Note : Bonjouuuuur tout le monde ! Petite fic surprise, écrite dans le cadre du Secret Santa. Il y aura 4 chapitres et ils seront publiés tous les matins jusqu'à vendredi.
J'en profite pour remercier Flo'wTralala et Nalou pour leur organisation !
La demande était "histoire de pères célibataires avec enfants diaboliques" et j'espère beaucoup que mon histoire plaira à sa commanditaire... LYRA64 ! Oh, ma copine que j'adore, je suis tellement contente d'avoir écrit pour toi !
J'espère également que cette histoire vous plaira à toutes et tous - je ne m'étais jamais autant amusée à écrire une fic, en tout cas ! Bon, y'a un peu de drame aussi, parce que je reste SomeCoolName tavu.
J'ai lu que dans un univers alternatif Alex était le fils d'Emma et Scott (oui, je sais, c'est bizarre au début, mais on s'y fait). Dans cette histoire, il est le fils d'Emma mais pas de Scott.
Bêta : un énorme, énooooorme, énoooooooooooooooooooooooooooorme merci à Maya Holmes cœur cœur TMTC.
Bip Bip Bip.
Erik hait cette sonnerie. À chaque fois que son téléphone sonne, il se dit qu'il doit en changer, mais il oublie et ça l'énerve encore plus. Il se retourne dans son lit, yeux encore fermés, gémissements de sortie. Il tape au hasard sur sa table de chevet jusqu'à attraper son portable qu'il colle à son oreille.
"Allô ?"
"Il est onze heures, Erik," souffle Emma.
Il grogne et cache sa tête sous sa couverture.
"On n'avait pas rendez-vous," remarque-t-il, grinçant.
"Non, c'est vrai. C'est juste qu'on est samedi et que tu n'as plus quinze ans. Bref, tu as quelque chose de prévu cet après-midi ? Il y a un garçon que je pense que tu devrais voir."
Il frotte son visage, réfléchit rapidement et comme il n'était pas saoulé par avance à l'idée de vivre cette journée, il se dit que son agenda est libre. Et puis, Emma a toujours le chic pour lui faire rencontrer des mecs très intéressants. Par intéressants, il veut dire sexy, avec très peu d'inhibition.
"Ok."
"Parfait. Disons seize heures chez moi ? Et après, vous irez faire ce que vous voulez."
"Ouais."
"C'est noté. Ah, au fait, le garçon, c'est mon fils Alex. Je rentre vers dix-huit heures. Merci, à tout' !" s'empresse de rajouter Emma, fière de son embrouille.
"Attends !" s'écrie Erik, soudain parfaitement réveillé. "Non, non, je ne garde pas Alex !"
"Tu viens de me dire que tu étais disponible ! Allez, Erik, fais un effort pour une fois. Je ne te demande jamais rien, mais là son babysitter n'est pas disponible et j'ai un rendez-vous important."
"Laisse-le devant la télé."
"Il a neuf ans."
"Mets lui un dessin animé !"
"Erik Lehnsherr, seize heures chez moi, me fais pas chier."
Erik regarde son écran, Emma a raccroché. Il soupire, qu'il se sent con de s'être fait avoir. Il n'a pas du tout envie de garder Alex. Déjà, il n'aime pas beaucoup les enfants, mais le fils d'Emma est hors catégorie. Mal élevé, pourri gâté, Erik l'évite à chaque fois qu'ils se voient. Il pourrait ne pas se rendre chez elle, d'ailleurs. Il lui suffit de lui envoyer un sms pour lui dire et ensuite de couper son téléphone pour être tranquille.
Il observe son portable dans sa main, réfléchit. C'est vrai qu'Emma ne lui demande jamais rien et qu'elle lui a fait rencontrer nombre de plans culs intéressants. Allez, ça sera sa bonne action de l'année.
Ses lunettes de soleil fermement posées sur l'arrête de son nez, pour être sûr que personne ne le reconnaîtra, Erik garde son doigt sur la sonnette Frost. Le son est strident, il espère qu'Emma comprendra le message. C'est Alex qui vient lui ouvrir, il lève sa petite tête blonde jusqu'à lui et le salue d'un signe sec de la tête :
"Erik."
"Alex."
