait du mal à digérer l'information.
Il fallait agir. Maintenant.
- … Franchement, déjà on existe. Ça te semble pas assez improbable par hasard, comme fait ? Ici, plus rien ne pourrait m'étonner.
Le criminel récupéra sa cigarette, tombée au sol sous la stupeur de son propriétaire, puis il la ralluma et quitta la pièce, sans un mot de plus. Il crut entendre le Prof vaguement articuler un « Et tu vas où ? » mais il ne voulut pas répondre.
Sur les trente mètres qu'il avait à faire entre l'appartement et le Combi du Hippie, puisqu'il était maintenant à peu près certain qu'il le trouverait là, il allait falloir qu'il fasse sérieusement travailler ce qui lui servait de tête. Et très vite quitte à s'y trouver.
Oublier. Ne pas y penser.
Retenir ses larmes. Fumer. Et surtout oublier.
Le Hippie fixait le plafond constellé de tâches de rouille, allongé sur la couchette dans son véhicule, sa propre maison. Un joint de plus, encore.
Il fumait trop dernièrement. Enfin, depuis ce matin quoi. Mais peut importait, il fumait trop ça c'était sûr.
Et c'était pas bon pour le bébé. Probablement pas, disons.
Il eut envie de s'éclater le crâne contre la première paroi qui se présenterait. On avait dit de ne pas y penser, bordel ! Son homologue en costard cravate n'en aurait rien à faire lui, alors pourquoi devrait-il commencer à se sentir concerné, lui ?
Un implacable « Parce que c'est dans ton corps que grandit l'enfant, imbécile. » lui vint aussitôt à l'esprit. Ouais c'était pas faux ça.
Mais quelle importance, après tout…
Il ne chercha même pas à regarder qui entrait dans son Volkswagen, alors qu'il entendait la porte coulisser et quelqu'un se hisser à l'intérieur. Il tira une taffe sur son joint, tranquillement, bien qu'un peu nerveux et contrarié sur les bords. Il fallait qu'il se calme.
- Hé gamin, ça va ?
… Oh non, la Terre entière, Babylone en personne même s'ils le voulaient, mais pas lui…
Il soupira puis expira l'épaisse fumée de ses poumons, les yeux clos, avant de soupirer et de répondre, d'une voix lasse :
- Gros, passe plus tard si t'en veux s'te plaît, je me repose là...
- Tu sais très bien que je ne suis pas venu pour ça.
Ton sérieux, aucune blague salace ni d'allusions douteuses. C'était pas bon ça.
Le Hippie se redressa d'un bloc, s'asseyant en tailleur sur le lit, avant de faire l'un des trucs les plus impensables qui soient, pour ceux qui le côtoyaient au quotidien du moins. Il retira ses lunettes de soleil et les accrocha à son t-shirt avant de fixer le Patron avec des yeux d'un bleu presque gris, froids, presque dénués d'émotions. Si ses pupilles n'étaient pas dilatées à l'extrême, il aurait pu presque penser qu'il était complètement clean, pour le coup.
- Tu veux quoi, Gros ?
- Savoir comment tu te sens. N'évite pas mes questions s'il te plaît.
Le Patron lui avait parlé avec une certaine douceur qu'il ne lui connaissait pas, laissant le Hippie sur ses gardes. Depuis quand le Patron pouvait-il faire preuve d'un semblant d'humanité, au juste ?
Il sentait les larmes lui piquer les yeux. Non, il ne fallait pas pleurer. Oublier. Faire semblant.
Le Hippie se força à sourire, espérant intérieurement qu'il serait convaincant.
- Je vois des coccinelles oranges et j'ai l'impression d'être une loutre, Gros ! On va dire que c'est pas trop mal, nan ?
- Hn. Je sais très bien que tu es encore un minimum conscient. Tu ne sais pas mentir, gamin, désolé.
- Mais je ne mens pas-
- Autant que ce que moi je ne suis pas au courant de ce qu'il se passe.
