Disclaimer:
Les personnages d'Harry Potter ainsi que les « décors » sont la propriété exclusive de J.K. Rowling. Il n'y a aucune intention de contrefaçon ou de violation de ses droits d'auteur. Cette histoire est écrite pour le seul plaisir de l'écriture et ne rapportera aucun centime à son auteur.
Note : je parle de la création du Choixpeau dans cette fic car je l'avais imaginé dans la fic « ce qui unit Gryffondor et Serpentard ». Comme je reste dans le même « univers », il me parait logique d'en parler de cette façon.
One shot 1 - Un lien pour la Saint-Valentin
Extrait de « La vie d'Helga Poufsouffle, Fondatrice de Poudlard » par Rowena Serdaigle
C'est Helga qui a eu cette idée que chacun d'entre nous présente la vie d'un autre Fondateur de Poudlard. Je crois qu'elle a précisé que ce serait une bonne chose, pour la stabilité et l'harmonie de notre quatuor : elle a parfois des idées bizarres, mais l'expérience m'a appris qu'elles sont en général bonnes. En réalité, Poudlard fonctionne depuis plusieurs dizaines d'années et ce n'est qu'avec le temps que j'ai compris pourquoi, sans Helga, rien de tout cela n'aurait été possible. Oui sans elle, Poudlard n'aurait jamais été qu'un joli tas de pierres. J'ignore comment elle fait, mais elle parvient à valoriser le meilleur de chacun de nous pour nous permettre de nous dépasser encore. Elle nous aide également à rester unis, malgré nos opinions parfois divergentes...
Je vois les élèves déçus lorsque le Choixpeau les dirige vers la maison de Poufsouffle : ils ont tort. Helga n'a jamais été par choix sur le devant de la scène. Mais elle était toujours là pour organiser et diriger quand il le fallait, le tout avec efficacité et bon sens. Ce sont là d'immenses qualités, comme le don de soi, et qui font d'elle l'une des plus grandes et des plus généreuses sorcières qui soient. De même, elle a empêché plusieurs fois Salazar de partir grâce à sa ténacité et sa douce obstination. Ou peut-être grâce à l'amour qu'il lui porte. Il est si facile d'aimer Helga ! Une chose pourtant : je n'ai jamais compris ce qu'elle pouvait trouver à Salazar, mais je pense qu'elle peut dire la même chose pour Godric et moi...!
Jamais je ne le lui dirai en face, mais j'aime cette femme comme ma soeur. Comme tout le monde, elle a des défauts. Mais c'est bien son romantisme innocent qui a failli nous conduire à la catastrophe avec ce satané sortilège...
1
Helga reposa le manuscrit avec un soupir satisfait. « L'histoire de la sorcière Astrid »... Une magnifique histoire d'amour entre Astrid et Ryan, un sorcier venu des plaines nordiques. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas lu une si belle histoire. Et elle en avait bien besoin ces temps-ci.
Un nouveau soupir, plus triste. Elle se leva lentement de son fauteuil au tissu usé. Son vieux fauteuil, qui lui venait de sa grand-mère. Rowena ne comprenait pas pourquoi elle ne le remettait pas à neuf d'un coup de baguette magique. Mais faire cela, ce serait comme oublier d'où venait ce fauteuil. Comme la plupart de son mobilier.
Quand Helga s'était installée à Poudlard avec Godric, Rowena et Salazar, elle savait qu'elle ne reviendrait pas dans sa maisonnette perdue dans les bois. Et elle avait tenu à en recréer l'atmosphère dans ses appartements, pour essayer de se sentir chez elle. Et non pas dans ce château débordant de sortilèges expérimentaux et en pleine construction depuis cinq ans... Pas dans ce château où le mot silence était banni et envahi par une multitude d'ouvriers nains et farfadets, de sorciers spécialistes en techno-sortilèges. Heureusement, ses serres étaient déjà prêtes et elle avait pu poursuivre ses expérimentations végétales. C'était une consolation au milieu de ce vacarme ambiant.
