Auteurs : 4 mains – Ariani Lee/Plume d'Eau
Fandom : Kingdom Hearts
Disclaimer : Les personnages ne nous appartiennent pas et nous ne tirons aucun profit de cette histoire. Vaguement inspiré de la série « Dead like me » (très cool mais restée inachevée).
Résumé : Axel cherche un colocataire. Et parmi tous les choix qui s'offrent à lui, il était loin de penser que le plus rationnel serait celui-là.
Humour (noir), deathfic, major death character


Chapitre 1 : Challenge accepted !

Die, die, we all pass away
But don't wear a frown 'cause it's really okay
You may try 'n hide and you may try'n pray
But we all end up the remains of the days

Danny Elfman


Axel soupire un bon coup en posant le balai contre le mur. Ce n'est pas du grand art mais ça fera l'affaire. L'important, c'est que l'appartement paraisse aussi clean que possible, pas qu'il le soit vraiment.
Il traverse son salon pour aller chercher la balayette - qu'il a laissée près de la poubelle de sa propre chambre. Peu de chances qu'il fasse visiter cette pièce-là, mais vaut mieux être prudent. Quelques instants plus tard, le dernier tas de poussière (visible) a disparu et il a rangé ses instruments de nettoyage.

Il est 17h52 - et la première visite est censée arriver à 18 heures. Il est dans les temps !
Reste à voir si les trois personnes s'étant annoncées pour visiter l'appartement le seront aussi.
Un appartement somme toute confortable - une cuisine, un salon séparé, une salle de bain avec tout le confort et surtout deux chambres - mais devenu trop cher pour ses moyens. Raison pour laquelle il s'est mis à la recherche d'un colocataire.
Raison pour laquelle il s'est, surtout , mis à faire le ménage en cette fin de journée pluvieuse. Lui qui déteste ça par-dessus tout.

Avec un soupir, Axel jette un regard à l'horloge. Il ne lui reste que quelques minutes - pas assez de temps pour relancer une partie sur la console qui attend sous sa télé. Il lance à la place un coup d' œil à son bureau, hésite...
… et manque de sursauter en entendant la sonnette.
Une fois. Puis deux.
Trois.

- Ça va, ça va ! J'arrive !

Déjà lui, c'est mal barré. Axel se presse jusqu'à l'entrée et déverrouille les deux serrures. La porte s'ouvre et il s'efforce d'avoir l'air aussi avenant que possible.
Un type de son âge à peu près, avec le crâne rasé et un gros blouson de cuir zippé jusqu'au menton, se tient sur le palier. Axel note mentalement qu'en dépit de ses voies de fait sur la sonnette, le visiteur remplit déjà un de ses critères : il n'est pas du tout son genre. Avoir un coloc', a-t-il décidé, c'est comme une relation de taf, ça doit rester pro. Il cherche quelqu'un qui payera le loyer avec lui, pas un potentiel plan cul slash nid à problèmes. Or le gars - Florian, d'après ce qu'ils se sont dit au téléphone - est trop grand, trop chauve, trop carré, trop nerveux. Il a même l'air un peu patibulaire, mais Axel s'écarte pour le laisser entrer. On ne juge pas un livre à sa couverture. Il a un quart d'heure avant la visite suivante.

- Ok, donc… Ici c'est le salon. Au fond du couloir, y a ma chambre. Là…, continue-t-il en ouvrant la porte sur sa droite, c'est la salle de bain. La porte en face est la chambre de libre. Et au fond, on a la cuisine.

Florian regarde autour de lui, sa large carrure occultant presque la lumière du couloir.

- Y a un porte-manteau ? demande le visiteur. Il fait crevant, ici.
- Euh… Non. T'as qu'à poser ta veste sur une chaise ?
- 'Kay.

Le visiteur se détourne et se débarrasse de son blouson de motard qui n'aurait pas l'air déplacé dans un épisode de Sons of Anarchy . Il le lâche sur le dossier du canapé. Quand il revient, Axel voit qu'il porte un tee-shirt usé sur lequel s'étale un slogan délavé mais encore parfaitement lisible: LIBÉREZ BERTRAND CANTAT! Il s'arrête devant Axel, attendant qu'il poursuive comme si tout était parfaitement normal.
Ledit Axel hésite sur la conduite à adopter. Non seulement le mec balance ses affaires comme s'il était déjà chez lui, mais en plus, ce t-shirt. Ce t-shirt… alors que Cantat est sorti de prison depuis des lustres ?
L'expédier.
L'expédier, vite.

