Me revoilà! Cette nouvelle histoire s'inspire directement de la célèbre émission American Idol. Vous y retrouverez une bonne partie de nos personnages préférés de Jane Austen (Élisabeth, William, Jane, Charles, Fitzwilliam, Georgianna, la famille Bennet... etc.) et quelques nouveaux dont j'ai besoin pour faire avancer cette fantaisie. Pour William, plus spécifiquement, je me suis inspirée du célèbre juge Simon Cowell. Ceux et celles qui connaissent l'émission, savent comment il était reconnu pour ses propos sévères et quelques fois méchants.
Je tiens à remercier toutes celles qui lisent mes histoires et qui prennent le temps de m'écrire des commentaires. Continuez à le faire. N'arrêtez pas. Merci aussi à celles qui se sont ajoutées depuis le début. Merci aussi à celles qui insèrent mes histoires dans la section «favorites» ou dans la section «alerts». C'est très gratifiant!
Pour finir, je dois remercier plus spécialement deux personnes: Tout d'abord Youk qui commente et corrige mes textes avec rigueur, puis une nouvelle lectrice qui a accepté d'insérer les paroles de ses chansons dans cette histoire. En effet, Fafii m'a gentiment proposé d'écrire les paroles des chansons qui, dans mon histoire, doivent être composées par Élisabeth (ou par d'autres). Il y en a une première dans ce chapitre. FaFii et moi avons bien hâte de savoir ce que vous en pensez.
Sur ce, bonne lecture. Miriamme
Première partie
-Liz, tu ne songes pas réellement à faire ça ? S'inquiéta Jane, les sourcils froncés et la bouche tordue en un rictus désapprobateur.
-Jane, c'est la seule voie qui existe pour ceux et celles qui veulent se faire connaître rapidement! Pourquoi ne puis-je pas en profiter moi aussi? Plaida Élisabeth, en pointant l'affiche qu'un employé venait de coller contre le mur extérieur de la bibliothèque municipale.
-Mais as-tu pensé à la famille? Une fois que tu seras entrée dans la bouche de la machine «American Idol», on va tous être impliqués, que tu le veuilles ou non. Plaida Jane en haussant le ton.
-Jane, comment veux-tu que je m'y prenne alors? Je n'ai pas les moyens d'engager des musiciens. De me payer un auteur. Un agent. Un studio. Tu ne peux même pas imaginer tout ce que ça prend pour produire ne serait-ce qu'«une démo». Alors imagine à quelle distance je me trouve du rêve que je caresse depuis que je suis née.
-Fais-toi connaître comme choriste avant? Suggéra Jane.
-Jane, mon rêve est de devenir soliste et de faire un album. Je ne veux pas faire partie de la chorale familiale toute ma vie. Hurla Élisabeth avec exaspération.
-Je ne suis pas sourde Liz. Je comprends très bien ce que tu veux dire. Mais, je reste convaincue que si tu cherchais vraiment, tu trouverais un autre moyen d'y arriver, sans en passer par là. Ajouta-t-elle en pointant l'affiche à son tour.
-Aucun moyen ne sera aussi rapide et efficace que celui-là. Je veux essayer Jane. De toute façon, c'est presque certain que je ne serai pas choisie. Mais si jamais je me trompe, si j'ai de la chance et que j'entre dans la compétition… Alors là, j'aurais au moins l'occasion de suivre des cours, de travailler avec de vrais artistes et, ce qui est encore plus intéressant, de rencontrer des gens de l'industrie : des gens influents.
-Aurais-tu oublié les critiques humiliantes, les railleries, le trac démesuré et les articles de journaux offensants? Mais enfin, Liz, as-tu seulement pensé aux juges? Tu sais comment ils peuvent se montrer durs, insensibles et bourrés de préjugés? Enfin, surtout l'un d'entre eux. Tu le sais bien, William Darcy. Il ne ménage aucun candidat. Il est méchant! Tu passes ton temps à l'insulter quand on regarde les émissions.
-Il m'est également arrivée d'être d'accord avec lui.
-Rarement.
-Il est le seul qui réussit à influencer le vote! Le seul qui dit réellement ce qu'il pense des candidats.
-À t'entendre, on croirait que ce sont les autres juges qui sont trop gentils.
-Non, je n'irais pas jusque là. Mais je refuse de rater ma chance uniquement parce que j'ai peur d'être intimidée ou démolie par William Darcy.
Après avoir exhalé un profond soupir, Jane contre attaqua : En as-tu parlé à nos parents? Ils ont leur mot à dire aussi.
-Non. Et je n'en ferai rien. Pas tout de suite en tout cas. Je préfère attendre de savoir si je passe le cap de la première étape avant de les mettre au courant.
-Tu les préviendrais seulement après ta première audition?
-Oui et seulement si je réussis. Après tout, si je ne suis pas retenue… cela ne changera rien pour eux.
-Je n'arrive pas à croire que tu y songes sérieusement.
-Je ne fais pas qu'y songer comme tu dis : JE SUIS DÉJÀ INSCRITE! S'écria Élisabeth tout en sortant le formulaire qu'elle venait de faire signer par le répartiteur du concours pendant qu'elle attendait sa sœur.
-Mais ton audition est cet après-midi? Paniqua Jane après avoir jeté un coup d'œil sur la feuille que tenait sa sœur.
-Oui. Voilà pourquoi j'ai fait appel à toi. J'aimerais que tu m'accompagnes. J'aimerais beaucoup que tu viennes avec moi pour me soutenir.
-Tu es vraiment décidée, hein?
-Oui!
-Bon alors, très bien : j'irai. Mais je te répète que c'est de la folie.
Après avoir avalé leurs sandwichs respectifs (préparés à la hâte comme tous les matins), Jane aida Élisabeth à passer en revue l'ensemble des chansons qu'elle connaissait afin de choisir non seulement la plus originale, mais également celle qui aurait le plus de chance de mettre sa voix en valeur. Elles cherchèrent également deux autres pièces afin que la jeune chanteuse ne fût pas prise au dépourvu, s'il advenait que les juges lui demandassent de présenter une autre chanson.
Connaissant les styles que sa sœur cadette maîtrisait le mieux, Jane lui suggéra de présenter la chanson de la comédie musicale Les Misérables : «I dreamed a dream». Cet air très émouvant, correspond à l'instant où Fantine raconte comment elle s'est laissé séduire par un aventurier. De son côté, comme seconde chanson, Élisabeth sélectionna sa chanson préférée de la comédie musicale Jésus Christ Superstar : «Superstar».
Deux heures plus tard, Élisabeth et Jane faisaient la queue derrière plusieurs centaines d'aspirants chanteurs qui caressaient tous le même rêve : devenir le ou la prochaine «American Idol». Lorsque quarante-cinq minutes plus tard, elles purent enfin entrer dans la salle, on leur remit un numéro et on leur suggéra de revenir dans une heure afin de ne pas avoir à attendre trop longtemps. Levant les yeux vers le panneau lumineux que lui désignait l'homme chargé de l'inscription officielle, Élisabeth découvrit que celui-ci affichait le numéro 1908 alors que le sien était une centaine plus loin.
-2008? Ton numéro c'est vraiment 2008?
-Oui.
-L'année 2008. Ce n'est pas l'année où ton ami Marc a essayé de t'embrasser avec la langue à ton bal de graduation?
-Oh, Jane, pourquoi tu parles de ça?
-Ce nombre pourrait te porter malheur non? Blagua-t-elle pour détendre l'atmosphère.
-Jane! S'insurgea Élisabeth qui commençait à avoir la bouche sèche et les jambes molles.
-Tu peux toujours changer d'idée, tu sais?
-À t'entendre, je pourrais presque croire que tu ne crois pas à mon talent.
-Je veux seulement t'éviter d'être humiliée. Les juges sont rarement capables de reconnaître le vrai talent lorsqu'ils le voient.
-Oui, sans doute. Mais si je n'essaie pas, si je n'y vais pas, je vais m'en vouloir toute ma vie. Jane, j'en ai assez de travailler comme barmaid chanteuse dans un bar à la mode. Et surtout, je veux réaliser mes rêves avant d'avoir vingt-cinq ans.
-Je sais, je comprends. Convint-elle, comprenant qu'elle devait changer d'attitude et tout mettre en œuvre pour supporter sa sœur du mieux qu'elle le pouvait.
-Sans compter que je n'ai plus les moyens de me payer des cours de chant.
-On pourrait s'arranger si tu voulais.
-Jane Bennet! Tu as déjà mis fin tes propres études pour travailler plus tôt et aider nos parents à payer les frais scolaires de Mary, Kate et Lydia. Je veux bien croire que tu es une excellente coiffeuse, tu es même la meilleure. Et je suis certaine que tu aimes ton métier. Mais Jane, avec les notes que tu obtenais à l'école, tu aurais pu entreprendre des études plus importantes. Tu aurais pu devenir avocate ou même médecin…
-Il ne faut pas exagérer Liz.
