Hiver 1980 :

Lorsqu'elle avait repris l'affaire familiale à sa sortie de Poudlard, trois ans auparavant, elle ne pensait pas que ce travail lui plairait autant. Depuis plus de dix siècles, les Trois Balais avaient toujours été tenus par un Wallace. Il n'était pas question que cela change. Voilà l'argument qu'avait avancé la fille unique de Robert et Gerty Wallace devant leur refus à la voir reprendre l'établissement. Mais c'était une fille têtue qu'ils avaient mis au monde, comme l'étaient souvent les écossaises. Ils avaient fini par se faire une raison et avaient définitivement abandonné l'idée de la voir occuper de hautes fonctions au Ministère de la magie. A présent, ils avaient quitté le village pour s'installer sous des cieux plus cléments, la laissant seule diriger le pub.

En ce lundi, il n'y avait pas eu grand monde. La neige, qui tombait abondamment depuis le début de la matinée, s'était muée en une tempête qui l'avait contrainte à mettre ses clients dehors plus tôt que de coutume. Le vieux Ian était plus fiable que n'importe quel baromètre sorcier où moldu. Dès qu'elle l'avait vu se frotter le genou, d'abord doucement puis avec de plus en plus de vigueur, elle avait compris que le blizzard n'allait pas tarder à se lever. Ni une ni deux, elle ordonna à tout ce petit monde de regagner ses pénates. Bien sûr, il y avait toujours ceux qui n'étaient pas faciles à déloger, accrochés comme des sangsues à leurs chopines. Généralement, ils ne se faisaient pas prier bien longtemps. Si leur offrir leur dernier verre ne suffisait pas, la simple menace d'appeler leurs épouses pour qu'elles viennent les chercher parvenait toujours à les faire décamper.

Maintenant que le pub était complètement vide, Rosmerta Wallace mettait de l'ordre dans son établissement. La tempête était à son maximum et l'on n'entendait plus que les bourrasques de vent qui faisaient violement battre les volets et trembler les fenêtres. Elle donna un dernier coup de balai avant de jeter un regard satisfait sur la salle parfaitement en ordre : les chaises étaient toutes posées sur les tables ; pas une miette ne subsistait sur le parquet ; le cuivre du le comptoir étincelait.

Elle se saisit d'un bougeoir. La nuit était tombée bien vite, à moins que ce ne fût les épais nuages chargés de neige qui obscurcissait le ciel. Elle prit alors la direction de l'escalier qui menait à son appartement. Elle comptait bien profiter de ce temps libre inattendu pour enfin se reposer, écrire quelques lettres et se plonger dans ce roman qu'elle peinait à finir. Peut être qu'un bon bain l'aiderait à oublier la fatigue accumulée et à se vider un peu l'esprit de ses préoccupations. Elle en avait grand besoin. A bien y réfléchir, il lui faudrait plus qu'un bain, un verre ou deux ne lui feraient pas de mal.

Elle passa donc derrière le comptoir, à la recherche d'une bouteille de vin d'ortie qu'elle s'était réservée pour une soirée comme celle-ci. Où pouvait-elle bien l'avoir rangée, se demanda-t-elle en fouillant les étagères avant de se souvenir qu'elle l'avait cachée sous l'évier. C'était le seul endroit où elle était sûre que Bob, son barman grand amateur de ce nectar, ne viendrait par fourrer le nez.

Alors qu'elle se penchait pour récupérer la bouteille si convoitée, un énorme bruit retentit. La lourde porte des Trois Balais venait de voler en éclat. Prise de panique, Rosmerta plongeât sous le comptoir. Le vent glacé qui s'introduisit dans la salle refroidit l'atmosphère presque instantanément, mais le froid n'était pas le seul responsable de ses tremblements. Le vent seul n'aurait pas réussi à ouvrir cette porte qui tenait depuis des siècles. Ce ne pouvait-être que lui, le pire cauchemar de tous les sorciers. Elle avait redouté cette visite. La peur lui tenaillait le ventre et ne faisait que s'accroître au souvenir des atrocités commises par celui qu'elle soupçonnait de s'être introduit chez elle à l'instant.

Très vite, au bruit du vent s'ajouta celui de bottes qui martelaient le plancher de chêne, presque en cadence. Alors elle entendit pour la première fois la voix du plus redoutable sorcier que le monde ait connu. Une voix étrangement mélodieuse mais qui ordonna fermement :

− Allez !