Au bout de quelques très longues minutes, Florian-et-son-tee-shirt reprennent le chemin de la sortie, au grand soulagement d'Axel.
Qui est persuadé que quoi qui puisse l'attendre après ça, ça ne peut pas être pire.
C'est toujours une connerie de penser ça. Parce que l'Univers ? L'Univers vous entend.
Challenge accepted !

Si la première visite était en avance… la seconde est en retard. Très en retard.
Ça fait presque dix minutes qu'il poireaute quand enfin, un coup de sonnette. Un seul, cette-fois, mais visiblement, on s'est endormi avec le doigt appuyé dessus.
Il rouvre la porte et se retrouve face à face avec une blonde qui le regarde avec des yeux brillants, un peu rouges, l'air vraiment, vraiment très fatiguée.
Axel la fait entrer. Elle est polie, quoiqu'un peu lente à répondre, et elle a le mérite de ne pas militer pour la cause nazie ou le Ku Klux Klan, c'est déjà beaucoup mieux que son prédécesseur. Il lui fait faire le tour du propriétaire, lui montre la salle de bain, les toilettes séparées.

- Ça nous évitera des situations gênantes, avance-t-il.

Elle ne le quitte pas des yeux une seconde. En fait, elle ne regarde pas du tout ce qu'il lui montre. Elle le couve, lui , de son regard trop brillant, les paupières à demi-baissées. Elle a l'air d'un fauve déjà repu. Axel finit par froncer les sourcils. Est-elle seulement en train de l'écouter, en fait… ?

- Et derrière cette porte, ajoute-t-il en indiquant du doigt la porte des toilettes, qu'il vient de lui montrer, je garde ma collection de camions de pompier grandeur nature et les lynx et les chauve-souris empaillés qui datent de mon examen de taxidermie. Ça ne te dérange pas j'espère ?
- Non, c'est cool, lui répond-t-elle d'une voix qui traîne jusque par terre.

Elle est défoncée. Elle est plus défoncée qu'un vieux matelas dans un squat. Elle plane tellement qu'elle a rien regardé, rien écouté. Si elle emménageait, elle débarquerait sûrement avec des pipes à eau et des bongs en guise de bibelots. Et peut-être une petite culture de cannabis, tant qu'à faire. Qui fume trois kilos d'herbe avant de visiter un appart'? Axel a déjà fumé un joint, il est pas complètement innocent, et elle a pas juste tiré trois coup sur celui qui traînait dans le cendrier.
Elle est complètement raide.

Il ne lui faut qu'une grosse minute pour la guider à nouveau vers la sortie avec quelques mots gentils. Il referme la porte derrière elle avec un soupir exaspéré.
Cette fois, Axel ne commet pas l'erreur de mettre l'Univers au défi de faire pire. Il ne lui reste qu'une seule chance, et il aimerait bien pouvoir manger jusqu'à la fin du mois, mine de rien. Depuis que son frère a déménagé, il ne peut plus payer le loyer et la proprio (qui est très gentille mais faut pas pousser Bobonne dans les orties) a déjà été bien patiente et compréhensive. L'argent ne pousse pas sur les arbres…
Quand la troisième et ultime visite arrive, Axel prie Bouddha, Allah, Odin et le p'tit Jésus pour que Raymond soit un plan viable. Pitié Raymond, me fais pas faux-bond !
Axel se gifle mentalement face à tant de nullité dans la vanne et ouvre à nouveau la porte.

