Disclaimer: Les personnages de Shaman King appartiennent à Hiroyuki Takei, blablabla, oui, bon on a compris.
Hello, je suis 3riot8o1 et ceci est la toute première fic que je vais poster ici. Ça doit faire plus de 5 ans que je n'ai rien écrit, mais j'ai décidé de m'y remettre, car je crois bien avoir vu toutes les images que je pouvais voir, lu toutes les fanfictions que je pouvais lire, acheté des doujinshis çà et là, et… Je n'ai malheureusement plus rien de HoroXRen à me mettre sous la dent… Et il n'était pas question que je reste là, les bras croisés, à regarder le fandom de ce merveilleux pairing disparaître. Me voici donc aujourd'hui, en espérant que cette fanfiction puisse assouvir (ou faire renaître…?) les fantasmes inavoués de certains fans de HoroXRen comme moi :') Bonne lecture!
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Le énième rapport météorologique se fit entendre à la radio lorsqu'il se résolut à extirper son bras dénudé hors des couvertures moelleuses pour l'éteindre. La voix féminine et posée annonçant une journée froide et pluvieuse se tut, laissant place à un silence astral. De faibles tintements de vaisselle s'échappant de la cuisine ainsi qu'un subtil arôme de café éveillèrent peu à peu ses sens engourdis par le sommeil. Horohoro s'étira longuement, non sans réprimer un bâillement sonore. Plus ou moins éveillé, il s'assit sur son lit, perdu dans la contemplation de la fenêtre sur laquelle s'écoulaient de longs et paresseux rubans d'eau.
Son regard dériva sur le plancher en bois franc de sa chambre. Ou plutôt sur le bordel qui y régnait. La vue de son sac à dos éventré, des feuilles éparpillées aux quatre vents, d'un manuel d'algèbre étonnamment propre et de quelques crayons aux bouts mordillés lui rappela immanquablement qu'aujourd'hui était son premier jour de vacances. En effet, après avoir fini son dernier cours la veille, le jeune homme avait tout balancé en vrac sur le plancher avant de s'écraser sur son lit, qui jamais n'avait semblé si confortable, pour y dormir plus de douze heures consécutives.
Il bâilla en s'étirant, les bras tendus au-dessus de sa tête. Malgré son récent congédiement pour une raison « totalement insignifiante », ses examens plus ou moins bien réussis et la fatigue inexplicable qui accompagne nécessairement les lundis, il se sentait plutôt en forme. Une joie candide et naïve l'envahit tandis qu'il fila sous la douche où le premier jet d'eau froide acheva de le réveiller. Puis, vêtu de ses habits les plus propres, il se rendit à la cuisine. Il y trouva son colocataire, le nez fourré dans un quotidien anglais quelconque et une tasse de café noir à la main.
« Hey, Lyserg ! » fit Horohoro d'une voix énergique.
« G'morning ! »répondit le dénommé Lyserg en levant les yeux. « Tu sembles particulièrement joyeux pour un matin pluvieux. Et wow, chemise et pantalon propres ! Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait du Horohoro que je connais ? »
Ce dernier déposa sa tasse fumante en laissant échapper un petit rire. En effet, rares étaient les occasions de voir celui avec qui il cohabitait porter autre chose qu'un t-shirt et une paire de jeans délavés. Il semblait si sérieux que c'en était risible. Horohoro fit une petite moue face aux moqueries de son ami.
« Tu sais bien que je dois me retrouver un job… se défendit-il en réajustant le col de sa chemise. Pas le choix d'avoir l'air un minimum crédible. D'ailleurs, je ferais mieux d'enlever mon bandeau ou pas ? »
Lyserg réfléchit un petit moment, la tête légèrement penchée d'un côté, les sourcils froncés.
« Je pense que tu fais plus sérieux sans ton bandeau. Tes cheveux tombent plus naturellement et ça te rajoute un certain charisme », affirma-t-il avant de porter sa tasse de café à ses lèvres.