Mais lorsqu'Helga lisait, elle oubliait tout cela. Seulement, les bons livres étaient rares. Encore plus les romances. La vie était vraiment mal faite... La sorcière un peu replète alla choisir un de ses chapeaux, dont la création était une autre de ses passions. Elle venait de prendre un chapeau végétal, mélange de mousses fleuries, d'herbes odorantes et chanteuses : elle était très fière d'avoir réussi à conjuguer ses deux passions, les chapeaux et les plantes. Et elle se regardait dans le miroir pour y voir une sorcière aux traits agréables, un peu replète et pas très grande. Ses yeux mordorés semblaient tout remarquer et ses cheveux châtain clair aux boucles parfois indisciplinées retombaient sur ses épaules en une cascade souple. Elle posa sur sa tête le chapeau pour décider que vraiment, il lui allait à ravir...
La porte s'ouvrit à la volée et Rowena entra en vociférant :
- Je rêve ! Cet idiot de techno-sorcier, tu sais, Morris ! Il a - tiens-toi bien - jeté un sortilège de lévitation sur l'escalier qui part du 3ème étage pour que ce soit plus facile de l'ajuster... Il a juste oublié que nous avions augmenté la puissance des sortilèges dans le château pendant sa construction. Et donc... cet escalier s'est encastré au plafond de la tour aux escaliers ! Le plafond est fichu ! Et comme ce crétin a annulé son sortilège, l'escalier en retombant a...
— Tout doux, Rowena, fit Helga d'un ton ferme.
Tout en ajustant son chapeau devant le miroir.
— Les escaliers sont fichus. Comme tous les sorts majeurs que nous avons jetés dans la tour. Trois mois de travail anéantis..., fit Rowena avec un peu plus de maîtrise d'elle-même.
— Qu'est-ce qui t'énerve à ce point ? demanda Helga en se tournant vers elle. Ce n'est pas la première fois qu'un incident pareil survient, non ?
— Tout. Rien... Oh, je ne sais pas. Mais je suis énervée, ça oui !
La sorcière aux cheveux aile de corbeau s'assit à son tour dans le fauteuil préféré d'Helga. Elle prit le manuscrit qu'Helga lisait tantôt et en lut le titre, un rire dans la voix :
— L'histoire de la sorcière Astrid. Encore un roman d'amour courtois ?
Helga eut un sourire amusé :
— Pas si courtois que ça ! Pourquoi es-tu si énervée ?
Rowena parut réfléchir un instant :
— Vraiment... je ne sais pas, c'est peut-être parce que les finitions du château... C'est si long. J'aurais aimé que ce soit enfin fini pour la nouvelle année ! Et ouvrir l'école le plus tôt possible.
— Tu sais bien qu'il y a toujours des impondérables en magie. Ce n'est pas à toi que je vais l'apprendre ! En plus, à mon sens, l'école n'ouvrira pas avant une bonne année.
— Je sais. Et toi tu lis encore ces romans, se moqua Rowena.
— Ça m'aide à ne plus penser au fait que quelqu'un a laissé la porte de mes serres ouverte et que plusieurs de mes plantes rares ont gelé, répliqua Helga avec un certaine dureté. L'hiver est rude. Et le sera encore plus pour le coupable quand j'aurai découvert de qui il s'agit.
Rowena se leva pour faire face à Helga, plus petite qu'elle et lui poser sa véritable interrogation :
— Tu penses vraiment que cette école va marcher ? Que ça va marcher entre nous quatre ?
Helga sourit, une étincelle amusée dans ses yeux mordorés et perspicaces.
— Qu'a donc encore fait Godric ?
— C'est lui qui a suggéré à Morris de servir d'un sort de lévitation.
Helga eut un léger rire :
— Il est toujours aussi distrait.
— Distrait ou pas, je crois que je vais partir.
Son amie fronça les sourcils :
— Comment ça partir ?
— Juste pour quelques semaines.
— Attends, on s'est juré que...
— Qu'aucun de nous quatre ne quitterait le château tant qu'il n'est pas achevé, oui je sais. Mais là, je crois que je vais craquer. Ces contretemps me rendent dingue. J'ai fini la partie conception pour la sorcellerie depuis des semaines. Tout ce que je fais, ce sont les finitions, les équilibres et les ajustements entre les différents sortilèges pour que tout tienne ensemble.
— Rowena, et si tu faisais quelques recherches à la bibliothèque ?
— Je veux bien, mais sur quoi ? Non, j'ai besoin de partir. Justement, j'ai entendu parler de plusieurs ouvrages rares que la bibliothèque de l'Institut des sorciers de Salem vient de recevoir.
— Et si... je te donnais l'occasion d'exercer tes connaissances sur un problème ardu ? Pour faire quelque chose qui n'a jamais été fait. Quelque chose d'unique et qui n'existerait qu'à Poudlard ?
