Note de l'auteur :
Ça fait un moment que, grâce à une amie (Greengrin, que ferions-nous sans toi ?), je suis tombée dans le bain de cette série extraordinaire : Doctor Who. Je lui ai envoyé plusieurs one-shots sur le sujet, et dans sa grande gentillesse, elle m'a autorisé et même encouragée à les publier, alors qu'au départ ils n'étaient que pour elle. Donc remerciez-la bien fort, sans elle, vous n'auriez doublement pas cette fic sous les yeux.
Je précise que malheureusement, je n'ai pas vu la série au complet. J'ai les DVD des trois premières saisons, dont j'ai vu tous les épisodes (c'est fou ce que ça ressemble à de la drogue : quand on commence, impossible de s'arrêter) et ensuite… C'est un peu n'importe quoi. J'ai vu plusieurs épisodes au complet, puis, hem… Un certain site internet est mort et il m'a été difficile de poursuivre. Quand j'essaie de commander les DVD des saisons suivantes, il y a toujours un problème, et Youtube est bien gentil, mais malgré ma relativement bonne compréhension de l'anglais, j'ai du mal. Doctor Who est une série difficile à suivre en temps normal, alors imaginez dans une langue qui n'est pas la vôtre. Compliqué de comprendre les rouages du cerveau génial du Docteur. Et impensable de voir ça en VF.
Tout ça pour dire il y a sûrement des erreurs, ou des incohérences. Mais bon, je m'en sors en disant qu'il y en a parfois aussi dans la série elle-même, et puis, ce qu'il y a de bien avec Doctor Who, c'est que c'est la porte ouverte aux fanfics : on peut toujours dire que nos histoires sont bel et bien arrivées… Dans un univers parallèle^^.
Ceci est un recueil de one-shots, les deux premiers étant composés avec comme impératif la phrase « jouer au docteur », et les suivants sans prompt particulier. Pour l'instant, j'en ai trois tapés et corrigés. Je donne les deux premiers ensemble, le suivant, la semaine prochaine. Les autres sont à l'état de brouillon pour le moment. Ils peuvent être lus indépendamment.
Rien ne m'appartient, et je ne gagne pas d'argent en écrivant ces lignes.
Ce recueil est dédicacé à ma chère Greengrin.
Ce one-shot se déroule durant la première saison.
Rating de ce one-shot : K+.
TARDIS Lullaby
Rose aime dormir dans le TARDIS.
Cela ne lui arrive pas très souvent, et elle en profite d'autant plus lorsque l'occasion se présente. D'ordinaire, ils s'arrêtent à une époque accueillante et, grâce aux passe-partout divers du Docteur, se prélassent dans une chambre d'hôtel honteusement luxueuse. Rose s'amuse beaucoup de toutes ces fanfreluches, inchangées ou si peu quel que soit le siècle où ils débarquent. A croire que les dorures, les rubans ou frisettes d'un goût ridicule ont toujours été synonymes de richesse et de confort.
Pour elle qui n'a jamais eu beaucoup d'argent, les draps de soie ou tissés dans une matière argentée extraterrestre sont une inépuisable source d'amusement, sans compter les petits-déjeuners servis au lit, les fleurs par dizaines sur les consoles ou encore les fruits confits qui collent aux doigts et poissent la bouche. Elle en est tout de suite moins ravie lorsque le Docteur annonce d'un ton léger, presque innocent, que les draps si doux dans lesquels elle se roulait sont confectionnés à base de bave solidifiée d'un mollusque géant, ou que les confiseries dont elle se goinfre jusqu'à l'écœurement sont en réalité des larves de bestioles trop proches du crapaud à son goût.
Bien sûr, il n'aurait pas pu le dire plus tôt, cette saleté d'alien au sourire radieux.
