Si toi aussi tu penses que la fin du dernier livre sent le citron pas frais…
Enjoy!
Survivante
Chapitre 1
Tobias
Je vois Cara à l'autre bout de la pièce. Elle est blessée. Un large bandage recouvre une partie de sa tête, mais ce n'est pas ce qui m'inquiète le plus. Non, ce qui m'inquiète, c'est la tristesse et la peur que je peux lire sur son visage.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
Cara secoue le visage lentement. Ses yeux sont humides et elle ne parvient pas à cacher son émotion. Quelque chose de terrible a du se passer ici.
- Où est Tris ? je pose encore des questions et le fait que l'on ne me donne pas de réponse me rend complètement fou.
- Je suis désolée Tobias…
La réponse de Cara est à peine plus qu'un murmure. Pour la première fois de ma vie, je comprends vraiment ce que signifie être terrifié.
- Désolée pour quoi ? s'exclame Christina. Dis-nous ce qui s'est passé !
- Tris a pris la place de Caleb. Elle a survécu au sérum de mort, mais… elle s'est fait tirer dessus.
Le monde autour semble disparaître tout à coup. J'ai la sensation de perdre le contrôle de mon corps. La terreur est semblable à celle que je ressens lorsque je me retrouve perché au dessus du vide, en bien pire. J'ai l'impression que j'ai cessé de respirer, mais je n'en suis pas certain. En fait, je ne suis plus sur de rien.
- Est-ce qu'elle est vivante ?
J'entends Christina hurler sa question à mes côtés. Je lui en suis reconnaissant. Je n'ai pas la force de parler. Si je pose cette question, j'obtiendrai une réponse de la part de Cara et si elle me dit que Tris est morte, tout deviendra réel. Tant que je n'ai pas de réponse, je peux prétendre que rien de tout cela n'est arrivé. Que tout va bien.
Comme un lâche.
- Elle est vivante. Nous l'avons installée avec Uriah. Elle ne s'est pas encore réveillée.
Lorsque Cara prononce ces mots, je sens mon cœur battre à nouveau et j'inspire profondément. C'est alors que je réalise que j'avais vraiment retenu mon souffle depuis notre arrivée.
Je n'attends pas une seconde avant de me rendre dans la chambre dans laquelle Tris est installée. Son corps est allongé sur un lit. Des tuyaux la relient à différentes machines qui l'aident à rester en vie. Un moniteur suit les battements de son cœur. Je ne suis pas un spécialiste, mais je comprends à la succession de « bips » que son rythme cardiaque est trop lent. Elle paraît si faible, si minuscule.
Je m'installe à ses côtés et sert sa main dans la mienne.
- Tris…
Je murmure son nom comme une prière. Elle ne peut pas mourir, pas ici, pas maintenant. Nous n'avons pas combattu si dur, endurés autant de peines, tout ça pour la perdre quand tout est sur le point de finalement s'améliorer. Je ne peux m'empêcher de croire que, quelque part, l'univers se moque de nous. C'est une farce, une mauvaise blague. Je dois me réveiller.
Christina pose sa main sur mon épaule. Je me retourne pour la regarder. Des larmes coulent le long de sa joue et s'écrasent le long de sa clavicule. Derrière elle, je vois une forme familière se dessiner dans l'encadrement de la porte. Caleb.
Je me lève d'un bond sans réfléchir. Je ne sais pas ce que je compte lui dire, mais ma rage dirige mes mouvements. Je ne fais rien pour la contrôler. Je n'ai pas envie de la contrôler.
- Espèce de sombre imbécile, comment as-tu pu…
- Arrête ! s'exclame Christina en se postant entre nous deux
Elle pose ses mains sur mon torse et me regarde avec dureté. Elle semble avoir compris que, si je me laisse aller maintenant, je perdrai le peu de calme qui me reste et serai vraiment capable du pire.
Je pose à nouveau mon regard sur Caleb et le dévisage avec dégoût.
- Je suis désolé, murmure-t-il, sa voix tremblante et secouée par le chagrin.
- Tu es désolé ?
Les mots de Caleb ne font qu'accentuer mon dégoût. Comment peut-il être désolé ? Tris est mourante. Il n'y a rien qu'il puisse dire ou faire pour excuser cela.
