Le requiem de L

Light…

Sombre idiot.

Alors tu l'as fait, sans la moindre hésitation.

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Tu n'es vraiment qu'un abruti ! Alors qu'on aurait pu être heureux ensemble…

Pourquoi tu m'as tué ? Hein ? Dis ? Tu avais une raison ?

Oh, bien sûr, tu avais peur que je te démasque. Tu t'es cru plus intelligent que moi. Mais en réalité, tu n'as rien compris. Tu es une taupe, aveugle et sourde. Je n'ai pourtant cessé de te le répéter : tu es Kira et je le savais. Mais je n'ai rien dit, rien montré d'officiel. J'ai fait semblant de te poursuivre sans jamais conclure mon enquête alors que je disposais de toutes les preuves. J'ai joué la comédie et tu as joué avec moi, imperturbable, tirant des analyses risquées au point de t'inclure toi-même dans leurs champs de probabilité, et pourtant en gardant une permanente marge de sécurité. Tu es un très bon acteur, tu sais ?

Et moi, comme un naïf, moi j'ai bêtement cru en toi, j'ai placé ma vie entre tes mains, et tu me l'as ôtée sans attendre. De plus tu as utilisé le moyen le plus vil : tu as sacrifié Rem. Une gentille shinigami, qui n'y était pour rien dans notre histoire. Ou plutôt, dans mon histoire imaginaire, dans mes fantasmes délurés, dans mes chimères où j'ai eu le malheur de me perdre. Je t'en veux. Je te déteste. Je t'en veux tellement…

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Pourquoi tu n'as rien vu ? Avec ta perspicacité hors du commun, j'étais pourtant sûr que tu ne tarderais à me percer à jour… Es-tu à ce point insensible, pour ne rien comprendre aux sentiments des autres ?

Regarde Misa. Maintenant encore, tu te sers d'elle comme d'une poupée entièrement dévouée à ta cause. Tu n'hésiteras pas à t'en débarrasser à la moindre anicroche, n'est-ce pas ? Si elle devient gênante, tu l'élimineras toi-même. Car tu es ainsi : droit et affûté telle la lame d'une épée. Tu es une arme qui a tranché le fil de nombreuses vies, et pourtant tu brilles, tu étincelles de mille feux. On dirait que le sang qui te couvre des pieds à la tête rehausse encore ta beauté naturelle. Tu es terrible, oui, vraiment… mais tu es beau. Tu es fascinant.

Dis-moi, où était le problème ? Mes signaux manquaient-ils de clarté ? Pourtant, tu es intelligent, tu remarques tout… Mes regards en coin, mes gestes évocateurs, mes sourires discrets, même mon obsession pour Kira, les as-tu tous manqués ?

J'ai tout fait pour te garder à mes côtés… Je t'ai emprisonné un mois, durant lequel je n'ai cessé d'observer les lignes délicates de ton corps ; je t'ai enchaîné à mon poignet, pour vivre vingt-quatre heures sur vingt-quatre près de toi ; pour finir, et malgré les soupçons que je nourrissais publiquement à ton égard, je t'ai fait entrer dans la cellule d'enquête, tout en sachant pertinemment que cette position facilitait tes projets.

Tu vois, le sort de centaines de personnes, je l'ai oublié en pensant à toi. Pour vivre avec toi, j'ai fait tout ça, j'ai renié ma propre nature ; tout ce que j'étais, je l'ai laissé pour toi.

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Et tu m'as tué.

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Nous étions si proches, et tu m'as brutalement éloigné de toi. Certes, mon amour était discret. Un peu trop, je ne le nie pas. Mais de là à ne rien voir ! Light ! N'as-tu donc vraiment pas de cœur ?

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Dis-moi, qu'espères-tu dorénavant ? Tu m'as tué, je ne serai plus là pour te protéger, plus là pour assurer tes arrières. Le prochain L n'aura pas la même faiblesse que moi, il ne tombera pas amoureux de toi. Il ne te fera pas de cadeau. Il ne t'épargnera pas. Il t'aura.

Tu viendras me rejoindre alors. Certes, nous serons de nouveau ensemble. Mais je ne pourrai plus t'écouter respirer, je ne pourrai plus caresser ta peau au cœur de la nuit, en craignant à chaque instant de t'éveiller. Je ne pourrai même plus rêver du contact de tes lèvres sur les miennes ; parce que toutes ces sensations physiques, nous serons en privés désormais, de toute éternité. Un cauchemar. Et un rêve pourtant, si tu es avec moi.

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Tu vas mourir. Je te le prédis.

Ensemble, nous aurions pu vivre. Mais tu m'as tué ; or, ton destin te ramènera vers moi.

Nous serons réunis à nouveau, tous les deux.

Le possesseur d'un Death Note ne peut prétendre ni au Paradis, ni à l'Enfer ; je ne l'ignore pas. Moi non plus, je ne sais pas ce qui t'attend. Mais qu'importe, si c'est avec toi.

o

Je t'attendrai.

Pour te suivre.

Pour partir avec toi.

o

Je t'attendrai.