Le Patron savait qu'il avait fait mouche en disant ça, et il ne put retenir un sourire lorsque le Hippie sembla se figer, réalisant qu'il savait ce qui lui arrivait. Cela ne lui empêcha pas de vite le perdre cela dit. Ça lui faisait mal. Il avait du mal à le reconnaître, mais ouais, ça lui arrachait les tripes de voir le Hippie dans un état pareil, et encore plus de savoir que c'était de sa faute.
Merde, quoi, le seul qu'il laissait tranquille chez les Sommet, et fallait que le pire truc qui puisse advenir, ce soit pour sa gueule. Y avait réellement de quoi s'arracher les cheveux, s'ils en avaient encore eu néanmoins.
Un ange passa, alors qu'il détaillait son homologue du regard derrière ses lunettes noires, homologue qui, d'ailleurs, avait recentré son attention sur son joint, le regardant presque comme si sa vie en dépendait. Ça avait quelque chose de terriblement attendrissant et de pathétique à la fois, et bon Dieu, pendant une fraction de seconde, le criminel se surprit à se demander ce qu'il avait bien pu arriver à ce pauvre petit être qui n'aurait pas fait de mal à une mouche pour qu'il en arrive à fuir la réalité de la sorte. Avait-il plongé dans la drogue comme il en avait été de même pour lui et la délinquance, les plaisirs de la chair et le vice ? Qui sait.
Et puis, du coup, de quel côté de Mathieu était-il le reflet ?
Le Patron vit le Hippie se lever puis s'installer juste en face de lui sans réellement le voir. Il était indigné et consterné par le constat qu'il venait de faire.
Personne ne savait rien du Hippie, dans le fond. Il passait son temps à fumer, à planer et à dire tout un ramassis de choses décousues en prônant le respect d'autrui et des arbres, mais quelqu'un avait-il ne serait-ce que pensé à lui demander pourquoi il était comme ça ? Ce qu'il y trouvait ? Même Mathieu, quand on y pensait. Qui en avait pris le temps ?
Enfin, il devait sûrement en savoir plus sur lui qu'eux, c'était bien grâce à Mathieu s'il était là, mais dans le fond, le connaissait-il vraiment ?
Et quand on pense que c'est moi l'aînée des personnalités… Arrivée juste avant lui…
- Hé Gros, ça va ? On dirait que t'as vu un fantôme mais y en a pas ici, je te le promets…
J'aurais du prendre le temps de faire sa connaissance. Être là pour le protéger, ou même juste pour savoir ce qu'il fichait là, dans les délires schizophréniques de notre hôte… Ouais, juste pour savoir quoi, le minimum, parce qu'après bon, il est quand même assez grand pour se gérer tout seul… Enfin je crois. Quel con je suis quand même.
Il reprit ses esprits et réalisa que le Hippie le fixait avec inquiétude, les mains tirant sur son t-shirt gris d'anxiété. Non, en fait il était incapable de se défendre ou même de voir réellement le mal chez quelqu'un, c'était évident même. Pauvre chose.
Le Patron le prit soudain dans ses bras, l'étreignant comme il ne l'avait jamais fait avec qui que ce soit, enfouissant la tête dans le cou de l'autre homme, s'enivrant en passant de l'odeur de cannabis qui ne quittait jamais le Hippie et qu'il aimait bien, malgré tout, parce qu'elle le lui rappelait. Il ne savait pas pourquoi il faisait ça, mais il en avait besoin, il devait le faire.
C'était de sa faute, tout ce merdier.
Le toxicomane ne réagit pas tout de suite à l'étreinte de son double, trop choqué pour savoir quoi faire. Que faire, à vrai dire ? Ça voulait dire quoi, tout ça ?
Et puis, qu'est-ce que le criminel pouvait bien vouloir de lui ?
Pourtant il lui rendit son étreinte. Maladroitement, avec nettement moins de force, les mains agrippées à son dos comme à une bouée de sauvetage, les yeux brûlants de larmes salées qu'il préféra laisser couler, cette fois. C'en était trop cette fois-ci. Il baissait les armes.