Les bruits de bottes se firent plus pressés. Ils devaient être au moins trois. D'où elle était, Rosmerta ne pouvait que deviner ce qu'il se passait autour d'elle. Elle entendit du bois qui se brisait, des placards que l'on ouvrait et que l'on vidait brutalement de leur contenu. Des pas se faisaient plus sonores, ils s'approchaient, ils venaient vers elle. Ce n'était maintenant plus qu'une question de secondes avant qu'elle ne soit découverte. Elle s'enfonça un peu plus dans la niche sous l'évier mais elle savait qu'elle ne faisait que retarder l'inéluctable. Elle chercha dans la poche de sa jupe sa baguette. Si elle devait mourir ce soir, ce se ne serait pas sans se défendre. Mais la poche était vide.

Paniquée, son regard courut autour d'elle pour finalement se poser sur le plan de travail adossé au mur derrière le comptoir. En évidence, sa baguette la narguait. Si elle essayait de s'en saisir, elle serait immédiatement découverte. Sa dernière heure était venue, elle le savait. Elle ferma les yeux, repensa à l'heureuse vie qu'elle avait eue jusqu'alors. Lorsqu'elle les rouvrit, prête à bondir pour se battre, une paire de bottes se tenait là, juste devant elle. Elle leva les yeux et son regard se posa sur le visage d'un Mangemort, dissimulé par le tristement célèbre masque macabre qui ne laissait percevoir que quelques centimètres-carré d'une peau cireuse et un regard noir inquiétant.

L'homme la fixa à peine un instant avant de se détourner et de mettre à terre les bouteilles et les verres posés sur les étagères, qui vinrent voler en éclats tout près d'elle. D'un revers de bras rageur, il fit valser tous les objets disposés sur le plan de travail, entraînant dans son geste la baguette de Rosmerta qui vint rejoindre les débris jonchant déjà le sol. Une main sur la bouche pour réprimer tout cri qui aurait pu révéler sa présence aux autres Mangemorts, Rosmerta observait cette scène, incrédule. Il ne fit pas un geste pour l'empêcher de récupérer sa baguette. Il savait qu'elle ne s'en servirait pas contre lui. S'il avait voulu la tuer ce serait déjà fait.

Une fois son saccage fini, le Mangemort partit, sans un coup d'œil dans sa direction. Elle n'y croyait pas. Cet homme au regard noir si dur l'avait épargné. Comment était-ce possible ? Elle repensa à ces corps sans vie retrouvés partout où celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom passait, aux atrocités que l'on attribuait à ses Mangemorts que certains prétendaient plus sanguinaires que leur maître lui-même. Elle s'enfonça alors un peu plus dans sa cachette, continuant d'écouter les échos de la mise-à-sac. Des sons lui parvenaient de l'étage. Toujours ces bruits de bois, de porcelaine et de verre que l'on brise.

Il lui sembla s'écouler une éternité avant que cela ne cesse et que tous aient rejoint leur maître qui n'avait apparemment pas quitté la grande salle du pub.

Elle remarqua alors qu'une fissure dans le bois du comptoir lui permettrait d'apercevoir ce qui se passait. Elle y colla prudemment un œil. Elle ne voyait pas grand-chose, mais elle distingua la silhouette longiligne du mage noir drapé dans une lourde cape qui traînait à terre. L'un de ses disciples s'approcha. Etait-ce celui qui l'avait épargnée ? Il mit un genou à terre et obséquieusement inclina la tête. Une longue mèche de cheveux blonds glissa alors de sous sa capuche.

− Nous n'avons rien trouvé Maître, il n'est pas là. On nous a encore mal renseignés. Dit l'homme.

Le mage noir ne fit pas un commentaire. Il tourna seulement les talons et, suivi de son escorte, s'en alla, laissant derrière lui une Rosmerta prostrée et qui ne savait à quoi, et encore moins à qui, elle devait son salut.

Combien de temps s'écoula avant qu'elle n'ose s'extirper de sa cachette ? Deux minutes ? Un quart d'heure ? Plusieurs heures ?

