Bonjour à tous !

Je reprend cette histoire en lui rajoutant un prologue.

Donc, pour ceux qui attendaient le chapitre 2, non il n'est pas publié mais vous aurez un joli prologue tout beau tout mignon à lire !

Les publications de cette histoire seront très aléatoires, je me concentre principalement sur Nathanaël Wyllt dont le prochain chapitre est attendu comme le messie (Oui, Lewl Haul, Barberousse L'hypster, Blaidd Ceirios, je parle de vous !).

Je vous souhaite une bonne lecture et n'hésitez pas à commenter !

Bisous sur les deux fesses,

CyberCoffee


Prologue

Le sentier qui serpentait habituellement entre les vallons sur plusieurs kilomètres avait disparu, recouvert par les eaux. La pluie diluvienne qui s'abattait sans discontinuer sur le Yorkshire depuis un mois avait ravagé les environs et avait provoqué la mort de milliers de personnes. Une pluie qui n'avait rien de naturel. Elle avait commencé à tomber goutte par goutte, puis de plus en plus fort à mesure que les jours passaient. Les autorités ne s'étaient pas méfiées. Les habitants non plus. Puis un barrage au nord de la région s'était écroulé et avait noyé sous les flots une ville de trente mille personnes. A l'est, une classe entière d'élèves de maternelle avait péri lors d'un déplacement en bus scolaire, emporté par une rivière qui avait débordée. Peu à peu, des événements de ce genre s'étaient multipliés aux quatre coins du Yorkshire et avaient attirés l'attention du Magenmagot.

Harry ajusta sa capuche en soupirant. La pluie coulait le long de son torse depuis qu'ils étaient arrivés sur place. Il était gelé malgré le sort de réchauffement.

Son équipe et lui avaient été dépêché sur place afin d'enquêter sur la cause indéniablement surnaturelle de cette pluie incessante. De son avis, Voldemort était incontestablement derrière tout ça. Après tout, Voldemort était toujours derrière tout ce qui sortait de l'ordinaire depuis plus de dix ans.

« Patron ! » grésilla son dispositif de communication.

« Du mouvement, Fléreur ?

-Trois individus traversent le vallon ouest en barque, vêtus comme des civils.

-Il n'y a plus aucun civil dans cette zone », répliqua Harry en épongeant d'une main l'eau qui s'était accumulée dans sa barbe. « Ce sont des sbires du Mouvement.

-C'est pour ça que je te les signale. »

Harry se saisit de ses triplettes et balaya du regard la zone dont son second lui avait parlé. Goran MacLagen (nom de code « Fléreur ») était le meilleur élément de son équipe. C'était un homme d'une trentaine d'années d'une loyauté sans faille. Son intégrité et sa capacité d'adaptation avaient toujours impressionné Harry. Il savait pouvoir se reposer entièrement sur lui si la situation l'exigeait. Et la situation l'exigeait souvent. Ils s'étaient croisés quelques fois dans les couloirs de Poudlard lors de leur scolarité mais leur différence d'âge et les événements morbides de ses dernières années au collège les avaient empêchés de pouvoir faire plus ample connaissance. Ce n'est que lors du recrutement de nouveaux Aurors, il y avait de cela une quinzaine d'années, qu'Harry avait eu le plaisir de découvrir Goran parmi les postulants. Il avait brillé durant toute la durée de l'examen et Harry l'avait alors rapidement pris sous son aile. Il était devenu un excellent Auror et un ami précieux au fil du temps.

« Je les ai en visuel », répondit-il quand ses triplettes s'arrêtèrent sur les trois silhouettes.

« C'est un piège, patron.

-Je sais.

-Donc on y va, je suppose.

-Evidemment, préviens les autres ! » ricana Harry.

Deux grésillements plus tard, la voix déformée de Goran retentit à nouveau :

« Sombral, rejoins le Norvégien et passez par l'ouest pour resserrer la tenaille. Le Patron et moi nous nous dirigeons vers l'est pour les dépasser et les prendre à revers. Nundu, Selkie et Abraxan vous suivez les cibles à vingt mètres. Rapace, tu survoles la zone sur un périmètre de cinquante mètres. Il doit y avoir des sbires du Mouvement en faction tout autour de la cible.

-Bien reçu, Fléreur », grésilla plusieurs fois le dispositif.