Rowena ne put retenir un sourire intéressé.
— Et pourquoi tu ferais ça ?
— Parce que je suis ton amie et qu'il est important que nous restions tous quatre ici. Pour Poudlard et sa magie.
— Alors je t'écoute, fit Rowena.
— Laisse-moi jusqu'à demain, d'accord ? Là, je dois absolument voir mes plantes. J'espère que personne n'a été faire une seconde visite à mes plantes.
— Tu sais que tu peux être aussi effrayante que Salazar lorsque tu parles de tes plantes ?
Helga sourit encore et sortit. Rowena ne réussissait pas à comprendre comment quelqu'un qui était aussi gentille qu'Helga, avec ses joues toujours un peu rouges, réussissait à sourire d'une telle façon qu'on avait immanquablement une sueur froide dans le dos ? Peut-être était-ce le maniement des poisons. Après tout ça ne pouvait être que ça, car Salazar et Helga n'avaient que cela en commun... Helga était l'archétype de la bonne sorcière : généreuse, loyale, d'une extrême gentillesse, avec un sens aigu de la justice et de la moralité. Elle était aussi la plus tenace d'entre eux - sans doute était-ce une qualité quand on cherchait à créer de nouvelles espèces végétales. Mais elle ne pardonnait pas les actes de méchancetés ou de bêtises.
2
Helga parcourait les allées de serres tout en réfléchissant à ce qu'elle voulait demander à Rowena. Une idée folle. Mais cette école avait besoin d'idées folles, parce qu'elle devait se démarquer des autres. Chaque école de magie avait sa marque. L'école de Durmstrang valorisait la force et le pouvoir, à tel point qu'en plus d'être étudiée, la magie noire était expérimentée. Et aucun sorcier né dans une famille moldue ne pouvait s'y inscrire.
Beauxbâtons... Ah Beauxbâtons, c'était entièrement différent : les français aimaient mêler magie et art, à tel point que l'un n'allait pas sans l'autre. La sorcellerie dans toutes formes devenait avec eux une science aux gestes précis et mesurés... Et puis il y avait l'institut des sorciers de Salem, qui était l'école la plus vieille du monde et la plus respectée. D'ailleurs tous quatre y avaient étudié. Certes Salazar n'y avait passé que deux années, il avait toujours été autodidacte. Mais la politique de l'Institut était d'inciter à l'expérimentation, la science, car l'innovation y était le maître mot de l'enseignement. Toutes ces écoles mettaient en valeur la sorcellerie et le pouvoir, sans mettre l'accent sur le coeur nécessaire pour utiliser les puissants pouvoirs que chaque sorcier détenait.
Bref ici en Angleterre, les sorciers étaient plus conservateurs et aussi plus romantiques... Alors pourquoi ne pas valoriser l'amour ? L'idée lui plaisait énormément. En plus, cela serait difficile à mettre en oeuvre et ce serait une façon de clamer au monde entier que les créateurs de l'école de Poudlard excellaient à la perfection dans l'art de la sorcellerie... comme les professeurs qui y enseigneraient. Oui, une excellente publicité.
Elle avait déjà décidé que le maître mot du sortilège serait amour et que, de façon très logique, le sortilège qu'elle voulait créer devrait se déclencher à la Saint-Valentin...
La romantique qu'elle était, en faisait des bonds de joie intérieure : après tout, il s'agissait de réunir deux âmes soeurs chaque année à Poudlard. Tout le problème était de savoir comment les réunir et les aider à prendre conscience de leurs sentiments respectifs... Helga bloquait tout simplement pour la mise en oeuvre pratique du sortilège : seule Rowena, la meilleure sorcière en recherche pouvait l'aider.
Elle parvint à déterminer les éléments clefs pour que le sortilège fonctionne : la date et le type de sortilège. Pour le moment, elle hésitait entre un gros coeur de paillettes qui illuminerait les deux élus de l'année, ou un petit angelot qui servirait d'intermédiaire... Ce qui l'ennuyait, c'est qu'aucune de ses idées ne lui plaisait vraiment. Il fallait que ce sortilège force les personnes à reconnaître leur sentiment, chose qui prend du temps surtout lorsque les personnes sont butées. Le sortilège devrait durer un mois, jusqu'au 14 mars, jour blanc et pendant de la Saint-Valentin.
