Bonjour et bonsoir à tout le monde, vous qui avez survécu au RÉSUMÉPOURRIDELAMORT.
Ceci est mon premier passage sur le fandom Avengers et je connais probablement certains d'entre vous mais en tout cas, laissez-moi vous dire que même si ça fait presque dix ans que je suis dans la fanfic, c'est toujours la même petite pointe de stress lorsque vient le moment de poster quelque chose de nouveau.
Ceci est un Slash. Post Civil War. Avec un sous-entendu bromance pas tout à fait sous-entendu.
Vous découvrirez bien vite de quel côté j'étais pour Civil War, vu que mon point de vue sera largement exposé au cours de cette fic, mais la finalité de tout ça c'est bel et bien… Une romance pure et simple, avec des messieurs qui se font des blagues de cul et des bisous voire les deux en même temps.
Il sera question de tolérance, d'apprendre à se remettre en question, d'un chat un peu stupide, de cheveux longs, de barbes, de coupes de champagne et de Pepper qui fait très peur. Il sera question d'apprendre à pardonner aux autres, surtout à soi-même, de drague datant des années quarante et d'établis qui rentrent douloureusement dans les reins. Il sera question de loyauté qui devient un défaut innommable et de fiel mesquin qui suinte un peu par les pores. Il sera question de ne rien laisser inachevé. Il sera question d'art aussi. Un peu.
Ça a été écrit sur Vamos a la playa de Loona, Nightcall de Grammar London, Si Facile et Inachevés des Casseurs Flowteurs.
J'espère que vous prendrez plaisir à découvrir qui je suis et ce que j'écris, autant que j'ai pris du plaisir à vous lire ou à écrire cette fiction.
Merci à Absolette, ma beta, qui a eu la lourde tâche de remplacer ma beta historique, Moody Poison, afin de rendre ce texte lisible.
Métallifère – Partie 1
Sur la table de la cuisine traînait un courrier qu'il avait lu en diagonale et abandonné là en attendant d'avoir plus de temps pour le consulter dans le détail. La façon dont la lettre avait été pliée laissait uniquement voir la signature « Bons baisers, Dan ».
Il posa le sac de courses et entreprit de fouiller dedans afin de ranger au frais les produits périssables. Il referma la porte du frigidaire d'un coup de pied léger, attrapant le paquet de croquettes qu'il ouvrit pour en déverser un peu dans le bol qui trônait au coin du plan de travail.
La queue noire qui ne tarda pas à venir se frotter contre son tibia lui arracha un sourire et Steve se baissa pour attraper la boule de poils entre ses bras, chuchotant :
— Eh oui, le chat, c'est pour toi… Tu ne penses vraiment qu'avec ton ventre.
L'animal le gratifia d'un miaulement éraillé, incapable de pouvoir émettre un son plus distinct et le cœur de Steve se gonfla de tendresse pour la bête. Il tendit son index droit pour lui gratouiller la tête. La vue de sa main transforma son sourire en une grimace un peu douloureuse. Il avait encore une trace de la brûlure qu'il s'était fait la semaine passée, quand Dan lui avait annoncé, passant à son atelier, qu'il avait l'intention de l'exposer dans une célèbre galerie de New York.
La surprise avait été telle que son doigt avait dérapé sur le bout de métal qu'il était en train de sculpter et la brûlure avait pulsé longuement, lui rappelant que ce que Dan lui proposait n'était pas un rêve trop beau, comme ceux qu'il faisait souvent.
Laissant le chat déguster ses croquettes, il se tourna et appuya sur le bouton de la radio, avant de s'emparer de nouveau de la missive pour la parcourir des yeux. Dan lui annonçait que l'exposition de New York se préparait gentiment et qu'il était fort possible que le triptyque qu'il avait fini de composer – la brûlure lui était venue du dernier pan de ce tableau en trois parties et trois matières – fût le clou du spectacle.