Harry patienta cinq minutes avant de voir son second sortir des fourrés derrière lui. Il était aussi trempé que lui mais arborait tout de même son inlassable sourire.

« C'est parti », fit Harry.

Le nombre incalculable de missions effectuées ensemble leur avaient permis de se connaître sur le bout des doigts et ils évoluaient instinctivement, côte-à-côte, sans avoir à se parler pour se comprendre. De temps en temps, l'un d'eux faisait des signes avec les doigts à son coéquipier qui lui répondait de la même manière. Silencieusement, ils dépassèrent les trois individus et ils furent bientôt en position.

« Le Norvégien au Patron », grésilla le dispositif, « nous sommes en position.

-Bien reçu », répondit Harry. « Continuez de les suivre à distance. Rapace, au rapport !

-Périmètre dégagé sur vingt mètres. Dix sbires entre vingt et quarante mètres : deux à dix heures, trois à cinq heures, un à midi, trois autres à sept et un dernier à six heures. Ils vous suivent à quinze mètres de distance.

-Bien reçu, faites comme si vous n'aviez pas remarqué. Je donnerai le feu vert pour l'élimination. »

Harry et Goran continuèrent d'avancer tout en gardant un œil aux bruits environnants. Harry vit un des sbires qui s'approchait un peu plus que les autres et il le signala à son partenaire qui hocha la tête pour confirmer qu'il l'avait vu.

« Rapace au Patron », fit le dispositif, « les trois individus se dirigent vers un bâtiment de type manoir. Encore un kilomètre.

-Signes de vie ?

-Négatif, c'est une vieille baraque qui semble abandonnée.

-Bien. Sombral, tu passes en éclaireur et tu me fais un rapport sur les lieux. Selkie, tu rejoins le Norvégien. »

Il fallut dix minutes pour que Sombral fasse à nouveau grésiller le dispositif.

« Sombral au Patron ! La place est nette, pas de signes de vie ni de signes de charmes ou de protections. Ils doivent utiliser l'alchimie.

-Et merde ! » jura Harry en jetant un coup d'œil à Goran qui grimaçait. « Si ce sont des alchimistes nous ne serons jamais assez pour les contrer. A toutes les équipes sauf Nundu : autorisation de desceller vos capacités jusqu'au niveau 6.

-Jusqu'au niveau 6 !? » s'écria Goran. « Tu as perdu la tête ?

-Nous n'avons pas le choix, Fléreur ! Nous ne serons jamais capables d'essuyer une offensive avec nos scellés ! Il n'y a que Nundu qui pourra contre-attaquer et, seul, il ne tiendra pas longtemps !

-J'espère que tu as raison, si jamais nous vidons nos scellés et qu'une attaque de plus grande envergure a lieu dans les jours qui suivent, nous serons complètement inutiles !

-Je le sais bien ! » grogna Harry en ajustant sa capuche trempée. « Si tu as une autre idée, je suis preneur !

-Débloque seulement jusqu'au niveau 3 et si nous nous retrouvons dans une impasse, tu activeras jusqu'au niveau 6. C'est plus prudent.

-Ce sont des alchimistes, Goran ! Le niveau 3 ne suffira pas ! »

Goran se pinça l'arête du nez, las. Il savait bien qu'Harry avait raison. Après tout, Harry avait toujours raison.

« Ok », finit-il par abdiquer. « Niveau 6.

-On va s'en tirer, mon vieux, » promit Harry.

« Comme d'habitude », fit Goran en esquissant un sourire.

Comme s'ils étaient en symbiose, ils levèrent leurs baguettes de concert. Ils la firent courir le long de leurs épaules gauches, sur lesquelles se trouvaient les tatouages de leur division, qui cachaient leurs scellés. Desceller les cinq premiers niveaux leur prit dix bonnes minutes durant lesquelles ils étaient sans défense.

Enfin, ils parvinrent au sixième niveau. Ainsi libérées de leurs entraves, leurs magies s'affolèrent et l'air ambiant se réchauffa brusquement. Leurs auras gonflèrent et se mélangèrent un moment avant de venir caresser leurs visages et ronronner de plaisir.

« Bordel, j'avais oublié comme c'est bon ! » s'extasia Goran en gratouillant son aura du doigt qui vint s'y frotter comme un chat.

Harry sourit et ferma les yeux quelques secondes pour apprécier lui aussi la sensation de plénitude qui l'habitait. C'était comme si on avait rempli à ras-bord une outre d'eau. Sa magie dégoulinait par tous les pores de sa peau et la sensation était foutrement bonne.