-Tu aurais pu faire tout ça et tu le sais très bien, mais tu es d'une nature trop généreuse pour t'en plaindre.
-Mais je suis heureuse comme ça.
-Je l'sais Jane. C'est justement ce que je te dis. Mais en tout cas, moi non. Je vais aller passer cette audition que tu le veuilles ou non! Je donnerai le meilleur de moi-même et après? Eh bien après, on verra…
Après quelques minutes de silence à regarder les candidats passer les portes et en ressortir en ayant des réactions aussi diversifiées qu'eux-mêmes, Jane regarda sa montre, fronça les sourcils, puis se tourna vers Élisabeth : Tu ne travailles pas ce soir? S'inquiéta-t-elle.
-Oui, je commence à six heures.
-Ouf! Heureusement que tu vas passer bientôt.
-Change de sujet, s'il te plait. La pria Élisabeth pour éviter de succomber à la panique.
-J'arriverai au bar vers 19h00 heures, comme prévu! Juste avant ton numéro.
-À ce rythme là, je vais finir par être obligée de demander qu'on te donne le cachet de Collins.
-Liz, tu sais bien que je le fais pour toi. Pas pour lui en tout cas.
-Je sais. J'ai tellement de chance que tu sois aussi disponible.
-Je t'en prie! Si tu réussis cette première étape, qu'est-ce qui va arriver après?
-Si je reviens de la salle avec un carton jaune, ça voudra dire que j'aurai été sélectionnée pour aller passer cinq jours à Hollywood. C'est là-bas que se déroulera la deuxième étape. C'est au terme de ces cinq longues journées que seront choisis ceux et celles qui passeront à la télévision et donc à la troisième étape. En général, ils essaient de former un groupe de 24 chanteurs : 12 gars et 12 filles. Toutefois, années après années, ils font des changements…
-J'ai vraiment peur pour toi. Comprends-moi bien, j'ai confiance en toi. Mais tu sais comme moi à quel point le niveau est élevé, très élevé.
Une heure plus tard, Élisabeth et Jane revinrent vers la salle. Elles eurent beaucoup de difficulté à se trouver une place pour s'asseoir puisqu'il y avait des gens partout. Les uns étaient en larmes, les autres chantaient tout bas dans un coin alors que certains semblaient tellement anxieux que c'était à se demander comment ils allaient faire pour performer.
Quelques minutes après son retour, Élisabeth avait vu entrer une dizaine de personnes dans la salle d'audition sans qu'aucune n'en fût ressortie avec le fameux carton jaune. Elle fut d'autant plus étonnée qu'elle connaissait le talent de plusieurs candidats et qu'à cet effet, elle s'était attendue à ce que les plus talentueux eussent eu réussi la première étape.
Lorsque le panneau lumineux imprima le numéro 2000, Élisabeth commença à ressentir les effets du trac comme avant chacune de ses prestations sur scène. Au moment où le candidat 2007 s'engagea dans la salle, elle se leva, prit un grande bouffée d'air et s'approcha de l'animateur. Elle avait beau savoir qu'elle aurait à lui parler avant d'entrer dans la salle et que depuis son inscription, il possédait déjà certaines informations la concernant, Élisabeth attendit la dernière minute pour l'aborder. Lorsqu'il se tourna vers elle, il la dévisagea avec scepticisme, jeta un œil sur ses notes puis se décida à l'interroger : Quel âge avez-vous mademoiselle Bennet?
-J'ai 22 ans. C'est écrit noir sur blanc sur votre feuille, non ?
-Oui, bien entendu, mais c'est que vous avez l'air beaucoup plus jeune…
-Vous me flattez.
-Êtes-vous nerveuse?
-J'ai le trac! Qui ne l'a pas avant de franchir cette porte?
La porte s'ouvrit derrière eux pour laisser sortir le jeune homme précédent. Celui-ci passa tout près de l'animateur, leva sa main gauche et esquissa un geste bien connu de tous (impliquant un majeur) au moment où le caméraman tournait son objectif vers lui.
-Tu perds ton temps. Ils sont tous fous. Confia-t-il à Élisabeth avant de prendre la poudre d'escampette.
-Est-ce qu'ils ont accepté quelqu'un depuis ce matin? S'enquit Élisabeth juste avant d'avancer vers la porte.
-Trois, seulement trois. Pour ma part, c'est la première fois que je vois ça. Répondit Nyeem, l'animateur vedette de l'émission.
La lumière indiquant que les juges étaient prêts à recevoir le prochain candidat se mit à clignoter. Nyeem ouvrit la porte et invita Élisabeth à entrer. Pendant qu'elle avançait vers les trois personnes qui l'attendaient bien assises derrière une table, son cœur battait si fort que la jeune chanteuse fut presque convaincue que les juges pouvaient l'entendre.
-Veuillez décliner votre nom, votre âge et le titre de la chanson que vous allez interpréter à la caméra. Lui demanda Charles Bingley d'un ton parfaitement neutre.
-Je me nomme Élisabeth Bennet, j'ai 22 ans et je vais vous interpréter une chanson tirée de la comédie musicale les Misérables.
-Allez-y quand vous êtes prête. Nous vous écoutons. Renchérit celle qui se nommait Caroline Kingsburry.
Élisabeth se concentra sur sa respiration, retint son souffle quelques secondes et commença à se mettre dans la peau de Fantine. Elle prit également le temps de penser à son avenir qu'elle souhaitait pouvoir prendre en charge toute seule, faute d'avoir les moyens financiers de se payer des cours de chant, espérant que la frustration et la rage que ces pensées faisaient naître en elle pourraient nourrir son interprétation de la chanson «I dreamed a dream». Elle savait aussi qu'à tout moment, l'un des juges pouvait lui demander de s'arrêter. Au bout de deux couplets, elle commença à paniquer puisqu'en général, lorsque les juges laissaient un candidat chanter aussi longtemps, c'était parce qu'ils riaient tant qu'ils se retrouvaient incapables de la stopper. Élisabeth éprouva dont un immense soulagement, lorsqu'elle entendit Caroline l'interpeller : Merci mademoiselle Bennet. Bien, très bien même. J'ai vraiment aimé ça. Charles, tu en penses quoi? S'enquit-elle en se tournant vers son voisin de gauche.
-Enfin une candidate intéressante. Votre voix est forte, bien placée. Quel âge avez-vous?
-J'ai 22 ans. Répondit la jeune femme tout en jetant un œil sur le troisième juge dont les yeux étaient toujours rivés sur la fiche d'inscription qu'il tenait entre ses mains.
-On vous en donnerait 18. S'exclama Caroline avant de s'intéresser à son voisin : William?
-Quoi? Sursauta ce dernier. Oh! Mademoiselle Bennet? C'est ça? Bien en général. Sauf pour le choix de chanson bien entendu. Un rictus désapprobateur déforma sa bouche pendant quelques secondes. Je ne suis pas convaincu que les comédies musicales vous conviennent parfaitement. Conclut-il.
-Pourquoi? Lui demanda alors la jeune femme.
-Vous me semblez avoir eu de la difficulté à doser l'émotion. J'avais franchement l'impression vous étiez en train de jouer votre avenir et non votre amour. Ajouta-t-il d'un ton paternaliste.
-Je comprends ce que vous voulez dire, mais… c'est quand même un peu plus «mon avenir» que je suis venue jouer ici? Commenta Élisabeth, avec un léger sourire.
-Bien répondu mademoiselle. Admit Charles Bingley avant de s'adresser à William à nouveau : Alors cher collègue, qu'est-ce que tu décides? C'est OUI ou NON pour toi?
-Je dis NON. Répondit William avec conviction.
-Pour ma part c'est un OUI. Affirma Charles avant de se tourner vers Caroline.
-Cette jeune femme a quelque chose, c'est indéniable. Alors, c'est OUI.
-Deux OUI et un NON pour Élisabeth Bennet. Bienvenue à Hollywood mademoiselle! La félicita Charles avant de lui tendre un petit carton jaune.
-Merci. Lui dit Élisabeth en allant prendre le carton dans sa main.
Lorsqu'elle ouvrit la porte pour revenir dans la salle d'attente, Nyeem la questionna du regard. En réponse à son interrogation muette et pour surprendre sa sœur qui s'était approchée dès qu'elle l'avait vue réapparaître, Élisabeth leva son carton jaune et l'utilisa pour se cacher le visage. Plusieurs cris s'élevèrent dans la salle. L'animateur s'approcha avec le micro pour lui demander d'expliquer comment s'était passée son audition. Élisabeth lui résuma brièvement sa prestation, consciente de la caméra braquée sur elle. Dès que ce fut possible, Jane lui fit une accolade et l'entraîna vers la sortie.
Conformément à l'accord préalable passé avec son aînée, Élisabeth se résigna à appeler chez elle pour prévenir le reste de la famille. Ses parents furent très heureux pour leur fille, mais la prévinrent qu'ils souhaitaient une bonne conversation plus tard, pour comprendre toutes les implications de cette démarche qui leur semblait tout de même un peu risquée. Jane quitta Élisabeth à quelques pas de là, après avoir marché avec elle jusqu'au bar où elle travaillait depuis un an. Fidèle à son habitude, Élisabeth entra par l'arrière et s'enferma dans la salle de bain pour se changer.