Et le Patron l'avait remarqué, non sans émotion d'ailleurs. Bordel, il se sentait tellement niais d'un coup… ! Qu'est-ce qui lui arrivait ? C'était pas son genre !
Et pourtant, sa voix n'était plus qu'un murmure qui se voulait doux et rassurant, bien loin des vociférations obscènes qu'on lui connaissait. Il n'avait pas envie de crier après le Hippie, ne surtout pas l'effrayer...
- … Qu'est-ce que tu comptes faire, gamin… ?
- Je… Je ne sais pas… Je ne sais même pas comment c'est arrivé là. Gros, j'en ai trop pris, hein… Beaucoup trop… Pas vrai ?
Toujours à se planquer derrière la drogue et ses effets pour se rassurer, c'était bien lui ça. Le Patron soupira puis se sépara légèrement du Hippie, venant poser son front contre le sien pour pouvoir le regarder droit dans les yeux. Ces yeux de glace, aux pupilles dilatées, et pourtant si bouleversants, encore pleins de l'espoir d'un semblant de vie simple. C'en était presque touchant.
- Non, pas cette fois. Arrête de dire ça pour te décharger de toutes responsabilités.
- Mais Patron-
- Tu veux faire quoi, Hippie ? Réponds-moi. Et de préférence, si tu peux éviter d'y passer la journée pour me refourguer une décision de ta part, ça serait cool, parce que j'ai pas forcément envie que les autres me voient comme ça avec toi. J'ai une réputation à tenir, hein… Et les trucs tout mignons à vomir, je préfère laisser ça à la seule chose qui est censée fournir des ovules par chez nous.
Le Hippie se surprit à sourire de la bêtise du Patron. Il était drôle, à autant tenir à sa réputation. Vraiment. C'était un truc si futile pourtant… Inutile même.
Mais bon, chacun ses priorités, dans la vie.
Et le choix qu'il avait à faire était particulièrement difficile. Du genre de celui qui, justement, remettait tout en doute…
- Est-ce que tu as… Envie de le garder ?
… Ouais, c' était mignon de lui reposer mille fois la même question sous diverses formes, mais ça réglait pas le problème pour autant…
Le Hippie soupira, alors qu'une de ses mains venait se poser sur son ventre sans même qu'il n'y prête attention. Ce ventre, qui abritait la vie.
De quoi avait-il envie, au juste ?
Il n'était pas du genre à penser à ce type de choses. Avoir des enfants, fonder une famille, ça ne lui avait jamais effleuré l'esprit. Enfin, jamais jusqu'à maintenant. Y arriverait-il seulement, à prendre soin d'un enfant, à l'élever ? Se sentait-il prêt à ça ?
Tant de questions sans réponse. C'était usant, de longue.
- Tu veux quoi, toi ?
- Je veux savoir ce que tu en penses avant, répondit simplement le Patron, guettant les réactions de son homologue. Tu es le premier concerné que je sache...
Il paraissait détendu comme ça. Ouais, parfaitement calme même, aux premiers abords. En vérité, quiconque le connaissait parfaitement, Tatianna par exemple, savait qu'il était mort de trouille, voire paniqué. C'était pas lui ça. Mais en même temps, on ne l'avait jamais mis face à telle situation. Il avait toujours tout fait pour échapper à ça, justement. Vu le nombre de filles qu'il fréquentait, y avait de quoi prendre ses précautions... Et non, au final quand la vie voulait vous faire un doigt d'honneur, elle arrivait toujours à ses fins, quitte à innover et à se foutre allègrement des lois de la génétique pour ça. Lois qui étaient de sa propre main d'ailleurs, comme ça encore moins de scrupule à les transgresser, c'était gratuit ça aussi !
Au final, il se ravisa sur son précédent jugement. Cette journée ne commençait pas bien, non. Elle partait complètement en live, ça par contre, oui !