Là était toute la controverse d'utiliser pareille technique : sceller une grosse partie de sa magie pour l'avoir en réserve n'était pas sans danger. Nombre d'excellents sorciers avaient perdu la tête et avaient fini par libérer de plus en plus souvent leur magie si bien qu'ils étaient devenus accros à cette sensation et n'avaient pas respecté la première règle : libérer la réserve par palier. Libérer les douze niveaux d'un seul coup était un suicide pur et simple, le corps ne pouvant encaisser autant de puissance sans préparation.

« Au rapport ! » ordonna Harry dans le dispositif.

« Sombral, niveau 6 atteint.

-Le Norvégien et Selkie, niveaux 6 atteints.

-Abraxan, niveau 6 atteint.

-Rapace, niveau 6 atteint.

-Bien reçu, » fit Harry. « Rapace, combien de temps ?

-Point de rencontre avec les cibles dans deux minutes.

-Laissez-les entrer dans la bâtisse. Sombral, poste-toi en faction sur le toit. Les autres, vous nettoyez le périmètre avec discrétion. Pas de prisonniers, ces sbires-là sont de simples sorciers, ils sont là pour venir en renfort aux alchimistes qui sont dans le bâtiment. Rapace, tu nous aiguilles de là-haut.

-Bien reçu. »

Goran lui fit un signe de la main et ils se séparèrent sans bruit. Harry choisit de mener l'attaque par le haut. Il lévita jusqu'à la cime d'un arbre et balaya le périmètre avec ses triplettes qu'il avait préalablement enchantées pour qu'elle lui révèle les auras des sorciers environnants.

Une forte chaleur se mouvait avec précision à sa droite : Goran. Il s'approchait rapidement d'une seconde source de chaleur, bien plus faible. Goran ne s'arrêta pas mais son adversaire tomba aussitôt et la chaleur faiblit.

Harry sourit et s'élança dans le vide lorsqu'il repéra une seconde source de chaleur à dix mètres au nord-est. En temps normal, il aurait transplané d'arbres en arbres mais cette technique était bien trop bruyante lors d'opérations à risques comme celle-ci, il lévita donc jusqu'à se retrouver au-dessus de sa cible. Il cessa son enchantement brusquement et se laissa tomber sur le sbire. La dague qu'il tenait fermement s'enfonça dans son crâne comme dans de la glaise. L'homme n'eut pas le temps de crier, il était déjà mort.

« Nundu, un sbire derrière toi à cinq mètres ! » prévint Rapace par le biais du dispositif.

« Reçu. »

Harry et Goran se rejoignirent là où ils s'étaient quittés quelques minutes plus tôt et attendirent cinq minutes supplémentaires avant de demander un rapport.

« Périmètre nettoyé », répondit plusieurs fois le dispositif en grésillant.

« Patron, les trois suspects sont arrivés, ils descendent de la barque », leur indiqua Sombral. « Entrée dans le bâtiment dans 5, 4, 3, 2, 1…cible dans le manoir. Je répète, cible dans le manoir. Toujours aucuns signes de vie. Quels sont les ordres ?

-Quelles sont vos positions ? » demanda Harry avant de décider de la marche à suivre.

« Le Norvégien et Selkie à dix mètres à l'ouest.

-Abraxan et Nundu à douze mètres de l'entrée principale.

-Rapace en vol stationnaire à trente mètres de haut.

-Sombral sur le toit.

-Parfait. Formation en tenaille, on entre. »

Chaque membre de la division se mit en mouvement et ils entrèrent dans la bâtisse, couverts par divers sorts de désillusion et sorts de silence. La division d'Harry Potter était la meilleure de tout le service des Aurors et chacun des membres avait été soigneusement trié parmi une sélection méticuleuse d'éléments qui sortaient de l'ordinaire. La défaite ne faisait pas partie de leur vocabulaire.

La formation en tenaille était un classique et pénétrer dans le bâtiment silencieux fut un jeu d'enfant. Un jeu bien trop simple pour qu'il ne cache aucune mauvaise surprise. Ils ne pouvaient plus communiquer sans attirer l'attention sur eux mais ils continuèrent leur avancée dans le respect de la formation, tous leurs sens aux aguets.

