-Le véritable Everdeen-
Décidément, j'aime beaucoup aborder le thème de la mémoire et des souvenirs. Ceci est ma troisième fiction sur ce fandom. Ce sera un two shot. Ce que Peeta s'apprête à révéler à Katniss pourrait bien la marquer à jamais. Mais il a besoin d'avouer. De tout avouer.
Je ne sais pas comment cette fic sera accueillie, alors si vous aimez, n'oubliez pas de laisser une review à la fin. L'autre chapitre bientôt ;)
Chapitre 1: Les confessions
Ce secret me pèse de plus en plus. Avec Katniss, on s'est jurés de tout se dire. Seulement voilà, je me sens incapable de lui dire CE secret depuis qu'il est revenu à ma mémoire. C'était il y a plus de deux mois, lors d'une énième séance avec le docteur Aurélius. Katniss ne l'aime pas, mais elle m'autorise à le voir car je lui dis que ça me fait du bien, ces séances. Quand je m'en suis rappelé, alors cela a été le choc, parce que je savais de suite, sans hésitation, que cela avait été réel, que cela n'était pas de mon invention, j'en avais la profonde conviction.
J'ai connu le père de Katniss. Et il a changé ma vie. C'est grâce à lui que j'en suis là à présent, aux côtés de ma fiancée, et c'est grâce à lui encore que je deviendrais bientôt l'heureux papa d'une petite fille. Nous n'avons pas encore choisi de prénom, mais rien ne presse. Plus rien ne pourra me prendre mon bonheur.
Je rentre par la porte principale, les mains couvertes de terre. Je suis content, les primevères se développent admirablement bien. Je pars me débarbouiller, puis rejoint ma femme sur le divan. Elle est en train tricoter, mais visiblement, cela ne lui réussit pas.
-C'est ton nouveau loisir ? Je demande en pointant la boule de laine trouée qui, je présume doit être de petits chaussons pour bébé.
Elle me regarde d'un air résigné :
-C'était, corrige-t-elle. Delly a essayé de m'apprendre, mais je n'y comprends vraiment rien. Pourtant j'ai copié exactement chacun de ses mouvements !
Je ris de bon cœur, mais je suis en panique au fond de moi. Aujourd'hui, j'ai décidé de tout lui dire. Ça ne va pas être facile.
-Tu sais quel jour on est ?
-Le trois Mai.
Je prends une inspiration et me lance selon la tactique des petits pas :
-C'est le jour où je t'ai rencontré.
-Ah vraiment ? Sourit Katniss.
C'est elle tout craché ça. Elle n'accorde pas d'importance aux dates. Moi, je m'en souviens très bien de ce jour. Je me rapproche d'elle et tend ma main, attendant son autorisation. Elle la prend et délicatement la pose sur son ventre rebondie. Je peux sentir la vie à travers la peau tendue. C'est elle. C'est mon deuxième trésor qui se cache derrière.
-J'avais cinq ans, poursuivis-je. Je t'ai vu lever la main…
Son regard malicieux se pose sur moi comme un papillon.
-La suite, tu la connais, dis-je en la regardant amoureusement.
Elle se penche et m'embrasse tendrement.
-Raconte-la-moi encore une fois s'il te plaît.
-Tu étais dans ta petite robe qui t'allait si bien, et tu t'es mise à chanter. Et je me souviens que les oiseaux se sont tus à ce moment-là. Tu étais magnifique.
-Tu as donné moins de détails cette fois-ci, fait Katniss en mimant un air déçu.
Cette histoire, j'ai bien dû la lui raconter une centaine de fois au moins. Mais elle ne se lasse jamais de l'entendre.
-Ah, tu veux des détails ? M'enquis-je.
Elle me jette un sourire narquois. Je souris, caresse son ventre.
-Peeta…
Le sérieux dans sa voix m'interpelle soudainement, et je lève la tête pour rencontrer sa mine soucieuse.
-Qu'y a-t-il ? Dit-elle. Tu trembles.
En disant cela, elle pose sa main sur la mienne, et je me rends compte que je tremble bel et bien.
-Je ne t'ai pas dit toute la vérité sur ce jour-là, dis-je rapidement.
Elle me lance un regard accusateur :
-Peeta, dit-elle d'un ton de remontrance, on s'était pourtant jurés de…
-Oui, je sais, dis-je en déglutissant péniblement. Mais je ne m'en suis souvenu que très récemment.
-Peeta Mellark, je te connais très bien maintenant. Et je sais quand mon mari me ment.
Elle me fixe droit dans les yeux. Ça y est, le duel est engagé. Je soutiens son regard. Elle me sonde de ses yeux gris. Je tiens le coup, mais la pression se fait plus forte, plus intense, insoutenable, et je finis par détourner le regard, baissant les yeux comme un chien fait lorsqu'il se fait réprimander.
-D'accord, ok, ça fait deux mois.
-Deux mois ? Ce n'est pas à cette date que remonte ton dernier rendez-vous avec le docteur ?
J'acquiesce. Elle soupire :
-Je savais qu'il y aurait un problème avec lui. Il y en a toujours avec lui.
