Prologue
« L'espace…Immense océan d'étoiles. Lorsqu'une comète le traverse, j'ai l'impression qu'il neige en observant la trainée. Cela me rappelle ma planète natale, Zeona. Son froid intense n'est pas le même qu'ici... Son manteau blanc me manque. Cependant, quand je ferme les yeux, je me souviens du rouge écarlate souillant le sol immaculé, la douleur me foudroyant, mes mots face aux ennemis…Tout ça pour sauver la vie d'un homme… »
Chapitre I
Zeona, cinquième planète la moins glacée du système Wintoreal. Les humains l'ont colonisée après la Guerre du Retour. Bien que le climat y soit glacial, elle offre des ressources permettant de commercer avec d'autres systèmes avoisinants. Plusieurs villes ont été bâties sur divers points de la planète. Un système de réseau ferroviaire permet de rejoindre les zones de civilisations. Certains sont plus fréquentés que d'autres, dépendant également du jour et de la nuit. Quelques villages servent encore d'étapes pour les longs trajets, cependant quelques-uns commencent à être à l'abandon.
Shifu en fait partie, plus aucune âme ne vit dans ce petit bourg. Seule la gare est encore entretenue car elle sert d'étape pour les longs trajets entre les capitales du Nord et du Sud. Dehors, la neige continue de tomber, recouvrant les autres édifices en ruines depuis des années. Le tableau d'affichage illumine les ténèbres dans le hall de gare. Au centre, plusieurs personnes patientent en fixant l'unique ligne lumineuse du tableau. Enveloppée dans un long et grand manteau sombre, une femme souffle sur ses mains pour les réchauffer. Ses cheveux noirs sont coupés court sur le dessus, laissant voir en dessous de longues mèches aussi blanches que la neige. Ses yeux violets ne décrochent pas du tableau lumineux tandis qu'elle réajuste un grand sac sur son épaule. Elle pousse un énième soupir en voyant l'heure défiler lentement. L'unique train qui doit passer n'arrive que dans une heure. De temps en temps, elle porte son attention sur les autres passagers qui s'impatientent également.
Un bruit l'interpelle, venant d'un recoin de la gare. Nul ne semble y avoir prêté attention, hormis elle. Avec prudence, elle se dirige vers une zone abandonnée qui étaient des toilettes à l'origine. La vieille porte automatique réussit à s'ouvrir tandis qu'elle entre dans la pièce. Au détour d'un renfoncement, son regard se porte sur une forme avachie au sol. Des taches écarlates ornent le vieux carrelage poussiéreux. Elle hésite un instant, observant l'homme assis contre le mur. Sa poitrine se soulève, signe qu'il est en vie. Lâchant son sac, elle s'agenouille près de lui. Elle ne peut voir son visage, caché par des cheveux bruns coupés en bataille. L'une de ses mains appuie sur un côté de son torse dont des gouttes de sang coulent entre ses doigts. Ses vêtements ne sont pas typiques de la planète, dans les tons sombres et aucun signe montrant une appartenance à un groupe.
« Est-ce que ça va ? »
La voix de la femme est calme, murmurante. Elle n'obtient aucune réponse compréhensible hormis des gémissements plaintifs. Elle commence à se relever.
« Je vais aller chercher de l'aide, tenez bon. »
Mais une main la retient. Elle se retourne vers l'homme, croisant l'unique œil marron derrière les mèches brunes. Une balafre part du nez pour finir sur la joue.
« Non ! Réussit-il à dire d'une voix profonde. N'alertez personne. »
Le ton est autoritaire malgré la douleur qu'il ressent. Elle hésite un instant avant de s'agenouiller face à lui, le rassurant du regard. Il la relâche, serrant les dents suite à un nouvel élancement. La femme ressent de la peine à le voir ainsi. Sans réfléchir, elle ouvre son sac, cherchant un linge propre. Elle déchire l'une de ses chemises pour en faire des bandages. Prenant le chiffon propre, elle le tend vers l'homme.