Il soupira. Qu'allait devenir sa vie maintenant ?
C'est vrai ça ! Il écarquilla les yeux de surprise, prenant soudain conscience de tout ce qu'une grossesse allait entraîner par la suite. Des responsabilités. Une vie à chérir, et dont il faudrait prendre soin… Un choix à assumer. En avait-il envie, seulement ?
Lui qui s'était toujours cru au dessus de tout, et sans la moindre once d'attache, il se sentait pieds et poings liés. Tout allait découler de la réponse du toxicomane devant son nez. Un « non », et tout serait réglé. Plus de souci, plus d'ennuis, une histoire à balayer d'un revers de main et sans rancune mon pote ! C'était pas mal ça, tiens…
Ouais, mais c'est moche putain. Il a rien demandé, le mioche ! Pensa-t-il soudainement alors que son regard se perdait sur l'abdomen de son ami, cette zone encore plate et même légèrement sculptée de muscles qui allait bientôt s'arrondir… Il avait dit quoi déjà, le pédant à hublots ? Deux mois ?
C'était pas déjà un peu tard, pour avorter ?
Était-ce seulement le même mode opératoire que dans un avortement classique, dans le cas d'un homme…
Il eut envie de s'éclater la tête contre la portière du Combi. Allons donc, il commençait à penser au bébé maintenant ! Trop réfléchir, décidément, ça ne lui allait pas. Et ne pas savoir ce qu'il voulait vraiment, encore moins !
Le Hippie se décida à prendre la parole, après un silence qui sembla durer des heures. Ce qui n'aida guère plus le criminel, d'ailleurs :
- Je sais pas, Gros. C'est bizarre… Même dans mes trips les plus bizarres, je ne me retrouvais pas à la place où je suis là. Et franchement, c'est plus simple de parler à des licornes que de faire un choix concernant…
Il fit une pause dans sa phrase, réfléchissant clairement à comment qualifier ce dont il avait appris l'existence un peu plus tôt dans la matinée. Il était complètement perdu.
- … Le bébé.
- Hein ?
- Appelle-le comme ça, puisque c'est bien de ça qu'on parle, le Patron évitait son regard à présent, se sentant à la fois pas à sa place et en même temps étrangement concerné par la situation, comme il n'aurait pensé l'être. Était-ce parce qu'il savait que cet enfant n'était pas que celui du Hippie, mais également le sien ?
- … D'accord, Patron. Mais… Je ne sais pas. Vraiment. D'un côté, je veux pas. C'est pas comme Capsule de Bière ou Wifi là, c'est autre chose, c'est beaucoup de responsabilités, et je suis pas sûr de pouvoir affronter ça seul… Mais d'un autre côté…
Il caressait son ventre distraitement, la tête légèrement penchée en arrière, fixant rêveusement le plafond. Le Patron savait qu'il avait perdu à ce moment-là. Qu'il se retrouve seul ou à deux, ou même avec tout le troupeau qui faisait Dieu seul savait quoi dans l'appartement en ce moment même, ça ne changerait pas la donne. Il ne pourrait pas décider d'éliminer une vie, même en étant offerte par le pire des monstres qui soient… Ce serait contre ses propres principes de paix et de bien.
Mais avait-il réellement perdu ?
- Tu penses que ça serait une bonne idée de le garder ? Tu en es sûr ?
- Tu veux quoi toi ? Le faire disparaître ? Effacer tout souvenir de ce qui a pu arriver ?
L'homme en noir resta bouche bée face au ton soudainement employé par le Hippie, si sec et dur. Il ne prenait que rarement une voix comme celle-ci… Vraiment très rarement.
Et puis, comment ça, « effacer tout souvenir » ? Il voulait dire quoi par là, l'autre ?