Lorsqu'elle trouva enfin le courage d'en sortir, la vision de sa salle dévastée la laissa sans voix et lui embua le regard. Pas une table, pas une chaise n'avait réchappée au saccage. Il ne restait qu'un amoncellement de débris qu'aucun « reparum » ne parviendrait à remettre en état. L'étage n'avait sûrement rien à envier au rez-de-chaussée. Elle imaginait ses vêtements réduits en charpie, ses précieux bibelots fracassés, son canapé éventré, sa literie mise à terre et piétinée. Elle s'apprêtait à aller le vérifier par elle-même lorsque de nouveaux bruits de pas derrière elle la figèrent d'effroi.

Ils étaient revenus. Sa main se serra sur la baguette qu'elle avait récupérée et d'un mouvement vif, fit volte face en la pointant au hasard. Un homme immense à la chevelure flamboyante se tenait à présent devant elle. Elle le reconnu immédiatement pour avoir vu sa photo à plusieurs reprises dans La Gazette du Sorcier : Rufus Scrimgeour, le plus redoutable et redouté des Aurors du Ministère la dévisageait froidement.

− On dirait qu'un ouragan vient de passer à travers votre salle de réception... ironisa-t-il tandis que son regard parcourait la pièce.

Rosmerta resta muette, toujours sous le coup de sa terreur.

Puis il lança par-dessus son épaule :

− On arrive trop tard ! C'est la quatrième fois ce soir !

Ces mots emplis de frustration s'adressaient à une petite personne emmitouflée qui venait d'entrer par l'ouverture béante. Lorsqu'elle se débarrassa de la capuche et de l'écharpe qui cachaient son visage, Rosmerta reconnut Alice Kent, une fille qui était à Poudlard à la même époque qu'elle. Contrairement à son collègue, elle prit une expression horrifiée devant le spectacle qu'offraient les Trois Balais.

Elle s'approcha de la maîtresse des lieux, lui adressa un sourire réconfortant, puis la prit par les épaules pour la mener vers un coin de la pièce moins dévasté que le reste.

− Qu'est-il arrivé ?

Rosmerta s'effondra alors en pleurs dans les bras de son ancienne camarde et lui raconta entre deux hoquets le film des événements : l'intrusion, la destruction et comment elle avait été sauvée par un des Mangemorts qui n'avait pas dévoilé sa présence.

La dernière révélation sembla surprendre Alice, mais laissa indifférent son co-équipier qui continuait à faire le tour de la pièce à la recherche d'indices inutiles.

En quelques minutes, les Trois Balais furent emplis d'Aurors et autres fonctionnaires qui furetèrent partout, lui rappelant à chaque craquement de bois qu'ils produisaient en fouillant les décombres les minutes affreuses qu'elle venait de vivre. .

Tour à tour, ils se succédèrent pour lui poser toujours les même questions : quand, qui, pourrait-elle les identifier, comment, combien, pourquoi était-elle encore en vie ?

− Vous allez finir par me laisser tranquille ? C'est moi la victime ! finit par leur répondre Rosmerta, lasse de leur présence. Elle n'avait plus qu'une envie : qu'ils partent.

Son souhait ne fut exaucé qu'au petit matin, lorsque John Londubat, l'auror qu'avait épousé Alice Kent, arriva. Tout le monde était appelé d'urgence. Une autre attaque avait eu lieu et cette fois il y avait un mort : un corps venait d'être découvert flottant dans une rivière.

Rufus Scrimgeour fut le premier à se précipiter vers la nouvelle scène de crime. Ils la laissèrent seule. Si ce n'avait été sur l'insistance d'Alice, peut-être n'auraient-ils même pas pris la peine d'effectuer une réparation de fortune sur sa porte.

Cette nuit fut la plus terrifiante de sa vie…Cette nuit elle avait presque tout perdu… Elle était anéantie. Mais elle devait se relever, rebondir, se reconstruire en même temps qu'elle remettrait les Trois Balais sur pied.

Peu à peu, elle refit surface, ne reparla plus de cette nuit. Tout semblait avoir retrouvé sa place. Les Trois Balais furent remis en état et étaient plus accueillant encore. Mais malgré cela, le souvenir de la visite du Mage Noir resta vivace. Il devait lui en rester une peur viscérale des nuits de tempête, pourtant si fréquentes dans cette contrée des Highlands.