Il le fait entrer et appelle sa mère pour lui dire qu'Erik est arrivé. Sur le chemin, Erik a conclu qu'Emma avait besoin de quelqu'un pour s'occuper de son fils pendant qu'elle serait à un rencard, mais de la voir descendre les marches avec ses baskettes sales et son pull trop grand lui confirme le contraire. Elle embrasse Erik sur la joue et il laisse ses yeux scruter son visage : pas maquillé.
"Tu vas où ?" demande-t-il, surpris.
"J'ai un rendez-vous, je t'ai dit. Bon, je reviens dans deux heures. Il y a de quoi goûter, les clés sont là, si vous voulez sortir. Alex, chéri," appelle-t-elle en tendant sa main vers lui. Il court jusqu'à elle et ne bouge plus, comme un petit soldat," Tu es sage, d'accord ? Tu écoutes Erik."
Le nain fait glisser son regard gris vers le seul homme de la pièce et Erik comprend très bien le message : non. Emma ne semble même pas le comprendre puisqu'elle embrasse la petite tête et caresse sa joue.
"Je t'aime, t'es le plus beau."
"Je t'aime, t'es la plus belle," répond Alex et Erik lève les yeux au ciel.
Une fois la porte claquée derrière Emma, la maison est affreusement silencieuse. Deux heures risquent de s'apparenter à de la torture. Erik claque ses mains pour se donner contenance.
"Okay, qu'est-ce que tu veux faire ? Tu veux un goûter ?"
"Tu m'achètes une PS4 ?" demande Alex, sérieux.
Erik ouvre grands les yeux et ne retient pas un petit rire.
"Non, pourquoi je ferais ça ?"
"Tu ne m'achètes jamais de cadeau de Noël, ni de cadeau d'anniversaire, depuis au moins mes six ans - je ne me rappelle plus si tu m'en offrais avant. Tu peux te faire pardonner maintenant en m'achetant une PS4."
"Pourquoi je t'offrirais des cadeaux de Noël ?"
"Parce que tu le fêtes avec nous chaque fois."
"Oui, comme Jean, Angel, Logan…"
"Ils m'offrent tous des cadeaux. Même Logan, c'est pour te dire."
Erik souffle. Okay, même si le bûcheron ermite se ramène avec un cadeau pour le gamin, Erik pourrait faire un effort. Il hoche la tête.
"D'accord, à Noël prochain, je te fais un cadeau."
"Une PS4," rappelle Alex, en levant un doigt.
"J'ai compris que t'en veux une," s'énerve Erik, sans confirmer ses espoirs idiots. "Tu veux qu'on sorte ?"
"Ouais, y'a le parc à côté," accepte Alex, en haussant les épaules.
"Mets ton manteau, alors."
Erik et Alex ont convenu d'une distance de six mètres entre eux. Erik ne veut pas croiser des ex (ou potentiels futurs) dans ce parc bondé et Alex ne veut pas que ses amis lui demandent si Erik est son père. Ils ne parlent plus une fois les grilles passées et Erik suit Alex, puisqu'il n'a aucune idée d'où sont les jeux. Il s'installe finalement sur un long banc en pierre qui entoure le coin réservé aux enfants et un petit terrain de foot, où Alex s'est immédiatement précipité en voyant un ballon rond.
Le parc n'a rien de plaisant et c'est incroyable de se dire que des gens veulent réellement que ça soit leur quotidien. Ça hurle dans tous les sens, des gamins mangent du sable, d'autres laissent derrière eux leurs jouets et pleurent cinq pas après en disant qu'ils les ont perdus. Il y a beaucoup trop de femmes, aussi, et Erik se dit que les hommes sont vraiment malins de les laisser se taper la corvée de sortie. Après un rapide tour des lieux qui lui a confirmé qu'il n'y a personne d'intéressant pour lui, il sort son téléphone et perd son temps sur ses réseaux sociaux.
Il est interrompu longtemps après par Alex qui se tient droit devant lui : il est couvert de terre et d'herbe. Il renifle et passe son avant-bras sous son nez. Erik grimace de toutes ses forces.
"Tu joues au foot en rampant ou quoi ?"
"J'ai faim."
"Mange."
"On a rien pris. Et puis maman rentre dans vingt minutes."