Nda : le 14 mars à la Ste Mathilde, dit aussi « jour blanc », il est d'usage de faire des cadeaux à la personne qui vous a offert des chocolats à la Saint-Valentin. Cet usage est très répandu au japon, absolument pas en France…
Il fallait qu'elle parle à quelqu'un de son idée, pour réfléchir ensemble à la mise en place concrète du sortilège. Elle se rendit rapidement dans les cachots.
- Salazar, tu es là ? fit Helga en entrant dans le laboratoire de potions.
Elle avait frappé, mais personne ne lui avait répondu. Cela ne l'étonnait pas car Salazar détestait être dérangé pendant la réalisation de ses potions. Aux dernières nouvelles, il tenait de créer une potion pour le château, un mélange puissant de celles d'intangibilité et de fixation, de manière à ce que les sortilèges du château ne disparaissent pas avec le temps. Il était dessus depuis six mois, et essayait tous les ingrédients qui lui tombaient sous la main en espérant trouver le bon... Elle s'avança dans le laboratoire de potions : toutes les tables de travail étaient envahies par une multitude de fioles, flacons ou pots, tous remplis d'ingrédients divers et étranges. Elle aperçut la personne qu'elle était venue chercher et qui portait une robe de sorcier d'un vert émeraude profond.
— Salazar ?
— Oh bon sang, quoi encore ? demanda le sorcier en se retournant.
Il avait les cheveux courts d'un blond presque argenté. Son visage était très fin, avec des pommettes hautes. Ses lèvres charnues étaient généralement serrées en un pli mécontent, comme à l'instant. Des cils longs encadraient un regard gris vert. Et il portait un simple anneau d'argent à l'oreille gauche.
— Bonjour à toi aussi, mon cher.
— Je t'en prie Helga, je suis pressé : qu'est-ce se passe encore ? Morris a recassé les escaliers ? Ou alors Rowena les a cassés pour qu'il arrête de jouer avec ? Ou mieux, Rowena a décidé de le casser, lui pour qu'il arrête ses maladresses ?
Helga fronça les sourcils : visiblement, quelque chose contrariait Salazar, et ce quelque chose ne pouvait être que la potion qu'il ne parvenait pas à créer depuis des mois... Elle aimait à croire que l'un de ses rôles dans leur quatuor était de concilier tout le monde, d'amoindrir les heurts avec diplomatie, car ils avaient tous les quatre des personnalités bien trempées. Elle était la seule à proposer des compromis, la seule que tous écoutaient vraiment car elle restait calme en toute circonstance, capable avec sa gentillesse presque décalée de proposer une tasse de thé à deux sorciers en plein duel de magie... Ce n'était pas pour rien qu'elle supervisait l'ensemble des travaux du château, et que tout le monde lui demandait conseil.
— Rien de tout cela, enfin pour l'instant. Non, je venais pour te demander un conseil.
Elle lui expliqua son idée. C'était la première fois que Salazar la voyait aussi hésitante, la première fois aussi qu'elle ne parvenait pas à trouver une solution toute seule.
— Colle-leur les mains ! s'exclama-t-il tout à coup.
— Quoi ?
— Tu te demandes comment faire durer le sortilège un mois : colle-leur les mains. En plus, ça ne les empêchera pas d'aller en cours, et cela les forcera à rester ensemble et à communiquer. Et à coopérer. C'est bien ce que tu souhaites, non ?
— Ce n'est pas un peu extrême ?
Salazar eut un large sourire :
— Je te parie que tout le monde trouvera ça romantique au possible !
— Il reste juste un problème : comment les choisir ?
— Je suis ravi de voir que tu ne penses pas à tout, malgré les apparences.
— Je t'en prie, Salazar, personne ne le peut !
— Toi si. Tu es sidérante d'organisation. Bref, pourquoi ne pas « rajouter » un rôle au Choixpeau ? Comme il choisit les élèves, il sera à mieux de « former » les couples.
Le Choixpeau avait été la brillante occasion de mettre toute leur science et leur détermination en commun.
— Tu n'as pas tort, concéda-t-elle vexée de ne pas y avoir pensé plus tôt.
— Mieux ma chère : j'ai raison et tu le sais. Il suffit simplement d'améliorer un peu le Choixpeau. Parles-en à Godric, c'est lui le plus doué pour les sorts relatifs aux objets inanimés.
— Puisque tu es si doué, tu ne pourrais pas m'aider à trouver la personne qui s'est introduite dans mes serres et qui a oublié de refermer ? Beaucoup de mes plantes rares ont gelé.