Dans tout le débâcle qui suivit, il fut bienheureux que ce soit Nundu qui fut attaqué le premier par un alchimiste car cela permit aux autres membres de la division de riposter avec force même si le futur démontrerait que cela ne fut pas assez.

Finn Graham était un homme dangereux et le pauvre alchimiste qui eut la mauvaise idée de l'attaquer en fit les frais. Le surnom « Nundu » lui avait été valu car il avait une étrange fascination pour les poisons gazeux. Couplée à sa propre alchimie, Finn était une véritable machine de guerre. Son adversaire n'eut pas le temps d'émettre un râle de souffrance que sa peau se détachait déjà de son crâne comme si elle fondait sous une chaleur extrême. De l'avis de personnes extérieures comme de l'avis des Langues de Plombs du Ministère, l'auror alchimiste Finn Graham était bon à enfermer.

Mais Harry Potter avait découvert en lui une source infinie de puissance et une loyauté sans faille malgré son instabilité mentale. Il ne lui en fallut pas plus pour l'accueillir au sein de sa division après avoir trafiqué un laissez-passer estampillé du sceau ministériel. Après tout, plus on est de fous et plus on rit, comme le disait si bien le dicton.

« Nous sommes repérés », avertit Nundu. « Alchimiste de niveau 5 ! »

Harry déglutit et entendit Goran faire de même. Il y avait peu d'alchimistes encore en vie depuis La Grande Chasse, six ans auparavant. Et il y avait encore moins d'alchimistes d'un tel niveau. Comment Voldemort avait-il fait pour les persuader de jouer les kamikazes en plein milieu du Yorkshire ? La logique aurait voulu qu'Il les garde auprès de lui, comme gardes du corps !

« On est dans la merde, Patron ! » chuchota Goran d'une voix inquiète malgré ses tentatives pour essayer de le cacher.

« Je le crains », répondit simplement Harry en imaginant divers scénarii qui leur permettraient de se sortir de ce guêpier sans y laisser la vie.

Ce fut à cet instant précis que trois silhouettes encapuchonnées sortirent littéralement de l'ombre. Leurs corps s'extrayaient de l'ombre d'une colonne, dégoulinants de ce voile de noirceur gazeux, comme s'ils surgissaient d'un puits de brume de pétrole. Quand ils furent enfin hors de l'ombre qui cherchait à les retenir, ils coupèrent d'un geste les derniers filaments noirs et brumeux qui les retenaient.

C'était en cela que les alchimistes étaient dangereux.

Ils jouaient avec le feu. Transmuter son corps fait de chair et de sang en élément intangible comme l'ombre était une prouesse horrifiante. Il suffisait de ne pas être assez puissant pour se retrouver submerger par l'ombre elle-même pour finalement oublier que l'on était autre chose qu'une part de cette ombre. En moins de temps qu'il ne fallait pour le dire, vous n'étiez plus rien.

L'alchimie n'a de limite que l'imagination. Avec elle, les possibilités étaient infinies en théorie. Combinée à la puissance, les possibilités étaient infinies en pratique.

Le plus haut niveau jamais enregistré à ce jour était une puissance alchimique de niveau 6. Se retrouver devant trois alchimistes de niveau 5 était donc tout bonnement les prémices de votre mort.

« On est complètement dans la merde », crut bon d'informer Goran.

« Être optimiste n'est pas une option, Fléreur !

-Excuse-moi d'être un tantinet sceptique ! »

Harry n'eut pas le temps de répondre que les dalles du couloir dans lequel ils se trouvaient se soulevèrent et mutèrent en monstres de pierres et de fer aux rangées de dents pointues.

Goran lança immédiatement le premier sort, ce qui sembla donner le signal aux monstres pour sauter toutes griffes dehors dans leur direction. Le sort de Goran, amplifié par le descellé, détruisit les monstres comme s'il s'était agi de simples fétus de paille. Mais, immédiatement, l'alchimiste de droite transmuta les dalles de plus belles et une nouvelle armée de monstres surgit des méandres de son imagination morbide. Goran se décida pour un combat au corps à corps, transperçant des ventres de marbre, pulvérisant des pattes d'argile, déchiquetant des têtes en ferraille. La magie coulait en lui et, à l'aide d'un sort particulièrement utile, il avait englobé son corps d'une couche de magie pure qui accentuait sa puissance de frappe et amortissait celle de ses adversaires.