L'uniforme de ce bar chantant à la mode était un «tee-shirt» noir moulant, une jupe de cuir de la même couleur s'arrêtant mi-cuisses, éclairée d'un minuscule tablier blanc. Un bonnet assez mignon complétait le tout. Le patron, un homme très strict pour la tenue, insistait également pour que ses «barmaids» fussent outrageusement maquillées. Une fois changée, Élisabeth rejoignit sa collègue et amie Charlotte qui s'empressa de lui demander des nouvelles de son audition. Lorsqu'Élisabeth lui présenta le carton jaune qu'elle avait apporté avec elle, Charlotte poussa un cri strident et la serra dans ses bras. Tandis qu'elles s'entraidaient pour finaliser leur maquillage respectif, Élisabeth lui fit part de ses impressions sur les juges.
-William Darcy a vraiment voté contre toi? S'insurgea Charlotte.
-Ouais, il n'était pas satisfait de mon interprétation.
-Pfff! Il n'aime jamais rien.
Une fois satisfaites des couleurs qu'elles venaient d'appliquer sur leurs paupières, les deux jeunes femmes se rendirent au comptoir pour aider leurs deux collègues de la journée à regarnir le bar pour la soirée. Immédiatement, les deux jeunes filles devinèrent que la soirée serait mouvementée. Il y avait déjà une foule impressionnante et les autres employés leur firent savoir que la journée n'avait pas été de tout repos.
-Tu crois qu'il y a un lien avec les auditions qui se tiennent tout près? S'informa Charlotte avant d'aider Danielle à détacher son tablier.
-Probablement. En tout cas, les clients sont très impatients.
Comme pour corroborer les paroles de leur collègue Danielle, des hurlements provenant de l'entrée du bar firent se retourner d'un bloc presque tous les clients. Élisabeth préféra jeter un œil dans le miroir derrière le bar, s'attendant à voir une vedette ou une célébrité. Il faut dire que l'endroit était si bien situé qu'il n'était pas rare que des gens connus vinssent y prendre un verre entre deux déplacements. Charlotte, qui était mieux placée qu'elle pour détailler les nouveaux arrivants, lui asséna un coup de coude et lui fit signe de regarder vers sa gauche.
Élisabeth se pencha pour mieux distinguer les nouveaux venus et rougit instantanément. Les trois juges et l'animateur vedette de l'émission «American Idol» venaient tout juste d'entrer dans le bar. La jeune femme retrouva un semblant de calme en prenant conscience qu'elle n'aurait pas à les servir puisqu'elle était en avance sur son horaire. De plus, son apparence était maintenant si différente de celle de l'après-midi qu'elle se doutait bien qu'il y avait peu de chance que l'un d'eux la reconnût. Les quatre nouveaux arrivants se présentèrent directement au bar pour commander. Élisabeth entendit Charles commander une bière pression, Caroline un verre de vin blanc, Nyeem un gin tonic tandis que William demanda un Rhum & coke. Comme elle se trouvait juste devant la bouteille de Rhum, Élisabeth la passa machinalement au barman à qui William s'était adressé.
-Je comprends pourquoi on nous a dit qu'il fallait venir voir cet endroit. Entendit-elle Charles affirmer.
-Il ressemble un peu au bar où nous sommes allés dans la ville de Dallas, tu ne trouves pas? Lui demanda William à son tour.
-Un petit peu. Mais seulement le décor. Répliqua Caroline en venant s'installer entre les deux juges pour recevoir son verre.
-La tenue des serveuses est intéressante! Admit Charles en admirant la silhouette de Charlotte pendant qu'elle plaçait des bouteilles sur les tablettes du haut.
-En tout cas, heureusement qu'il ne nous reste qu'une ville à faire. Parce que moi, mes oreilles sont saturées.
-Tout sera fini après Philadelphie William. L'encouragea Nyeem.
-Seulement 12 cartons jaunes ici à Boston. C'est du jamais vu. Je me trompe ou c'est la première fois qu'on en sélectionne si peu? Les questionna Caroline.
-C'est étonnant en effet. concéda Charles en prenant une gorgée de bière.
-On devient peut être de plus en plus difficile… Suggéra Caroline.
-Honnêtement, j'ai trouvé que nos choix d'aujourd'hui, n'était pas d'un calibre aussi élevé que celui des autres régions. Trancha William après avoir avalé une première gorgée de son verre.
-Ça dépend de qui tu parles? Rétorqua Charles en se tournant vers lui.
-Ouais parce que les sept gars étaient bons. Sauf le premier, le tout petit avec la voix grave. J'avoue que j'ai eu pitié de lui… un peu. Confia Caroline aux trois autres.
-Tu n'as pas aimé les filles? Lui demanda alors Charles curieux.
-Pas toutes.
-Pourtant, tu as voté pour chacune d'elles. Rétorqua Charles surpris.
-Si je fais le compte, sur les 12 cartons jaunes remis, il n'y a que 6 candidats seulement pour lesquels nous avons voté positivement tous les trois? Demanda William à ses deux collègues.
-Oui. Lui répondit Caroline.
-Quand je pense que nous avons entendu 36 fois la chanson «Taking Chances». Déplora Charles en prenant une autre gorgée de bière.
-J'aime encore moins quand on entend sans arrêt les mêmes extraits de comédies musicales. Rétorqua William sans remarquer qu'Élisabeth s'était raidie derrière lui.
-Ah! Moi je garde un bon souvenir de mademoiselle Bennet. Celle qui a chanté «On my own» avec beaucoup d'émotion. reconnut Caroline.
-C'est vrai qu'elle avait une très belle voix, avec beaucoup de maturité. Renchérit Charles.
-«I Dreamed a Dream»! Elle a chanté «I Dreamed a Dream», pas «On My Own». Rectifia William avec impatience.
-Tu vois, tu l'as remarqué toi aussi. Le taquina Charles.
-Charles, les autres filles étaient carrément mauvaises. Ce n'est pas difficile de se distinguer après ça. Vous vous êtes laissé prendre d'ailleurs : selon moi, mademoiselle Bennet en faisait trop. Sans compter que... côté apparence? Elle n'a fait aucun effort vestimentaire. Rien pour se mettre en valeur.
-Le bon goût ça se développe William. Tu es trop sévère. Le sermonna Caroline.
-On ne juge pas un chanteur sur son apparence, voyons. Plaida Charles.
-On cherche une star. Vous oubliez que l'apparence compte beaucoup chez une idole. Termina William en portant à nouveau son verre à sa bouche.
Au moment où William abaissa son bras, il remarqua pour la première fois les deux serveuses qui ricanaient dans le coin droit du bar. Le barman lui réclamant son argent au même instant, il se concentra sur son portefeuille et sur la transaction à effectuer. Tout en posant un billet de 10$ devant le barman impatient, il constata que les deux jeunes filles s'étaient écartées l'une de l'autre, mais qu'elles continuaient à s'esclaffer chacune de leur côté. Déterminé à leur faire savoir qu'il n'appréciait pas leur attitude, il se tourna tout d'abord vers celle qui était à sa gauche. Il assista alors à une relève de personnel impliquant les deux ricaneuses. Tandis qu'elles attachaient les liens du tablier que leurs collègues venaient de leur passer, William eut tout le loisir de les détailler. La première était d'une beauté ordinaire et n'aurait certainement pas pu être engagée sans son épais maquillage. La deuxième par contre était vraiment très belle. En la regardant attentivement, William constata que sa beauté ne devait rien à ses vêtements, ni même à son maquillage qui était aussi prononcé que celui de sa collègue. Lorsqu'il eut terminé son examen, il réalisa qu'elle le dévisageait tout autant, sans sourciller. Habitué à susciter l'admiration, William soutint son regard jusqu'à qu'une légère secousse sur son bras lui fît renverser une partie de son verre. Se tournant vers Charles pour le réprimander, il constata que ses trois collègues, immobiles et muets, ne quittaient pas des yeux la même jeune fille que lui. Ayant compris qu'il se passait quelque chose d'anormal, William s'intéressa de nouveau à la jeune femme tandis qu'elle nettoyait le comptoir et le dessous du verre qu'il venait de renverser. La seconde serveuse recommença à rire aux éclats. Soudain, une voix d'homme hystérique interpella celle que tous dévisageaient encore et ce fut en entendant son nom qu'il la reconnut.
-Élisabeth Bennet, il arrive mon verre de bière?
-Brune, rousse ou blonde ce soir, Collins?
-Aussi brune que toi, ma chérie. Rétorqua celui qui n'en était certainement pas qu'à sa première consommation.