Erik regarde l'heure et sent le poids qui l'oppressait, s'envoler. Il se lève et lui fait signe qu'ils rentrent. Alex salue ses amis sur le passage (en les checkant très sérieusement, comme s'ils faisaient partie d'un dangereux gang alors que la plupart d'entre eux doit encore dormir avec une veilleuse). Ils reprennent leur distance de sécurité et Alex est manifestement très pressé de rentrer car il trotte presque. Soudain, un grand chien brun déboule, sans laisse, truffe en l'air et langue sortie. Alex s'émerveille et lui court après, sans avoir la présence d'esprit qu'il peut se faire arracher le bras par la bête.
"Alex, t'approche pas du chien," crie Erik, déjà saoulé à l'idée de devoir lui courir après.
"Oh, je suis désolé !" résonne une voix pleine de thé à la bergamote, derrière lui.
Déjà que la plupart des Londoniens ont un accent proche de la comédie musicale, l'homme qui vient de s'adresser à Erik les surpasse tous. Il se retourne, curieux de savoir ce que l'homme a à dire et putain, il ne s'attendait pas à ce qu'il soit l'incarnation très (et trop) précise de ce qu'on appelle communément un fantasme.
Cheveux bruns, un peu plus longs que la moyenne, légèrement bouclés. Yeux bleus, mais bleus ! Pas gris-on-va-dire-bleu-pour-en-rajouter, pas une-couleur-indescriptible, non, non, vraiment bleus, comme le ciel en été, comme la piscine de l'album Nevermind de Nirvana, comme la robe de la Vierge Marie - okay, mauvais exemple, Erik espère que cet homme est tout sauf vierge. Et une bouche qu'Erik fixe sans aucune retenue. Il s'imagine très bien embrasser ces lèvres. Et leur faire autre chose.
"C'est mon chien. Votre fils a peur ? Je peux le rappeler. Churchill ! Churchill, au pied !" hèle l'homme, la voix chantante.
Erik tourne la tête et voit le chien qui tourne, joyeux et bienveillant, autour d'Alex qui rayonne de joie.
"Non, il n'a pas peur," réplique Erik, un peu déstabilisé.
"Désolé, j'essaye de le promener sans laisse au maximum pour l'habituer. D'habitude il est très obéissant."
Vous vous êtes déjà excusé, veut dire Erik. Il ne le fait pas parce que, il a beau être un peu (beaucoup) arrogant, il sait prendre sur lui quand il rencontre un potentiel candidat à qui faire mordre son oreiller.
"Erik Lehnsherr," dit-il en tendant sa main.
"Charles Xavier."
"Charles," répète-t-il, lentement, comme s'il découvrait le prénom pour la première fois et qu'il se rendait compte combien il était lumineux.
(C'est une technique qui marche à tous les coups.)(Charles rougit.)(Erik en était sûr.)
"Churchill adore votre fils. Comme s'appelle-t-il ?"
"De ?"
"Votre fils ? Comment s'appelle-t-il ?" répète Charles, un joli sourire aux lèvres.
Erik hausse un sourcil, suit le regard bleu et comprend ce qu'il vise. Le nain. Qu'il pense être son rejeton. Erik ouvre la bouche sans oser répliquer.
"Il doit avoir neuf, dix ans ? Ils sont géniaux, à cet âge-là. Pardon, je suis désolé si je pose trop de questions. Je suis professeur, j'adore les enfants."
"Il s'appelle Alex, il a neuf ans," répond tout aussi vite Erik.
"Oh c'est très beau comme prénom ! Est-ce le diminutif d'Alexandre ?"
Est-ce que ça l'est ? Erik n'en a aucune idée.
"Oui," arrive-t-il à sortir, la voix un peu dansante entre l'affirmation et la question.
Charles sourit, apparemment heureux de cette confirmation et Erik se dit que c'était la bonne carte à jouer. Et la drague est un jeu auquel Erik est très bon et ne perd quasiment jamais. Il serait d'ailleurs sûr de gagner si son téléphone ne sonnait pas et que ce n'était pas le prénom Emma affiché dessus. Il grimace et explique :
"Je suis désolé, c'est sa mère, je dois le ramener."
Charles fait un petit O de la bouche, et Erik s'imagine très bien lui faire faire un plus gros O, avant d'expliquer :
"Nous ne sommes pas ensemble. C'est ma meilleure amie, c'est tout."