Salazar parut extrêmement surpris :
— Je ne comprends pas, j'ai pourtant fermé derrière moi...
— Pardon ? Oh toi, ne me dis pas que... Oh toi ! Combien de fois, je vais devoir te dire de ne pas entrer dans mes serres sans moi !
— C'est pour ma potion, tu avais des plants de Merlanade et...
— Oui eh bien, ils sont rares ! Et chers.
— Ma douce, ma chère Helga, commença-t-il d'un ton théâtral. Comment pourrai-je me faire pardonner ? Demande-moi ce que tu veux et je le ferai, conclut-il avec emphase.
Salazar avait toujours été charmeur, comptant sur sa verve naturelle et son don des potions pour se sortir de toute situation. Helga ne le connaissait que trop bien et ne se laissa pas tromper.
— Très bien. Je vais recommander de nouveaux plants de Merlanade au Japon : tu régleras la facture.
Le sorcier ne broncha pas :
— Donne-moi le bon de commande et je le remplis. Tu ne t'occuperas de rien.
— Non, non, non Salazar : je sais combien tu es occupé. Je le ferai moi-même. Je pense que l'ensemble de la commande et des frais de livraison s'élèvent à vingt gallions : c'est ce que j'ai payé la première fois, en tout cas.
Salazar parcourut rapidement du regard son laboratoire :
— C'est que... je n'ai pas une telle somme ici.
— Je le sais bien.
Elle sortit un morceau de papier et écrivit rapidement quelques mots.
— Voilà, c'est pour la banque Gringotts. Signe et ce sera tout.
— Attends, je voudrai connaître les tarifs et commander quelques plantes pour mes potions, fit-il pour gagner du temps.
Elle lui jeta un regard acéré et déchira le papier :
— Très bien. Alors Salazar Serpentard, tu as une dette envers moi.
— De vingt gallions.
— Non, ma commande partira dans quelques minutes puisque je ne peux pas attendre. Si je ne recommande pas de nouveaux plants rapidement, je n'en aurais pas avant un an. Souviens-toi simplement que tu as une dette et je ne te demande rien d'autre. Pour le moment, en tout cas.
— Tu es certaine que nous n'avons aucun lien de parenté ?
— Oh oui, Salazar, répondit-elle avec un charmant sourire. Sûre et certaine. Après tout, je viens d'Ecosse et toi de Norfolk... Je sais qu'aucun membre de ma famille n'aurait pu vivre dans un marécage.
— Pourtant on y trouve beaucoup de plantes rares et même des herbes aromatiques pour la cuisine.
— Alors la prochaine fois que tu passeras chez toi, tu seras aimable de m'en ramener. Je ne comprends pas que tu n'y aies pas pensé. Enfin, tu connais ma passion pour la cuisine.
— Bien sûr très chère, fit Salazar en regardant ses chers chaudrons dont le contenu mijotait doucement.
Comme toujours, il était difficile de distraire Salazar de ses recherches : il avait du charme, mais il semblait le garder pour ses potions et ses liaisons éphémères... Helga se dit la réflexion tout à coup que peut-être le sortilège qu'elle projetait de créer pourrait l'aider. Pourquoi pas ?
3
Helga chantonnait dans les couloirs, ravie de l'idée de Godric. Encore plus ravie de leur coopération parfaite. Chacun avait apporté sa contribution au sortilège : il ne restait qu'à demander à Rowena de mettre au point une technique, un sort pour mettre en oeuvre leur volonté. Si elle avait « gardé » Rowena pour la fin, c'est tout simplement parce qu'elle serait la plus difficile à convaincre. Ce n'était pas pour rien que Helga comptait lui demander de réaliser les recherches : la jeune femme ne savait pas résister à une innovation et serait par conséquent plus encline à lancer un sortilège expérimental.
Helga servait le thé lorsque Rowena entra dans les appartements de la Fondatrice de Poufsouffle :
— Alors quelles sont les recherches que tu voulais que j'effectue ? fit-elle en s'asseyant dans le confortable canapé.
Helga prit le temps de lui tendre une tasse de thé, de boire une gorgée de la sienne, avant de lui répondre :
— Je voudrai créer un sortilège spécial dont le point focal serait le Choixpeau.