Horohoro retira donc son bandeau et passa une main dans ses cheveux azur encore humides.
« D'accord », répondit-il simplement, un peu gêné par le compliment.
Il inséra deux rôties dans le grille-pain et s'affaira à sortir quelques pots de confiture, du beurre, une salade de fruits et du lait. Il se servit un verre qu'il but d'un trait.
« Sinon, j'ai fini l'école ! Aujourd'hui c'est ma première journée de vacances… »
« Et tu comptes déjà te trouver du travail ? T'es motivé dis donc. »
« Je suis complètement à sec… »
« Tu n'avais pas des économies »
« Faire réparer mon snowboard m'a coûté un bras… Du coup, à ce rythme, je n'aurai plus de quoi payer le loyer lorsque tu ne seras plus là. »
« Hmm… »
Lyserg haussa les épaules, résigné. Malgré son manque d'assurance, il avait traversé le continent en tant qu'étudiant étranger pour venir s'établir ici. L'idée de devoir retourner dans son pays natal pour compléter ses études en droit le déprimait un peu.
Il jeta un coup d'œil vers la fenêtre contre laquelle une pluie torrentielle tambourinait sans ménagement. La lumière grise du jour naissant fit briller ses yeux comme des émeraudes.
« Mais dis-moi, commença-t-il au bout d'un moment, tu pourrais au moins attendre une journée où il fait beau, non ? Il pleut à verse dehors… »
Horohoro termina sa dernière bouchée et déposa plats et ustensiles dans l'évier. Il rétorqua que de toute façon, il annonçait de la pluie pour toute la semaine et que dans tous les cas, cela ne le dérangeait aucunement.
« En tout cas, j'y vais », lança-t-il en enfilant une veste chaude et en balançant son sac sur son épaule.
« Le souper tient-il toujours ? » demanda Lyserg.
« Ouais, mais vas-y d'abord, j'te rejoindrai au resto vers disons... 17h30 ? »
« Parfait, tu m'enverras un message texte si tu penses être en retard. »
« Ok, passe une bonne journée ! »
« Pareillement ! »
Le jeune homme enfila son capuchon et sortit sous la pluie battante avec comme seul allié un parapluie qui, au premier coin de rue, menaçait déjà de l'abandonner.
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« Très bien. Je vais prendre le temps de consulter votre dossier, cher Monsieur. Passez une agréable journée ! »
« Merci bien, au revoir… »
Horohoro sortit de la boutique, manquant de trébucher sur la petite marche qui séparait l'entrée du trottoir. Il se mit à marcher rapidement, les dents serrées. Maisoui,c'estça,songea le jeune homme aux cheveux bleus avec mépris.JemettraismamainaufeuquemonC.V.setrouveaufonddespoubellesàl'heurequ'ilest.Etpuis,sonpetitsourired'hypocrite,jeleluiferaisbienravaler…
Sa frustration laissa place à un désespoir muet lorsqu'il dû assister, impuissant, au spectacle de son parapluie retourné et emporté dans une bourrasque. Deux ou trois jurons plus tard, il continua son chemin, les mains fourrées dans ses poches.
Complètement trempé et frigorifié, Horohoro s'arrêta au bout de la rue, devant un petit café. Jusqu'à présent, il avait fait plus d'une quinzaine de boutiques, marchés, épiceries et restaurants. Si quelques employeurs avaient accepté son curriculum vitae de bon cœur, il eut la nette impression que tous les autres l'avaient simplement fait par politesse avant de le renvoyer gentiment. Et ce, sans compter ceux qui lui avaient simplement montré la direction de la sortie.
Horohoro reprit lentement son souffle. Sans se décourager pour autant, il se dit qu'on finirait bien par le rappeler et que dans le pire des cas, il lui restait amplement le temps de rechercher un emploi ailleurs que dans ce quartier qui semblait prendre un vilain plaisir à lui mettre des bâtons dans les roues.