Ne ressemble pas à un néo-nazi ? Check.
Ne semble pas être sous l'influence d'une substance psychotrope ? Check. (A part peut-être du prozac.)
N'est absolument pas au goût d'Axel ? Triple-check.
Au fond, tout ce que le plus jeune arrive à penser… c'est que Raymond a bien une tête de Raymond.
Après quelques politesses dont la banalité met du baume au cœur d'Axel, celui-ci reprend le circuit de la visite - il commence à avoir le coup de main. Raymond le suit, ses quatre-vingt kilos haletant derrière Axel comme s'il le faisait courir. Il y aurait quelques problèmes d'artères bouchées là-dessous que ça ne l'étonnerait pas beaucoup. Heureusement qu'il y a un ascenseur. Enfin, cela dit : ce visiteur-là est arrivé armé de ses dernières fiches de salaire, ainsi que de - miracle ?! - un certificat de bonnes vies et mœurs qui atteste de son casier judiciaire impeccable.
Raymond n'est pas très heureux. Fraîchement divorcé et une pension alimentaire qui ne lui laisse pas de quoi payer tout un loyer, il a comme un petit air d'infarctus qui flotte autour de lui. Pourtant, c'est de très loin la personne la plus agréable qu'Axel a vue de la journée. Pour tout dire, il lui fait un peu de la peine.

- Bon. Merci pour votre visite et votre dossier très complet. Je vais étudier tout ça - je vous appelle dans la soirée pour vous donner ma réponse.
- Très bien. J'attendrai votre appel alors. Bonne fin de journée.
- Ouais, la même.

Axel referme la porte en retenant un soupir, de satisfaction cette fois - content que tout ça soit fini. Et surtout, heureux à l'idée d'avoir trouvé ce qui doit probablement être - dans sa situation - la perle rare.
Il n'a pas le temps de faire un pas qu'un bruit sourd retentit dans son dos. Sourcils froncés, il fait demi-tour et rouvre la porte.
Et là, Raymond. Étalé de tout son long sur le palier. Il n'a même pas eu le temps d'allumer la lumière et il fait très sombre. Voire trop. La lumière qui sort de l'appartement par la porte ouverte a l'air de se faire manger par les ombres, mais Axel voit bien que son visiteur ne bouge pas du tout. Pourtant, il capte un mouvement dans le couloir. Un mouvement rendu presque invisible par la silhouette qui l'a effectué, dont l'habit noir se fond parfaitement dans les ténèbres. Sa présence n'est trahie que par un reflet de la lumière sur l'objet qu'elle tient à son côté – une faux qui fait deux fois sa taille.
Axel claque la porte.
Puis - comprenant ce qu'il vient de faire - la rouvre.

Raymond est toujours là.
La silhouette aussi.
Axel hurle.
La silhouette noire fait un bond de deux mètres et laisse échapper sa faux qui tombe dans un grand fracas métallique. La lame recourbée atterrit juste à côté d'Axel, qui se jette sur le côté.

- Mais qu'est-ce que c'est que ce délire ?!

Un voisin cogne contre sa propre porte en guise de protestation. La silhouette noire, beaucoup moins impressionnante sans sa faux, se penche pour la ramasser. Se redressant, elle porte une main à son capuchon et l'enlève.
C'est un gamin.
La faux fait réellement deux fois sa taille. Il a des cheveux blonds en pétard, des yeux bleus, une peau parfaite. La Mort est un adolescent de quinze ans avec un visage de poupée blasée.
La Mort ouvre la bouche.

- Tu me vois ? il demande.
- Tiens, une voix qui sort de nulle part, je me demande bien… Évidemment que je te vois, tu es juste en face de moi !
- Ah.

Axel attend de savoir ce que la Mort va ajouter.
Au bout de cinq interminables secondes de silence, il explose.

- Ah ? Ah ? C'est tout ce que tu as à ajouter, Denis Brogniart ?!
- C'est gênant.
- … Gênant. Il a dit "gênant". Un mec est mort sur mon pallier, c'était le colocataire parfait et surtout le seul que j'avais, et lui il dit que c'est "gênant".

Le gosse lui fait un regard de poisson mort.

- C'est tout ce qui te préoccupe ? Tu n'aurais pas dû me voir. Personne n'est censé me voir.
- Qu'est-ce que j'y peux, moi ? C'est pas moi qui t'ai demandé de venir cueillir ce mec en particulier.
- C'est pas moi qui décide. Il était sur ma liste, c'est tout.
- C'est facile, ça ! Et je fais quoi moi, maintenant ?!