-----------------------------------------------------------------------------------------------------------------

Décembre 1998

Encore quelques minutes et il arriverait enfin à la petite maison qu'il occupait avec Harry et Hermione.

Ron était sur son balai depuis des heures. Il regrettait presque de ne pas avoir transplané car le froid était piquant et chargé d'une humidité qui parvenait sans mal à passer la barrière de sa cape de laine. De plus, chargé comme il était, tenir en équilibre relevait de l'exploit. Mais rien n'aurait pu le dissuader de chevaucher son tout nouveau balai.

Voilà deux jours qu'il n'avait pas vu ses amis. A l'occasion de Noël, il était retourné au Terrier pour quelques jours. Il avait été heureux de retrouver les siens. Charlie, en mission pour l'ordre, n'avait pas pu se joindre à la fête. Percy, lui, n'avait même pas daigné répondre à l'invitation. Mais Molly Weasley se faisait un raison: jamais depuis plusieurs années, elle n'était parvenue à réunir toute sa petite famille pour Noël.

Hermione avait rejoint ses parents, que l'ordre avait mis à l'abri hors du pays sous la garde de Charlie. Ils ne comprenaient pas tout ce qui se passait, le monde des sorciers et leurs problèmes les dépassant. Pourtant, devant l'insistance de leur fille, ils s'étaient résignés à fermer leur cabinet dentaire pour une durée indéterminée, prétextant un tour du monde.

Harry quant à lui, était allé en Cornouailles sur une piste qu'il disait devoir absolument vérifier. Mais Ron n'était pas dupe. Il savait qu'en vérité, son ami voulait éviter Ginny. Leur dernière rencontre, qui remontait au mariage de Bill et Fleur, s'était mal passée. Ils évitaient jusqu'à se regarder.

L'atmosphère du mariage avait été étrange. Bill se remettait péniblement de ses blessures et la disparition de Dumbledore était encore trop présente dans l'esprit de chacun. Pourtant, Fleur était magnifique dans sa robe blanche toute simple, son bouquet de lys serré contre son giron, remontant solennellement l'allée qui la menait devant l'officiant.

D'invités, il n'y avait eu que la famille la plus proche et les amis les plus intimes. Pas de musique, pas de danse, juste un copieux repas concocté avec amour par Molly.

Pour Noël l'humeur avait été un peu plus joyeuse, malgré les absences que tous ressentaient péniblement. Chacun faisait un effort pour que l'espace de quelques jours la guerre soit oubliée. Les membres de sa famille avaient bien changés, seuls ses parents étaient restés les mêmes. Bill et Fleur nageaient dans un bonheur trop mesuré pour de jeunes mariés. Même les jumeaux n'étaient pas aussi espiègles qu'à leur habitude. Mais le pire c'était Ginny, qui avait évité pendant ces deux jours tous les sujets concernant Harry. Dès que son nom était prononcé, elle quittait la pièce ou bien s'enfermait dans un silence pathétique, si bien qu'immédiatement on changeait de conversation.

Au matin de Noël, la magie finie par opérer. Au pied de l'immense sapin bariolé, trônait un amas de paquets multicolores. Très vite, on n'entendit plus que le papier cadeau que l'on déchirait et les exclamations de joie des Weasley. Comme chaque année, Molly avait offert à chacun de ses enfants un pull tricoté main. Arthur était heureux d'offrir à chacun d'eux un objet moldu. Ron hérita donc une petite boussole en cuivre dont il cherchait encore l'utilité. Mais le plus beau cadeau ce furent les jumeaux qui le lui offrirent. Ils attendirent que tous aient découvert leurs présents avant de le lui remettre, certains de leur effet.

− Un nimbus 2006 … murmura Ron sceptique en découvrant le contenu du paquet puis d'un ton méfiant, il s'adressa à eux :

− Ce n'est pas une autre de vos farce-et-attrapes ? Il ne va pas s'écraser lamentablement au sol une fois que je serai à 10 mètres ?

− Non ! s'exclamèrent les jumeaux en cœur.

− C'est bien un véritable Nimbus 2006. précisa George avant que Fred n'ajoute :

− Mais tu viens de nous donner une bonne idée…

Ron était resté sans voix un moment et lorsqu'il comprit que ce qu'il tenait entre les mains était bien réel, il sauta de joie. Toute la famille partit dans un immense éclat de rire en le voyant bondir comme un cabri. Jamais on ne lui avait rien offert qui lui fasse autant plaisir.