Le son cristallin d'un carillon l'extirpa de ses pensées. Un client venait tout juste de sortir du café devant lequel il se tenait, faisant virevolter un très court instant le papier collé sur la porte. Il plissa les yeux pour y lire « Serveur recherché, temps plein ou temps partiel ». Le cœur empli d'une motivation nouvelle, Horohoro jeta un rapide coup d'œil à l'enseigne, puis entra dans le petit café.
« Bonjour, Monsieur ! Bienvenue au Café Le Tigre d'Or ! »
Une jeune Chinoise à la silhouette élégante l'accueillit avec un sourire si radieux que Horohoro en oublia presque instantanément ce qu'il était venu faire ici. Avant même qu'il eut le temps de prononcer quoi que ce soit de cohérent, l'employée porta ses mains à son visage, en signe de surprise. « Mais mon Dieu, s'exclama-t-elle. Vous êtes trempé jusqu'aux os. Enlevez-moi vite ce manteau et installez-vous, je vous offre un café ! »
Horohoro, embarrassé tant par la beauté de la jeune femme que par sa gentillesse, balbutia quelques mots incompréhensible : « Euh… Non ! Enfin… Je… En fait, euh, j'étais venu pour… Euh, je… »
Sans vraiment prendre la peine de l'écouter, elle cria quelque chose dans sa langue maternelle à l'un des employés derrière le comptoir et s'empressa de pousser son client vers l'une des tables au bord de la fenêtre. « Installez-vous ! On va vous servir dans quelques minutes ! »
Pendant qu'elle s'éloignait vers le fond du café, le jeune homme remarqua la longue robe traditionnelle brodée d'un dragon qu'elle portait. Non seulement épousait-elle parfaitement ses courbes, mais la large fente au niveau des cuisses laissait entrevoir une sublime paire de jambes devant lesquelles il ne pouvait rester indifférent. Sentant le rouge lui monter aux joues, il s'empressa d'enlever son manteau et s'installa sur la chaise qui émit un vague grincement.
Malgré le mauvais temps, quelques clients étaient attablés, seuls pour la plupart, sirotant une tasse de café. Ou bien était-ce du thé, vu les théières en porcelaine sur certaines tables et la douce odeur de jasmin qui flottait dans l'air.
Le menton dans le creux de la main, Horohoro porta ses yeux sur le mur du fond où un gigantesque dragon semblait exécuter une danse frénétique, la gueule grande ouverte, exhibant fièrement ses écailles aux couleurs criardes. Sur le mur opposé, trois longs rouleaux de calligraphie chinoise suspendus exposaient une vérité qui échappait complètement au jeune Japonais, et ce, probablement même s'ils avaient été traduis dans sa langue. Le regard de ce dernier termina sa trajectoire sur les quelques lanternes écarlates suspendues ça et là au plafond, puis sur le classique maneki-neko à la patte levée posé sur le comptoir.
Horohoro ne put s'empêcher de réprimer un sourire moqueur : « Décidément, le décor est aussi ringard que le nom du café… »
À cet instant précis, une tasse de café s'abattit sur sa table, provoquant un entrechoquement de verre qui le fit sursauter. Il leva la tête pour croiser un regard perçant, si bien que son premier réflexe fut de baisser les yeux dans la fraction de seconde qui suivit. Un drôle de flash-back lui revint en mémoire, celui de s'être fait gronder par son professeur lorsqu'il avait obtenu 25 sur 100 en mathématiques.
« Votre café… monsieur »
Aucune douceur. Son ton était aussi rude que son geste. Il s'était même forcé de rajouter « monsieur », comme pour sonner plus poli, mais qui, en fait, sonnait complètement faux. Horohoro releva les yeux, évitant soigneusement le regard de l'autre, prêt à dire quelque chose, mais sa bouche demeura silencieusement ouverte.
Devant lui se tenait un jeune garçon d'à peu près son âge, d'une beauté remarquable. Certes, il avait cet air renfrogné qui semblait naturel chez lui, mais sans trop savoir pourquoi, Horohoro ne pouvait s'empêcher de lui trouver un certain charme. Peut-être à cause de ses traits d'éphèbe, son cou mince, ou encore sa petite stature…
Confus, il détourna à nouveau les yeux.
