Déclaration : Les personnages ne m'appartiennent pas, ce sont ceux du film The eagle. Je ne fais que les emprunter, merci à Rosemarie Sutcliff de les avoir crées.


Prompt from The_Eagle_Kink on LJ : Esca as a slave was pretty dark and intimidating at first, emotionally detached. I'd love to read a story about him finding a baby animal in a storm (it may be a pup!Cub or some other cute creature) and hiding it in the stables not telling any of his masters. I want Marcus finding out and being shocked seeing scary Esca's softer side, being all careful and gentle, risking punishment to help the animal.
Esca/Marcus, movie!verse.

Esca, vu comme un esclave assez sombre et intimidant au premier abord, émotionnellement détaché. J'aimerais lire une histoire où il trouve un animal bébé dans une tempête et où il le cache dans les écuries sans le dire à aucun de ses maîtres. Je veux que Marcus découvre tout et qu'il soit choqué en découvrant le côté doux, prévenant et tendre d'Esca alors qu'il risque une punition pour avoir aidé l'animal.

Je n'ai pas résisté... j'espère que le résultat vous plaira.


Suggestion d'écoute : la magnifique BO du film écrite par Atli Örvarsson… mais pourquoi pas, Alex Clare : Whispering
« Whispering, whispering, whispering, whispering
As I pass myself down to my knees
Whispering, whispering, whispering, whispering
As I fall through the willow trees, and I said
Who will care for the fallen? »


Partie 1

La tempête faisait rage, balayant les paysages de trombes d'eau, secouant les arbres tels des brindilles et zébrant le ciel d'éclats lumineux. Les nuages s'étaient accumulé toute la journée faisant ressembler un début d'après-midi à une soirée. Les vents avaient inlassablement orchestré leur défilé dans le ciel, apportant un froid glacial comme rarement Esca en avait connu à cette période de l'année. Il venait de quitter la demeure des Aquila et ses mains étaient déjà froides comme la pierre, ses oreilles rougies par un froid vif qui pénétrait ses vêtements trop fins qui se mouillaient. Il ramena sa cape contre lui, maigre protection face aux vents, tout en serrant les dents. La veille, Sassticca, la cuisinière en titre, lui avait commandé des champignons et malgré ses protestations, il était parti les lui chercher. Tout était bon pour quitter la villa, son maître voulait manger des champignons, il en mangerait.

Ses maîtres… Aquila, le propriétaire de la villa l'avait acheté, mais Marcus Flavius Aquila son filleul, en avait immédiatement hérité. Celui-ci n'était pas un Romain comme les autres qu'il avait eu le malheur de connaître. En attirant les faveurs du public dans cette arène minable, où il avait prévu de mourir aussi dignement que possible, l'ancien centurion lui avait sauvé la vie. Cela avait été un choc, qui aurait pu prévoir qu'un ange gardien, qui plus est romain, le sauverait ? Pas Esca et son esprit, détaché de son corps qui avait encaissé les coups, avait mis quelques instants à le réaliser… tout comme il n'avait pas prévu que cet ange gardien devienne son maître. Être redevable d'une telle dette auprès d'un Romain avait été un second choc. Il avait digéré l'information tandis qu'il quittait Calleva en suivant docilement le Romain venu le chercher.

Il n'était pas suicidaire, il avait l'âme d'un combattant, une âme qu'aucun Romain ne pourrait jamais atteindre et il profitait de toutes les opportunités qui lui étaient données pour se battre.

Dans l'arène, il avait fait l'inverse de ce qu'on attendait de lui, décevant simultanément le public venu le voir se battre et son maître. Il l'avait averti, mais cela ne l'avait fait qu'éclater de rire. Il ne l'avait pas cru, pensant qu'il était comme les autres et que, face à sa mort, il ferait tout pour l'éviter en se battant. Ils faisaient tous cela… et Esca jugeait ce spectacle pitoyable. Sans arme digne de ce nom, la faim au ventre, seule l'énergie du désespoir guidait leurs gestes, mais pas les siens. Même s'il reconnaissait aux Romains un talent guerrier certain, il ne pouvait dans ces conditions démontrer le sien. Stoïque et fidèle à sa décision, il avait, lui semble-t-il, changé les règles et agit selon son code d'honneur.