« Appuyez avec ça, au moins pour arrêter le saignement. Je vais faire un bandage serré, ça fera mal mais vous ne perdrez plus de sang. »
L'inconnu hésite avant de la laisser faire. Elle pose le linge propre sur la blessure avant qu'il n'appui dessus. Puis elle se saisit des lambeaux de la chemise et se rapproche de lui pour faire le bandage. La proximité avec cet homme la perturbe mais elle essaye de ne rien laisser paraître.
« Pourquoi m'aidez-vous ? »
La question surprend la jeune femme. Elle stoppe ses gestes de soins pour lui faire face, soutenant son regard.
« Pourquoi je ne vous aiderais pas ? »
Cette étrange réponse fait écarquiller l'œil de l'homme. La femme reprend ses soins tandis que l'inconnu crispe les dents au moment où le bandage se sert. Cependant, le sang de la blessure est stoppé.
« Vous allez à la capitale ? Demanda-t-elle.
-…Non, mais je dois partir d'ici. »
Il n'en dit pas plus cependant elle devine qu'il a des ennuis. Des bruits l'interpellent, venant du hall de gare. Rassurant l'inconnu, elle y jette un œil. Parmi les passagers qui attendent, des hommes en armes demandent papier et billets pour contrôler les voyageurs. Elle reconnaît à leurs blasons qu'il s'agit d'une brigade spéciale du gouvernement. Aucun ne vient vers le lieu où elle est, cependant elle sait qu'ils sont sûrement à la recherche de quelqu'un… Elle revient vers l'inconnu, réfléchissant à comment l'aider, le train n'arrive que dans une demi-heure… Elle ôte son manteau et le met sur ses épaules. Puis elle cherche dans son sac, sortant une veste de fourrure claire qu'elle enfile avant de continuer de fouiller dans ses effets.
« Que faites-vous ? Demande surpris l'homme.
- Vous ne passerez pas. La Brigade Cyan rôde et demande l'identité des gens. Je peux vous aider à monter dans ce train, mais faut vous déguiser un minimum. »
L'homme ouvre la bouche mais il se résigne, car il connaît déjà la réponse à sa question. Il voit la détermination dans le regard de la femme, ce qui le surprend. Elle lui pose un chapeau sur la tête et entoure le bas de son visage d'une écharpe ayant bien vécu. Elle remonte la capuche de sa veste, s'emmitouflant un maximum dedans. Elle tend un dernier élément à l'inconnu : une vieille canne ferrée surmontée d'un pommeau en forme de crâne.
« Essayez d'avoir la jambe droite raide. On ira dans les dernières minutes avant l'arrivée du train. On ne devrait pas être contrôlé et laissez-moi parler au cas où. »
L'homme approuve de la tête en saisissant la canne. Cela le fait sourire brièvement en fixant le crâne. La femme guette le bon moment où le train est annoncé. Le sifflement lointain de la locomotive se fait entendre tandis que les passagers se dirigent vers le quai. La brigade Cyan se rassemble pour faire le point tandis qu'un couple s'éclipse discrètement vers le quai. S'appuyant sur la canne, l'homme baisse le visage, soutenu par la femme. Le train entre en gare alors que la neige continue de tomber. Les portes de la locomotive s'ouvrent pendant que les passagers montent à bord. Des membres de la Brigade Cyan slaloment entre eux, continuant de chercher le fugitif.
L'un d'eux observe une femme aidant un homme avec une canne à monter. Il lui semble ne pas avoir vu ces voyageurs dans le hall. Mais avant qu'il n'ait pu les interpeller, la sonnerie de départ retentit, fermant les portes du train. Le véhicule se met en branle et commence à prendre de la vitesse. Il sort de la gare en direction du Sud tandis que la neige s'intensifie. Dans un wagon presque désert, la femme fait le tour, ayant laissé l'homme s'installer sur un des sièges. Après s'être assuré qu'aucun membre de la Brigade Cyan ne soit monté, elle revient s'asseoir à côté de lui, gardant sa capuche sur la tête.
« On devrait être tranquille jusqu'à la prochaine gare dans deux heures, mentionne-t-elle. Ça va aller pour votre blessure ?
- …Vous aidez souvent les gens ?