"Vous êtes divorcé ?"
"Non, je suis gay."
Et les joues de Charles se colorent à nouveau de rouge. Erik sourit.
"Est-ce que vous promenez souvent… Churchill, dans le coin ?"
"On vient d'emménager sur Clarence Road. Je pense qu'on viendra à Regent's Park plus souvent, oui."
"On se recroisera peut-être, alors."
"Peut-être, oui," réplique Charles, charmé.
"Je l'espère en tous cas."
Erik lui sourit une dernière fois et va récupérer Alex.
"Donne-moi ta main," lui ordonne-t-il en chuchotant.
"Hein, pourquoi ?" s'inquiète Alex, lèvre retroussée, dégoûté d'avance.
"Fais-ce que je te dis et je dis à ta mère que c'est moi qui t'ai donné l'autorisation de te salir."
"... Ok."
Il met sa main pleine de terre dans celle d'Erik qui grogne tout bas. Churchill - il n'y a vraiment que les Anglais pour appeler leur chien du nom d'un politicien de la seconde guerre mondiale, Erik ne se le permettrait jamais, étant Allemand - tourne encore un peu autour d'eux avant que la voix de Charles Xavier ne le rappelle pour de bon. Erik se retourne, salue de sa main libre Charles et a la confirmation qu'il continuait de le matter ; avoir Charles Xavier sera d'une simplicité réconfortante.
"T'es vraiment chelou, comme mec," lâche Alex, dans un soupir.
Erik est rentré chez lui. Emma lui a proposé de rester dîner, mais il avait envie d'être seul. Il aime son appartement : une énorme pièce au dernier étage, avec une cuisine toute en longueur dans l'entrée, un espace salon et salle à manger et deux grandes portes coulissantes, toutes aussi blanches que les murs, qui amènent à la chambre.
Il s'est pris à manger sur le retour et dévore ses pâtes chinoises allongé sur son lit, Netflix allumé sur une énième série dont il ne regardera même pas la moitié des épisodes avant de passer à autre chose.
Comme tous les mercredis matins, Erik fait son jogging à Regent's Park. Il va à la salle tous les jours, sauf le mercredi car des adolescents viennent en groupe et Erik ne peut pas voir autant d'acné sans avoir envie de les saupoudrer de bicarbonate de soude (est-ce vraiment efficace contre les problèmes de peau ? Erik n'en sait rien, mais il semblerait que le bicarbonate serve à tout, alors…).
Ses écouteurs dans les oreilles, il écoute Son of a Preacher Man interprété par Dusty Springfield lorsqu'un chien aux longs poils bruns le fait tourner la tête. Au bout de la laisse, Erik reconnaît Charles Xavier. Il fait un petit détour pour le rejoindre et Charles le voit à son tour - le sourire qui lui adresse est un compliment à lui seul.
"Vous êtes bien matinal," commence Erik, charmeur.
Il est bien content de ne courir que depuis quinze minutes, il ne sue pas encore. Il pose ses mains sur ses cuisses pour reprendre son souffle et garde sa tête relevée pour continuer à observer les magnifiques yeux de Charles.
"Je suis obligé de promener Churchill avant d'aller travailler. Et vous, vous courrez tous les matins ?"
"Non, je vais à la salle, habituellement."
Les yeux de Charles brillent. Oui, Charles, je suis l'homme parfait, pense très fort Erik.
"J'aimerais avoir votre courage," plaisante Charles.
"Vous ne faites pas de sport ?"
"Jamais," rit-il, léger.
"Vous avez de la chance, ça ne se voit pas."
Charles penche la tête, sourit, amusé.
"Je porte des pulls trop grands, je le sais. Vous ne pouvez pas deviner ce qu'il y a en-dessous."
"C'est un défi ou une invitation ?" demande Erik.
Charles entrouvre les lèvres et finit par rire, l'air de dire touché. Draguer cet homme est un délice.
"Je vous raccompagne ?" propose-t-il.
"Je ne voudrais pas interrompre votre séance."
"J'ai déjà fait mes cinquantes minutes," ment Erik, à l'aise.
Ce qui n'est pas le pire des mensonges de la matinée, car Charles, merveilleux mais embêtant Charles, demande :
"Comment va votre fils, Alex ?"