Ne perdant rien de cet échange entre la barmaid et son client, William comprit qu'aucun d'entre eux ne devait rester au bar. Cherchant autour de lui une table qui serait libre, William constata qu'il n'y en avait qu'une, très près de la scène. Il se leva, marcha jusqu'à la table en question et fit signe aux trois autres de venir le rejoindre. Le dénommé Collins en profita pour prendre sa place et s'installer au bar, juste devant la jeune candidate démasquée, accompagné de deux individus qui n'étaient déjà plus en état de conduire.
-Collins, tu sembles avoir oublié que dans quelques minutes, tu dois… Commença Élisabeth.
-Pas ce soir. Appelle ta sœur! La coupa Collins d'une voix pâteuse et incertaine.
-Elle n'est pas payée et c'est ton travail.
-Charlotte, donne-moi une bière! Hurla-t-il en direction de l'autre barmaid.
-Tu me le paieras Collins! Le menaça Élisabeth en déposant une bière pression devant lui. Je te jure que je vais en parler à Thomas, dès ce soir.
-Si tu fais cela, mes copains et moi, on va s'occuper de toi! Répliqua Collins en se levant.
-Liz, laisse-le faire, de toute façon ta sœur vient d'arriver.
Pendant que Jane venait retrouver Élisabeth derrière le bar, Charlotte en profita pour s'esquiver et nettoyer la table où les quatre vedettes venaient de s'asseoir. Une fois Charlotte partie, Caroline regarda en direction du bar, cherchant Élisabeth des yeux.
-Nous ne pouvions pas savoir. Confia-t-elle aux trois hommes qui étaient assis avec elle.
-Elle aurait dû se manifester dès qu'elle nous a reconnus. Se plaignit William.
-Personnellement, je ne l'ai pas reconnue du tout, elle est très différente de cet après-midi. Se justifia Charles.
-Croyez-vous qu'elle va chanter ce soir? Demanda Nyeem aux juges.
-On est dans un bar chantant…
-J'aimerais bien l'entendre à nouveau, moi. Se prononça Charles.
-Moi aussi. Je la trouve très séduisante habillée comme ça. Renchérit Nyeem.
-Manifestement, nous ne sommes pas les seuls à le penser. Constata Charles en voyant que plusieurs hommes, assis près du bar, reluquaient la jeune serveuse-chanteuse.
Tandis que Charles détaillait attentivement la jeune femme blonde à la silhouette parfaite qui discutait avec Élisabeth Bennet, il fut le témoin privilégié de la violente altercation qui se tint entre le dénommé Collins et la jeune barmaid. La collègue d'Élisabeth revint de la salle, passa derrière Collins et s'adressa à lui pour essayer de le calmer, mais rien ne semblait fonctionner.
Plus Élisabeth s'approchait du téléphone accroché au mur derrière le comptoir, plus le dénommé Collins se faisait menaçant. Sentant que l'attention de tous les clients était désormais sur lui, Collins se mit à rire tout en continuant à contourner le comptoir. Élisabeth décrocha finalement le téléphone, lui tourna dos et commença à discuter avec son interlocuteur. Collins serra les poings, continua à avancer et interpella Élisabeth en hurlant. Ses deux amis tentèrent de le retenir, mais arrivèrent à peine à le ralentir. Écourtant sa conversation, Élisabeth se retourna pour surveiller la progression de Collins.
La scène qui suivit aurait pu se produire au ralenti tant elle fut intéressante. Collins se dégagea de la prise peu contraignante de ses deux copains, progressa rapidement le long du bar et allongea les bras pour essayer d'agripper la fille. Celle-ci fut plus rapide, recula juste assez pour ramasser le boyau distributeur de bière pression et arrosa son assaillant d'un long jet de bière froide. Quelques secondes plus tard, l'hurluberlu perdit l'équilibre et se retrouva face contre terre, baignant dans une mare impressionnante de liquide mousseux.
Sans attendre une seconde de plus, la jeune femme ordonna aux deux acolytes de son agresseur de le transporter hors du bar. Pendant qu'ils s'exécutaient, la belle blonde qui était entrée un peu plus tôt et qui s'était écartée du bar au début de l'incident, se rapprocha en contournant la flaque qui avait cessé de croître afin de prêter main forte à sa sœur.
Une minute plus tard, le patron de l'établissement émergea de derrière le bar, prit la mesure de ce qui s'était passé et grimaça. Constatant que tout le monde regardait dans sa direction, il reprit contenance et escorta la barmaid responsable de l'incident vers l'arrière afin qu'elle lui expliquât l'incident. Pendant ce temps, le plus naturellement du monde, Jane se rendit derrière le comptoir, enfila un tablier et commença à aider la seconde barmaid à nettoyer les dégâts. Quelques minutes plus tard, conformément aux directives de l'établissement, Charlotte et Jane circulèrent parmi les clients afin de leur offrir un verre de bière pression en précisant qu'il s'agissait d'une gracieuseté du patron. Lorsqu'elle arriva devant la table où étaient installés les quatre vedettes de l'émission «American Idol», elle se renfrogna et attendit de savoir s'ils avaient l'intention de prendre une seconde consommation avant de leur servir un verre.
Ce furent Nyeem et Charles qui prirent la décision de rester, au grand désarroi de William qui aurait franchement préféré partir avant le début du spectacle. Jane termina son service auprès d'eux, tandis que la foule se mettait à s'agiter lentement, devinant aux mouvements qu'ils percevaient derrière l'épais rideau que les musiciens étaient en train de se mettre en place.
Une dizaine de minutes plus tard, le public était passé d'une agitation paisible à une excitation contagieuse. Lorsque le rideau commença à s'écarter, la foule qui entourait les juges se mit à émettre des sifflements stridents et à scander : Lizzie, Lizzie, on veut Lizzie!
-Avec un nom pareil, c'est sûrement une effeuilleuse. Gloussa Caroline en regardant vers la scène.
-Mais non, on n'est pas dans ce genre d'établissement. Rétorqua Charles à celle-ci.
Un coup léger heurtant son épaule força William à se retourner. Découvrant la belle blonde de toute à l'heure, William fronça les sourcils et remarqua qu'elle lui faisait signe de la suivre.
Dès qu'ils furent assez loin de la scène, William lui demanda : Qu'est-ce qui se passe?
-Vous êtes bien William Darcy? Lui demanda Jane pour la forme puisqu'elle l'avait reconnu dès son entrée.
-Oui. Répondit-il avec impatience croyant qu'elle voulait simplement obtenir son autographe.
-Je suis désolée de venir vous déranger comme ça, mais on vous demande au téléphone.
-Oh! Répondit-il en changeant totalement d'attitude.
-Suivez-moi, le téléphone est dans le couloir, derrière le bar.
Dès que la jeune femme arriva devant l'appareil, William saisit le combiné qu'elle lui tendit et répondit à son interlocuteur. Il n'avait laissé les coordonnées du bar qu'à sa sœur, compte tenu que la batterie de son cellulaire était morte et qu'il tenait à ce qu'elle puisse le joindre n'importe où en cas de besoin. Pendant qu'il écoutait attentivement ce qu'elle avait à lui confier, il assista également à une scène désagréable entre le patron de l'établissement et Élisabeth Bennet.
-Tu dois payer pour la bière que tu as gaspillée. De même que pour les frais occasionnés par la tournée générale que j'ai dû offrir aux clients pour qu'ils oublient l'incident. Lui rappela Thomas.
-C'est tellement injuste! Il allait me sauter dessus! S'insurgea Élisabeth.
-Tu connais les règles de mon établissement, celles-ci ne sont pas négociables. Lui intima-t-il pour finir.
-Collins n'a eu que ce qu'il méritait. Il m'a insultée! Se défendit Élisabeth avec ferveur.
-Tu l'as provoqué! Tu le fais toujours! S'emporta à nouveau Thomas Myers.
-Quoi? Je voulais seulement m'assurer qu'il serait en état de jouer. Plaida la jeune femme en haussant le ton à son tour.
-Collins a toujours pris un verre avant d'aller jouer.
-Ouais! Eh bien, tu sauras que ça fait deux semaines qu'il ne joue plus! Explosa Élisabeth.
D'abord soufflé par la nouvelle, Thomas retrouva son aplomb et lui demanda : Qui a joué à sa place?
-Ma sœur Jane.
-Pourquoi me l'avoir caché?
-Collins voulait que je lui donne une chance de se reprendre. Il traverse une mauvaise passe. Admit Élisabeth à contre cœur.
-Bon! Alors tu rembourses les dégâts comme prévu et je m'occupe de régler la situation avec Collins. Trancha Thomas avant de lui tourner le dos et d'entrer dans son bureau.
La jeune femme poussa un profond soupir avant de gagner le bar.
«Comme si j'avais le choix» Dit-elle à voix haute en passantdevant William Darcy sans le voir.
Ayant terminé sa conversation téléphonique avec sa sœur depuis quelques instants, William attendit que la jeune femme eut disparu pour aller frapper à la porte derrière laquelle avait disparu le propriétaire.
Lorsque Thomas ouvrit la porte, il reconnut immédiatement son visiteur et rougit instantanément. William profita de son embarras pour lui dire : Excusez-moi, mais je n'ai pas pu m'empêcher d'entendre votre conversation avec votre employée.