A chaque fois, ça ne manque pas, Jack s'étouffe de rire en s'écroulant par terre, sans aucune pudeur, et Rose part bouder comme une adolescente en claquant derrière elle la porte de sa suite. Plus tard, lorsqu'elle en est enfin sortie, le Docteur ne se gêne pas pour grignoter sous ses yeux effarés les confiseries fautives, et se sucer les doigts pour en retirer l'épaisse pulpe orange à l'odeur capiteuse. Si elle n'était pas aussi proche de rendre son repas alors, elle aurait crié au fanservice devant un geste pareil.
Mais parfois, rarement, le Docteur et ses compagnons sont trop secoués pour effectuer les diverses manœuvres nécessaires afin de débarquer dans un lieu exempt de tout ennemi ou catastrophe interplanétaire. En général, ils viennent de sortir d'une aventure périlleuse et d'échapper à la mort encore plus in-extremis qu'à l'ordinaire. Un peu choqués, et épuisés pour Rose, ils quittent la place en vitesse et ferment à clef la porte de la cabine bleue, celle qui a arrêté un jour tous les soldats de Gengis-Khân. Puis, hagards, ils errent autour de la structure centrale de l'appareil, rassurés par la douce lueur blanche et bleue qui pulse comme un cœur qui bat. Le Docteur sort de nulle part quelques couvertures et matelas, et prend un air enjoué pour signaler aux « enfants » qu'il est l'heure d'aller se coucher. Rose apprendra ensuite que le TARDIS possède diverses cabines spacieuses, dont des chambres. Mais sans doute le Docteur a-t-il compris que cet aspect « camping » et la proximité de lui et Jack la rassurent, l'aident à encaisser les diverses horreurs auxquelles elle a été confrontée.
Jack est le premier à s'allonger sans façon, un peu n'importe où, souvent en travers du passage. Rose peut presque prévoir à la seconde près le moment où il se mettra à ronfler. Chez lui, la position allongée déclenche automatiquement deux réactions : soit une disposition marquée pour le sport de chambre, soit le sommeil. Jack a la chance de parvenir à dormir n'importe où et dans presque n'importe quelle condition, comme un enfant. Rose, elle, met un temps avant de s'assoupir, le cœur encore battant la chamade et les veines chargées d'adrénaline. Les draps la grattent et lui chatouillent le nez, le matelas datant sûrement de Mathusalem (littéralement, car avec le Docteur, tout est possible) grince sous elle à chaque fois qu'elle se retourne. D'entre ses cils qui filtrent la lumière du TARDIS, elle observe le Docteur qui fait ses réglages sur le tableau de bord, dans le plus grand silence.
Cet aspect là du Docteur l'a toujours impressionnée. La manière dont il sait se faire discret après avoir été sous le feu des projecteurs. Si remarqué, le Docteur, toujours le centre des regards. Il ne fait plus aucun bruit, tout est assourdi, même ses gestes ralentissent comme pour l'aider à plonger plus profondément dans sa torpeur. Les molettes qu'il tourne et qui font d'ordinaire tant de bruit ne produisent pas le plus léger crissement, les boutons qu'il presse s'enfoncent docilement. Il fronce légèrement les sourcils, concentré, mais un sourire flotte sur ses lèvres. Ses doigts volent au-dessus des commandes, les caressent tendrement, amoureusement. Comme il le ferait avec le corps d'une femme, songe-t-elle rêveusement, un peu de rouge lui montant aux joues. Lorsque la frontière entre le sommeil et l'éveil est si mince, elle peut bien se permettre ce genre de pensées, elles ne prêtent pas à conséquence.
En fait, pour être exacte, elle n'a pas véritablement l'impression que le Docteur étouffe volontairement les bruits qu'il fait pour ne pas les réveiller. Plutôt que l'air devient plus épais autour d'elle, comme un cocon, et que ses oreilles se bouchent. Puis vient l'impression que le sol se réchauffe, accueillant, moelleux, qu'elle se fond dans la coque du vaisseau, que l'air liquide et tiède lui emplit les poumons. Béate, elle se laisse aller à cette délicieuse impression de ne faire plus qu'un avec ce qui l'entoure et est devenu, plus que sa maison, une sorte d'extension de son Docteur. Sans TARDIS, il ne serait pas celui qu'il est. Il ne serait plus cet être étrange et fascinant qui compte tant pour elle, tout simplement parce qu'ils ne se seraient jamais rencontrés.