L'agent artistique avait un flair incroyable pour repérer les œuvres qui allaient fonctionner. Il était tombé en admiration devant le triptyque qui représentait trois Avengers. Il n'avait pas fait le moindre commentaire, mais Steve savait parfaitement qu'en dépit de ses cheveux plus longs, des lunettes de vue à la monture épaisse et de la barbe qui lui dévorait les joues, Daniel West avait reconnu en lui le célèbre Captain America.
Cette œuvre d'art était aussi belle que novatrice. Elle jouait avec les matières, dessinant un Spiderman dans des toiles d'une soie tissée avec soin – Steve avait eu de mal à trouver le tissu qui correspondait exactement à ce qu'il avait en tête –, parsemant Tony Stark de métal sur sa joue droite et son bras gauche. Pour finir, de fines lumières décoraient les mains de Black Widow, sublimant les courbes de la jeune femme.
West était tombé amoureux de ce tableau. Il dégageait énormément de choses, de sentiments contradictoires et un frisson intense avait remonté le long de son échine la première fois qu'il l'avait vu. C'était comme s'il se trouvait en plein milieu d'un règlement de compte entre superhéros.
Il avait remarqué les regrets imprimés sur le visage de Widow, trop appuyés pour qu'ils n'émanassent que d'elle.
Il y avait Spiderman, nouvelle recrue des Avengers qui avait su se faire une place dans cette équipe, dont l'attitude volontaire laissait entendre que Steve l'acceptait en tant que relève.
Et surtout, il y avait Stark. Stark dont la stature dominait les deux autres. La position même des corps sur les trois toiles montrait que Captain America investissait lui-même Iron Man de son statut de leader, tant sur les anciens que sur les nouveaux Avengers.
Il était évident pour n'importe qui un peu au fait de ce qu'il s'était passé entre les Avengers que cette toile était le récit à la peinture d'une histoire que Steve ne pouvait raconter avec des mots, tant elle était difficile à formuler.
Si Daniel n'avait rien dit aux autorités à propos de Captain America, c'était uniquement parce que perdre un tel artiste n'était pas concevable pour ses affaires. Dans peu de temps, Steve Rogers se vendrait à plusieurs millions de dollars pour une œuvre aux dimensions étriquées. Il n'osait même pas imaginer à combien il pourrait écouler ce triptyque si canon d'ici quelques années.
Steve replia le courrier et monta un peu le son de la radio, se dandinant gentiment au son de la musique qui était diffusée. C'était un de ces tubes de l'été dont personne ne se souviendrait l'année suivante, mais ça suffisait bien assez pour le mettre d'humeur affable. Le chat était toujours sur le plan de travail et miaulait silencieusement, refermant sa gueule d'un air vexé quand il constatait que rien n'en sortait.
Il se percha sur un des tabourets de la table haute qui trônait au milieu de la cuisine et saisit son carnet, dans la ferme intention de travailler plus longuement son prochain projet. Modeler le métal pour son triptyque lui avait tellement plu qu'il envisageait de prolonger l'expérience avec une sculpture. Il en dessinait quelques esquisses depuis quelques jours, une fois qu'il put de nouveau tenir un stylo après sa brûlure.
Bucky allait bientôt rentrer. Il travaillait à la frontière, sur des chantiers. Ce n'était pas le meilleur job du monde, mais ça leur permettait de vivre à peu près décemment. Ils louaient une petite maison et le garage avait rapidement été transformé en atelier pour Steve. Les premiers temps, ils s'étaient juré que ce n'était que provisoire, histoire d'attendre que les Accords de Sokovie se tassassent un peu. Puis les semaines avaient passé, les années avaient chassé les mois et finalement, ils s'étaient habitués à cette nouvelle vie. Surtout depuis que le chat était avec eux.
