Une voisine pour la vie
Disclaimer : Je suis au regret de vous annoncer que malgré tous mes efforts je n'ai pas réussi à changer d'identité… JK Rowling reste JK Rowling et moi, bah je reste moi.
Résumé : Dans une réalité analogue à la nôtre, Severus Snape, 27 ans, aspire à trouver un point d'ancrage à son existence morose bercé par un quotidien tout aussi bilieux et sépulcral. Potionniste désabusé et propriétaire d'un appartement au cœur de Londres depuis 3 ans, son habituelle routine est brusquement chamboulée par l'arrivée d'une lettre, une invitation pour le moins inattendue, qu'il s'est dicté d'ignorer. Seulement, tout était sans compter sur son unique voisine de palier, qui consiste en sa parfaite antinomie.
Prologue
Installé dans une causeuse en vieux cuir, Severus savourait la douce chaleur qu'un poêle à bois s'appliquait à répandre dans son salon. Au-dehors, West Brompton s'offrait au crépuscule, tintant ainsi les ruelles du quartier d'un halo rose thé irrésistible en cette fin d'été. Les yeux plongés dans le feu, le visage flatté à la fois d'ombre et de lumière, il n'avait de cesse de froisser et défroisser d'une main le feuillet cartonné jadis soigneusement plié dans l'enveloppe ivoire qui brulait désormais au creux des flammes voraces du poêle. Ses doigts effilés jouaient nonchalamment avec le papier sans oser s'en détacher ne serait-ce que pour une seconde.
En quittant son laboratoire deux heures plutôt, Severus ne se doutait pas qu'en regagnant son appartement en cette soirée radieuse, il aurait l'atroce surprise de tomber face à un hibou grand-duc armé d'un message imprévu. Préoccupé par ces satanés restrictions budgétaires qui, imposées aux herboristes par le Ministère, empoisonnaient ses affaires les plus lucratives, il s'était débarrassé de ses chaussures sans prêter une quelconque attention au volatile qui le fixait du haut de son juchoir. Perché au rebord verni de la fenêtre à guillotine du living-room, l'animal avait déposé une lettre aux reflets satinés sur la console, près du téléphone, avant de repartir précipitamment dans un léger ululement. Son cri aigu l'avait fait sursauter si fort que Severus avait aussitôt relevé la tête pour apercevoir le jet de plumes alezanes abandonnées par le rapace. Perplexe, il s'était approché derechef vers la petite table et s'était emparé du courrier pour en vérifier l'expéditeur. En décochant le sceau mordoré frappé d'un « P » en lettre capitale son cœur avait manqué un battement.
Le noir de ses iris s'était instantanément accroché à celui des inscriptions délicatement incurvées qui couraient sur la surface laiteuse du billet. Sourcils arqués, il en avait déchiffré chaque phrase avec une lenteur quasi chirurgicale. Il n'y avait certes qu'une dizaine de lignes à y lire, pourtant Severus, plus pâle qu'il ne l'avait été depuis longtemps, s'était employé à n'en rater aucune.
Il s'agissait d'un faire-part sobrement décoré aux imprimés aériens sur lequel s'animait la photographie d'un jeune homme et d'une jeune femme aux sourires rêveurs. La gorge serrée, il avait parcouru une nouvelle fois d'un œil détaché le maigre texte qui accompagnait leur portrait sous la forme d'une miniature.
Lily & James
Ont la joie de vous annoncer leur mariage
Le samedi 25 septembre 1987 à seize heures précises
En la Cathédrale de Rochester dans le comté du Kent
Ils vous convient à la bénédiction nuptiale
Ainsi qu'au cocktail qui suivra la cérémonie
Au domaine de la butte-ronde.
Amitié-Emotion-Bonheur.
Soudain dépouillé d'oxygène, il s'était raccroché in-extrémis au dossier d'un fauteuil avant de s'y assoir dans l'espoir de regagner son souffle. Très loin d'accueillir avec plaisir l'annonce de cet « heureux » évènement, Severus s'était penché devant le poêle en fonte, avait craqué une première allumette pour s'assurer du bon tirage à l'intérieur du foyer avant d'embraser un journal et de le lancer sur les buches.
Mû par la rage, il avait déchiré l'enveloppe duveteuse pour l'envoyer attiser les braises de l'âtre dans un sifflement hargneux. Mais alors qu'il était sur le point de faire subir le même sort au carton d'invitation, le souvenir du sourire de Lily sur le cliché mobile l'avait fait suspendre son geste, un genou à terre et le bras levé en direction des flammes. Incapable de détruire ainsi la seule image qu'il détenait d'elle adulte, synonyme du temps passé sans elle ces neuf dernières années, il s'était redressé pour reprendre place au fond de la causeuse qu'il n'avait, dès lors, plus quitté.
La lettre au poing, il continuait de s'interroger sur le pourquoi d'une telle convocation. Ce genre de réceptions étaient en général réservées à la famille et aux amis proches, hors il ne faisait partie ni des uns ni des autres, bien au contraire. Sa rapide percée dans les rangs du seigneur des ténèbres à sa sortie de Poudlard n'était guère passée inaperçue, il en avait conscience. Sa réputation n'était plus à faire, l'Ordre du Phénix s'en était gentiment chargé. Se construire une place parmi le monde sorcier, une fois la caste de ce suprémaciste consanguin désertée, lui demanda davantage d'effort qu'il n'en n'avait déjà fourni. Il s'était d'ailleurs résigné à loger dans un district londonien moldu pour échapper aux commérages qu'il avait en horreur. Par chance, son don pour la confection des potions eut raison des résistances de bien des gens, ceux-ci trop enchantés de disposer d'élixirs de qualités à moindre prix. La modeste boutique qu'il s'était fait aménager fonctionnait à merveille, effaçant par-là, peu à peu, l'ardoise de ses erreurs passées aux côtés des mangemorts.