- Je sais pas, je réfléchis, tu crois que je me retrouve tout les jours dans un merdier pareil ? Il avait haussé le ton et s'en voulut aussitôt, lui qui s'était promis de rester calme, c'était raté pour le coup : Non, figure-toi ! Et puis tu veux dire quoi exactement par « effacer tout souvenir de ce qui a pu arriver » ? On dirait une réplique de film à l'eau de rose, et pitié, n'invoque pas la toute puissance des coléoptères ou les maux de Babylone, ils ont rien à voir avec ça aux dernières nouvelles !
- Tu comptes nier encore longtemps que nous deux, c'était pas comme avec toutes les femmes qui sont à tes pieds, Gros ?
- Mais je nie rien du tout, bon sang ! Et bien sûr que non c'est pas pareil, t'es pas une de ces putains de grognasses, déjà !
Le Hippie le fixait avec une certaine tristesse dans le regard d'un coup. Comme s'il avait été blessé par l'une des remarques du criminel. Et pour cause :
- C'est ça pour toi, la seule différence ?
L'autre homme eut l'impression de se prendre un coup de poing dans le ventre. Un ton froid, sans sympathie, sans cette chaleur ou cette once d'enthousiasme propre à la voix de l'écologiste. Non, rien. Juste de la douleur. C'en était presque effrayant, d'ailleurs !
Il regrettait amèrement ses mots à présent. Et de s'être levé ce matin-là aussi, quitte à y être.
Que pouvait-il lui dire à présent ?
… La vérité, du con, ça pourrait être un bon début, t'en penses quoi ?
Mais quelle vérité ?
Qu'il tenait éventuellement un peu trop à cet homme qui passait plus ses journées défoncé que réellement conscient de ce qui se passait autour de lui, et qu'il avait réalisé ça avec effroi après la nuit qu'ils avaient passé ensemble ?
C'était ça, la vérité ?
Ou plutôt celle qu'il était curieux de voir ce que ça ferait d'être père ? Dans le fond, tout ramenait au même point, non ?
Il avait de nouveau ramené le Hippie tout contre lui, les bras autour de sa taille sans y faire attention, le nez empli de l'odeur amère des joints de ce dernier sans en ressentir une quelconque gêne ou malaise. Il était juste bien comme ça. C'était con et niais à dire, mais vrai putain !
Qu'est-ce qu'il était bien, ici… Auprès de lui…
- Non, c'est bien plus que ça.
- Hn ?
Le Hippie n'osait plus bouger, à peine respirer. Il se sentait apaisé, dans les bras du criminel, même si n'avait jamais pu le dire à qui que ce soit jusqu'à ce qu'il ne s'effondre devant le Prof, quelques heures plus tôt. Ça avait presque toujours comme ça, sans qu'il puisse dire pourquoi. Ils ne se parlaient quasi jamais, s'ignoraient le trois quart du temps, et pourtant, il tenait à lui. Même s'il lui en avait voulu en apprenant qu'il portait son enfant. La colère n'avait pas duré bien longtemps, trop vite rattrapé par un curieux sentiment d'euphorie. C'était extraordinaire. Un miracle. Un don du ciel. Et c'était une vie mince…
Mais cet enfant allait-il changer quelque chose entre eux ? Il fronça les sourcils à cette question. Non, bien sûr. Il savait que le criminel était pas de ce genre là…
Alors c'était quoi cette réponse ?
Il releva la tête, cherchant son regard à travers les verres teintés, lorsque l'improbable se produisit.
Les lèvres du Patron venaient d'emprisonner les siennes dans un baiser d'une douceur extrême, lent et tendre. Comme ça, sans raison…
Il avait l'impression que son cœur allait le lâcher. Pour de bon, cette fois.
- Ecoute-moi bien, toi, la voix du Patron était douce, presque irréelle tant il semblait improbable qu'elle puisse être ainsi : Je ne nierai pas ce qui a pu arriver. Je ne nierai rien, et en passant, ouais, t'as raison, c'était différent avec toi. Différent comment, je sais pas, mais pas pareil, c'est sûr. Assez en tout cas pour m'intriguer… Alors si ça te tient à cœur, et que tu le veux, on le garde. Je te promets pas d'être au niveau pour ce qui est d'être un bon père, je pense même être sacrément mauvais pour ça ! Mais je serai là, c'est déjà bien non ? Toute façon j'ai envie de te dire qu'entre nous deux, il a pas gagné au Loto, le gamin…
Le Hippie n'en revenait pas. Il avait bien entendu ?