"Alex va bien, merci."
"Vous avez sa garde un weekend sur deux ?"
"Non, nous n'avons pas de règle. Je le prends dès que sa mère a besoin que je le garde. Ou dès que j'ai envie de le voir," ajoute-t-il, avec un large sourire.
"D'accord…"
Ils marchent côte à côte en silence quelques secondes, avant que Charles ne demande encore :
"Je suis désolé, je suis très curieux, trop, parfois, n'hésitez pas à me dire si ma question est déplacée. Comment avez-vous fait ?"
Ô combien Erik aimerait lui dire que la question est déplacée, mais il ne veut pas le brusquer. Charles est comme tous les Anglais, né avec un balai qui a poussé entre le rectum et les cervicales. Qu'il se soit permis une question personnelle est un trop grand pas en avant pour qu'Erik lui fasse regretter.
"Non, je vous en prie, posez moi toutes les questions que vous voulez, je serais ravi d'y répondre. Emma, sa mère, m'a dit un jour… qu'elle voulait un enfant. On se connaît depuis le lycée. Elle est extrêmement indépendante, elle ne voulait pas quelqu'un dans sa vie. On a donc fait une fécondation simulée et… voilà."
"Une insémination artificielle, vous voulez dire ?" corrige Charles, confus.
Erik pourrait se taper le front. Ça lui apprendra de ne rien connaître à la procréation.
"Oui. Emma et moi appelons ça la fécondation simulée. C'est notre petit… délire."
Charles hoche la tête et sourit poliment.
"Et vous ?" demande Erik, pour changer de sujet.
"Je n'ai pas d'enfant," répond Charles, comme une excuse.
"Je veux dire, et vous, vous avez quelqu'un ?"
Charles attend quelques secondes, joueur et finit par admettre :
"Non."
Erik se met à marcher à reculons pour être face à Charles lorsqu'il l'interroge :
"Disons, si Emma, qui est une très belle femme, et moi, étions disponibles pour un rencard, lequel d'entre nous aimeriez-vous inviter ?"
"Premièrement, j'espère que je me ferais inviter."
"Bien sûr," confirme Erik avec un large sourire.
"Même si je ne doute pas une seule seconde de l'attirance d'Emma, je… choisirais plutôt vous."
Erik sourit comme un homme dont l'équipe de rugby a gagné les matchs de qualifications. Ils se séparent, arrivés à la sortie du parc.
"Est-ce que vous gardez Alex, samedi ?" demande Charles, juste avant qu'ils ne repartent chacun de leur côté.
"Oui," répond Erik sans réfléchir.
Encore une fois, bonne réponse. Charles sourit.
Samedi, Erik sonne chez Emma. Elle ouvre, surprise, et il lui tend directement un sac.
"Tes vinyles," explique-t-il.
C'est l'excuse parfaite qu'il a trouvée pour débarquer chez elle. Depuis le temps qu'elle lui réclame, il a enfin trouvé le courage de tous les rassembler et de lui ramener. Elle l'invite à entrer et lui propose un café qu'il accepte. Alex est dans le salon, affalé sur le canapé, à jouer à la console.
"Tu l'as, la PS4," remarque Erik, avant même de lui dire bonjour.
"C'est la Switch," corrige Alex, comme si Erik était infiniment débile.
"C'est pareil, c'est une console…" peste-t-il.
Emma arrive avec sa tasse et Erik sourit largement en la remerciant.
"Alex a été accepté dans l'équipe de foot de Primrose," lui apprend-elle, gonflée de fierté.
"C'est cool," se réjouit (autant qu'il peut) Erik.
Alex lui adresse un regard peu impressionné.
"Hey, en parlant de foot, tu voudrais qu'on retourne ensemble au parc, comme la semaine dernière ? Tu pourrais y jouer, comme ça."
Emma cligne des yeux. Alex met son jeu en pause et tourne son corps pour regarder Erik. Il le sonde de ses petits yeux de serpent, indéchiffrable, jusqu'à ce qu'il lance un Okay définitif. Il éteint sa console et disparaît à l'étage pour s'habiller. Erik se concentre sur sa tasse pour ne pas croiser le regard d'Emma.
"C'est… d'accord," finit-elle par bredouiller.