Le jeune serveur, qui n'en pouvait plus de soutenir cet air légèrement ahuri, -voire carrément stupide, songea-t-il en son for intérieur-, que son client lui adressait, émit un vague grognement, comme pour le ramener à la réalité. Ce qui semblait plutôt bien fonctionner puisque ce dernier écarquilla grand les yeux d'une surprise mal retenue avant de bafouiller maladroitement : « Je… Euh… Merci, merci beaucoup… »
Sans même prendre la peine de répondre, l'employé du café tourna les talons et s'en alla vaquer à ses autres occupations.
L'air toujours hébété, Horohoro le suivit du regard. Il remarqua distraitement ses drôles de cheveux, ramenés en une seule pointe au dessus de sa tête. Il finit par baisser les yeux sur sa tasse de café. Il mit un certain temps avant de remarquer les formes abstraites qui s'étaient dessinés à la surface de la mousse. On aurait dit un motif de feuille « ou quelque chose comme ça ». Entoutcas,c'esttrèsjoli,pensa Horohoro en portant la tasse à ses lèvres. L'arôme raffiné de caféine lui titilla plaisamment le nez tandis qu'il sirota une première gorgée de ce liquide chaud. Puis, comme en transe, il déposa lentement la tasse sur la table : de toute sa vie, c'était définitivement le meilleur café qui ne lui ait jamais été donné de boire.
Il chercha son serveur du regard… et le trouva. Ses cheveux noirs tirant sur le pourpre jetaient une ombre sur les traits tendus de son visage, comme pour le tenir à l'abri des regards. Il se rappela de son attitude désagréable et rude, et eut peine à croire que ce café suave et onctueux qu'il tenait entre les mains puisse provenir de cette seule et même personne.
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« J'te jure, même moi qui ne raffole pourtant pas du café, j'ai trouvé le sien extraordinaire. »
« Alors là, tu m'étonnes. Tu aurais dû lui demander son secret ! »
Attablés sur la terrasse du Patch Restaurant Bar & Grill, Horohoro et Lyserg dégustaient respectivement un steak de filet mignon et champignons sautés ainsi qu'un filet de saumon avec sauce hollandaise et asperges. Deux grands verres de bière froide accompagnaient le repas du duo qui discutaient avec animation, profitant des timides rayons de soleil de cette fin de soirée.
« Tu plaisantes ? » se moqua Horohoro avant de boire une gorgée de bière. « Il était si bête ! »
« Tu exagères… »
« Pas du tout ! Moi aussi, au début, je pensais que c'était juste mon imagination, mais j'serais mort dix fois s'il y avait eut des fusils à la place de ses yeux. »
« Mais voyons, c'est complètement injustifié… »
Horohoro planta sa fourchette dans un gros morceau de steak et le dévora avec un appétit sans retenue.
« Y d'vait ne pas m'aimer la face… » marmonna-t-il au bout de quelques secondes, la bouche pleine.
« Dans ce cas, t'es mal parti pour te faire engager là, non ? »
« J'sais pas, ça s'était plutôt bien passé lorsque j'ai parlé à Jun-san… »
« Jun-san? »
« C'est la patronne du Café. Elle était très sympa, souriante… et foutrement sexy! J'te jure... »
De ses mains, il fit un mouvement dans l'air, comme s'il caressait les flancs d'un violoncelle. Lyserg éclata de rire.
« Toi alors... »
« J'avais un mal fou à me concentrer durant l'entrevue… » continua Horohoro avec un sourire niais.