Perdue dans un doux brouillard cotonneux, apaisée par la présence du Docteur à côté d'elle, elle écoute les chuchotis qui ont remplacé les ronflements de Jack. Des murmures, des rires mutins de fille ou d'enfant, des mots doux et des notes fredonnées emplissent le vaisseau. Elle ne parvient pas à en saisir le sens. Comme si le TARDIS lui chantait une berceuse et que, l'oreille collée par terre, elle pouvait entendre sa voix. Proche du sol comme elle l'est, elle sent battre un cœur immense sous le sol de métal, qui la berce. Elle est comme sur une vague, au creux, puis au sommet, elle plonge et se soulève, pour finalement sombrer sous la surface des eaux chaudes. A ce moment, la lueur omniprésente se transforme, et devient celle de sa veilleuse lorsqu'elle était petite fille, et craignait le noir. Il y a une odeur de roses, légère, ténue, une main douce qui lui passe sur le front, et elle dort enfin. C'est toujours un sommeil parfait qui l'accueille alors, et la laisse reposée et fraîche. Les rêves se résument à des brouillures de couleurs, des rayons de soleil et des éclats de sourire frais. Parfois, une chevelure sombre lui passe sous le nez, des bras la cerclent et c'est l'étreinte d'une femme inconnue qui lui fait traverser la nuit, en sécurité.
Lorsqu'elle émerge enfin, son haleine n'est pas chargée comme d'habitude au réveil, au contraire, elle a un goût sucré dans la bouche. La tête encore embrumée, les yeux clos, elle se demande à quoi ressemblerait un baiser matinal dans le TARDIS. Le Docteur est toujours là, éveillé, à se demander s'il dort jamais. Il est soit devant ses commandes, soit assis sur une chaise entre Jack et elle, mais dans tous les cas il a détourné son attention de ses réglages et réparations, et la regarde avec un sourire bienveillant. Elle lui sourit vaguement aussi, et s'étire. Elle n'a aucune courbature, malgré le matelas peu confortable. Elle aurait tout aussi bien pu passer la nuit dans un hôtel quatre étoiles. Elle constate alors qu'un peu de lumière de l'extérieur filtre de dessous la porte du TARDIS, et comprend, troublée, que le Docteur les a finalement amenés à une destination nouvelle et sans danger. Troublée, parce que les secousses et les chaos habituellement ressentis lors du voyage ne l'ont même pas réveillée, ne l'ont même pas dérangée. Est-ce bien naturel, ce sommeil qui la prend lorsqu'elle s'allonge dans le vaisseau du Docteur ?
Un jour, elle se met en tête d'obtenir réponse à sa question. Elle est encore un peu méfiante alors, elle ne se souvient que trop bien de la fois où il l'a déposée chez elle avec un an de retard, un laps de temps bénin pour lui, ou bien de celle où elle a appris que le TARDIS étendait un champ quelconque dans son cerveau pour lui permettre de comprendre les langues diverses que l'on parlait autour d'elle. Le Docteur avait oublié de le mentionner.
Plus tard, elle a compris que le Docteur, s'il ressemble à un humain, n'a pas exactement les mêmes préoccupations ou craintes qu'eux, d'autant plus qu'il est beaucoup plus âgé. Ce qui lui parait d'une extrême importance à elle ne peut être qu'un détail pour lui, et vice-versa. Il a appris à prêter à la plus petite chose une grande attention, y devinant un indice d'une catastrophe future, à moins qu'il ne soit rendu démesurément heureux par un événement aussi simple que le battement d'ailes d'un papillon jaune. Pour lui, peut-être est-ce une espèce qui va définitivement disparaître de la surface de la Terre et bouleverser l'écosystème, à moins qu'il ne s'agisse des gênes de départ d'une race très évoluée. Il ne voit pas les choses comme eux. Il les voit parfois mieux, parfois moins bien, il se projette plus loin dans le temps, il établit des connections entre les événements qui échappent à Rose et Jack. Ils sont myopes, et lui astigmate, en quelque sorte.