-Tu te trompes, il m'a aidé à faire resurgir ce souvenir. Mais je ne lui ai pas confié.
S'ensuit une longue minute de silence, que je finis par rompre :
-Tu es fâchée ?
Elle ne dit rien, semblant peser le pour et le contre, mais je vois un sourire se dessiner sur le coin de ses lèvres, et je sais qu'elle est sur le point d'abandonner la lutte. Je lui embrasse le front, et un sourire timide apparaît sur ce visage que je connais si bien :
-Tu sais bien que je ne peux pas me fâcher contre toi, dit-elle en se pelotonnant contre moi.
Je change de posture pour lui assurer un meilleur confort, et elle pose sa tête sur mon torse.
-Avant de te révéler cela, il faut que tu saches. Je t'aime Katniss, sois en sûr. Tu m'as bien entendu ? Je t'aime.
-Je sais. Moi aussi.
Et ces mots me suffisent. Nous restons là, un moment, et la peur que j'avais se dissipe peu à peu. J'ai confiance en Katniss. J'ai confiance en notre avenir. Elle lève son regard vers moi.
-Tu penses pouvoir me dire ton secret ? Demande Katniss et je sais que si je ne suis pas prêt elle respectera ma décision. Mais je le suis. J'acquiesce lentement.
-C'est un peu compliqué, avouai-je, et si tu as la gentillesse de m'écouter jusqu'au bout, je veux bien te raconter. Tout depuis le début.
-Je promets, dit-elle doucement.
-Tu ne me verras plus sous le même jour après ça, je la préviens.
-Ça ne me dérange pas, rassure-toi.
-Je t'ai menti, dis-je en me mordant la lèvre. Mais je déteste te mentir. Je suis désolé.
-Ce dont tu te souviens…tu es sûr que c'est réel ? Demande-t-elle, et je sens la pointe d'inquiétude dans sa voix.
-Je ne peux pas te garantir que tout est parfaitement exact. Des détails ont pu m'échapper. J'étais trop jeune pour bien me souvenir. Mais ce que je sais, c'est que dans l'ensemble, c'est ce qu'il s'est passé.
Je jette un coup d'œil à ma montre. Elle indique seize heures. Bien, on a l'après-midi devant nous.
-Ce jour-là, je n'étais pas amoureux de toi. Pas encore, dis-je.
A ma grande surprise elle se met à rire. Son visage resplendit tellement, et je me mets à rire doucement sous l'effet d'entraînement.
-Pourquoi tu ris ?
-Tu en as fait tout un plat pour ça ? Dit-elle en redoublant de rire. Allons Peeta, tu t'es torturé l'esprit pour rien, je ne t'en veux pas du tout. A cinq ans, c'est normal de ne pas savoir ce que c'est qu'aimer. Et que dire de moi ? Je ne t'ai même pas remarqué à l'époque.
-Ah, je ne sais pas comment je dois le prendre, dis-je en faisant mine d'être vexé.
Elle passe ses bras autour de mon cou, s'autorise à embrasser mon menton, puis remonte jusqu'à mes lèvres. Je lui rends son baiser.
-Alors Mr Mellark, quand avez-vous été amoureuse de moi ?
-C'est là que ça se complique, dis-je en reprenant mon sérieux. Pour comprendre, il faut remonter à mes neuf ans. Katniss, il faut que je t'avoue quelque chose. –Je prends une respiration- J'ai connu ton père.
Ses yeux s'agrandissent. Je passe ma main dans les cheveux.
- C'est grâce à lui…grâce à lui qu'on en est là, dis-je, les mots se bousculant dans ma bouche sous l'émotion.
-Tu ne me l'a jamais dit Peeta ! S'exclame-t-elle.
-J'avais mes raison crois-moi.
Et je commence mon récit.
J'avais neuf ans quand je me suis enfui de ma maison après une énième humiliation. Cette fois-ci, j'avais décidé d'en finir. J'ai fait quelque chose que je n'aurais jamais osé auparavant, car je n'étais pas prêt à mourir. Je suis entré dans la forêt. Je me suis enfoncé dans les bois, j'ai laissé la nature m'engloutir. J'ai déambulé sans trop savoir ce que je comptais faire. Et c'est là que je l'ai rencontré. Au détour d'un chemin. Il a pointé son arc vers moi en m'entendant, et je ne sais pas qui de nous a été le plus surpris.
-Petit, qu'est-ce que tu fais là ?
Sa voix était douce, je m'en souviens. Il a baissé son arc et s'est approché de moi. Il a dit nerveusement :
-J'ai failli te tuer petit. J'ai cru que tu étais du gibier. Il ne faut jamais me refaire ce coup, ou je vais avoir une crise cardiaque.
Il a posé une main sur ma tête en signe paternel :
-Qu'est-ce que tu fais là ? Répète-t-il. Hé, tu ne serais pas dans la classe de ma fille toi ?
Comme je ne répondais toujours pas, il m'a examiné, et d'un coup il a saisi ma main et a remonté la manche de mon gilet, révélant mes blessures. Elles saignaient encore un peu. Je me suis dégagé brutalement.