- Je ne voulais pas, je n'ai jamais voulu…
- Alors tu aurais du l'empêcher de prendre ta place !
Je hurle et sens à nouveau ma colère prendre le dessus. J'ai l'impression de perdre toute capacité à penser et à me compoter de manière rationnelle. Je connais Tris mieux que quiconque. Je sais que rien ni personne n'a la capacité de la contrôler. Elle avait pris sa décision et personne n'avait le pouvoir de l'arrêter.
Néanmoins, je décide d'ignorer ce fait. Je n'ai pas envie d'être logique ou d'admettre quoi que ce soit. Tout du moins, pas avant qu'elle ne soit réveillée et tirée d'affaire.
- Dégage maintenant.
- Mais je…
- Sors ! insiste Christina en se retournant vers Caleb. Il vaut mieux pour nous tous que tu t'en ailles.
- C'est ma sœur. Je suis sa famille, j'ai le droit de rester à ses côtés.
- C'est nous sa famille, déclare Christina d'une voix sombre.
Je suis reconnaissant d'avoir son appui. Je n'ai pas la force de supporter cette situation et Caleb en même temps. Il s'en va sans ajouter un mot et je retourne m'installer auprès de Tris. Je me demande si elle peut nous entendre, si elle est consciente d'une manière ou d'une autre de notre présence.
Christina s'assied de l'autre côté du lit et laisse glisser ses doigts le long de l'épaule de Tris. Sa bouche forme un très léger sourire. Je ne sais pas où elle puise la force de montrer un signe de positivisme. J'en suis incapable.
- Elle va s'en sortir, déclare-t-elle en relevant le visage pour me faire face.
- Comment est-ce que tu peux en être aussi sûre ?
- Tris n'abandonnerait pas comme ça, répond-t-elle simplement en haussant des épaules. Et puis… elle ne te laisserait pas tomber.
Malheureusement, je ne suis pas d'accord avec Christina. Tris n'a jamais été le genre de personne à attacher de la valeur à sa propre vie. Je sais qu'elle m'aime, mais cela n'a jamais été suffisant pour l'empêcher de se comporter avec insouciance. Je détourne mes yeux de Christina et les focalise à nouveau sur Tris. Sa poitrine se soulève très légèrement – trop légèrement – à chacune de ses respirations. Un soupire m'échappe et je ne peux dire s'il s'agit de lassitude ou de gratitude. Elle est en vie et pour le moment, c'est tout ce qui compte. Néanmoins, je ne peux réprimer cette voix dans ma tête qui ne cesse de me répéter : pour une fois, j'aurais voulu qu'elle pense à moi avant de se sacrifier pour les autres.
Les trois jours qui passent sont un véritable enfer. Lorsque j'arrive à fermer les yeux et à m'endormir, c'est pour voir Tris mourir dans mes cauchemars. J'entends les sons stridents des machines qui la gardent en vie devenir erratiques avant de se stopper nets. Je me réveille à chaque fois en sursaut et court vers la chambre dans laquelle elle est allongée, inconsciente, pour vérifier qu'elle est toujours en vie.
Je ne peux pas vivre sans elle et je ne sais pas combien de temps je pourrai tenir ainsi sans complètement perdre la tête.
Le sommeil ne me semble plus être une option acceptable. Je ne supporterai pas de la voir mourir encore une fois. Je décide donc d'arrêter d'essayer de dormir. Au moins, lorsque je suis éveillé, j'arrive à garder un certain contrôle sur mon esprit.
L'air chaud et humide des dortoirs m'étouffe. Sans réfléchir, je me lève et me dirige vers le couloir. Je ne sais pas où je vais et j'avance sans but à travers le bâtiment désert. J'ai l'impression de marcher perpétuellement sur une corde raide, perchée à des centaines de mètres du sol. Après quelques minutes, je me retrouve face à la porte qui mène sur le toit. Je l'ouvre et m'installe par terre contre le mur.