-Vous avez été aspergé de bière vous aussi? S'inquiéta Thomas.
-Non, d'ailleurs ce n'est pas pour ça que je suis là. En fait, je voulais vous faire une offre. Une offre intéressante pour votre établissement et j'aimerais bien en discuter avec vous maintenant.
Beaucoup plus intéressé qu'il ne le laissa réellement transparaître, Thomas s'empressa d'offrir une chaise à son visiteur tandis que la musique annonçant le début du spectacle envahissait le couloir et que le bruit assourdissant des applaudissements des clients l'obligeait à refermer la porte de son bureau.
Pendant ce temps sur la scène, Élisabeth attendait le silence pour s'adresser à la foule.
-Bonsoir à tous et à toutes. Je suis contente de voir que vous êtes en grand nombre ce soir. Au menu de la soirée, vous verrez défiler devant vous vos barmaids chanteuses préférées: Charlotte Lucas, Janice Stevens, Anne Feras et moi même Élisabeth Bennet. J'ai le plaisir et l'honneur de briser la glace comme on dit. Toutefois, puisque je viens de perdre mon musicien. Après tout, vous l'avez tous vu se noyer dans le houblon! Vous buvez même une bière à sa santé. Par conséquent, une âme charitable viendra le remplacer et j'ai nommé ma sœur Jane Bennet.
Pendant que Jane s'installait au clavier, Élisabeth présenta les deux pièces qu'elle allait chanter pour l'occasion.
-Ce soir, je vais vous offrir deux nouvelles compositions. Voici la première qui s'intitule :
Mauvais départ
Dring, le réveil sonne, une nouvelle journée commence
Et comme tous les matins, je n'me sens pas très bien
Il est temps d'me lever et partir travailler
La vie appartient, à ce qu'on dit, au plus malin
Mon bus est en retard, quand il est là
J'y trouve des gens bizarres, un nouveau à la barre
J'me retrouve plantée, d'vant des bureaux fermés
Oh mince c'est samedi, j'aurais pu rester au lit
Ce début de journée est un mauvais départ
C'est plus que sûr : ce soir, je finirai au bar !
Serveur, encore un verre
Cette nuit, j'veux avoir la tête à l'envers
Serveur, sers-moi une bière
Que celle-ci me porte jusqu'au sommet de la Terre
Qu'elle me fasse oublier enfin toutes mes galères
Oh ! Espérer que demain soit meilleur qu'hier
C'soir voici ma devise, chanter, danser et boire
Alors levez vos verres à ma santé ce soir !
Avant de retourner, ouais, à la case départ
Shopping pour pouvoir être, la sensation du bar
À peine ai-je avancé, la femme du boulanger
Je crois, qui porte en son sein, l'espoir de demain
Et puis ce pauvre chien, semblant être l'maître du sien
C'te bonne femme distinguée, que j'aimerais déridée
Mon ex, sa nouvelle bombe, il ne faut pas qu'je tombe
Je voulais être discrète, boum, j'attire toutes vos têtes
William regagna la salle alors qu'Élisabeth attaquait la seconde partie de sa chanson. La foule étant vraiment compacte, le jeune homme ne fut pas en mesure de se frayer un chemin pour retourner à sa place, ni même capable de s'avancer suffisamment pour apercevoir la chanteuse.
«Ça c'est une belle voix!» Pensa-t-il en essayant de voir la jeune femme à travers les silhouettes dressées devant lui.
Cette journée quel bazar
C'est plus que sûr : ce soir, je finirai au bar !
Serveur, encore un verre
Cette nuit, j'veux avoir la tête à l'envers
Serveur, sers-moi une bière
Que celle-ci me porte jusqu'au sommet de la Terre
Qu'elle me fasse oublier enfin toutes mes galères
Oh ! Espérer que demain soit meilleur qu'hier
C'soir voici ma devise, chanter, danser et boire
Alors levez vos verres à ma santé ce soir !
Tequila, Margarita... je ne les compte plus
Danse, danse... danse après danse, je mets l'ambiance
Tape, tape... tape dans tes mains, y'a pas de lendemains
Debout, laisse-toi porter, par cette chanson osée
Serveur, encore un verre
Cette nuit, j'veux avoir la tête à l'envers
Serveur, encore un verre
Cette nuit, j'veux avoir la tête à l'envers
Serveur, sers-moi une bière
Que celle-ci me porte jusqu'au sommet de la Terre
Qu'elle me fasse oublier enfin toutes mes galères
Oh ! Espérer que demain soit meilleur qu'hier
C'soir voici ma devise, chanter, danser et boire
Alors levez vos verres à ma santé ce soir !
Les paroles du refrain réussirent à le faire sourire, l'intriguant assez pour qu'il s'interrogeât sur son auteur. Lorsque la foule commença à reprendre le refrain avec la chanteuse, William fut certain que l'interprète avait beaucoup de métier puisqu'elle savait parfaitement ce qu'il fallait faire pour charmer son public.
«Si seulement les aspirants chanteurs pouvaient être aussi bons que cela. Mon rôle de juge serait tellement plus satisfaisant.» Pensa-t-il pendant qu'un intéressant silence s'installait et régnait assez longtemps pour que l'artiste comprît qu'elle avait réussi son effet. Cette chanson terminée, les spectateurs s'écartèrent légèrement lui permettant ainsi de marcher vers la table que ses collègues occupaient toujours. Une fois assis, il leva les yeux vers la scène et resta figé par la surprise.
«Élisabeth Bennet!» Entendit-il résonner dans sa tête. Se tournant vers Caroline, il vérifia tout de même tant il était ébloui par la beauté de la jeune femme alors que son visage était imprégné de lumière : C'est elle qui chantait à l'instant?
-Oui! Elle est tellement bonne.
N'en croyant pas davantage ses oreilles que ses yeux, William ne put que se joindre aux autres spectateurs et la suivre du regard tandis qu'elle revenait vers l'avant scène pour se percher sur un petit tabouret. Après avoir jeté un dernier coup d'œil vers sa sœur qui était au clavier, Élisabeth tourna la tête vers les spectateurs, avec un éblouissant sourire sur les lèvres.
-Ma seconde chanson est aussi une nouvelle composition…
-On veut entendre «Today!» Protesta un habitué, assis dans la première rangée.
-Désolé Benny! Not «Today!» Répliqua-t-elle faisant naître un rire joyeux dans la salle. Je n'ai droit qu'à deux chansons et comme je viens d'en mettre deux au monde cette semaine, vous comprendrez que j'ai vraiment hâte de vous les présenter. Si vous n'aimez pas la seconde, n'applaudissez pas et je comprendrai.
Subjugué par son charisme et sa beauté, William s'enfonça confortablement sur sa chaise et attendit le début de la chanson. Un étroit faisceau lumineux l'enveloppait et tous les spectateurs étaient suspendus à ses lèvres. Lorsque sa voix s'éleva, basse et rauque, William sentit un frisson lui traverser le corps. Les paroles, vraiment bien choisies, racontaient l'histoire d'une jeune femme sans ressources qui rencontra un jour un homme ayant confiance en son talent. Celui-ci la modela et lui apprit tout ce qu'il savait. Lorsqu'elle fut enfin suffisamment sûre d'elle, il la quitta. Une fois seule, elle s'éteignit et se retrouva rapidement sans ressource à nouveau. La chanson se terminait sur la même voix basse et rauque d'Élisabeth que William appréciait réellement. Lorsque la musique se tut, les spectateurs se levèrent d'un bloc et l'applaudirent à tout rompre. William n'en revenait pas. Son talent était si brut, si unique qu'il frissonna à l'idée que le concours, au lieu de lui offrir un enrichissement, puisse la dénaturer. Combien de fois n'avait-il pas vu des artistes dotés d'un potentiel extraordinaire, craquer sous la pression et pire encore, subir de mauvaises influences. Certains s'étaient mis à boire, d'autres à prendre de la drogue, sans compter ceux et celles qui en étaient venus à confondre «admiration» et «amour» au point qu'ils s'étaient mis à coucher à droite et à gauche.
Pendant que les applaudissements fusaient, interminables, William en vint même à souhaiter que la jeune femme commît tellement d'erreur durant la première étape du concours qu'elle serait évincée de la compétition.
-Quel moment inoubliable! S'exclama Charles tout en gardant les yeux rivés sur la scène où la belle Jane alla retrouver sa sœur pour la serrer dans ses bras.
-William s'en mordra les doigts de ne pas avoir voté pour elle. confia Caroline à Charles et à Nyeem, ses voisins de gauche.
-Au contraire. Protesta William avec conviction.
Les trois autres le regardèrent comme s'il était fou, mais n'eurent pas le temps de lui demander de s'expliquer puisque la seconde chanteuse commençait son tour de chant. Toutes les prestations qui suivirent ne réussirent pas à atteindre le même niveau d'excellence. Aucune serveuse-chanteuse n'arriva à la cheville d'Élisabeth.