L'ennui, c'est que Severus n'était pas assez bête pour imaginer que cette célébrité, fraichement battit, ait pu changer quoi que ce soit à l'image que la société nourrissait à son égard. Celle d'un homme vil, mauvais et aigri qu'il ne niait pas, puisqu'il se savait comme ça.
Car oui, Severus n'était pas quelqu'un de charmant. Marqué par une enfance difficile, il était aux antipodes de l'archétype masculin par excellence. Affublé d'un teint de poussière, d'un nez proéminant et de cheveux gras, il était clair que les femmes ne se bousculaient pas au portillon pour venir l'admirer. Epais comme une portière de vélo, il ne s'était jamais habillé qu'en noir, fuyant la mode vestimentaire sorcière un poil trop voyante pour son propre bien.
Mais ce caractère détestable, cette prédisposition au sarcasme et à l'antipathie, cette capacité à faire ressortir le pire chez les autres avaient la fâcheuse habitude de se décupler en la présence d'une personne plutôt particulière qui polluait son quotidien depuis déjà plusieurs semaines. Une femme insupportable, une plaie humaine, sa chère voisine de palier : Helen Nodelton. Tout juste la vingtaine, elle avait emménagé le dernier appartement de l'étage, juste à la gauche du sien, au début du mois d'aout, et s'était alors donnée pour mission de lui moisir l'existence. Allez savoir pourquoi, elle se trouvait être le premier individu sur cette planète à rechercher sa compagnie.
Elle avait débarqué un mercredi matin avec la discrétion d'un troll des montagnes en chaleur alors qu'il s'apprêtait à quitter la résidence. Qui aurait cru qu'une moldue de 1m67, 50 kilos toute mouillée, pourrait produire un tel barouf. Vêtue d'une monstrueuse salopette abricot elle tentait de grimper l'escalier encombrée de trois lourdes et imposantes valises.
-« Oh bonjour ! » S'était-elle exclamée, sa figure inondée de boucles brunes, tandis qu'il descendait « Vous habitez ici aussi ? »
-« Fine observation. »
-« Vous tombez bien! J'aurais besoin d'un peu d'aide si ça ne vous pose pas de problème. »
-« Et vous, vous tombez très mal, je suis pressé. »
Il « patienta », l'espace d'une minute, qu'elle atteigne le premier palier et la contourna par la droite en la bousculant d'un coup d'épaule. A l'instant où il quittait l'immeuble, il l'entendit jurer lorsque l'une de ses valises dévala les marches dans un fracas assourdissant.
En rentrant ce soir-là, à peine avait-il eu l'occasion d'ôter sa veste qu'elle vint frapper à sa porte. Elle avait troqué son immonde salopette pour une robe bateau turquoise à fleurs jaunes poussins. Réprimant un haut-le-cœur, il l'avait toisé de la tête aux orteils avec un rictus dégoûté.
-« Que voulez-vous ? »
La mine enjouée, elle lui avait alors tendu un panier d'osier garni de pots et bouteilles en verre aux contenus douteux.
-« Je ne me suis pas présentée correctement tout à l'heure, je m'appelle Helen Nodelton. »
Elle lui offrit une main qu'il refusa de saisir.
-« Severus Snape. »
-« Ce sont des confitures et du soda au gingembre. J'en donnais souvent à mes voisins dans le Westmorland. C'est du fait maison! »
Il y eut un long silence aussi vide que le panier était rempli avant qu'un pli contrarié n'apparaisse sur son front.
-« C'est une plaisanterie? Vous n'êtes pas vraiment en train de faire ce que je pense que vous êtes en train de faire n'est-ce pas? »
Désorientée par le ton polaire qu'il avait emprunté elle était restée muette, ses fines lèvres roses légèrement pincées.
-« Je n'ai aucunement l'envie de faire votre connaissance. Ni aujourd'hui, ni demain et encore moins après-demain. En revanche je rêve de boire une bonne tasse de thé alors si vous voulez bien m'excuser. »
Il n'avait pas fait un pas qu'elle s'était écriée :
-« Je suis douée pour faire le thé ! Je pourrais… »
-« Bonsoir Miss Nodelton. »
En claquant la porte, Severus avait jeté un coup d'œil au judas, estomaqué d'avoir eu affaire à une telle calamité. Etait-elle suffisamment idiote pour insister alors que n'importe qui aurait compris qu'il se fichait éperdument d'elle et de ses marmelades ? Il espéra sincèrement à ce moment-là qu'elle ait reçu le message.
Malheureusement, Le destin en avait décidé autrement et quoi de plus divertissant que de la lui mettre dans les pattes ?
Et si cette fatalité n'en n'était pas une ?
A suivre…
Il s'agit d'un chapitre introductif, ne m'en voulez pas, je sais qu'il est court… le prochain arrive dans les jours qui viennent! J'espère que ce début vous a plu, n'hésitez pas à laisser vos impressions !
Chouvis !