La nuit est fraiche et c'est exactement ce qu'il me faut. Le vent souffle à travers la ville. Je me perds dans mes pensées lorsque le grincement de la porte me ramène à la réalité. Zeke s'avance vers moi et prend place à mes côtés. Nous n'avons pas parlé depuis que nous sommes revenus de la ville. Une tension insupportable s'est installée entre nous depuis ma terrible révélation. L'espace d'un instant, cela me permet de détourner mon esprit de Tris et de ne pas penser exclusivement qu'à elle.
Un long moment s'écoule sans que Zeke ne prenne la parole. J'aimerais dire quelque chose, mais je ne trouve pas de mots qui puissent convenir à la situation.
- Il fait froid, déclare-t-il avec nonchalance.
Je relève le visage et le dévisage avec stupéfaction. Je m'étais attendu à des insultes, à de la colère, à n'importe quoi, mais pas à une remarque aussi inutile et vide de sens.
Zeke semble remarquer mon incrédulité et m'observe avec curiosité.
- Quoi ? demande-t-il en toute innocence.
- Ton frère et Tris sont dans le coma. Soyons honnêtes, c'est la merde… et tu ne trouves rien d'autre à me dire que « il fait froid » ?
Je ne saurais dire quand j'ai vu Zeke sourire pour la dernière fois. Son visage semblait froid et impassible lorsqu'il est arrivé. Pourtant, j'aperçois un léger sourire se dessiner au coin de sa bouche.
- Ta gueule, déclare-t-il en secouant le visage et en détournant son regard.
Il lève les yeux et observe les étoiles un court instant avant de reprendre la parole.
- Je voulais te parler, commence-t-il par déclarer en soupirant. La situation est très tendue depuis que nous sommes ici et avec ce qui est arrivé à Tris…
Zeke marque un temps de pose et m'observe avant de reprendre la parole.
- Je n'ai pas vraiment trouvé le moment idéal pour le faire.
Un lourd silence s'installe à nouveau entre nous. J'ai des milliers de choses à dire, mais aucune d'entre elles ne valent la peine d'être verbalisées maintenant. C'est Zeke qui est venu pour me parler et je décide de le laisser faire.
- Ce n'était pas de ta faute.
Sa déclaration me laisse sans voix. Je retourne mon regard vers lui et le dévisage sans savoir quoi répondre. Je mérite de la colère, pas de l'acceptation.
- Tu ne peux pas être responsable de tout ce qui se passe autour de toi, ajoute-t-il avec fermeté. Uriah a fait un choix. Tris a fait un choix. Tu ne peux pas leur enlever ça.
- J'aurais du être là pour les protéger.
Je ne prends pas le temps de réfléchir avant de répondre et cette déclaration m'échappe. Tant pis, je ne regrette pas de l'avouer. Je me sens coupable pour Uriah et pour Tris. Au fond, ce n'est un secret pour personne.
- Je n'étais pas là non plus pour mon frère, ajoute-t-il pour faire suite à ma remarque. Est-ce que tu penses que c'est de ma faute s'il est dans cet état aujourd'hui ?
- Non, bien sûr que non ! je m'exclame avec conviction.
Et je le pense. S'il y a bien une personne qui n'est pas coupable d'avoir commis la moindre erreur, c'est Zeke. Il n'est en rien responsable de ce qui est arrivé à Uriah.
- Pourtant, je n'étais pas là. J'aurais potentiellement pu le protéger, ajoute-t-il.
- Tu ne pouvais pas savoir ce qui allait se passer.
- Très bien, commente-t-il en hochant la tête. Maintenant, peux-tu me dire en quoi tout cela est différent pour toi ?
Je comprends enfin ce que Zeke essaie de faire. Il ne se sent pas coupable et il n'est pas en train de se confesser à moi pour se libérer de sa culpabilité. Il veut me faire comprendre que je ne suis pas plus coupable que lui de ce qui arrive à Uriah et Tris.
- La vie est tout un tas de choses. Elle peut être pénible, longue ou alors même courte, joyeuse, stimulante ou insupportable. Mais il y a une chose que la vie n'est pas.
J'observe mon meilleur ami avec curiosité.
- Elle n'est pas juste, conclut-il avec assurance. Alors arrête de vouloir prendre la responsabilité de tout ce qui ne va pas dans ce monde. Rien de tout cela n'est de ta faute et il est inutile de vouloir te cacher derrière de la culpabilité pour éviter le vrai problème : mon frère et ta copine pourraient mourir et ça fait chier.