« Oh, parce qu'elle t'a passé en entrevue ? »
« Ouais ! Elle a bien voulu me passer tout de suite. À cause du mauvais temps, c'était pas très occupé alors du coup… »
Horohoro lui expliqua ensuite comment l'entrevue s'était déroulée. Il avait fait rire la gérante du café à plusieurs reprises, ce qui semblait être un bon signe à ses yeux. Il se demanda néanmoins s'il allait devoir faire de la caisse, « j'espère pas, j'suis pourri grave en maths. D'ailleurs, j'pense pas avoir réussi un seul examen de toute ma vie ». Et puis, il lui parla du décor, « tellement ringard et cliché, mais on s'habitue à force ». Puis, il s'excusa de monopoliser la conversation avant de demander des nouvelles de son interlocuteur.
« Et toi ? Qu'est-ce que t'as de bon à raconter ? T'en es où avec euh… cette fille dont tu m'as parlé ? Celle de ton organisation religieux ou j'sais pas quoi… »
« Mais… Mais, pourquoi tu me demandes ça comme si on était un couple? »
« Oh, parce que ce n'est pas le cas ? »
« Ben non… Ben non, crétin… »
Lyserg, visiblement gêné, saisit nerveusement son verre. Et sans hésiter une seconde, il vida le restant d'un seul trait. Un peu pris de panique, Horohoro s'excusa maladroitement pour sa question déplacée et reconnut que ce n'était pas de ses affaires. Il lui proposa de changer de sujet, chose à laquelle Lyserg acquiesça sans dire un mot.
Cela faisait plus d'un an qu'ils se connaissaient et pourtant, Lyserg restait toujours bien mystérieux lorsqu'il s'agissait de lui. Et lorsque Horohoro faisait l'erreur de se montrer quelque peu indiscret, l'Anglais se renfermait encore plus sur lui-même, au grand dam de son colocataire. Même si ce dernier avait prit l'initiative de l'amener dîner de temps en temps, il n'avait pas vraiment appris à le connaître. Luiparcontre,pourraitaisémentécrireunebiographiesurmavie… Jenefaisqueça,parlerdemoisansarrêt… songea Horohoro, un tantinet déçu par la situation.
Néanmoins, il aimait beaucoup sa présence sincère et attentive, ses manières polies et raffinées. Sans même qu'il ne le sache, Lyserg avait souvent été un modèle pour lui, tant par son implication dans des activités bénévoles diverses que par le simple fait qu'il était toujours là pour l'écouter, le supporter, et ce, dans tous les sens du mot.
C'est donc tout naturellement que le léger malaise qui s'était installé quelques secondes plus tôt disparut au fur et à mesure que Horohoro se mit à palabrer à propos de tout et rien, fidèle à lui-même.
En se glissant sous les couvertures cette nuit-là, Horohoro s'endormit tout de suite, bercé par le son apaisant de la pluie qui s'était remise à tomber.
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Il faisait plutôt frais cet avant-midi de printemps. Horohoro resserra son manteau autour de son corps pour se réchauffer. Ses pas étaient rapides et, à chaque respiration, une légère volute d'air blanche se formait devant sa bouche. Pour la dixième fois en moins d'une minute, il jeta un regard fébrile à son propre reflet sur les vitrines des boutiques qui séparaient son appartement du Café Le Tigre d'Or. Ses cheveux azur, retenus par un simple bandeau blanc, livraient une bataille sans merci contre le vent. Ses yeux rougis par le sommeil accusaient un réveil brusque, causé par la sonnerie tonitruante de son téléphone cellulaire à 11 :00 le matin. Au son de la voix hésitante qui avait demandé un certain « M. Usui euh… Ho… Horokeu ? Ai-je bien prononcé votre nom ? » avec un léger accent chantant, le jeune homme avait littéralement bondi de son lit, la poitrine gonflée d'un sentiment euphorique.
On lui demandait de se présenter dans une heure afin de commencer sa formation de serveur. Le tablier et la chemise étaient fournis sur place, il n'avait qu'à apporter une paire de pantalons noirs, un lunch ainsi que « ta bonne humeur et l'énergie dont tu as fait preuve lors de notre entretien ! »
Après avoir replacé son bandeau une énième fois, il prit une grande inspiration, puis ouvrit la porte du café. Le chant familier du carillon accompagné d'effluves de café et de jasmin l'accueillit.