− J'ai hâte de l'essayer ! D'ailleurs j'y vais tout de suite… Ginny ! Fred ! Georges ! Une petite partie de Quidditch à deux contre Deux ?

− On va te ratatiner ! déclara Fred qui avait jaillit de son siège à la proposition de son cadet, immédiatement suivi par Georges.

− Alors Ginny, on t'attend ! insista Ron, voyant que sa sœur n'avait pas bougé un muscle à son invitation.

− Elle ne joue plus au Quidditch et je ne crois pas que ce soit parce que le championnat de Poudlard a été annulé… murmura Fleur à l'oreille de Ron.

− Alors pourquoi ? l'interrogeât-il

Bill qui n'avait rien perdu des propos de sa jeune épouse lui lança un regard qui voulait dire « il faut te faire un dessin où est-ce que tu es trop bête ? »

Mais madame Weasley mit tout le monde d'accord : elle ne les voyait pas souvent, ce n'était pas pour qu'ils passent le peu de temps qu'ils avaient en famille à voler sur un balai ; ce que Monsieur Weasley s'empressa d'appuyer devant le regard insistant de sa femme.

− Tout à fait les enfants, votre mère à parfaitement raison.

− Dans ces cas je le testerai en allant rejoindre Harry et Hermione. se résigna Ron qui n'avait pas lâché son balai.

Ginny s'enfonça dans son fauteuil.

− Mais c'est très dangereux Ron ! dit sa mère inquiète, tu sais très bien que tu dois faire attention.

− Ne t'inquiète pas maman je me rends invisible en vol.

− Ce n'est pas à toi de me dire si je dois m'inquiéter ou pas ! répliqua-t-elle un peu vivement.

En disant ça, elle jeta un œil à l'horloge familiale dont les aiguilles représentant Percy et Charly n'avaient pas quitté la position « En danger de mort ».

− Je t'assure maman, tout se passera très bien… essaya de la rassurer Ron qui comprit alors que la bonne humeur de Molly pendant tout son séjour n'avait été qu'une façade.

Molly se radoucit un peu.

− D'accord, mais tu prendras de la potion de vigilance. J'en ai préparé un plein chaudron la semaine dernière…

− Maman… se plaignit Ron.

− Je ne croyais pas que je dirais ça un jour, mais maman à raison : tu devrais l'écouter, crut bon d'ajouter Georges.

Ron s'approcha de lui et de façon à ne pas être entendu de sa mère lui expliqua :

− Je ne préfère pas. Si je suis trop prudent, je n'aurai pas les mêmes sensations sur le balai… Et il est hors de question que je ne vois pas ce que cette petite merveille à dans le ventre… » conclut-il en enlaçant son nouveau jouet comme s'il s'était s'agit d'une femme.

− Et bien, je comprends mieux pourquoi toi et Hermione vous n'avez jamais conclu, lança Ginny ironique. Tu as l'air de préférer ton balai aux filles…

− Arrêtez avec Hermione, il n'y a rien, absolument rien entre nous ! On est juste amis… se défendit Ron agacé.

Pendant toute la durée de son séjour au Terrier, il lui avait semblé que sa sœur ne sortait de son mutisme que pour l'asticoter à propos d'Hermione. Elle s'était trouvée des alliés de circonstance, puisque ses frères et de sa belle-sœur ne manquèrent pas non plus une occasion de le taquiner à ce sujet. Ils étaient persuadés qu'il entretenait à l'égard de la jeune sorcière un sentiment bien différent de la simple amitié. Il ne pouvait pas nier qu'Hermione lui plaisait. Mais elle ne le voyait que comme un ami, tout au plus comme un frère. Et puis ils avaient bien d'autres soucis en ce moment

Le dernier repas en famille fut pris dans une ambiance maussade. Ron eut du mal à avaler son petit déjeuner, une boule lui enserrait la gorge à chaque bouchée, même son café avait un goût amer. Ces deux jours étaient passés trop vite. Ginny ne retournerait à Poudlard qu'après la nouvelle année, Bill et Fleurs restaient encore quelques jours avant de regagner la France. Seuls les Jumeaux quittaient aussi le Terrier le jour même, leurs affaires et l'ordre du Phoenix les attendaient.