- Ça ne m'aide pas vraiment à me sentir mieux.
- Je ne dis pas ça pour que tu te sentes mieux, répond-t-il avec franche honnêteté. Je le dis parce que c'est comme ça que je vois les choses.
Un nouveau silence s'installe entre nous, mais la tension qui avait pris le contrôle de notre amitié a disparu. Tout ce qu'il reste, c'est une douleur lancinante et le vent qui parcourt la ville sans relâche.
- Maintenant, poursuit-il en insistant sur ses mots. J'ai également dit qu'il faisait froid. Et ça aussi, je le pensais, ajoute-t-il en se levant.
Je le suis jusqu'à la porte qui mène à l'intérieur du bâtiment. Avant de retourner à l'intérieur, Zeke se retourne et me regarde avec insistance. Maintenant que la lumière éclaire son visage, je peux lire avec clarté les marques de fatigue sous ses yeux. Les mêmes que celles qu'il peut également voir sur mon visage.
- Toi et moi, ça va. D'accord ?
Cette déclaration est simple, mais elle porte un message très fort. Je hoche du visage sans rien dire et je sais qu'il comprend. Nous nous dirigeons tous les deux vers les étages inférieurs, où se situe la chambre de Tris et Uriah ainsi que les dortoirs.
Le soleil est presque levé lorsque le bruit d'une alarme strident s'élève dans les couloirs. Elle provient de plus loin et ne suffit pas à réveiller tout le monde dans le dortoir, mais elle est suffisamment bruyante pour réveiller Zeke qui ne dormait pas profondément.
- Qu'est-ce que c'est que ce bordel ? demande-t-il en se redressant sur ses coudes, les yeux encore mi-clos.
Je secoue la tête et me lève pour me sortir de dortoir. Zeke est juste derrière moi lorsqu'une femme apparaît dans l'encadrement de la porte. Son visage est illuminé et plein d'excitation.
- Suivez-moi, déclare-t-elle.
Immédiatement, je sens mon cœur faire un bond dans ma poitrine. Elle nous amène dans la chambre de Tris et Uriah. S'il s'agissait d'une mauvaise nouvelle, elle n'aurait pas affiché cette mine réjouie. Se peut-il donc que…
Alors que j'entre dans la chambre, je ne peux masquer ma déception. Tris est toujours immobile. Uriah a les yeux ouverts, par contre. Zeke se précipite à ses côtés et me pousse hors de son chemin. Son frère est vivant et c'est un soulagement pour nous tous. Je suis heureux de voir qu'il va s'en sortir, mais mon sentiment contient également une part d'égoïsme. Je n'aurai jamais à me reprocher sa mort. S'il nous avait quitté, j'aurais porté cette responsabilité jusqu'à la fin de mes jours, même si Zeke semble ne pas penser que je sois responsable de ce qui est arrivé à son frère.
Je laisse échapper un soupire de soulagement, puis je dirige mon regard vers Tris. J'observe sa poitrine se soulever doucement à chacune de ses respirations et m'accroche à cela pour me convaincre qu'elle est bien en vie et qu'elle va s'en sortir.
Des médecins s'affèrent autour du lit d'Uriah. Cette chambre qui était si calme depuis des jours est tout à coup plongée dans l'agitation et le désordre. Des voix s'élèvent de tous les côtés. La vie reprend sa place et une énergie sans pareille semble s'emparer de toutes les personnes qui se trouvent dans la pièce. Enfin, toutes les personnes, sauf Tris. Et moi.
Je m'assieds sur le bord de son lit et prend sa main dans la mienne. Après un court moment d'agitation, Uriah est emmené hors de la chambre pour effectuer des examens. Tout l'énergie est l'agitation disparaissent en un éclair. Le silence n'est brisé que par les moniteurs reliés à Tris et au son de sa respiration. Le masque relié à son visage l'aide à respirer et amplifie le son de chacune de ses inspirations.