-Qui t'a fait ça ? Dit-il en me regardant dans les yeux.
-Maman a laissé tomber une assiette, dis-je précipitamment.
Il m'a considéré longuement, d'un air presque triste.
-Sans faire exprès ?
Elle l'a jeté vers moi. Je me suis baissé à temps, mais les débris m'ont coupé.
-Non elle ne l'a pas fait exprès.
Il me regarde et je sais qu'il ne me croit pas. Mais il n'insiste pas.
-Et vous que faites-vous ? Vous chassez ?
-Tu es très perspicace bonhomme. Mais si ça ne te dérange pas, j'aimerais que ça reste entre nous.
-Je garde bien les secrets, dis-je.
-J'en suis convaincu.
Nous marchons un peu dans la forêt.
-La vie est précieuse petit. Il ne faut pas la gâcher.
Je me demande s'il savait ce que j'étais venu faire ici.
-Je ne m'appelle pas petit, répliquai-je. Je m'appelle Peeta.
-D'accord Peeta.
Il me fait signe de se baisser. Nous restons tapis dans un buisson. Il me pointe un arbre, et je me mets à le scruter. Je le vois lever son arc et l'instant d'après un écureuil tombe d'une branche.
-Vous visez bien.
-Je ne suis pas trop mauvais, dit-il en souriant.
Nous avons passé le reste de l'après-midi ensemble. Il m'a emmené cueillir des mûres sauvages, et nous nous sommes régalés près d'une cascade. Il ne disait pas grand-chose, mais je le respectais instinctivement. C'était un grand homme ton père. Il faisait très beau ce jour-là. Il a essayé de m'apprendre à nager, mais ma tentative n'était pas très brillante. J'ai bu plusieurs fois la tasse, et le bruit de la cascade ne m'a pas du tout rassuré. Je crois que j'avais déjà peur de l'eau à cette époque. Puis nous sommes remontés et nous nous sommes allongés sur les pierres plates qui bordaient l'eau. J'ai demandé à tout hasard.
-Vous ne m'avez pas dit votre nom.
Il a fait une pause.
-Alan. Tu peux m'appeler Alan.
Je hoche la tête. Nous restons ainsi, le soleil nous réchauffant la peau, au milieu de la nature, à écouter les oiseaux. Il s'allonge et je le vois fermer les yeux. C'est un des rares moments où j'ai vu ton père aussi détendu. J'ai fait de même sur mon petit rocher, et l'après-midi est passé bien vite. Je me souviens du soleil. Il était orange en fin de journée. D'un bel orange.
-On devrait rentrer, dit-il finalement.
Mais je n'en avais pas envie. Je sais que le soleil se couche, et qu'il faudra bien que je le fasse.
-Encore un peu, murmurai-je.
Je ne me rappelle pas du retour. Je crois ton père m'a porté jusqu'à la barrière, car je me souviens avoir ouvert les yeux, et l'avoir vu scruter la barrière, à l'affut du bruit. Il m'a déposé à terre après s'être assuré que la clôture n'était pas électrifiée. Il m'a pris par les bras et a pris son air grave.
-Peeta, tu dois me promettre de ne plus retourner dans la forêt. C'est un lieu dangereux.
-Mais je ne crains rien avec vous.
-Je ne serais pas toujours là pour toi. Je ne peux pas, je dois m'occuper de mes filles, tu comprends ?
Je hoche silencieusement de la tête.
-Elles en ont de la chance, murmurai-je.
Il m'a pris dans ses bras, et j'ai senti la chaleur. Mes parents ne m'ont jamais pris dans leurs bras. La meilleure chose que mon père pouvait faire, c'était de m'éviter des ennuis en détournant la colère de ma mère. Une larme a roulé sur ma joue. Il a desserré son étreinte.
-File maintenant Peeta.
-Au revoir, Monsieur Everdeen.
Je l'ai vu esquisser un sourire malicieux :
-Alors tu me connaissais ?
-Vous êtes le mineur dont mon père m'a parlé, dis-je simplement. Vous êtes le père de Katniss.
Puis je me suis retourné, et j'ai marché vers la boulangerie sans regarder en arrière. A ce moment, je ne t'aimais pas encore. Au mieux j'étais heureux pour toi, au pire je t'enviais. Tu as eu une enfance que j'aurais voulue avoir. Je n'éprouvais ni haine, ni colère. Juste un arrière-goût amer en sachant que ce formidable après-midi ne serait bientôt plus qu'un souvenir heureux.
-Oh Peeta, dit Katniss en me serrant encore plus fort dans ses bras. Merci, merci d'avoir partagé ce souvenir. Tu me donnes quelque chose de tellement précieux à mes yeux. J'ai l'impression que mon père revit à travers ces souvenirs. Merci.
Elle dit cela en m'embrassant le front et se lève.
-Il faut que j'aille préparer le dîner. Tu me raconteras la suite demain ?
-Promis.
Je me lève et inconsciemment, me tord les mains. Je ne lui ai pas encore révélé le plus gros. J'espère que tout ira bien quand elle le saura.
Que je ne l'ai pas aimé avant les Jeux. Pas avant notre rencontre officielle.