« M. Usui ! Bienvenue ! Je vous attendais ! »
Jun avait un sourire chaleureux, des yeux pétillants. Horohoro jeta un coup d'œil au petit panda imprimé sur son décolleté, étiré par sa poitrine voluptueuse. Il rougit brusquement, puis s'inclina très bas.
« A… Appelez-moi Horohoro ! »
Après quelques échanges de formalités, elle lui fit faire le tour de l'arrière de sa propriété, là où étaient situés les casiers, les toilettes et la salle des employés. Horohoro crut à tort que la zone réservée au personnel allait être différente de tout le reste.
Accrochés le long du couloir, de gigantesques éventails de toutes les couleurs déployaient leur parure, tels des papillons prêts à s'envoler. Certains d'entre eux semblaient être peints à la main. Sur l'autre mur, des poissons aux écailles orangées nageaient paisiblement dans plusieurs petits tableaux, aux côtés d'un calendrier. Le mois de mars était illustré par la grande Muraille de Chine.
« Tu dois trouver que ça en fait un peu trop, hein ? » demanda Jun en riant doucement, voyant l'expression ahurie de son nouvel employé face au décor des lieux.
« Je… Mais non, pas du tout ! » répondit Horohoro, un peu trop rapidement.
« Oh, ce n'est pas la peine de me mentir, tu sais ! »
Elle lui fit un clin d'œil –qui donna envie à Horohoro, écarlate, de disparaître six pieds sous terre -et l'amena ensuite derrière le comptoir où elle le confia à un serveur Afro-Américain. Ce dernier l'accueillit d'un large sourire avant de tendre la main : « What'sup,buddy! Alors c'est toi le nouveau ? Moi, c'est Chocolove McDonell, à votre service ! »
Il avait de grands yeux rieurs et un fort accent américain, « comme dans les films ». Il lui serra la main :
« Enchanté ! Appelle-moi Horohoro. »
« Boroboro ? » fit son interlocuteur en éclatant d'un rire sonore.
Malgré le nombre incalculable de fois que le jeune Japonais avait entendu ce calembour, il ne pouvait en vouloir à son nouveau collègue, qui semblait prendre un plaisir fou à rire de sa propre blague, se tenant même le ventre à deux mains.
« Excuse-moi, fit-il au bout d'un court moment en reprenant son souffle. C'est juste que… »
Horohoro leva une main conciliante et s'efforça de sourire en haussant les épaules.
« T'en fais pas, c'est pas la première fois qu'on me la sort, celle-là. »
« Et euh… C'est comment, ton nom, en fait ? »
« Horohoro. H-o-r-o-h-o-r-o. »
« Cool ! »
Il griffonna dans un petit calepin dans sa poche avant de lancer : « Allez viens, j'te présente à l'autre mec qui travaille ici ! »
L'image du serveur qui lui avait servi son délicieux café la dernière fois lui revint instantanément à l'esprit et il sentit son cœur faire un petit bond dans la poitrine. En suivant la boule de cheveux afro de Chocolove, il se demanda distraitement si l'autre allait se souvenir de lui.
Mais celui qui se présenta devant lui n'avait rien à voir avec le serveur de ses souvenirs. Il était plutôt grand, presque de la même taille que lui et Chocolove. Ses cheveux bruns étaient ramenés à l'arrière en une petite queue de cheval. Il bougeait la tête au rythme de la musique qui jouait dans ses oreilles jusqu'à ce que Chocolove tire sur ses écouteurs d'un geste sec. « Jun-san t'as dit cent mille fois de ne pas écouter de la musique au travail ! »
L'intéressé sursauta et, visiblement confus, regarda à gauche et à droite, cherchant à comprendre. Il ne trouva rien de mieux à dire que : « Mais... C'est que le dernier single de BOB est sorti… (puis, s'adressant à Horohoro) Est-ce que tu connais BOB ? »
Il avait des yeux doux, calmes la voix traînante. On aurait dit que tout son être dégageait une aura de paix, de quiétude, comme un matin de printemps.