Une part très sombre de moi est amère. J'ose à peine y penser et me l'avouer est pénible, mais je ne peux me cacher la vérité... Si j'avais pu avoir le contrôle sur cette situation, si j'avais pu choisir qui pouvait vivre ou rester dans le coma… j'aurais réveillé Tris, pas Uriah.
J'essaie de repousser ces sombres pensées au plus profond de moi-même et je m'allonge contre Tris en gardant sa main entre les miennes.
- Je t'en supplie réveille-toi…
Je murmure ces mots en fermant les yeux. Je sais qu'elle ne peut pas m'entendre, mais je ne peux m'empêcher d'espérer que, quelque part, elle est consciente de ma présence.
Le bruit lent et calme de sa respiration me berce. Allongé à ses côtés, je me sens apaisé. Je pense pouvoir peut-être trouver le sommeil. Sa présence apaise mes craintes et les sons produits par ses moniteurs me confirment qu'elle est bien en vie.
Je perds le fil de mes pensées et arrive finalement à m'endormir.
Le soleil brille lorsque je me réveille. Je me suis endormi à l'aube et je ne sais dire quelle heure il est maintenant. Au fond, ça m'est complétement égal. Néanmoins, je suis encore épuisé. J'aurais également que le calme que Tris m'apporte me permette de dormir plus longtemps. Je garde mes yeux fermés avec l'espoir de me rendormir, lorsque tout à coup je sens une légère pression contre ma main.
En fait, je suis encore probablement encore en train de rêver. Tris me sert la main. Elle est vivante et en sécurité. Tout cela est terminé et ne sera désormais plus qu'un mauvais souvenir. J'entends sa respiration s'accélérer et les bips des moniteurs s'agiter.
Tobias… j'entends mon nom prononcé d'une voix enrouée et tremblante.
Tris est vivante. Tris est…
Tris est réveillée.
J'ouvre les yeux pour me retrouver face aux siens. Elle me regarde avec insistance malgré sa fatigue et son état de faiblesse.
Je fais un bond et me redresse. J'aimerais parler, mais ma voix semble rester coincée au fond de ma gorge et je suis incapable de parler. J'aimerais l'embrasser, mais son masque de respiration me fait obstacle et j'ai trop peur de l'enlever.
- Tobias… tu me fais mal, ajoute-t-elle, sa voix toujours aussi faible.
Je réalise alors que je sers sa main très fermement. Trop fermement. Je la relâche soudain comme si elle était devenue brûlante, horrifié que je puisse lui faire du mal.
Il me faut une seconde pour reprendre mes esprits. Elle est vivante. Elle est réveillée. Je m'approche à nouveau d'elle et colle mon front contre le sien.
- Tris, je…
Les mots sortent de ma bouche, sans que je sache vraiment ce que je vais dire.
- J'ai cru que je t'avais perdue.
Et c'est vrai. J'ose à peine le dire, mais il m'est arrivé de croire qu'elle ne s'en sortirait pas. Qu'elle ne se réveillerait jamais. Tris ne répond pas tout de suite. Je peux voir qu'il est encore pénible de parler et que sa gorge lui fait mal.
- Je n'ai jamais voulu te quitter, déclare-t-elle en prenant ma main dans la sienne.
A ces mots, mon cœur sursaute dans ma poitrine. J'aimerais la croire. J'aimerais tellement me dire que c'est vrai, que tout ira bien et qu'elle restera toujours auprès de moi. Pourtant, je sais que c'est faux. Elle s'est retrouvée face à un choix et elle a préféré se sacrifier pour son frère. Je connais Tris par cœur et je sais que vouloir sauver les autres est dans sa nature. Néanmoins, face à ce choix, elle ne m'a pas considéré du tout. Que serait-il advenu de moi si elle n'avait pas survécu ? A-t-elle seulement pensé à ce que je pourrais ressentir, à l'atroce souffrance que cela me causerait si elle mourait ?
Je connais bien la réponse à ces questions. Non, Tris n'a pas pensé à cette possibilité et elle n'a pas pensé à moi non plus. Elle a considéré le bien des autres avant de considérer le mien. Elle a voulu sauver son frère sans penser que cela pourrait me détruire, moi.
J'essaie de repousser ces sombres pensées au plus profond de mon esprit. Tris est vivante et pour le moment, c'est tout ce qui compte.