Harry, quant à lui, se jeta parterre, évitant de justesse la lance que venait de lui balancer l'alchimiste de gauche. Il ne dut qu'à sa dextérité pour envoyer un coup de pied dans la gueule monstrueuse de l'une des bêtes qui avait surgit de son ombre et fit une roulade arrière pour se repositionner sur ses jambes, la baguette levée. Il envoya plusieurs sorts qui détruisirent la dizaine de lance que lui envoyait l'alchimiste mais hurla de douleur quand quelque chose lui transperça l'épaule par derrière.

Il se retourna et put voir le troisième alchimiste, enfoncé jusqu'aux côtes dans l'ombre de Goran, tenant la lance entre ses mains. Un rictus mauvais fleurit sur son visage, dévoilant des dents jaunâtres. Un mouvement de doigts plus tard, une deuxième lance apparaissait dans sa seconde main et il la lança de toutes ses forces dans sa direction.

Harry l'évita comme il le put, elle ne fit qu'effleurer son épaule mais une sensation de vertige le fit trébucher. Les lances étaient empoisonnées !

« Fléreur ! Les lances sont contaminées !

-Tu es touché !? » demanda ce dernier sans lever les yeux de sa propre bataille.

« Si peu », marmonna Harry en contre-attaquant.

Il se saisit de la lance qui était toujours fichée dans son épaule et tira dessus d'un geste si brusque que son adversaire fut forcé de la lâcher. Harry grogna de douleur et délogea la pointe de ses chairs en grimaçant. Les coups sourds qui lui venaient de derrière lui lui indiquèrent que le deuxième alchimiste continuait d'envoyer d'autres lances qui venaient s'écraser contre son bouclier. Il renvoya la lance à son propriétaire qui plongea dans l'ombre avant qu'elle ne l'atteigne pour réapparaître aux côtés de son acolyte. La gueule grande ouverte d'un monstre apparut soudainement sous son pied droit et surgit de l'ombre pour se refermer sur sa cheville avant de replonger, essayant de l'entraîner avec lui dans la brume noire.

Son pied était désormais complètement englouti. Faisant fi de la douleur, Harry chercha un moyen de se maintenir hors de l'ombre. Mais dans le couloir, hormis quelques gravats, il n'y avait rien. Se saisissant de son alliance, il la métamorphosa en tige de platine. Usant du même moyen que Goran, il explosa les dalles d'un coup de poing violent et enfonça profondément la tige dans le sol avant de s'y accrocher de toutes ses forces.

Une deuxième gueule agrippa sa deuxième jambe et replongea dans l'ombre. Ses deux pieds s'enfonçaient inexorablement dans le noir. Il pouvait déjà sentir le froid, glacial et inhumain, de cet espace dimensionnel bien particulier. Un craquement qu'il n'entendit pas mais ressentit parfaitement lui indiqua que le premier monstre venait de sectionner sa cheville. Il attendit la douleur qui déferla sans tarder, lui arrachant des hurlements.

Il jeta un coup d'œil à Goran qui, assailli par des dizaines de monstres et des lances, tentait tant bien que mal de repousser les attaques qui revenaient toujours de plus belle, en surnombre. C'était bien la première fois qu'ils se retrouvaient aussi impuissants. Le niveau de ces alchimistes était bien au-dessus de leurs compétences et ils ne pouvaient pas débloquer les niveaux supérieurs de leurs scellés sans cesser leurs sorts de protection, ce qui les conduirait inévitablement à la mort.

« Fléreur ! » s'écria Harry tandis qu'il repoussait d'un sort une énième lance que venait de lui envoyer le troisième alchimiste, suspendu dans une ombre du plafond. « Il va falloir qu'on le fasse ! ».

« Oh non ! » s'exclama l'homme avant de gémir de douleur car l'un des monstres venait de ficher ses crocs dans son abdomen.

Ils avaient encore un joker dans leur manche. Harry grimaça en sentant les griffes de ses propres monstres racler la peau de ses jambes, arrachant sans le moindre doute des morceaux de chairs. Cette fois-ci il n'aurait pas que de petites coupures à désinfecter. Il se demanda un instant s'il pourrait récupérer un bon substitut de pied et si celui-ci fonctionnerait correctement avant de chasser cette idée saugrenue : s'il voulait un substitut, il fallait d'abord qu'il survive à cette mission.

« A trois ! » prévint Harry.

« Un ! » compta Goran.

« Deux ! » poursuivit Harry.