- C'est mon travail en fait. Je suis passeuse, j'aide ceux qui veulent rejoindre les spatioports pour quitter cette planète.
- Même les criminels ? »
Elle se tourne vers lui mais il ne la regarde pas. Elle s'empare de la canne ferrée, la faisant tourner en fixant le crâne.
« Je suis une criminelle aux yeux du gouvernement. Ce que vous avez fait ne regarde que vous. Mes clients ne demandent que de l'aide, je ne les questionne quasiment jamais. Car pour moi, tout homme fait ses choix selon son libre-arbitre. Moi j'ai décidé d'aider les autres comme mon père avant.
- Ça lui appartenait ? Demande l'homme en fixant la canne.
- Pas vraiment. Il m'a dit que c'est un ami qui lui a offerte avant qu'ils ne se séparent. C'était bien avant ma naissance et avant qu'il rencontre ma mère sur Zeona. Ils luttaient tous deux au nom de la liberté et j'ai repris le flambeau à leur mort.
- Vous n'avez jamais songé à quitter cette planète ?
-…Si, de nombreuses fois mais je me dis qu'ici, des gens ont besoin d'aide pour partir. Si je m'en allais, qui les aidera ? Je ne leur demande aucun paiement en retour….Vous ne me devez donc rien, juste de rester en vie. »
L'homme esquisse un bref sourire avant de porter son attention sur le bâton et la femme. Cette dernière ôte finalement sa capuche, remettant ses cheveux en ordre.
« Puis-je vous demander votre nom ? Questionne-t-elle. Ou juste un surnom, même une lettre. »
Il reste silencieux, son regard fixant le crâne de la canne.
« …H.
- H ? Entendu, moi c'est Jiyuu. Vous voulez aller où ?
- Vous m'avez suffisamment aidé…
- Vous ne m'avez pas écouté plus tôt, interrompe-t-elle. C'est mon job, pas la peine de me parler de risque ou danger, je les côtoie chaque jour. Et puis, la Brigade Cyan a d'autres chats à fouetter que de traquer une passeuse.
-…Je cherche quelqu'un ou plutôt sa tombe.
- Sa tombe ? Il n'y a qu'un endroit sur Zeona. Même si les corps n'y sont pas, les stèles de pierres ornent la Plaine silencieuse. C'est à deux stations d'ici. Pourtant, vous ne semblez pas originaire de cette planète.
-…
- Désolé de vous avoir posé la question. C'est juste que vous êtes la première personne venant d'ailleurs que j'aide.
H demeure silencieux néanmoins il continue de la fixer. Jiyuu remet finalement sa capuche, se callant mieux dans son siège.
« Vous devriez vous reposez. Ne vous en faites pas, j'ai un ami qui travaille dans ce train, je lui ai demandé de m'alerter en cas de soucis. »
Sur ses mots, Jiyuu ferme les yeux avant de s'endormir. H continue de l'observer puis il prend la canne regardant le crâne. Il finit par sombrer à son tour dans les bras de Morphée, son esprit envahit de souvenirs.
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Le feu crépitait dans la cheminé. Une main caressait ses cheveux tandis qu'elle fixait un crâne sur une canne ferré. Il faisait si bon, elle se sentait en sécurité. Elle entendait des mots mais elle n'arrivait pas à tout saisir, juste que cela à un rapport avec ce crâne et un nom. Elle levait les yeux vers le visage de son père, marqué par le temps. Ce dernier esquissait un sourire…
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Le sifflement du train tire Jiyuu de son sommeil. Elle se rend compte qu'elle s'est assoupie sur H, néanmoins ce dernier n'y prête aucune attention. Il est réveillé depuis un moment, observant par la vitre le quai bondé de monde. Des membres de la Brigade Cyan circulent parmi les voyageurs, effectuant des contrôles d'identité.
« Vous devez être très recherché, chuchote Jiyuu. D'habitude, ils n'envoient qu'une patrouille dans une gare et contrôlent à la capitale. »
H ne répond rien. Plusieurs minutes s'écoulent avant que le train ne reparte. La jeune femme va pour souffler quand quelqu'un vient la trouver, lui faisant des signes de loin. Elle se lève pour le rejoindre et l'écouter. Elle écarquille les yeux, remerciant son ami avant de retourner vers H.