"Quoi ?"
"Rien c'est… unique, que tu proposes de t'occuper d'Alex."
"Si ça ne te plait pas, je peux rentrer chez moi."
"Non, non, au contraire ! Je vais pouvoir prendre un bain !"
"Tu ne prends pas de bain quand il est là ?"
"En fumant."
"Ah."
"Un bon joint de Raven."
"Oui, j'avais compris."
Elle se réjouit en tapotant dans ses mains et Alex apparaît, baskets lassées et manteau enfilé. Elle lui conseille à nouveau d'être sage et d'écouter Erik, mais le gamin ne paraît pas l'entendre. Il continue de fixer Erik et il n'arrête pas, de tout le chemin jusqu'au parc. Ils ne reprennent même pas leur distance de sécurité et Erik sait très bien que c'est parce que le nain se doute de quelque chose. Il est insupportable, pas idiot.
Erik se concentre pour trouver Charles, ou au moins, Churchill. Par une chance qui pourrait s'apparenter au destin (si Erik croyait à ses conneries) ils apparaissent quelques mètres avant le terrain de foot. Alex les reconnait instantanément aussi. Il s'arrête.
"Viens, tu veux pas aller jouer avec tes potes ?" l'appelle Erik, qui ne veut pas perdre de vue Charles.
"C'est lui que tu voulais revoir ? Pourquoi t'as voulu que je vienne ?" demande Alex sans aucune sympathie.
Erik souffle et revient près de lui pour parler plus bas.
"Pose pas de question, va faire ton foot, c'est tout ce que je te demande."
"Explique-moi ou je hurle."
Erik hausse un sourcil et pouffe un rire. Ce n'était pas la bonne chose à faire car, et il l'apprend de la manière la plus aiguë qui soit, Alex ne plaisante pas du tout. Il prend une grande inspiration et pousse un cri qu'Erik arrête aussi vite que possible en posant sa main sur sa bouche.
"Mais t'es complètement taré ? Ferme-la, je t'explique !"
Alex croise ses bras contre son torse et attend.
"Le mec, avec son chien, il me plaît. Il croit que t'es mon fils, donc tu te fais passer pour mon fils cet après-midi et après, on en parle plus. C'est simple, je suis sûr que même toi tu peux le comprendre."
Alex fait un pas sur le côté, regarde Charles longtemps et accepte, non sans ajouter :
"Okay. Je me fais passer pour ton fils. Si tu m'achètes une PS4."
"Putain mais t'es en boucle, c'est pas possible !"
"À prendre ou à laisser."
"Je ne vais pas t'acheter une console, t'en as déjà une."
"... Okay," conclut Alex en commençant à marcher vers Charles.
"Où tu vas ?"
"Lui dire que t'es pas mon père, que tu me kidnappes tous les samedis et que tu me prends en photo sous la douche."
"Mais t'es monstrueux !" s'horrifie Erik en courant pour le rattraper.
Il ne pensait pas que tous ses squats lui serviraient, mais voilà, parfois dans la vie, il faut s'abaisser au niveau d'un plus petit (dans tous les sens du terme) que soi. Il attrape Alex par les épaules pour qu'il ne bouge pas et le regarde droit dans les yeux.
"Très bien, je t'achète ta PS4. Mais interdiction absolue de raconter tes conneries de douche, okay ? Il pense juste que je suis ton géniteur. C'est pas un grand mensonge, c'est pas comme si t'en avais un de toute façon. Deal ?"
Alex ferme les yeux et inspire longuement. Il finit par tendre sa main pour serrer la sienne.
"Deal."
"Allez, donne moi ta main."
Leur poignée se transforme en simulacre de paternité. Les doigts d'Alex sont moites, ça dégoûte Erik, mais comme Charles se retourne au même moment et sourit en le voyant, Erik sourit aussi.
En ce mercredi matin, Erik n'est même pas déçu de ne pas pouvoir aller à la salle. Il ne pense qu'au parc, qu'à Charles. Il arrive exactement à la même heure que la semaine dernière et refait le même parcours. Il ne le voit pas. Churchill non plus. Il remonte jusqu'à la sortie qu'ils avaient emprunté, mais rien, nada.
Samedi prochain, Erik doit impérativement demander le numéro de Charles.