Dans cette villa, il ne cachait pas sa haine pour les Romains. Et son maître, blessé et souffrant le martyre, le lui rendait à sa manière. Par l'ignorance, Esca avait souvent le sentiment de ne pas avoir plus de valeur que le mur contre lequel il se tenait. Par ses mauvaises humeurs, lâchement tournées vers lui qui n'y était pour rien. Frustration, douleur, honte, les raisons ne manquaient pas. Esca était le témoin gênant de sa faiblesse physique, pourtant Marcus aurait certainement eu moins honte s'il avait compris qu'il imaginait sans difficulté le centurion qu'il avait été et le parfait Romain en pleine santé qu'il allait redevenir. Le celte ne lui en voulait pas, il comprenait sans jamais compatir. Il avait veillé à garder une distance suffisante pour ne pas ressentir de pitié pour l'homme. Il répondait aux ordres donnés, mais sans jamais faciliter les choses, rendant la situation souvent difficile pour Marcus qui ne manquait pas d'orgueil. Il agissait sans douceur quand il fallait panser sa blessure ou réaliser sa toilette. Esca récoltait des regards noirs, mais jamais une parole n'avait franchi les lèvres de son maître. Et il reconnaissait que cette attitude mesurée combinée à sa bravoure face à sa blessure forçait son respect. Il jouait avec lui à un jeu subtil et dangereux avec, jusqu'à présent, un certain succès. Son maître ne l'avait jamais battu ni même réprimandé, même s'il agissait sans agressivité. Tout le bénéfice ne lui en revenait pas, il devait le reconnaître : à plusieurs reprises, il avait bien cru être allé trop loin. Parfaitement immobile, il avait attendu un coup ou une réaction qui – étrangement - n'était jamais venu.

Ce n'était donc pas cette tempête qui allait ajourner sa cueillette. Cela était évident pour lui, beaucoup moins pour Sassticca qui avait exigé une confirmation du jeune maître avant de le laisser affronter seul les éléments déchaînés. Comme prévu, Marcus, confortablement installé sur une méridienne, concentré sur le feu qui crépitait dans l'âtre de la cheminée, lui avait ordonné d'aller chercher les champignons pour son repas. Sassticca s'était résigné sans un mot. Néanmoins sur le pas de la porte, elle n'avait pu s'empêcher de lui demander d'être prudent avec un ton si solennel, qu'il avait tiré un sourire au celte. Le premier depuis longtemps.

Une forêt dense étirait sa végétation jusqu'aux limites de la propriété des Aquila. Il ne fallait pas plus d'une demi-heure pour la rejoindre, aujourd'hui il en mit quinze. Au pas de course, il s'enfonça dans ces bois où il se sentit tout de suite à son aise. Cela faisait du bien de marcher sur un coussin d'herbe, d'entendre le feuillage des arbres frémir sous les assauts du vent, de humer l'odeur de la terre mouillée. Il sentit un poids, dont il n'avait même pas réalisé la présence, quitter ses épaules. Ici, il respirait et ce vent glacé réveillait son désir de liberté.

Il se mit rapidement en quête des champignons, levant les yeux pour repérer les chênes sapins propices à leur développement, parmi les bouleaux et les pins. Il ne serait pas difficile de les trouver, aucune feuille ne venait encore recouvrir le sol.

Des bruits au loin lui firent sortir la tête des fougères. Il conserva son petit couteau en main et saisit son panier déjà bien rempli. Ses sens étaient aux aguets guettant le moindre signe. Il n'attendit pas longtemps, des aboiements se firent bientôt entendre. Une battue, et elle se dirigeait vers lui. Esca se leva, il était temps pour lui de repartir, il avait assez de champignons et il faisait déjà bien sombre. Inutile de risquer une rencontre.