« On a un soucis. Des membres Cyan sont dans le train pour effectuer des fouilles. Il y a un endroit pour se planquer, faut se dépêcher. »
H se lève sans poser plus de question, prêt à la suivre. Jiyuu s'empare de son sac et suit son ami à travers le wagon. Il les emmène dans un couloir entre deux voitures et ouvre une porte menant à un petit espace. Elle le remercie avant de se glisser à l'intérieur avec H. L'endroit est très étroit et plus frais. La porte se referme derrière eux, se verrouillant.
« C'est moins confortable mais le trajet est plus court entre les deux étapes, dit Jiyuu. Il viendra nous ouvrir avant qu'on arrive et quand la Brigade Cyan ne sera plus dans les parages. »
Le silence règne entre eux hormis le bruit mécanique de la locomotive. Cependant, en restant debout et statique, le froid saisit Jiyuu, la faisant greloter. Elle frotte ses mains entre elle, réajustant sa veste. Une secousse lui fait perdre l'équilibre, elle se retrouve dans les bras de H. Gênée, ses joues se teignent de rouge, elle tente de s'éloigner mais il n'écarte pas les bras.
« Il fait plus froid ici, souffle-t-il. Restez ainsi sinon vous deviendrez un glaçon.
- Je…Merci. Je ne vous ai pas fait mal ?
- Ma blessure n'est plus depuis un moment. »
Jiyuu hausse un sourcil avec étonnement mais elle ne le questionne pas plus à ce sujet. Doucement, elle pose sa tête contre sa poitrine. Le parfum qu'il dégage lui semble familier, lui rappelant son père. La proximité leur permet de se réchauffer en attendant d'être arrivé à destination. Ils ne peuvent mesurer le temps qui s'écoule jusqu'à ce que la porte se déverrouille. L'ami de Jiyuu leur fait signe de venir, la gare n'étant plus très loin. Ils le suivent jusqu'à l'une des portes automatique, guettant autour d'eux. Nulle trace de la Brigade dans les parages tandis que la locomotive entre dans la station. Le quai est moins bondé qu'à la gare précédente.
A peine les portes s'ouvrent que Jiyuu sort, guidant H dans la gare. Du coin de l'œil, elle aperçoit la Brigade Cyan descendre du train pour contrôler les nouveaux voyageurs. L'un d'eux porte son attention sur l'étrange couple qui s'esquive bien vite. Il lance des ordres à ses collègues alors qu'il part à la suite des deux voyageurs. Deux autres membres de la Brigade se joignent à lui pour prêter main forte, arrivant dans le hall. Ce dernier est peu fréquenté mais il n'y a aucune trace du couple. Ils se séparent pour fouiller la zone, surprit que les deux passagers se soient envolés sans traces. Leur recherche fait chou blanc, même lorsque le train repart.
Un haut gradé de la Brigade les rappelle à l'ordre, leur ordonnant de rejoindre le fourgon qui doit les rapatrier à la capitale. Abandonnant, les membres de la Brigade sortent du hall de gare. Ils ne remarquent pas les deux voyageurs qui les observent dans l'ombre, cachés dans un recoin étroit. Jiyuu connait chaque gare de la planète, ses petites cachètes et ses passages secrets. Elle attend un moment, s'assurant que la Brigade Cyan soit bien partie. Derrière elle, H l'observe silencieusement puis il la suit une fois le danger passé. Jiyuu regarde l'horloge, la nuit est bien entamée et il reste de la route jusqu'à la Plaine silencieuse.