Et puis ce fut l'heure du départ. Il n'avait pas envie de les Laisser. Il ne savait pas quand il les reverrait, ni même s'il les reverrait un jour. Pourtant, il avait hâte de retrouver ses amis.

Les adieux se firent dans la cuisine du Terrier. Les Jumeaux étaient partis peu avant midi, mais Ron avaient différé son départ, préférant profiter de la sécurité de l'obscurité pour voyager. Sa mère fut la dernière à lui dire au revoir, mais au lieu de l'étreindre comme elle l'avait fait avec ses frères, elle lui ordonna :

− Ouvre la bouche !

Elle tenait à la main un flacon sur lequel était inscrit « Potion de vigilance » et dirigeait vers lui une cuillère emplie d'un liquide jaune et visqueux.

− Maman… protesta Ron.

− Ne discutes pas ! Je suis ta mère…

Alors, comme lorsqu'il avait six ans, il ouvrit grand la bouche et Molly lui enfourna une pleine cuillère de potion. Il fit la grimace tant elle était amer.

− C'est infect ! dit-il une fois qu'il l'eut péniblement avalé.

− Alors c'est que c'est efficace ! déclara sa mère en lui glissant le flacon dans la poche. Comme ça tu n'en manqueras pas mon chéri.

C'est seulement après que, ne retenant plus ses larmes, elle serra le plus jeune de ses fils dans ses bras un long moment.

A présent, le vent le glaçait, ses doigts engourdis serraient le manche de son balai. Encore un petit effort, il y était presque. Il souriait intérieurement en pensant à la fête que lui feraient ses amis et à leur joie lorsqu'il leur dévoilerait le contenu de ses sacoches. Ses parents n'avaient pas oublié les deux Gryffondors et l'avaient chargé de leur rapporter les cadeaux qu'ils avaient pour eux : une paire de gants bien chauds pour Harry et une belle écharpe pour Hermione. Juste avant qu'il ne s'envole pour retrouver ses amis, Ginny avait accouru vers lui.

− C'est pour Harry. lui dit-elle simplement, le prénom mourant dans un sanglot réprimé.

Il saisit le petit paquet soigneusement emballé qu'elle lui tendait et le rangea avec les autres, puis il prit sa sœur dans ses bras et, presque paternellement, lui caressa les cheveux. Il ne savait pas quoi lui dire pour la consoler. Il se contenta de déposa un baiser sur sa joue avant de s'envoler, retrouver ses amis.

Chevauchant toujours son nimbus 2006, Ron se retourna. Depuis quelques minutes, il avait l'impression d'être suivi. Il scruta l'obscurité mais ne vit rien. La potion de vigilance que sa mère l'avait forcée à prendre s'avérait apparemment trop efficace et, comme il le craignait, l'avait conduit à une prudence excessive. Mais ce n'était pas grave, dés le lendemain il confronterait sa petite merveille à l'Eclair de feu d'Harry. Il sourit d'anticipation : un peu de distraction ne leur feraient pas de mal avant de reprendre leur quête. Et puis il n'aurait pas pu piloter comme il l'aurait voulu. Les sacoches de cuir accrochées au manche l'alourdissaient trop.

En plus des cadeaux, Molly l'avait lesté de pratiquement tous les restes de leur repas de Noël. Il avait même l'impression qu'elle avait passé la nuit à en cuisiner un nouveau, tellement il y en avait. Depuis combien de temps n'avait-il pas partagé avec Harry et Hermione un repas digne de ce nom ? Ils allaient être heureux de se mettre sous la dent autre chose que ses sandwichs caoutchouteux ou les pâtes trop cuites d'Hermione. Seuls les œufs au bacon d'Harry relevaient le niveau de leur ordinaire. Les années passées chez les Dursley avaient finalement servies à quelque chose, comme aimait à le répéter Hermione.

Enfin il approchait. Il effectua un atterrissage impeccable tout près de la porte d'entrée. Une douce lumière s'échappait par les petites fenêtres. Cela étonna Ron, il avait pensé être le premier à arriver. Comment se faisait-il qu'ils soient déjà là ? C'est avec un peu d'appréhension qu'il poussa la porte.