« TROIS ! » hurlèrent les deux compagnons en chœur.

Comme sous l'effet de l'attraction de deux aimants, leurs magies s'étirèrent l'une vers l'autre et se rejoignirent. Lorsqu'elles se touchèrent, une expulsion énergétique balaya les monstres et les lances. Le point de jonction des deux magies grossit à vue d'œil et elles se mirent à tourbillonner de plus en plus vite. En une fraction de seconde, les deux magies furent réunies en une seule. Les deux puissances ne firent qu'une et les deux niveaux 6 devinrent un niveau 12.

Cette technique –interdite par le Ministère quand ils leur avaient présentée- ils ne l'avaient utilisée qu'une seule autre fois. Une seule autre fois qui leur avait valu huit semaines de coma magique et une jauge d'énergie négative.

Harry fixa Goran. Il vit dans ses yeux la lueur qu'il attendait et il hocha légèrement la tête. Simultanément, ils coupèrent les derniers liens qui les retenaient à cette boule de magie qui n'appartenait ni à l'un ni à l'autre. Elle fusa à travers le couloir, laissant une tranchée gigantesque dans son sillon. Elle anéantit les trois alchimistes qui ne purent rien faire contre une telle puissance, une telle barbarie.

La boule de puissance incandescente ne s'arrêterait pas tant qu'Harry et Goran n'auraient pas récupérer leur part de magie. Et c'était bien là le plus douloureux. Chacun de leur côté, ils envoyèrent un filament de leur magie à la poursuite de la boule. Les deux filaments bataillèrent dur pour trouver un point d'ancrage suffisamment stable pour s'y lier. Quand ils y parvinrent, Harry et Goran durent puiser dans toute leur énergie pour ramener de force leurs magies respectives. Il fallut les apprivoiser, les soudoyer, les rudoyer pour finalement réussir à les délier l'une de l'autre puis il fallut les tirer à la force de leur volonté afin qu'elles retrouvent leurs places au sein de leurs auras.

Il y avait toujours des résidus de la magie de l'autre et le rejet était violent. Une douleur inhumaine les fit hurler à s'en rendre muets. Ces quelques secondes parurent durer des heures et le supplice était insoutenable.

Goran perdit connaissance le premier. Harry le suivit de près.

« Patron ! »

La voix lui parvint jusqu'aux oreilles, sourde et étouffée.

« Patron ! »

Elle était grave, rocailleuse.

« Putain, patron !

-Je suis réveillé, Abraxan… » marmonna Harry.

« T'es pas beau à voir », l'informa l'homme entre sa barbe rousse et fournie. « T'es…pas entier. »

Harry fronça les sourcils et à mesure qu'il ouvrait les yeux, la douleur revenait par vagues.

« Oh bordel ! » jura-t-il entre ses lèvres pincées. « J'ai foutrement mal ! »

« J'te l'avais dit, patron », marmonna Abraxan en épongeant son propre sang qui coulait de l'endroit où aurait dû se trouver son oreille droite. « T'as perdu ton pied droit. »

« C'était donc ça…

-Et il te manque pas mal de peau au pied gauche, on voit tes os. »

Une quinte de toux grasse les fit sursauter.

« Tu t'en fous que je sois crevé, Axa ? » gémit Goran en recrachant des gerbes de sang.

« J't'avais pas vu, t'es sous les gravats !

-Y'en a toujours que pour le patron, façon !

-T'as pas bientôt fini de jouer les victimes ! » s'exclama une voix claire qui s'avançait vers eux.

« Je t'ai pas parlé, Selk..aaaa ! Bordel, je souffre ! » se mit à geindre Goran en se tenant le ventre.

La silhouette féline de Selkie se dessina sur les murs et elle apparut en se tenant le bras gauche qui pendait misérablement le long de son corps.

« T'es vraiment qu'une mauviette, Fléreur ! » s'exclama-t-elle avant de lancer un sort pour le dégager de sous les blocs de pierres.

« Où sont les autres ? » demanda Harry en essayant tant bien que mal de se relever.

« Le Norvégien est parti récupérer Sombral, il s'est fait prendre à revers par deux alchimistes. Apparemment, il est mal. Très mal. Rapace s'est fait descendre mais il a atterrit dans l'eau et est parvenu à se stabiliser avec un sort de flottaison.

-C'est la merde », fit Abraxan.

« C'est peu de le dire. »

Une détonation retentit et le souffle ravageur d'une explosion balaya le couloir pendant quelques secondes.