Dès que ce fut à nouveau possible, William proposa aux trois autres de regagner leur l'hôtel. Caroline accepta de rentrer avec lui alors que Nyeem et Charles choisirent de rester encore un peu. William comprit que son collègue masculin n'avait qu'une idée en tête et que celle-ci tournait autour d'une jeune et jolie blonde : la sœur d'Élisabeth Bennet. Il soupira et offrit galamment son bras à Caroline afin de l'aider à se frayer un chemin vers la sortie. Arrivé près de la porte, il se rendit compte que la jeune femme qui intéressait tant Charles Bingley se dressait devant l'entrée. En le voyant, elle s'écarta afin de lui laisser la voie libre. Changeant soudainement d'idée, elle lui toucha le bras et lui demanda : Comment avez-vous trouvé ma sœur, ce soir?
-Excellente. Mais il n'y a pas à dire, à sa place, je laisserais tomber le concours.
-C'est quoi votre problème? Vous êtes sourd ou quoi? L'agressa-t-elle, le prenant par surprise.
-Vous prétendez le savoir mieux que moi? Enchaîna-t-il aussitôt.
-Vous n'êtes pas objectif! L'accusa-t-elle en s'écartant pour lui montrer la porte.
-Qui a le plus de chance d'être impartial, une sœur ou un juge? Riposta William.
-Ne vous en faites pas mademoiselle Bennet. C'est le public qui décide réellement, pas nous. Tempéra Caroline.
-Mademoiselle Bennet, si vous aimez votre sœur autant que vous le dites, dissuadez-la de venir à Hollywood. Lui jeta finalement William d'un ton sans réplique.
-Vous avez de la chance que nous ne soyons pas près du bar, autrement je vous aurais certainement aspergé de bière. Le menaça Jane en plaquant un sourire de convenance sur son beau visage.
-Ne vous en faites pas, il me fait souvent le même effet. Blagua Caroline juste avant de pousser son camarade dans le dos afin de s'assurer qu'il sortît une bonne fois pour toutes.
-Bonne fin de soirée mademoiselle Bennet.
Indignée et déçue, Jane se dirigea vers le bar. Elle regarda sa sœur attentivement et lui demanda de lui servir une bière. Surprise par son air choqué, Élisabeth lui prépara son verre tout en espérant avoir le temps de l'interroger.
-Je peux vous l'offrir? Lui demanda Charles qui s'était approché sans qu'elle l'eût vu.
-Non merci. Je paie toujours mes consommations moi-même.
-Et vous Élisabeth, prenez-vous quelque chose?
-Je travaille au cas où vous ne l'auriez pas remarqué. Lança celle-ci d'un ton sarcastique.
-Vous avez beaucoup de talent. La complimenta Charles en recevant sa boisson.
-J'ai vraiment hâte de voir comment vous allez vous en sortir durant le concours. Ajouta Nyeem en arrivant au bar à son tour.
-Et moi, je vous prédis qu'elle ne franchira pas la première étape. Prophétisa Jane en levant son verre de bière.
-Quoi? Réagirent Charles et Nyeem en même temps.
-William Darcy y veillera. Affirma Jane.
-Il n'est pas le seul juge. Répliqua Charles indigné.
-Durant la première phase, c'est vous trois qui décidez, non? Le public n'a pas encore son mot à dire, n'est-ce pas? Demanda Jane à Nyeem.
-C'est vrai! Admit Nyeem.
-Mais nous sommes trois juges : votre sœur a autant de chance que tous les autres candidats! Plaida Charles.
-Jane Bennet, qu'est-ce qui se passe? Allez, dis-moi ce que tu as sur le cœur? L'apostropha Élisabeth qui voulait comprendre pourquoi Jane était aussi remontée et vindicative.
-En sortant, il y a quelques minutes, William a laissé entendre que tu n'avais rien à faire dans le concours.
-Jane! Il dit toujours ça… Se moqua Élisabeth, en se mettant à rire aux éclats.
-Il n'a pas le droit de dire des choses comme cela. Se fâcha Jane en jetant un œil sur Nyeem et Charles l'un après l'autre.
-Votre sœur à raison, mademoiselle Bennet. William est souvent excessif dans ses jugements. Ceci dit, il est loin d'être le seul à décider et je vous garantis qu'il change aussi très souvent d'idée à l'égard d'un candidat.
-Rien n'est décidé à l'avance. Conclut Nyeem. Toutefois, il est vrai que l'étape de Hollywood est la plus cruelle, la plus critique. Mais si je me fie à la réaction du public ici ce soir et à ce que j'ai entendu moi-même, votre sœur a de bonnes chances de réussir cette étape.
-Qu'elle gagne ou perde m'importe peu. Avança Jane, surprenant même sa sœur.
-Eh! S'exclama Élisabeth.
-Laisse-moi finir! Gagner ou perdre n'est pas si important. Ce qu'il faut c'est qu'elle soit jugée équitablement et que son talent soit reconnu.
-Je vous comprends et je suis entièrement d'accord avec vous. Admit Charles en la dévorant des yeux.
Remarquant le manège de Charles et surtout étant familière avec la situation, Élisabeth s'éloigna du comptoir afin d'aller servir d'autres clients. Revenant vers le bar quelques instants plus tard pour aller chercher un verre de bière pression, Élisabeth constata que Jane semblait tout à fait rassurée. Chaque fois que sa sœur aînée venait dans l'établissement, elle suscitait l'admiration inconditionnelle des hommes, plusieurs s'étaient essayés à lui faire la cour et à lui payer un verre, mais aucun d'entre eux n'avait réussi. Lorsque l'animateur de l'émission quitta le bar à son tour, Charles se retrouva seul avec Jane. Élisabeth remarqua alors que sa sœur semblait s'amuser énormément en sa compagnie. Finalement, lorsque Jane mentionna qu'elle voulait rentrer, Charles lui offrit galamment de la déposer chez elle en partageant un taxi. Élisabeth fut réellement étonnée de l'entendre accepter son offre. Tous les deux vinrent la saluer avant de partir.
-Au revoir Élisabeth, j'ai bien hâte de vous revoir à Hollywood.
-Pas autant que moi.
Lorsqu'elle regagna l'appartement qu'elle partageait avec sa sœur, deux heures plus tard, Élisabeth constata que Jane n'était pas encore rentrée. Un message sur le répondeur lui apprit qu'elle était allée prendre un dernier verre à l'hôtel où Charles et les autres étaient descendus.
«Une fois n'est pas coutume.» Se dit la jeune femme avant d'entrer dans la salle de bain pour faire sa toilette.
Le lendemain matin, les quatre collègues prirent un minuscule petit déjeuner avant de se rendre à l'aéroport où un vol direct en direction de la ville Philadelphie les attendait. Arrivant à peine à garder les yeux ouverts, Charles remarqua tout de même que Caroline jetait sans cesse un œil soupçonneux vers lui alors que Nyeem - qui avait quitté le bar aussitôt après avoir compris que Charles s'intéressait à la jeune blonde - fuyait son regard. William quant à lui demeurait fidèle à lui-même, c'est-à-dire indifférent à tout sauf à son journal qu'il lisait tranquillement.
-Je ne suis pas mécontent que nous n'ayons plus qu'une ville à faire. Souffla Nyeem à l'intention de celui qui avait le plus de chance de l'approuver : William.
-Moi aussi. Soupira Charles après avoir baillé.
-Tu n'as pas l'air très en forme Charles, tu t'es couché au moins? Lui demanda William.
-Il est resté au bar. En passant William, après ton départ hier soir, on a été obligés de réparer tes dégâts. Annonça Nyeem en esquissant une moue réprobatrice.
-Quels dégâts? S'étonna William.
-Il ne s'en souvient pas? Se scandalisa Charles.
-Je peux savoir de quoi vous parlez? S'ingéra Caroline qui n'arrivait pas à suivre la conversation.
-Nous parlons de Jane Bennet. Lui expliqua Nyeem.
-Ah, la sœur d'Élisabeth. Réalisa William en hochant la tête.
-La charmante blonde qu'on a croisée à la sortie? Demanda Caroline encore incertaine.
-Ça nous a pris au moins 20 minutes à Nyeem et à moi pour la calmer. Indiqua Charles en fixant William.
-20 minutes minimum. Tu joues avec le feu William. Le gronda Nyeem.
-Il est bourré de préjugés, plutôt. Ajouta Charles.
-Lorsqu'on me demande gentiment mon opinion, je ne la dissimule pas. Se défendit William.
-Pourtant, c'est mieux quelques fois. Le conseilla Nyeem, songeur.
-Non, jamais! Après tout, si on n'est pas prêt à accepter la vérité : il ne faut pas la demander. Affirma William.
-William, il est parfois nécessaire de faire preuve de diplomatie. Argumenta Caroline.
-Je suis juge, pas diplomate. Trancha définitivement William avant de se replonger dans la lecture de son journal.
-Tu trouves réellement que cette jeune fille n'a aucun talent comme tu l'as laissé entendre à sa sœur? Se renseigna Nyeem.