Elle a cessé d'en vouloir au Docteur quand elle s'est aperçue de cet état de fait, ce qui ne l'empêche pas de redoubler de prudence. Elle comprend parfaitement à présent que le Docteur peut oublier quelque chose d'une importance capitale à ses yeux. Elle prend plus garde à ce qu'elle dit ou fait. Elle pose davantage de questions, et les tourne différemment, comme on change un angle de tir pour s'adapter à la cible qu'on vise. Elle est fière de constater qu'elle touche juste de plus en plus souvent. Elle apprend à le connaître. Aussi, ce jour-là, lorsqu'elle demande au Docteur la raison de son sommeil si particulier et qu'il éclate de rire, elle ne se vexe pas.
« - C'est une drôle de question, ça. »
C'est tout ce qu'elle obtient, à part un clin d'œil mystérieux et un changement de sujet à l'aide d'une pirouette et d'un doux babillage. Soi-disant, en réalité, il serait simple d'éviter les cabrioles du TARDIS, mais il trouverait beaucoup plus amusant de se faire bringuebaler de droite à gauche lorsque tout va bien. Quand au bruit caractéristique du vaisseau lorsqu'il « décolle », il n'existe que parce que le Docteur maintient le frein à main pendant ses manœuvres. Guère convaincue, elle râle, ils finissent par se disputer, et au final, elle n'obtient aucune réponse.
Elle change de tactique, consciente qu'elle n'obtiendra rien de lui. Elle délaisse l'interrogatoire direct et lui préfère l'espionnage, venant fouiner et rôder devant les commandes du TARDIS. Elle est sûre qu'elle peut y dénicher l'astuce du Docteur. Plus elle y pense, plus elle est certaine que son sommeil n'a rien de naturel. Et cela se passe aux alentours des commandes. Peut-être diffuse-t-il un quelconque somnifère à travers la ventilation ? A force de se faire appeler « Docteur », le vilain, il va finir par vouloir véritablement jouer au médecin. Lorsqu'elle fait part de cette réflexion à Jack, il l'interprète mal et la taquine incessamment sur toutes les auscultations gynécologiques et les examens des amygdales que le Docteur pourrait bien faire à sa petite patiente. Elle lève les yeux au ciel et rétorque qu'elle lui fera prêter de force un serment d'Hippocrate. Le Docteur, qui n'est pas loin en réalité, sourit à son insu.
Rose n'a jamais rien découvert dans les commandes du TARDIS. Elle a eu beau examiner presque à la loupe les boutons et autres leviers aux formes tarabiscotées, tenter de déchiffrer les annotations en langues extraterrestres, elle n'a rien trouvé. Et pour cause, songe le Docteur qui ne peut s'empêcher de la gratifier parfois d'un sourire faussement angélique, le bouton déclencheur en question est sous le nez de Rose, mais tout comme sa célèbre carte de visite, il se montre différemment à chaque personne, et jamais sous sa vraie nature, sauf à lui. Lorsqu'il appuie dessus, afin de détendre ses compagnons épuisés et couverts de poussière et de sang, il songe toujours avec tendresse à celle qui l'emmène dans toutes ces contrées, toutes ces époques, cette partie de lui-même sans qui il mourrait. Celle qui les sauve en les abritant. Celle qui passe du baume sur les blessures de l'esprit. Sa sexy little thing. Quelle gentillesse de sa part de mettre au point ce programme particulier, pense-t-il en caressant l'inscription en lettres déliées, au-dessus de la touche.
« TARDIS Lullaby ».
La berceuse du TARDIS.
Voilà, je poste le suivant. J'espère que votre lecture a été agréable !