Le gosse incline la tête sur le côté.

- Je ne sais pas, moi. Je l'ai fauché et puis c'est tout. Mais on a un plus gros problème. Tu m'as vu, je ne peux pas te laisser comme ça.
- Quoi, tu vas me faucher aussi, c'est ça ?
- Non. Ton heure n'est pas venue. Je réfléchis.

La scène s'éternise. Le gamin en robe noire et le jeune homme exaspéré, et Raymond en train de refroidir entre les deux. Axel en vient à se demander si tout ça est bien réel - ou si les vapeurs de l'autre visiteuse lui ont attaqué le cerveau sans qu'il s'en rende compte.

- Ouais bah, je vais te laisser réfléchir seul, hein. C'est pas mon problème tout ça.

Axel referme la porte. Un instant plus tard, il entend frapper. Derrière, la Mort, son instrument disparu, le regarde. Pokerface.

- Pourquoi as-tu dit qu'il était ici, déjà?

Derrière lui, Raymond gît toujours. Il ne va visiblement pas disparaître tout seul. Axel hésite un instant à refermer encore une fois la porte, puis à mettre des boules quiès.

- C'était mon futur colocataire. Merci encore hein, à cause de toi il va falloir que je fasse un choix cornélien entre un probable néo-nazi et une stonarde.
- Hum.

Une longue pause, puis :

- J'ai un problème.
- Sans dec' ? relève Axel. Moi aussi. Bonne journée.

Il referme la porte aussi sec - tout ça commence sérieusement à lui courir sur le haricot. La Mort est pas fichue de faire son boulot correctement et après elle vient se plaindre ? À lui?! Qui c'est qui va devoir gérer les conséquences ?
Axel tourne résolument le dos à la porte. Et se retrouve face à la Mort qui se tient maintenant dans son couloir. Normal. L'autre ne lui laisse pas le temps de hurler de terreur.

- C'est pas si simple. C'est toi mon problème.

Ça ressemblerait presque à une menace sauf qu'il a beaucoup plus l'air de commenter un match de tennis que de vouloir prendre son âme.
Axel pousse un soupir, se pince le nez. L'instant de frayeur est passé trop vite pour qu'il puisse s'y accrocher - ne lui reste qu'une immense lassitude.

- C'est bien beau mais qu'est-ce que je peux y faire ? T'as merdé, c'est à toi de réparer ! C'est pas moi qui me balade avec une faux qui fait deux fois ma taille.

Et comme l'autre n'a visiblement pas l'air décidé à disparaître de son couloir aussi vite qu'il est apparu, Axel le contourne pour retourner dans son salon en réfléchissant à voix haute.

- Du coup… le skinhead ou la fumeuse? Elle a l'air inoffensive, mais je veux pas de drogue ici. Mais l'autre a l'air encore moins fiable… Du coup, si je-

La Mort le regarde.

- Combien, le loyer?

Axel plante au beau milieu de son salon - et de sa phrase.

- … Pardon ?
- Le loyer. Pour la chambre. Il y a bien une chambre libre ?
- 425 euros.

La réponse a fusé, quasi automatique. Axel se reprend bien vite.

- Attends, quoi ? Pourquoi tu me demandes ça, au juste ?!

La Mort ressemble moins à un enfant dans la lumière du couloir. C'est toujours la Mort Jeune, ne nous mentons pas, mais pas prépubère non plus. Dix-sept ans, peut-être dix-huit. Petit mais pas aussi nain que la faux le faisait paraître quand il la tenait en main. Et une expression difficile à déchiffrer sur son visage lisse.

- Écoute… J'ai comme qui dirait commis un impair en fauchant ton visiteur sans me cacher. Normalement, je suis censé me rendre invisible pour faire ça mais j'ai oublié. Je n'ai plus l'habitude des endroits peuplés. Bref, je ne peux pas te laisser comme ça, mais je ne peux pas te faucher non plus. Et il se trouve - par le plus grand des hasards - que je cherche un nouveau logement.
- … Donc tu essayes de te taper l'incrust' chez moi ?
- Moyennant finances.
- Tu… je… qu… je… Quoi ?!