Il regardait le Patron comme s'il était un étranger. Choqué, stupéfait, sans voix. Il voulait de cet enfant ? De leur enfant ? Il avait mal entendu, ou imaginé la scène non ?
… Il continua de fixer le criminel en silence pendant une bonne minute au minimum, l'autre homme en costume noir demeurant imperturbable devant lui, le regardant avec un sourcil relevé en guise d'interrogation. Il ne l'avait pas rêvé alors ? C'était vraiment ce qu'il voulait ? Ce n'était pas une hallucination due à la prise de drogue, promis ?
Il eut soudain envie de pleurer de joie. De laisser éclater l'immense chaleur qui se répandait en lui, cette euphorie qui lui donnait envie de le remercier à ne plus savoir qu'en faire, de rire, de crier, ce qui lui ressemblait si peu d'ordinaire ! Il ne savait plus où se mettre, alors qu'il pressait une main sur sa bouche, celle qui n'était pas sur son ventre, laissant enfin une larme de soulagement rouler sur sa joue. Une seule et unique larme.
Les coléoptères, les licornes, les papillons, et tout le monde en fait, vous avez entendu ? J'y crois pas Gros, c'est tellement… Juste… Oooooooh ! C'est…
- Papas…
- Ouais. Toi et moi.
Le Patron avait retrouvé son sempiternel sourire en coin, alors qu'il voyait clairement que le Hippie était fou de joie. Tant mieux, ça c'était une bonne chose. Si le gamin était heureux, c'était le principal. Quand au reste… Il eut une seconde d'hésitation, qui fut interrompue par le Hippie qui était venu l'embrasser avec fougue, quoi qu'encore un peu fébrile du choc émotionnel qu'il venait de vivre. Il se surprit à rire intérieurement, pendant qu'il répondait au baiser. Et puis pourquoi pas devenir père, dans le fond ? Ça ne devrait jamais être aussi difficile à vivre que de s'évader d'une prison de haute sécurité… !
Quoi que, avec lui comme père, il promettait sévère, le gamin… Au pire, le sang du Hippie devait être tellement imbibée d'herbe, jusqu'à l'ADN probablement d'ailleurs, que ça ne pourrait que le tranquilliser un peu… Ils auraient bien le temps de le constater, de toute façon.
Après, il n'était pas sûr de l'aimer. Il n'était même pas sûr de pouvoir aimer, de toute façon, dans tout les cas qu'importe vers quoi ils allaient, ils allaient y aller ensemble, et d'un bon pas même. Mais l'aventure serait intéressante à vivre, ça il en était sûr.
Et puis ils ne seraient pas seuls. Jamais.
Le Patron imaginait déjà le Geek en train d'essayer de convertir le nourrisson aux jeux vidéos, et la peluche géante en train de lui chanter des berceuses. Oh la la, que c'était niais !
Pourtant il en riait d'avance. Déjà que la maison Sommet n'était pas calme, là ça allait être encore pire.
Pas grave au pire. Ça apprendra au voisin d'à côté qu'il aurait du réellement déménager lorsque je le le lui avais conseillé, histoire qu'il arrête de venir nous déranger parce qu'on fout le bordel ! Bien fait pour sa gueule !
Et bien voilà, premier OS reposté. :')
Je ne vais pas plus m'étaler sachant que vous connaissiez déjà cet OS. / Mais j'espère vraiment que ça vous a plu ?
Oh oui, je l'espère...
M'enfin n'hésitez pas à me le dire si quelque chose vous chiffonne ou si au contraire, cela a su vous plaire si jamais vous ne le connaissiez pas~ :')
Allez, à tout de suite pour le deuxième OS ? ;)
J'vous aime !