-Et voilà! Qu'est-ce que je disais? S'exclama William en refermant le cahier qu'il avait commencé à parcourir. Vous êtes tous tombés dans le panneau. Je n'ai jamais dit que je trouvais que mademoiselle Bennet n'avait pas de talent.
-Mais si! Le contredit Charles.
-Mais non, j'ai lui simplement fait remarquer que je ne croyais pas que sa sœur était faite pour le concours.
-Et ça ne veut pas dire la même chose? Évidemment! Ironisa Nyeem.
-Non justement! Et si sa sœur m'avait demandé pourquoi je disais cela, j'aurais pris le temps de lui expliquer… Termina William.
-William, même moi je n'aurais pas cherché plus loin! S'exaspéra Charles.
-Mais tu l'as rassurée, Charles? Enfin, je crois… Ajouta Nyeem n'arrivant pas à dissimuler totalement le double sens que pouvait contenir sa question.
-Oui. Je crois que oui. Répondit Charles sans relever l'allusion de l'animateur.
-Tout est bien qui finit bien alors? Interrogea William.
-Je crois oui. Mais je vous en prie, parlons d'autre chose. Intima Charles qui n'avait qu'une hâte : que cette dernière journée d'audition fût derrière lui.
Sa nuit avec Jane avait été aussi inattendue que merveilleuse. Il avait bien hâte de lui reparler de vive voix et espérait qu'elle comprendrait qu'à cause de l'implication de sa sœur dans le concours, il ne serait pas vraiment capable lui faire signe pendant quelques temps.
Deux semaines plus tard, Élisabeth préparait sa valise pour son séjour à Hollywood. Elle venait juste d'appeler un taxi pour l'emmener à l'aéroport lorsqu'elle repensa à la surprise qu'elle avait éprouvée au moment où elle avait vu Nyeem arriver au bar la semaine précédente. Il était venu rendre visite à son patron Thomas pour faire suite à une entente que William Darcy aurait prise avec lui afin que la courte séquence qui devait être tournée pour la présenter en tant que candidate, fût justement filmée dans le bar où elle travaillait comme barmaid chanteuse. Le tout s'était déroulé très vite et sans qu'elle ne puisse émettre le moindre commentaire. Elle avait été interviewée et filmée en train de chanter sur scène devant les habitués ou pendant qu'elle servait les clients. Son patron avait même été amené à donner son opinion sur son talent et sur sa personnalité. Ce fut par Nyeem également qu'elle apprit ensuite que Thomas avait accepté d'effacer sa dette en bière – contractée après avoir arrosé Collins – à condition que le bar fût mentionné dans la présentation de la jeune candidate. Jane avait été aussi stupéfaite en apprenant que sa sœur devait cette intervention à William Darcy, mais puisqu'elle était toujours fâchée contre lui, elle resta sceptique quant à ses motivations profondes.
-Qui te dit que son objectif n'est pas justement que tu aies l'air d'une jeune fille facile? On ne projette pas la même image quand on est barmaid que lorsqu'on est chanteuse dans une chorale familiale. L'Américain moyen préfère la deuxième option et de loin. Appuya Jane.
-Je le déteste autant que toi sinon plus, mais je dois reconnaître que sans lui, je serais plus pauvre de $1 300! Tu admettras comme moi que ce n'est pas rien. Philosopha Élisabeth avant de franchir les portes tournantes de l'entrée de l'aéroport de Boston.
Les deux jeunes filles s'étreignirent affectueusement devant les portes coulissantes de la sécurité. Ses parents lui ayant fait leurs adieux à la maison, préférant ne pas se retrouver dans la foule, Élisabeth passa les douanes et prit place à bord de l'avion avec les autres candidats et candidates qui, comme elle, avait réussi à obtenir un carton jaune. Puisqu'elle connaissait bien deux d'entre eux, elle se dirigea vers la section où ils étaient assis.
Arrivés à Hollywood, un autobus vint les cueillir et les mener dans les bureaux de la compagnie. Là on leur demanda de regagner leur chambre en les prévenant qu'ils avaient été placés deux par deux : les filles avec les filles, les gars avec les gars. Un étage complet de l'hôtel était réservé aux garçons, un autre pour les filles et un dernier pour l'équipe technique de l'émission dont les juges et l'animateur. On leur précisa finalement qu'ils étaient tous attendus à 17h00 dans l'amphithéâtre du Rez-de-chaussée.
Lorsqu'elle pénétra dans sa chambre, Élisabeth fut étonnée de voir à quel point celle-ci était grande et luxueuse. Comme elle fut la première arrivée, elle choisit son lit et commença à ranger ses vêtements dans les deux derniers tiroirs de la commode. 30 minutes plus tard, une autre fille entra et se présenta à Élisabeth en disant qu'elle était la seule fille à avoir été retenue à Philadelphie.
-Par contre, j'en suis à ma deuxième année de participation à l'émission. L'an dernier, j'ai été éliminée ici à Hollywood. Ajouta Josie en faisant une jolie moue.
Élisabeth et elle sympathisèrent immédiatement. 10 minutes avant 17h00, elles retouchèrent leurs maquillages et se dirigèrent vers l'amphithéâtre. Lorsque Josie et Élisabeth entrèrent dans la salle, les trois juges et Nyeem étaient déjà rassemblés autour de la scène et bavardaient avec certains candidats au fur et à mesure qu'ils les voyaient entrer. Lorsque les deux jeunes filles passèrent devant ceux-ci, William Darcy se tourna vers elles et les regarda comme s'il les voyait pour la première fois. Une seconde plus tard, un grand sourire apparut sur son visage tandis qu'il s'avançait vers elles la main tendue.
-Josie Rosenberg? Philadelphie. Bienvenue mademoiselle. Vous devriez aller vous asseoir devant. Nous allons bientôt vous expliquer le déroulement de l'étape Hollywood.
-Merci, monsieur Darcy.
Lorsqu'Élisabeth le gratifia d'un sourire une seconde avant de suivre Josie, William se détourna et ne prit même pas la peine de la saluer. Dès qu'Élisabeth eut rejoint son amie, Josie lui demanda à quand remontait son audition.
-Il y a 10 jours à peine.
Sans montrer qu'elle était blessée par l'attitude méprisante de William, Élisabeth suivit Josie jusqu'à l'avant scène où la plupart des candidats et des candidates étaient déjà installés.
-Bon! Puisque tout le monde est là et parce que c'est l'heure surtout, je vais vous expliquer le déroulement de la semaine. Vous avez tous reçu une pochette verte en entrant. Je vous prie donc de l'ouvrir et de jeter un coup d'œil sur son contenu avec moi. Dans un premier temps, vous y trouverez une fiche jaune à compléter et à nous remettre avant de remonter vers vos chambres. La deuxième feuille est la plus importante, il s'agit de vos rendez-vous de travail avec le répétiteur.
Vous le rencontrez à deux reprises demain, une fois durant la matinée et une autre fois durant l'après-midi. Il vous aidera à préparer une première chanson que vous aurez à présenter demain soir à partir de 18h30. Vers 22h00, lorsque vos présentations seront terminées, les juges se retireront et formeront des trios. Vous connaîtrez les noms de vos partenaires le soir même. Vous aurez jusqu'au lendemain soir pour répéter entre vous la chanson qui vous sera imposée. Le moment venu, chaque trio viendra présenter sa chanson à tour de rôle. Encore une fois les juges devront délibérer. Le lendemain matin, à la première heure, vous apprendrez si vous êtes éliminés ou non. Ceux qui auront la chance de rester pour la 4e journée – et je vous précise à l'avance que plus de la moitié d'entre vous ne le feront pas – ceux qui resteront donc, auront à préparer une chanson de leur choix, mais sans avoir recours à un répétiteur. Vous présenterez celle-ci le soir de la quatrième journée. Une très longue délibération suivra afin que les juges choisissent les 24 candidats qui passeront à la phase 3. La dernière journée, vous serez appelés à tour de rôle et rencontrerez les juges individuellement afin d'apprendre si vous êtes classés parmi les 24 meilleurs. Bonne chance à tous et toutes.
Soudain, très nerveuse, Élisabeth jeta un œil sur sa feuille et constata qu'elle avait rendez-vous à 7h00 du matin avec le répétiteur. Dans l'après-midi par contre, son rendez-vous était fixé à 15h00. Josie, sa partenaire de chambre passerait tout de suite après elle, les deux fois. Les deux filles complétèrent leurs feuilles respectives et la remirent à Caroline qui les remercia et leur souhaita bonne chance. Comme elle s'apprêtait à quitter la salle, Élisabeth revint sur ses pas pour s'approcher de Charles Bingley qui venait tout juste de l'interpeller.
-Votre sœur vous a-t-elle accompagnée? Lui demanda-t-il sans perdre un instant.
-NON! Elle travaille, mais elle m'a demandé de vous saluer.
-Très bien. Merci Élisabeth.