C'est définitif. Le monde a totalement cessé de tourner à l'endroit.
Ça, ou bien la réalité et le sens commun sont partis prendre le thé ensemble sans prévenir personne. Parce que là, il y a difficilement d'autres explications rationnelles à toute cette histoire. Désespérément, il essaye de redonner un sens à la conversation surréaliste qu'il est en train d'avoir - doit-on le rappeler - avec la Mort.

- Mais… depuis quand la Faucheuse - ou le Faucheur, hein, tu m'excuses - a besoin d'un endroit où dormir ? Et puis quoi encore, bientôt tu vas m'annoncer que tu manges ?! Que tu te pintes la tête ? Que tu vas aux toilettes ?
- Je peux, oui. Techniquement je n'en ai pas besoin mais je peux. Et j'aime bien avoir un toit au-dessus de la tête. Celui que j'ai en ce moment héberge trop de cafards à mon goût.
- Des… cafards. La Mort existe, peut dormir, et n'aime pas les cafards.

Axel fait quelques pas et se laisse tomber dans le canapé, la tête entre les mains. Un long soupir vide entièrement sa cage thoracique. Il ne sait pas quoi faire de plus, là. À part espérer qu'il est simplement en train de dormir et que son cerveau a décidé de lui sortir le rêve le plus incroyablement bizarre de la décennie.
Malheureusement, un pincement sévère sur son bras lui assure bien que ce n'est pas le cas. Sourcils froncés, il finit par se relever sans un mot et se dirige vers la cuisine. Il sent bien le regard du gam—de la Mort dans son dos, mais choisit de l'ignorer soigneusement au profit de son fil de réflexion.
Au final… il est de retour sur trois choix. Un potentiel nazi, une droguée assurée… et la Mort. Tu parles d'un choix. Sauf que, songe-t-il en préparant sa tasse tandis que la bouilloire chauffe, au-delà de l'absurdité de cette situation…
Le premier choix risquerait de ne pas payer, ou de transformer son appartement en repaire à gens comme lui . Ce qui ne l'enchante pas du tout. La deuxième risquerait bien de faire débarquer les flics pour une descente, ou de redécorer ses étagères avec des pipes à crack. Mais le troisième choix…
… Le troisième choix…

- Tu pourrais payer ? Sans faute ? Tous les mois ?

Il lui faut quelques secondes pour se rendre compte que oui, il a bel et bien posé cette question à celui qui le fixe toujours depuis le salon.
Quelques secondes pour se faire à l'idée… qu'il est vraiment en train d'envisager tout ça.

- Tu me prends pour qui ? On est des fonctionnaires, mal payés mais payés. Tous les mois.
- Sérieux ?
- Depuis le XIVème siècle, oui.
- Pourquoi le … En fait, je crois que je ne veux pas savoir.

Axel passe la main dans sa tignasse rousse, son cerveau tournant à toute vitesse.
Il pourrait tout à fait tenter de mettre cet adolescent sous anti-dépresseurs à la porte, mais quelque chose lui marmonne à l'oreille qu'il risquerait bien de se téléporter à nouveau dans son couloir rien qu'en clignant des yeux.
Et puis au final… Si Raymond est mort - d'ailleurs faudra peut-être qu'il fasse quelque chose pour ça , songe-t-il vaguement - et que lui se propose… et qu'il peut payer… Pourquoi pas ?
Avec un dernier soupir, qui hésite entre le décidé et le résigné, Axel se relève.

- Je te fais visiter ?

La Mort le suit, avec sa robe noire qui traîne sur le vinyle. La situation déjà surréaliste atteint son point culminant quand Axel ouvre la porte de la chambre libre. Celle-ci est censée ne contenir que ce que Reno y a laissé : une grande commode IKEA dont il a perdu le plan et qui n'aurait pas passé la porte à moins d'être démontée, et un lit deux personnes qui n'aurait pas survécu au déménagement, matelas compris.
Sauf qu'il y a autre chose, appuyé au mur juste en face de la porte.

