Ce ne sont pas de petits mots jetés, écrits sur une feuille de papier déchirée et roulée en boule. C'est mon rêve, encore inscrit sur tes lèvres. Je lis toujours sur ces courbes, cet aveu délicieux. Femme, ces lettres que tu as déposées dans un ordre émouvant, m'ont fait chavirer. J'ai quitté mon bateau. Je ne veux plus être un salop. Je sens ton regard me pénétrer. Il est bleu, brillant, si froid et pourtant si chaud. Tu prie pour que je repose ma bouche sur la tienne, pour que ma main dans la tienne, plus rien ne nous retiennent, plus rien ne nous échappent. Tu veux ta vie dans la mienne, des matins à regarder l'aube ce lever. Ensemble. Nous serions si beaux, et mes doigts dans tes cheveux, tu ne pourrai pas rêver mieux. Tu veux ces promesses. Tu les veux. A l'infinie. Tu veux que je t'appartienne pour une vie qui jamais ne se finira. Je ne peux pas croire ce que j'ai en face des yeux. C'est moi, mon cœur et mon corps, qui voulons crier ce que tu dis. Oh mon Amour, s'il te plait, dis-le encore. Ma douce torture s'envole. Ai-je donc tout payé, pour être tellement gâté ? Suis-je lavé de mes pêchés ? A toi, je remettrai ma vie entière. Sans toi, je ne suis que poussière. Je ne suis qu'un vieil homme fatigué, brisé et blafard. Je suis condamné à t'aimer pour vivre. Condamné à te suivre et à regarder ton visage endormi. Les secondes me paraissent des minutes. Je me délecte de ce cadeau que je n'ai pas mérité. Je peux lire, avec un plaisir un peu sadique, ta peur qui scintille sur le bord de tes iris.

J'ai posé, à l'arraché, ma canne contre le mur. Tordue et horrible, c'est le seul souvenir de mes malheurs. J'ai approché mes mains de ta taille. J'ai vu tes sourcils tressaillir.

« Viens. »

Tu m'as sauté dessus, j'ai bien failli m'effondrer, mais je n'ai qu'un peu vacillé. Tu t'es un peu redressée, as fait cesser cette pression que ton cœur sur le mien allégeait tellement. Tu t'es souvenue de ce qui faisait que je n'étais pas un homme normal, de ce qui faisait que jamais je n'en serai un. Tu as levé ta tête vers moi, tes bouclettes brunes et ébènes avec toi. J'ai déposé un regard un peu fou à l'intérieur de tes prunelles. J'ai déposé ces mots d'amour à l'intérieur de ton cœur. J'ai oublié mon handicape, physique et morale, je me suis penché près de toi - j'avais déjà oublié combien j'étais grand et maladroit -, j'ai posé une main dans le recoin de tes lèvres, et j'ai laissé les miennes s'approcher et se presser doucement contre elles. Avant de perdre le contrôle, avant de détruire ce moment, j'ai glissé entre deux baisers, ce que je voulais clamer.

« Je t'aime. »

Désormais, je l'ai gravé sur ta bouche. Que vas-tu en faire ?