« On y est presque, le rassure-t-elle. J'espère qu'il y a encore un transport allant au cimetière à cette heure tardive. Sinon, on va devoir attendre l'aube…Elle marque un temps en fixant H avant de reprendre. Mais je suppose que vous n'avez pas beaucoup de temps et la Brigade peut revenir à tout moment. Venez. »
Jiyuu sort de la gare suivie de H, se dirigeant vers les transports de la petite ville. Contrairement à Shifu, Bogodal est encore habitée car le cimetière situé au loin est un lieu incontournable de Zeona. Tous les habitants vont là-bas pour honorer leurs morts. La chance sourit au couple car un transport s'apprête à partir pour la Plaine Silencieuse. Le véhicule équipé pour braver la neige s'avance dans les ténèbres de la nuit. Les flocons blancs virevoltent au gré du vent qui s'est calmé depuis peu. Jiyuu et H arrivent à leur destination une demi-heure après. La Plaine Silencieuse porte bien son nom, car il n'y a aucun son aux alentours. Ils sont seuls, leurs regards se posant au loin sur des formes en pierres. Jiyuu vient soutenir à nouveau H qui s'appuie sur le bâton.
« Ça vous dérange si on va d'abord sur la tombe de mes parents. Je vous aiderai à trouver votre ami, je connais bien le système de classification de cet endroit. »
H approuve en silence de la tête puis ils s'engagent sur un petit chemin escarpé couvert par la neige. Ils dépassent les premières stèles de pierre avant de voir la zone couverte de ces dernières s'étendre à perte de vue. Connaissant le chemin, Jiyuu se dirige vers un groupe de stèles plus isolé que les autres. Ses pas s'arrêtent devant deux pierres accolées l'une à l'autre. Chacune porte un nom, des dates ainsi qu'un petit sigle.
« Ça signifie qu'on est hors-la-loi aux yeux du gouvernement, explique Jiyuu. Les criminels sont enterrés dans ce secteur mais uniquement ceux qui ont été reconnus en tant que tel… Enfin, criminel n'est qu'une catégorie où le gouvernement y met ceux qui osent le contester. Alors que les autres stèles autour sont aussi des gens qui ne partagent pas l'avis du gouvernement. »
Jiyuu s'agenouille devant les pierres, enlevant la neige qui les recouvre. De vieux souvenirs émergent en elle, des images de sa mère souriante, de son père réajustant ses lunettes. Elle sort de ses pensées lorsqu'elle entend H tomber à genoux se tenant le côté du torse. Une tache écarlate s'agrandit sur le bandage.
« Votre blessure s'est rouverte !
- Ne vous inquiétez pas, interrompe H.
- Cela peut s'aggraver. Il vous faut des soins plus poussés, je vous aiderai à trouver votre ami mais…
- Je l'ai trouvé mais je n'ai pas pu tenir ma promesse de se revoir en vie. »
Jiyuu est surprise puis elle regarde tour à tour H et la tombe de ses parents. Les souvenirs reviennent en elle en fixant le crâne sur la canne ainsi que le nom énoncé autrefois par son père. Ses yeux s'écarquillent en regardant H.
« Votre ami… est mon père ? Mais alors vous êtes…
- HARLOCK ! »
Surgissant de nulle part, un contingent de la Brigade Cyan fait face aux deux personnes, leurs armes les menaçant. L'un d'eux s'avance plus en avant, portant un insigne de haut gradé.
« Je savais que tôt ou tard, vous viendriez ici. Au nom du gouvernement de Zeona, je vous arrête Capitaine Harlock ! N'opposez pas une nouvelle résistance sinon cela vous coûtera la vie. »
Harlock savait qu'ils ne le lâcheraient pas facilement depuis qu'il avait posé le pied sur cette planète et apprenant la mort de son ami. Cependant la situation est délicate. Sa blessure s'est ouverte de nouveau et il refuse de mettre en danger Jiyuu. Cette dernière a encore du mal à croire qu'elle a aidé le légendaire pirate recherché par la Coalition Gaia, ce même homme qui a révélé la vérité sur ce qu'est devenue la Terre. Soudain son songe lui revient en mémoire, aussi claire et limpide que de l'eau. Ses yeux violets se posent sur le bâton au crâne, sa main se crispant autour. Sans crier gare, elle se lève pour se mettre entre Harlock et la Brigade Cyan. Ces derniers sont surpris tout comme le pirate qui veut l'arrêter, néanmoins Jiyuu plonge son regard dans le sien.
« N'ayez crainte, chuchote-t-elle. J'aurai aimé le savoir plutôt tôt mais je suis ravie d'avoir rencontré celui qui partage les mêmes idéaux que mon père.