Rowena but une gorgée de thé :
— Pourquoi ? Le Choixpeau ne fera jamais rien d'autre que de diriger les élèves vers leurs maisons, alors je ne comprends pas trop où tu veux en venir.
Helga ne connaissait que trop l'a priori de Rowena sur tout ce qui était romantique.
— J'ai eu une idée, tu sais. Sur ce dont nous avions parlé il y a plusieurs mois, sur ce sortilège pour notre école. Quelque chose qui nous distinguerait par rapport aux autres écoles, quelque chose d'unique et qui prouvera au monde entier que nous sommes des sorciers qui savent innover, créer des sortilèges.
— Et ton idée est...
— De jeter un sortilège pour la Saint-Valentin qui réunirait deux élèves faits l'un pour l'autre.
Rowena la regarda, sidérée.
— Tu veux... quoi ? Attends, c'est ridicule !
— Au contraire, c'est important, insista Helga.
— C'est parfaitement idiot, contra Rowena. Et inutile ! Non mais, tu imagines les problèmes que ça va leur causer ? Ils seront là pour étudier, pas pour batifoler. Tout ça au nom de ton romantisme, des histoires d'amour dont tu raffoles.
— Oh ma pauvre Rowena, tu trouves toujours que les histoires d'amour sont ennuyeuses au possible !, fit Helga avec un certain amusement.
— Et toi tu ne lis que ça !
— Les élèves vont vivre ici sans doute les années les plus intéressantes de leur vie : ils vont apprendre la sorcellerie, les sorts comme les potions, et...
— Et tu trouves que leur faire vivre une histoire d'amour est nécessaire !
— Non non, pas une histoire d'amour, celle de leur vie : le Choixpeau y veillera.
— Et comment veux-tu arriver à ce résultat abracadabrant ?, se moqua Rowena.
— Comme je te le disais tout à l'heure, le sortilège doit avoir pour point focal le Choixpeau : il est le seul à pouvoir savoir quels élèves réunir. Il connaîtra chaque élève, il saura mieux que quiconque s'il existe des âmes soeurs parmi eux, dit Helga avec logique.
— Ri-di-cu-le ! se moqua Rowena. Je suis sûre que Godric et Salazar seront d'accord avec moi !
— Ils sont d'accord, répondit Helga avec un grand sourire, mais avec moi ! Salazar m'a même suggéré une excellente idée.
— Venant de lui, ça ne m'étonne pas, grommela Rowena. Je parie qu'il t'a conseillé d'enfermer les deux élèves qui seraient des âmes soeurs dans la même pièce pendant des jours.
— Oh non Rowena, tu sous-estimes sa perversité. Il a été beaucoup plus brillant que ça ! Il m'a conseillé de leur coller les mains, révéla-t-elle ravie. Pour qu'ils puissent assister aux cours.
— ... Quoi ? s'étrangla Rowena.
— Il a pensé que le fait de tout partager pourrait les forcer à admettre qu'ils sont des âmes soeurs.
Le fait qu'elle semble trouver cette idée géniale avait quelque chose d'inquiétant. Salazar commencerait-il à « déteindre » sur Helga ? Rowena se raccrocha donc à son dernier espoir :
— Et Godric ?
— Il m'a dit que le meilleur moment de l'année serait effectivement la Saint-Valentin. Et qu'il fallait prévoir un gâteau au chocolat, un petit mot, etc...
— Ah celui-ci... Toujours un grand romantique ! Doublé d'un éternel gourmand... Et comment les mains se décolleront, se résolut à demander Rowena, curieuse.
— En fait il y aura deux façons : l'une temporaire, l'autre définitive. Comme le sortilège dépendra du Choixpeau, dès que le couple quittera Poudlard, le sortilège cessera, mais pour reprendre dès le retour, enfin si les mains des deux personnes sont assez proches pour être collées à nouveau.
— Et de façon définitive ?
— Il suffira qu'ils se marient. Un mariage sorcier, évidemment.
Rowena s'étrangla avec son thé.
— Attends, et s'ils refusent de se marier, ils resteront collés tout le temps de leurs études à Poudlard ?
— Non, le sortilège cessera tout simplement s'ils sont réellement indifférents l'un à l'autre au bout de quelques jours. Tu comprends maintenant pourquoi j'ai besoin de ton aide, Il s'agit du sortilège le plus complexe que nous devons créer. La dernière fois, c'était le Choixpeau...
— Je ne suis pas d'accord !