- Je peux savoir ce que ça fout là ?! demande Axel en montrant la faux.
- Il faut bien que je la range quelque part, je ne peux pas la garder à la main toute la journée. C'est une des raisons pour lesquelles il me faut un logement.

Axel se pince à nouveau l'arête du nez, sourcils froncé et soupir aux lèvres.
Depuis quand cette fichue faux est-elle dans cette pièce, au juste… ? Et jusqu'à quel point la Mort a-t-elle prévu tout ça ?

- Ok, ok. Temps mort - sans mauvais jeux de mots. Si tu restes ici, il va nous falloir quelques règles. Et voilà la première : ce truc reste hors de ma vue. Sinon, je m'arrange pour qu'il finisse enfoncé dans un endroit très douloureux. Pigé ?

La Mort le regarde, et n'a pas l'air de piger plus que ça.

- C'est mon outil de travail. Il sera dans ma chambre ou dehors, et je vais éviter de refaire l'erreur d'oublier de me rendre invisible. Il n'y a pas de raison pour que tu me voies avec… à moins que ton nom apparaisse sur ma liste, évidemment.

Pas d'expression particulière en disant ça. Il pourrait être en train de parler de la liste des courses. Tiens d'ailleurs, parlant de courses…

- Et du coup… Tu manges ? Du genre, va-t-il falloir qu'on s'organise pour les repas ou bien comptes-tu piller le réfrigérateur sans prévenir?

La Mort se fend soudain d'un sourire.
Flippant.

- J'aime bien manger. C'est plus par curiosité qu'autre chose, je n'en ai pas besoin. Mais il y a des tas de choses intéressantes à manger par ici. Hier j'ai mangé des rala… halla… des ralapène… c'était vert et allongé avec un petite queue et ça croquait ? L'épicier me regardait de travers, je ne sais pas pourquoi.
- Est-ce que… tu es en train de parler de jalapeños ?!
- Voilà, c'est ça. J'en ai mangé dix. C'était croquant et juteux.
- …

Dix jalapeños.
Dix jalapeños . Dix des piments les plus forts du monde, engloutis à la suite, et probablement avec la même non-expression qu'il affiche depuis le début ? Pas étonnant que l'épicier l'ai regardé "de travers", oui ! Avec cette tête de poupée qui vient de prendre vie, le pauvre homme devait certainement se demander s'il ne devrait pas appeler les secours …
Mentalement, Axel se note quand même de prévoir un peu plus large sur les portions, à l'avenir. Mieux vaut prévenir que guérir - si son nouveau colocataire se prend d'une poussée de curiosité pour du hachis parmentier ou le quinoa, Axel sent bien que rien ne pourrait l'empêcher d'engloutir la casserole entière sans sourciller.

- Très bien… d'autres trucs que je dois savoir, sinon ?
- Je t'en ai déjà trop dit. Je ferai tout mon possible pour me comporter normalement. Je payerai ma part du loyer le premier du mois et j'achèterai mes propres aliments. Je n'ai pas besoin de grand-chose
- D'accord. Très bien. S'il y a besoin on mettra d'autres règles en place avec le temps, j'imagine.

Axel se gratte la tête, repartant dans le salon. Il attrape son thé - qui a salement refroidit entre temps - et en boit une gorgée.
Il s'apprête à essayer de reprendre le cours de sa petite vie tranquille quand un regard en direction du croque-mort inexpressif fait se connecter les deux derniers neurones encore en vie après cette hécatombe.

- T'as un nom, au fait ?

Le blond qui marchait derrière lui s'arrête net et reste planté là pendant un bon moment. Axel se demande si son mutisme est juste un refus de répondre à la question, mais un regard à ses yeux bleus le détrompe : ça tourne à plein régime là-dedans. Et il réfléchit longtemps avant de répondre.

- Roxas. Mon nom, c'est Roxas.
- Bienvenue chez toi, Roxas. Moi, c'est Axel. C'est bon, c'est retenu ?


Voilà. Vu qu'on écrit ça au feeling, les publications risquent d'être irrégulières mais bien sûr, on se laisse acheter par des reviews ! Et si vous avez des idées si situations comiques, n'hésitez pas à laisser un prompt. A bientôt !