Et pourtant… il ne put s'empêcher de quitter son sentier alors qu'il entendait, distinctement et non loin de lui, gémir. Des cris déchirants qui ne le laissaient pas insensible. Quelques enjambées plus tard, ce qu'il découvrit l'étonna franchement. Une louve recroquevillée sur elle-même. Blanche comme la neige mis à part une ligne noire sur le museau, un pelage déjà abondant, jamais il n'avait vu telle beauté. Elle grogna immédiatement sans même lui jeter un regard, son odeur lui ayant annoncé son arrivée bien avant qu'il ne la rejoigne. Entre deux gémissements, elle léchait sa cuisse transpercée par une flèche. Elle avait déjà perdu beaucoup de sang, elle s'était effondrée certainement à bout de forces. Mais avant même qu'Esca ne se décide à agir, un louveteau posa sa tête sur le dos de la louve. Lui, en revanche, était gris et il le fixait de ses yeux bleus, les deux oreilles dressées. Soudain, il bondit au-dessus de sa mère dont la mâchoire claqua dans le vide, elle n'avait pas réussi à retenir son petit. En trottinant, les oreilles toujours dressées, il vint renifler ses bottes. Esca se pencha, mais le jeune loup montra les crocs. Il était intéressé et méfiant.
- Je dois d'abord m'occuper de ta mère, lui expliqua Esca en celte tout en se redressant.
Le temps pressait, il entendait les chiens se rapprocher.
- Shhh, fit-il en s'approchant doucement, maudissant ceux qui l'avaient blessée, je ne vais pas te faire de mal. Il faut retirer cette flèche, murmura-t-il en se baissant pour examiner la blessure.
Esca ne quittait pas la gueule de la louve du regard, elle pouvait le mordre à tout moment tandis qu'il retirerait la flèche. Si près, il sentait une telle force émaner d'elle, il était impressionné. Il se demanda comment on pouvait décider de chasser une louve et ses petits… Malgré cela, sa mâchoire était puissante et ses dents bien acérées, Esca ne voulait prendre aucun risque. La louve retroussa dangereusement ses babines dès qu'il toucha sa cuisse, une beauté bien féroce. Le petit louveteau semblait avoir tout compris, il se tenait loin de sa mère, les regardant tous deux d'un air interrogateur qui fit fondre le celte. Il se décida finalement à retirer la flèche d'un geste rapide et sûr. Cela tira un hurlement terrible à la louve qui perdit connaissance.

Les chasseurs allaient la trouver, au mieux la tuer, au pire la ramener à Calleva pour les jeux où elle serait exhibée, enfermée dans une cage jusqu'à ce qu'elle meure sous les coups ou de faim. Esca avait séjourné dans ces cages, il ne le souhaitait pas à son pire ennemi. Cela ne pouvait pas être le destin de cette louve. La tuer ou la sauver, il n'y avait que deux solutions. Le petit loup gris fit quelques pas, lécha le museau de sa mère puis lui donna quelques coups qui restèrent bien sûr sans réponse.
- Ça va, ça va, j'ai compris, commença Esca. On va la ramener et la soigner, soupira-t-il. Qu'en dis-tu ? Offrit-il en tendant sa main au petit loup. Celui-ci vint timidement à sa rencontre. Il était perdu sans sa mère… Son pelage était doux, plus fin que celui de la louve, son corps chaud, Esca ne put empêcher un sourire de se figer sur ses lèvres. Il ne serait pas difficile à apprivoiser.

Esca rassembla toutes ses forces pour soulever la femelle et la charger sur son dos, il espérait vivement qu'elle ne se réveille pas avant leur arrivée. D'ailleurs, comment allait-il faire chez les Aquila ? Son geste serait incompris, interprété comme une faiblesse et moqué… et cela n'était pas envisageable. Depuis son arrivée, il travaillait à ne montrer aucune faille que ses maîtres pourraient exploiter contre lui. Il devait cacher les loups.