« N… Non, désolé », fit Horohoro au bout d'un moment.
« Ce n'est pas grave », répondit l'autre en esquissant un sourire. « Je te ferai écouter. Ravi de te rencontrer, je suis Yoh. Yoh Asakura. »
« Enchanté, moi c'est Horohoro. »
« Borob- »
« Trop tard, je lui ai déjà fait la blague ! » coupa Chocolove, tout fier de son propre gag.
Tout en serrant la poigne chaleureuse de Yoh, Horohoro ne put s'empêcher de se demander où était donc son serveur de la dernière fois. Il jeta un coup d'œil au Café presque vide, puis vers l'arrière de la boutique. Un temps passa, puis sa curiosité l'emporta : « Dites-moi, est-ce qu'il y a un autre serveur qui travaille ici ? »
Sans trop savoir pourquoi, il se sentait nerveux. Yoh et Chocolove s'échangèrent un regard.
« Tu veux parler de… Ren ? » demanda Yoh avec un sourire indéchiffrable.
« Euh, j'sais pas… fit Horohoro. Peut-être bien… ? Il était à peu près grand comme ça –Horohoro plaça sa main à plat sur une surface imaginaire, légèrement au-dessus de son torse- et il euh…- »
« Est-ce que l'étendue son vocabulaire se limitait à « Hmph » ? »
Une fois de plus, Chocolove lâcha un grand rire, cette fois accompagné de Yoh. Horohoro réprima difficilement un sourire, amusé lui aussi.
« J'pense bien qu'on parle de la même personne », dit-il finalement.
« Il est en pause dîner en ce moment », fit Yoh. « On te le présentera tout à l'heure si tu veux. »
« Mais promets-nous de ne pas démissionner comme le dernier serveur… » commença Chocolove, se voulant sérieux.
« T'es con, fallait pas lui dire ! »
Tandis que le « duo de comiques » se tordait de rire, Horohoro haussa un sourcil, incrédule. Que voulaient-ils dire au juste ? Qu'avait donc fait ce fameux Ren pour qu'un employé en vienne à démissionner ? Il se gratta l'arrière de la tête. Tout compte fait, il n'était plus aussi certain de vouloir faire sa connaissance…
Comme pour éviter que ce dernier ne se pose trop de questions, Chocolove profita de ce moment pour sortir un nouvel uniforme d'on-ne-sait-où et le lui fourra dans les mains. Puis, ignorant ses balbutiements confus, il le poussa dans le dos jusqu'aux toilettes afin qu'il puisse se changer.
« Allez, fais vite, on a du pain sur la planche, mon vieux ! » lança l'Afro-Américain avant de refermer la porte derrière un Horohoro penaud.
Ce dernier s'empressa d'enfiler une chemise –qu'il trouvait légèrement trop serrée-, puis un tablier noir portant l'insigne du Café qui lui arrivait aux genoux. Il jeta un regard à la glace et ne put s'empêcher de pouffer : il se trouvait bien ridicule dans cet accoutrement. Il replaça quelques mèches de cheveux rebelles, décocha un sourire à son reflet, puis sortit prestement.
Tout se passa très vite. Il sentit comme un poids lui rentrer dedans, lui coupant abruptement le souffle. Sous l'effet de la surprise, il recula précipitamment jusqu'à heurter le mur. Au contact douloureux de son dos contre la surface dure, il réprima un gémissement, puis ouvrit lentement les yeux. Vertige. Le temps s'arrêta.
Dès l'instant où il rencontra le regard de Tao Ren, il sut quelque part au fond de lui que sa vie allait changer de façon irrémédiable et prendre un nouveau tournant. Et avant même qu'il ne le réalise vraiment, il était d'ores et déjà trop tard pour faire marche arrière.
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La suite dans le prochain chapitre… )