« Je suppose que Nundu va bien », fit Harry en esquissant un sourire.

« Il faut croire », répondit Selkie en souriant à son tour.

Mais force était de constater que Nundu n'allait pas si bien que ce qu'ils pensaient car, dans la minute qui suivit, ils le virent courir vers eux en poussant de grands cris.

« NECROMANCIENS ! ILS ONT DES NECROMANCIENS ! »

L'annonce leur fit l'effet d'une douche froide. Ils furent debout en moins de temps qu'il ne fallut pour y penser. Clopin-clopant, ils dévalèrent les escaliers et longèrent les couloirs. Le Norvégien apparut à un croisement, portant sur son dos Sombral qui perdait des litres de sang.

Nundu continuait de balancer ses poisons mais rien n'y faisait, les alchimistes étaient plus nombreux et mieux préparés. Le piège avait été conçu pour que la division d'Harry Potter périsse. Voldemort avait eu une idée brillante à vrai dire. Il savait que la curiosité du Survivant l'amènerait à entrer dans la bâtisse, sans se méfier du niveau improbable qu'avaient les alchimistes qui s'y trouvaient.

Alors qu'ils sortaient en trombe du manoir, un vacarme assourdissant gronda au loin, dans la forêt. Comme si un tonnerre sourd résonnait dans l'espace. Une masse sombre se mit en mouvement et fondit vers eux.

Des millions d'oiseaux aux ailes noires filaient droit vers eux. Leurs yeux vitreux et leurs becs sombres ne laissaient pas place au doute : il s'agissait d'Oiseaux des Enfers. La plus terrible invention des Nécromanciens au service de Voldemort.

Ces bêtes étaient mortes depuis longtemps et leurs corps en décomposition, une fois manipulés par la sombre magie nécromancienne, réclamait une énergie qu'ils ne trouvaient qu'en avalant la magie des sorciers. Voldemort s'était inspiré du phénomène du Baiser des Détraqueurs pour créer quelque chose de cent fois plus terrifiant et cruel.

Les croassements éraillés ne cessaient de se rapprocher et Harry et sa division ne cessait de ralentir. Leurs corps n'en pouvaient plus. La silhouette de Rapace gisait à moitié dans l'eau. Il avait l'air dans les vapes. Nundu le souleva et le balança sur son épaule et ils continuèrent de courir.

Les Oiseaux des Enfers se rapprochaient inexorablement et chacun pensa aux êtres chers qu'ils laisseraient derrière eux. Selkie, qui aidait Goran, trébucha et l'entraîna avec elle au sol. L'oreille et le tympan arrachés d'Abraxan lui firent perdre l'équilibre et, lui aussi, s'écrasa parterre en gémissant. Harry n'ayant plus d'appuis le rejoint. Les jambes du Norvégien se dérobèrent sous lui et Nundu choisit simplement d'attendre la mort avec ses compagnons.

Ensembles, ils fixèrent la nuée sombre fuser vers eux et se préparèrent à souffrir comme ils n'avaient jamais souffert.

Cinquante mètres.

« Patron, t'sais que t'es un fou ? » fit Abraxan en sortant son éternelle flasque de Whisky-Pur-Feu pour s'en prendre une large rasade.

« On me l'a dit souvent, Axa », sourit Harry en se saisissant de la flasque à son tour.

Quarante mètres.

« Je suis bien contente d'être entrée dans cette division de fous, tout de même ! » s'exclama Selkie en buvant une gorgée.

Trente mètres.

« Je savais bien qu'on finirait par crever comme des cons », dit Le Norvégien en souriant avant d'asperger le visage de Sombral de Pur-Feu.

Ving mètres.

« On se reverra dans l'au-delà », murmura Nundu en se servant avant de porter le goulot aux lèvre inertes de Rapace. « Allez bois, mon pote. »

Dix mètres.

« On est trop vieux pour ces conneries », ricana Goran en terminant la bouteille.

Cinq mètres.

Et alors qu'ils se voyaient déjà déchiquetés par les milliers de becs noirs, la nuée d'Oiseaux des Enfers disparut subitement, comme si un portail sur une autre dimension avait été ouvert à deux mètres devant eux, les absorbant au fur et à mesure qu'ils s'approchaient.

Bientôt, plus aucun croassement ne se fit plus entendre.

« Qu'est-ce que… ? »