- Jiyuu…
- Mon père ne vous en a jamais voulu. Son seul regret est de ne pas avoir pu partager un dernier verre de Brandy ensemble. »
Un sourire se pare sur ses lèvres avant qu'elle ne fasse face à la Brigade Cyan.
« Mademoiselle, commence le Chef. Vous ne serez pas accusée de complicité si vous vous écartez et oubliez cette histoire.
- Nul homme n'a le droit de dicter ma conduite ! Vous croyez que les gens oublient facilement les atrocités que vous leur avez faites. Je ne vous laisserai pas vous en prendre à cet homme ! »
Le chef est surpris que la femme oppose une résistance. D'autant qu'avant d'intervenir, il n'a pu l'identifier par rapport aux fichiers de Zeona. Il fronce les sourcils, haussant le ton pour tenter de l'intimider.
« J'ignore qui vous êtes et je suis prêt à passer l'éponge. Mais pour la dernière fois, partez ou je serais obligé de vous arrêter…
- M'arrêter ? Alors que vous avez abattu de sang-froid mon père ! Je n'oublierai jamais ce que vous avez fait il y a cinq ans. Jamais vous n'ôterez mon libre-arbitre de défendre ce qui est juste ! »
Les révélations surprennent encore plus le Chef. Puis son regard se porte tour à tour sur les stèles de pierres et la femme. Soudain, il fait le rapprochement car un grand évènement a bouleversé l'histoire de Zeona, engendrant la mort du plus grand hors-la-loi recherché sur la planète. Des rumeurs courent comme quoi il a eu une descendance mais rien n'a permis de l'affirmer jusqu'à aujourd'hui. Sa surprise n'échappe pas à Jiyuu qui campe sur ses positions, écartant les bras. Rien ne la fera reculer. Elle n'a pu sauver ses parents il y a cinq ans. A présent qu'elle a retrouvé l'ami de son père, elle fera tout pour le sauver. Le reste de la Brigade est pris au dépourvu, ne sachant que faire. Soudain leur chef dégaine une arme, la pointant sur Jiyuu. Un coup part sans prévenir, éraflant la capuche de la jeune femme sans la blesser.
« Dernier avertissement ! Je ne sais pas si vous êtes réellement la fille de ce terroriste mais je vous abattrai si vous ne vous écartez pas ! »
Jiyuu ne répond rien, soutenant le regard du Chef. Ce dernier s'apprête à appuyer sur la détente lorsqu'une bourrasque de vent s'abat sur la zone ainsi que des tirs de canon. Surgissant du ciel, un petit vaisseau de combat éclaire le groupe, pointant ses armes sur la Brigade Cyan qui a dû reculer sous les premiers feux. L'emblème sur l'appareil ne laisse aucun doute : un crâne reposant sur deux os, signe de la piraterie. Sortant du cockpit, un homme de grande corpulence avec des lunettes s'adresse à la Brigade.
« Au moindre geste, je vous transforme en passoire ! Puis il se tourne vers Harlock et Jiyuu. Désolé du retard, capitaine, j'arrivais pas à vous localiser. Kei m'a passé un de ses savons.
- Yattaran, murmure le pirate.
- Je vous remorque. Vas-y Yama et pas trop de gestes brusques. »
A l'intérieur de l'appareil, un jeune homme aux cheveux bruns plus clairs mais portant la même balafre qu'Harlock manœuvre afin de récupérer leur capitaine. Jiyuu aide ce dernier à se relever, gardant un œil sur la Brigade Cyan. Aucun n'ose bouger ou tenter de les arrêter. La femme aide le pirate à grimper dans l'appareil au même moment où du coin de l'œil, elle aperçoit un mouvement furtif. Une détonation retentit, une gerbe de sang gicle, souillant la neige. Jiyuu titube, ses yeux se baissant vers l'impact qui la touché en plein cœur. La douleur traverse tout son corps qui s'effondre. Elle sent juste deux bras la rattraper, croisant le regard d'Harlock. Il lui semble l'entendre l'appeler alors que le froid des ténèbres l'envahit…