— Rowena, tu te rappelles notre « pacte » lorsque nous avons décidé de fonder Poudlard ? Que toutes les décisions importantes seront prises à la majorité ?
— Ne me dis pas que...
— Si, je suis désolée, mais tu es en minorité, nous sommes tous les trois d'accord : il faut un sortilège, quelque chose d'exceptionnel en plus du Choixpeau. Et puis peut-être changeras-tu d'avis quand tu verras le sortilège fonctionner ?
— Toi, tu me rendras folle, se lamenta Rowena.
— En attendant, je te donne une occasion rêvée pour créer un nouveau sortilège, non ?
Rowena lui jeta un regard noir.
— Le pire que c'est que je pourrais te dire que c'est impossible, mais tu me connais trop bien...
— Bien sûr, Rowena : tu essayeras de créer ce sortilège jusqu'à ce que tu réussisses. Et tu vas réussir.
Helga arborait un sourire de bonheur presque enfantin.
— Helga, arrête de me manipuler comme ça. Tu n'es pas supposée faire cela, la manipulation, c'est normalement le domaine de Salazar. Pas toi, tu représentes pour tout le monde, la probité, la loyauté, la gentillesse...
— Justement, je te demande de créer un sortilège au nom de l'amour : qu'est-ce qui te dérange dans tout ça ?
— Rien, grommela son amie. Rien du tout.
Et elle quitta la pièce avant de dire quelque chose qu'elle regretterait : son âme de chercheuse était excitée par les recherches à faire, les problèmes à résoudre. Rowena savait bien que chacun d'entre eux avait leurs faiblesses. Et elle-même ne pouvait résister à l'envie de créer.
Seule dans le couloir désert, elle fit doucement :
— Merci Helga. Mais quand un même, un sortilège romantique...
Si son amie n'avait pas eu cette idée, elle aurait quitté Poudlard pour aller étudier. Après tout, elle avait déjà lu le quart des ouvrages de la bibliothèque de Salem, le quart intéressant bien entendu. Et il restait encore de nombreuses bibliothèques de magie de par le monde à explorer...
4
Personne ne vit Rowena pendant un mois. Elle était la meilleure quand il s'agissait de réaliser l'impossible, de concilier des éléments qui n'avaient rien à voir ensemble, comme un sortilège et une potion ou un objet et un sortilège. Helga vit régulièrement les émissaires de bibliothèques de magie du monde entier, venir apporter et remporter les tonnes d'ouvrages que Rowena dévorait pour l'aider à trouver une solution au problème ardu qui se posait à elle.
Elle pensait que Rowena mettrait des mois à résoudre le problème. Ne serait-ce que pour éviter les travaux toujours en cours. C'était Rowena qui avait conceptualisé l'aspect de mobilité du château : escalier, pièces changeantes, et portes dérobées. Tout cela était son oeuvre. Et maintenant qu'elle n'était plus sur le dos des techno sorciers, les choses avançaient beaucoup plus vite, ainsi que l'avait espéré Helga. Elle gérait elle-même les crises et les erreurs, et comprenait mieux l'agacement quotidien de Rowena de voir les choses avancer si lentement...
Helga fut donc extrêmement surprise lorsqu'elle trouva Rowena un soir dans ses appartements. Elle était assise dans son petit canapé, le regard dans le vague.
— Bonsoir Rowena. Tout va bien ? Cela fait un bon moment que je ne t'avais pas vue, vint la saluer Helga.
Elle s'assit à côté de son amie.
— Bonsoir. Bah tu sais que lorsque j'ai des recherches à faire, j'ai tendance à rester dans mon bureau au calme.
Helga fronça les sourcils : Rowena avait les yeux rouges de fatigue et les traits tirés. Visiblement, elle avait encore privilégié le travail au sommeil...
— Alors, est-ce que tu as trouvé comment faire ?
— Bien entendu, soupira Rowena. Enfin, j'ai finalement trouvé lorsque j'ai discuté avec le Choixpeau. Pour finir, je pense que le sortilège doit être « ancré » dans le Choixpeau et dans Poudlard pour plus de force et d'efficacité. J'ai réuni plusieurs ingrédients et nous devrons le lancer tous les quatre. Tous ensemble et en harmonie, car il s'agit d'un sortilège relatif à l'amour. Enfin, je ne vais pas t'ennuyer avec les détails techniques...
— Tu ne m'ennuies jamais.