-Tiens, tiens. En tout cas lui, il se souvient de toi. L'agaça Josie lorsqu'elle la rejoignit quelques secondes plus tard.
-De ma sœur tu veux dire. Il se souvient de ma sœur. Rétorqua Élisabeth sans cacher sa déception.
Tout en mangeant, les deux jeunes filles passèrent de longues minutes à se faire des suggestions de chansons qui pourraient leur convenir. Tout y passa, de la simple ballade romantique aux chansons rock les plus connues. Dans la soirée, elles rallièrent leur chambre, firent des recherches concernant une bonne vingtaine de chansons chacune et se mirent au lit après avoir appelé leurs proches à tour de rôle. À 22h00, elles dormaient profondément toutes les deux. Vers minuit, Élisabeth s'éveilla une première fois. Le bruit qui provenait du corridor était si fort qu'elle n'arrivait pas à dormir. Elle leva la tête et constata que Josie, quant à elle, était toujours endormie. Tout en enviant sa nouvelle amie, elle se leva et remercia sa sœur Jane de lui avoir fait penser à acheter des bouchons pour les oreilles. Dix minutes plus tard, elle se rendormait pour de bon. Il était 6 heures du matin lorsqu'Élisabeth ouvrit les yeux. Josie dormait toujours.
Pressée d'aller prendre son petit déjeuner afin d'être capable de bien travailler avec le répétiteur, Élisabeth se leva, retira ses bouchons et se dirigea vers la salle de bain. Avant qu'elle n'eût pénétré dans la minuscule salle de bain, Josie s'éveilla à son tour et commença à se plaindre du bruit qu'il y avait eu la nuit en précisant qu'elle avait bien l'intention de prévenir les responsables afin que les concurrents fautifs fussent punis par l'équipe, compte tenu que les rassemblements et les fêtes tardives étaient interdits. Sortant de la salle de bain, Élisabeth revint prendre ses vêtements, mais Josie la devança en lui remettant ceux qu'elle portait la veille et qu'elle avait laissés sur une chaise à côté de son lit. Lorsqu'elle ouvrit le tiroir de sa commode pour s'emparer d'autre chose, Élisabeth remarqua une feuille pliée en deux, qui traînait sur le sol comme si une personne l'avait glissée sous la porte. Se penchant pour la ramasser, elle la déplia et découvrit un message qui lui était adressée.
-C'est pour me prévenir que ma répétition est déplacée à 11h30 à cause d'un imprévu.
-Tu es certaine que tu es la seule concernée? Lui demanda Josie s'inquiétant pour sa propre répétition.
-Oui. Le mot a été écrit par Nyeem. En tout cas c'est sa signature.
-Tu en as de la chance, tu vas pouvoir réfléchir plus longtemps à ta chanson.
Puisqu'elle était déjà réveillée et fin prête pour commencer cette journée qui serait nécessairement éprouvante, Élisabeth décida de suivre son amie au moment où elle partit pour aller déjeuner. Dans la cafétéria, il y avait déjà une foule impressionnante. Une fois assise devant son bol de céréales, la faim ne vint pas. Le trac faisait déjà son œuvre. Découragée, Élisabeth repoussa son assiette d'un geste brusque et regarda Josie qui dévorait son repas avec appétit.
-Je n'ai pas faim. Se plaignit Élisabeth.
-Attend après ta séance de travail, l'appétit reviendra. La rassura Josie.
-Alors, qu'as-tu choisi : une ballade ou autre chose?
-C'est pas juste! Toi tu peux chanter tout ce que tu veux. Ton talent peut venir à bout de tout. Moi je n'ai pas vraiment le choix de choisir une ballade, c'est ce qu'il y a de plus facile pour moi.
-Josie, avec ton charme et ton expérience, tu es nécessairement capable de tirer ton épingle du jeu même en choisissant un air plus difficile.
-Ouais! Tu as raison. Après mon échec de l'an dernier, je sais quand même un peu plus ce qu'il faut faire pour gagner… et ce qu'il faut éviter à tout prix.
-Et bien fais-le… Lui conseilla Élisabeth.
-J'en ai bien l'intention. Oups. Je dois y aller maintenant. Je te raconterai comment ça s'est passé après ma répétition. Si on a le même répétiteur que l'an dernier, tu verras, c'est vraiment un as! Il est excellent.
À 11h30, lorsque la jeune fille se présenta au local de répétition, elle réalisa immédiatement qu'il n'y avait plus personne. Elle examina l'horaire qui était affiché sur la porte et constata qu'elle y était toujours inscrite pour 7h00 du matin. En l'examinant de plus près, elle découvrit une annotation faite au stylo noir juste à côté de son nom : ABSENTE.
«Comment ça, absente?» s'exclama Élisabeth, trop surprise pour bouger de là. La seule explication plausible qui lui vint fut que le répétiteur n'avait pas été prévenu du changement d'horaire. Seule cette omission pouvait expliquer qu'il ne fût pas là. Hésitante et perplexe, la jeune fille décida d'aller trouver l'auteur de la note afin de clarifier la situation. Tous les candidats devant être à la cafétéria pour le repas du midi, Élisabeth se dirigea vers le hall où les administrateurs avaient leurs bureaux. Elle chercha la porte du local de Nyeem, mais ne la découvrit pas. Elle revint vers le bureau de la réceptionniste au moment même où les trois juges sortaient de l'ascenseur. Désespérée, elle se dirigea vers Charles.
-Ah! Monsieur Bingley? Avez-vous vu Nyeem? L'interpella-t-elle sans se soucier des deux autres juges qui suivaient derrière.
-Oui, il est en rencontre avec le répétiteur au deuxième étage.
-Oh non! C'est qu'il faut absolument que je discute avec lui. déplora Élisabeth.
-Je peux peut-être vous aider? Proposa Charles.
-Oui, j'imagine que je ne perds rien à vous en parler : je n'ai pas pu répéter ce matin.
-Vous vous êtes couchée trop tard? Tenta Charles.
-Non! Répondit-elle indignée avant d'ajouter : j'ai reçu une petite note ce matin venant de Nyeem. Il me demandait d'aller pratiquer à 11h30.
-Donc elle vient tout juste de se terminer! Quel est problème alors? S'impatienta Caroline, après avoir jeté un œil sur sa montre.
-Non! Quand je me suis présentée au local à 11h30, le répétiteur était déjà parti et les portes étaient fermées.
-Puis-je voir le mot de Nyeem? Lui demanda William qui était resté silencieux depuis le début.
-Tenez, voyez pas vous-même.
-Vous avez imité sa signature, voilà ce qui est arrivé! S'exclama-t-il après avec jeté un œil méprisant sur la feuille qu'Élisabeth lui avait donnée.
-Quoi? S'indigna la jeune femme.
-Vous vous êtes levée en retard, vous n'avez pas pu vous rendre à temps pour votre rendez-vous et vous avez inventé cette histoire de rendez-vous déplacé… Démontra William comme une évidence.
-Vous n'êtes pas la première à y avoir pensé, chaque année nous avons droit à une histoire semblable… à quelques variantes près. Ajouta Caroline presque gentiment.
-Vous croyez vraiment que j'ai écrit ce mot moi-même? S'emporta Élisabeth.
-Attendez. Laissez-moi vérifier auprès de Nyeem. Lui demanda Charles en s'éloignant avec son cellulaire.
Regardant à nouveau le mot de Nyeem, William ajouta : Vous ne deviez pas savoir que les répétitions se terminent toujours à 11h00 quand vous avez rédigé cela?
Avant même qu'Élisabeth ne rétorquât autre chose, Caroline ajouta : Elle ne devait pas savoir non plus que Nyeem n'avait rien à voir avec les horaires de répétition et que nous le savons.
Élisabeth préféra se taire comprenant d'elle même qu'elle était victime d'une machination. Elle retourna son attention vers Charles espérant qu'il put obtenir la confirmation que Nyeem lui avait bien envoyé ce petit mot. Toutefois, lorsque Charles se tourna vers elle après avoir mis fin à sa conversation avec l'animateur, il lui fit un bien triste sourire.
-Nyeem n'a rien à voir avec votre mot. Il ne s'occupe pas de ces choses là, Élisabeth. Je suis désolé.
Étant prise d'un fou rire insultant pour Élisabeth, Caroline se tourna vers William qui l'entraîna plus loin. Ne pouvant plus supporter leur attitude condescendante, Élisabeth remercia brièvement Charles et s'engouffra dans l'ascenseur. Une fois dans sa chambre, elle se jeta de travers sur son lit et se défoula sur son oreiller. Élisabeth n'avait aucune difficulté à accepter qu'on eut pu vouloir lui jouer un vilain tour, mais que William, Caroline et même Charles la crussent capable d'utiliser le mensonge pour arriver à ses fins, la révoltait. La jeune femme réalisa ensuite qu'elle ignorait totalement l'impact d'une telle absence sur ses chances de réussir cette première étape Hollywoodienne.
...À suivre...
Alors?
Des commentaires?
À vous d'écrire maintenant...
Miriamme
