Seule Aslinn m'appartient, le reste a été créé par le merveilleux J.R.R Tolkien.
« Petit ange,
Si toutes mes volontés ont été respectées, Oenone est en train de te lire cette missive. Je sais très bien que tu n'es plus un bébé, mais je veux qu'elle apprenne les nouvelles en même temps que toi. »
Ainsi commençait la lettre que lisait et re-lisait la personne assise à la table du fond de l'auberge. Vêtu d'une cape sombre et plongé dans sa lecture, on ne voyait plus que ses paupières et une partie de ses yeux noirs comme une nuit sans étoiles. C'était un Homme et pas n'importe lequel – Aragorn, roi du Gondor. Seulement, il s'était enfui de chez lui des années auparavant et était devenu un Rôdeur, sous le nom de Grand-Pas. Il détestait le Gondor et les Hommes comme il se détestait lui-même car il avait honte d'être le descendant de personnes malfaisantes aux ambitions démesurées et aux destins gâchés par la soif de pouvoir et la cupidité.
Ses yeux semblaient brumeux – il lisait la lettre sans la lire, connaissant les mots par cœur, s'intéressant plus à la forme des lettres, aux boucles des l et aux arrondis des a. Cette lettre était la chose qu'il chérissait le plus au monde – avec son épée – et chaque fois qu'il la regardait il ne pouvait s'empêcher d'avoir mal mais il la lisait quand même, comme si il en éprouvait le besoin physiologique.
Il replia le papier, le mit dans une de ses poches intérieures et commença à boire sa bière. Ce fut à ce moment qu'arrivèrent quatre Hobbits – petite taille et sourire rayonnant, du moins pour deux des quatre.
Aragorn comprit tout de suite que quelque chose ne tournait pas rond et il se rappela avoir entendu dire que les Cavaliers Noirs recherchaient activement un Hobbit dénommé Frodon Sacquet. Il remarqua que le premier – un brun aux grands yeux – avait l'air étrange et décréta que tout cela ne pouvait pas être une coïncidence. Il ne cessa de les observer et le brun sembla l'avoir remarqué car il demanda à l'aubergiste quelque chose en regardant Grand-Pas. Et puis, alors que trois des quatre Hobbits étaient à table, le quatrième, apparemment ivre, s'exclama, en parlant à une dizaine de clients :
« Si je connais des Sacquet ? Bien sûr : regardez ! Il y a mon ami Frodon, là-bas ! Eh ! Frodon ! »
La mine horrifiée des trois autres confirma à Aragorn que sa théorie était la bonne. Frodon se retrouva entouré par des clients curieux et au regard avide. L'Homme comprit que les Cavaliers Noirs avaient donné une récompense à celui qui leur donnerait Sacquet. Et alors que le Hobbit était jeté à terre, il aperçut, comme les autres, l'objet qu'il portait autour de son cou : un anneau. Et Grand-Pas sut tout de suite que cet anneau était l'Anneau de Pouvoir de Sauron, celui que les Cavaliers noirs devaient être en train de chercher. Toutes les pièces du puzzle s'emboitaient.
Soudain, le Hobbit disparut, volatilisé. Durant deux bonnes minutes, Aragorn regarda partout autour de lui – aucune trace de Sacquet. Et puis il réapparut alors que plus personne ne faisait attention à lui. L'Homme le prit par le cou et l'emmena ans une des salles vides de l'auberge. Une fois qu'il eût claqué la porte, Frodon s'écria :
« Qui êtes vous ? »
« Je m'appelle Grand-Pas.» répondit-il « Je suis un Rôdeur. »
L'œil aux aguets, la lame prête à parer n'importe quelle attaque, Aragorn vérifiait que personne ne venait quand les trois Hobbits entrèrent en trombe dans la pièce, le premier – un blond joufflu – criant
« Relâchez-le ! »
« Je n'attaquais pas votre ami, Hobbit, je l'ai amené ici pour le protéger. Grâce à la bêtise immense de l'un de vos compagnons » il regarda fixement le Hobbit qui avait depuis dessaoulé « les Cavaliers Noirs doivent déjà savoir que vous êtes ici. »
« Que nous proposez-vous ? » demanda le quatrième Hobbit – ni Sacquet, ni le joufflu, ni celui qui était saoul.
« J'ai une idée » répondit Grand-Pas « Vous avez réservé une chambre, n'est-ce pas ? »
Les quatre Hobbits acquiescèrent silencieusement.
« Donc l'aubergiste connait votre numéro de chambre » continua-t-il
Nouvel hochement de tête.
« Vous allez partir dans votre chambre puis disparaître grâce à l'anneau de votre ami Sacquet et revenir ici. Les Cavaliers Noirs ne sauront pas que vous serez ici et ils tenteront de vous tuer dans la chambre que vous avez réservé. »
Deux des Hobbits - Merry et Pippin d'après ce qu'il avait compris - semblaient convaincus mais le blond demanda:
"Pourquoi devrait-on vous faire confiance?"
Aragorn s'assit sur une des chaises et répondit
"Je connais Gandalf."
Et Sacquet et son compère parurent comprendre que si on ne pouvait pas faire confiance à Gandalf, on ne pouvait faire confiance à personne.
"C'est d'accord" déclara Frodon
Cette nuit-là, Aragorn et les quatre Hobbits virent les Cavaliers Noirs poignarder, lacérer, massacrer les lits vides qui auraient du être occupé par Frodon et ses compagnons. Mais il avait la tête ailleurs, la main dans la poche intérieure de sa veste, le parchemin en contact avec sa peau froide. Elle serait fière de moi, dit une voix dans sa tête. Elle serait fière de son fils.