— Merci, mais bon, je pense que Godric sera le seul à un peu près comprendre le principe. J'ai déjà donné à Salazar les potions nécessaires.
— Moi qui pensais que tu étais contre ce sortilège.
— Mais je le suis ! D'un autre côté, j'aime quand les choses sont bien faites, alors...
Elle haussa les épaules.
— Je suis certaine que tu me caches quelque chose, insista Helga.
— Tu sais que j'ai horreur de mentir, protesta la sorcière à la chevelure de jais.
— D'accord, alors laisse-moi te préparer un bon dîner, pour te remercier de tout ce que tu as fait.
— Mmh, c'est vrai. J'oublie toujours que tu excelles dans les sortilèges liés à la nourriture. Tes recettes sont à se damner. J'accepte volontiers ton offre
— Merci, fit Helga en rosissant légèrement.
— Je vais prévenir Salazar et Godric : cela fait longtemps que nous n'avons pas mangé ensemble et j'aimerai savoir où en sont les travaux.
— Bien sûr ! Je te laisse les appeler, alors.
Une fois dans la petite cuisine de ses appartements, la sensation que Rowena lui cachait quelque chose revint avec force. Helga avait une excellente intuition, mais elle savait aussi que Rowena ne lui avait jamais menti.
Lorsqu'Helga revint dans son petit salon, Salazar et Godric les avaient rejoints.
— C'est vrai ? On peut enfin fixer une date pour la fin des travaux ?
— Oui Rowena, lui assura Godric. Bon il restera les finitions pour les sortilèges les plus complexes que nous devons jeter nous-mêmes, mais le gros oeuvre sera fini d'ici un bon mois. Le château sera déjà plus calme... Nous ouvrirons à la prochaine rentrée !
Aujourd'hui il portait une robe de couleur rubis avec des lisérés or. Il avait comme toujours ses cheveux bruns et longs réunis en catogan, et ses yeux d'un brun aux nuances dorées pétillaient de joie.
— Et bravo pour les potions que tu m'as demandé de réaliser, intervint Salazar. Ta façon de mélanger certains ingrédients est très ingénieuse, et je pense pouvoir même les améliorer.
— J'y comptais bien, après tout c'est toi le maître des potions.
Salazar hocha doucement la tête, appréciant le compliment.
— Si je comprends, fit Helga en posant les plats et les assiettes qu'elle avait fait léviter depuis la cuisine, nous allons pouvoir jeter le sortilège de la Saint-Valentin ?
— Oui. En plus comme la Saint-Valentin est dans quelques semaines, nous pourrons voir s'il se déclenche comme prévu avant l'ouverture de l'école, fit Rowena.
Elle paraissait vraiment ravie.
Trop ravie.
— Mais puisqu'il n'y a pas d'élèves, comme allons-nous vérifier qu'il fonctionne ? demanda Godric.
— La visite officielle prévue par le Ministre de la Magie. Il viendra avec plusieurs journalistes et plusieurs familles de sorciers avec leurs enfants. Nous leur montrerons le Choixpeau, que les enfants voudront sûrement essayer, et voilà. Le sortilège se déclenchera, l'un d'entre nous emmènera hors de Poudlard les deux personnes qui auront été choisies pour annuler le sortilège.
— Brillant, Rowena.
— Non Godric, logique. J'aime la logique dans la sorcellerie. C'est ce qui fait son charme.
Le dîner improvisé s'acheva bientôt, chaque Fondateur regagna ses appartements avec enfin, la sensation que l'école de sorcellerie de Poudlard serait un succès.
5
Quelques jours plus tard, Godric, Salazar, Rowena et Helga jetèrent le sortilège de la Saint-Valentin. Ils se tenaient dans la Grande Salle du Château : ils avaient décidé d'en faire le point focal du sortilège car tous les élèves et les professeurs s'y retrouveraient ensemble plusieurs fois par jour.
Cela leur prit tout l'après-midi.
Et lorsque le sortilège fut enfin achevé, Rowena conclut, presque guillerette :
- J'ai hâte de le voir en oeuvre !
Helga sursauta : elle savait que Rowena lui cachait quelque chose. Pourtant, elle savait aussi que la jeune femme ne ferait jamais rien pour nuire à Poudlard. Comme chacun d'eux, elle chérissait déjà cette école. Mais Helga Poufsouffle avait hélas aussi l'impression qu'elle ne saurait le fin mot de l'histoire que le jour de la Saint-Valentin...