Il mit du temps à revenir à la villa, à installer la louve et son petit aux écuries qu'il était heureusement le seul à entretenir. Il choisit un compartiment inoccupé, malgré cela les chevaux réagirent à cette intrusion, clairement ils n'aimaient pas cela et Esca les comprenait parfaitement. Doucement, il passa une corde au cou du louveteau, il ne fallait pas qu'il s'échappe des écuries. Celui-ci mordilla la corde, tira un peu dessus puis se lova contre sa mère toujours inconsciente. Lui aussi était à bout de forces, Esca guère mieux… il rejoignit rapidement la villa.

La plupart des champignons étaient écrasés ou détrempés, lui-même était ruisselant et il était tard, très tard. Le retour avait été laborieux les épaules chargées, sans soleil ni lune pour guider ses pas.
- Par tous les dieux Esca ! S'exclama la cuisinière en le voyant entrer.
Elle l'examina de la tête aux pieds, bouche bée.
- Je croyais ne plus te voir revenir... mais que t'est-il arrivé ?! Demanda-t-elle, inquiète.
De la boue et du sang maculaient ses vêtements, ses cheveux et ses vêtements détrempés ruisselaient sur le sol formant déjà une petite flaque à ses pieds. Il était clair qu'il ne ressemblait plus du tout à la personne qui était partie quelques heures plus tôt. Vu le temps, Esca se dit qu'il n'y avait rien là de vraiment anormal. D'un bras tremblant de froid et de fatigue, il posa le panier qu'il avait réussi à rapporter (et cela n'avait pas été une mince affaire) sur la table.
- Il fallait les laisser mon garçon, le sermonna-t-elle gentiment en attrapant néanmoins d'un geste vif le panier et en examinant immédiatement le contenu. Confiante, elle avait déjà lancé la cuisson de son plat et Esca sentit immédiatement une pointe de soulagement s'échapper de ses lèvres.
- Bien, bien, murmura-t-elle, ce sera suffisant. Mais, fit-elle en levant brusquement les yeux sur lui, il faut te sécher et te réchauffer, ajouta-t-elle presque joyeuse en lui souriant.
La joie d'avoir ce met pour son repas lui donnait clairement une énergie nouvelle qui ravit Esca.
- Et te soigner ! Tu es blessé…
- Non ! La coupa-t-il, brusquement.
Son ton la surprit, elle ouvrit de grands yeux étonnés.
- Qu'est-ce qui se passe ici ? Gronda alors une voix dans le couloir.

Marcus bien sûr, qui d'autre ? Une partie de son poids appuyé sur la canne qui ne le quittait pas. Esca ne l'avait pas remarqué, mais rien ne lui échappait dans cette maison. Guettait-il son retour ? L'orage avait forci depuis qu'il avait quitté la villa, peut-être était-il finalement un brin inquiet pour lui…
- Domine, commença Sassticca en fronçant les sourcils. On ne peut pas le laisser comme ça, murmura-t-elle.
Il était hors de question qu'elle le touche, qu'elle se demande d'où venait ce sang en constatant qu'il n'était pas blessé. Esca lança alors un regard menaçant à son maître. Un des ces regards dont il connaissait parfaitement les effets sur le romain.
- Laisse-le, ordonna-t-il finalement d'une voix claire et tranchée.
Il se retira aussitôt et Esca, soulagé, quitta également la cuisine vers le quartier des esclaves, salissant consciencieusement le sol sur son chemin. Sale ou pas, de toute façon c'était lui qui les laverait demain matin. Il voulait se changer, mais plus important, il avait une louve à soigner.

Au repas ce soir là, il se tint derrière son maître comme à son habitude, prêt à le servir ou à remplir sa coupe de vin. Et quand ils entendirent un loup hurler, il tâcha de garder un visage impassible, réprimant la joie qu'il ressentait en constatant que la louve avait retrouvé un peu de forces. Son hurlement ne passa bien sûr pas inaperçu, il alimenta la conversation jusqu'au dessert…

À suivre... suite et fin au prochain chapitre.