L'animal leur ressemblait. Oublié de tous, il était en train de mourir de faim dans l'appartement de sa propriétaire décédée quand il avait enfin trouvé une ouverture qui lui avait permis de fuir vers l'extérieur. Malheureusement, il avait surtout rencontré la voiture qui roulait à ce moment-là et s'était traîné dans les buissons, agonisant lentement et seul. C'était Bucky qui l'avait recueilli et ramené. Ils avaient passé des semaines à le soigner doucement. Son pelage était parsemé de trous et sa queue avait été brisée sans espoir de réparation. L'unique chose qu'il conservait de son ancienne propriétaire était un collier rouge un peu délavé et une médaille en argent qui y était fixée.
La bête n'était pas très vive, elle passait plus de temps à se coller dans leurs pieds quand ils étaient chargés qu'à chasser les souris. En plus, elle détestait les câlins. Mais Bucky et lui s'y étaient attachés. Il était cassé, le chat. Un peu comme eux qui sursautaient toujours en entendant une voiture de flics. Il avait des cicatrices qui ne partiraient jamais, comme Bucky et son bras de métal, comme Steve et le regard apeuré de Tony qui brûlait encore ses souvenirs.
Il reposa son crayon, incapable de se concentrer sur ses esquisses, et il tourna la tête pour observer le chat qui se dandinait au bord du plan de travail. Il finirait par sauter et atterrir de travers, puis par se sauver, la queue raidie par la fierté blessée d'avoir chuté devant Steve qui rirait à gorge déployée, ne prenant pas la peine de se cacher pour ne pas vexer le chat. C'était un classique. C'était sa nouvelle vie.
Et c'était reposant.
Il n'y avait pas de méchants, pas de gentils, pas d'armes, de menaces ultimes, de monstres de foire, d'hypocrisie drapée des meilleures intentions, de génies aux tendances psychopathes ou d'assassins repentis. Pour une fois depuis qu'il était devenu Captain America, la seule chose qu'il avait à craindre était d'oublier le beurre de cacahouètes en allant faire les courses.
L'exposition était une aubaine et Steve avait accepté avec bonheur d'y présenter ses œuvres, à la condition de ne pas devoir s'y rendre lui-même. Dan lui avait concédé sans même chercher à comprendre pourquoi – ce qui avait confirmé à Steve qu'il savait qui se cachait derrière les traits du gentil artiste de l'atelier-garage. S'il parvenait à vendre une seule de ses œuvres, ça leur permettrait de racheter une voiture, pour que Bucky n'allât plus travailler en autocar.
Que Steve aimait cette vie simple, exactement comme il pensait mener en étant bien plus jeune. Avec le sourire, il tapota le rythme de la chanson et reprit le stylo. Il était temps de se mettre au boulot.
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La cravate de son costume l'étouffait un peu et il porta une main à sa bouche pour tenter de réprimer le bâillement horrible qui piquait ses yeux des larmes de la fatigue. Tony avait bossé toute la nuit sur un prototype de jet pour la nouvelle équipe d'Avengers. Il avait enchaîné la journée avec la garde du jeune Peter, avant d'encaisser les grognements de Natasha qui ne parvenait à trouver ni Bruce ni Clint, comme s'ils s'étaient tous les deux évaporés. Il avait tenté une blague vaseuse, s'attendant à recevoir un regard noir et la seule œillade qu'il avait aperçue était si triste qu'il en avait failli s'excuser.
À présent, Pepper l'avait traîné à l'inauguration d'une galerie d'art qu'elle avait acquis en tentant désespérément de se venger de la fois où il avait vendu toute sa collection d'œuvres aux scouts. Elle était juste à côté de lui, parfaitement éblouissante dans cette robe sublime qui collait à son corps et ils se trouvaient face à une assistance qui buvait littéralement les paroles de Pepper. C'était bien la première fois qu'il était heureux de ne pas être le centre d'attention, juste pour pouvoir bâiller tant qu'il le pouvait sans que le Cerbère qui lui servait de PDG ne le foudroyât du regard.
Elle était déjà bien assez douée pour lui faire des reproches, tissés au travers du discours d'inauguration. Elle avait évoqué la Sokovie d'une telle façon que seul lui avait pu lire entre ses mots tout ce qu'elle lui imputait à propos de la signature de ces Accords. Pepper s'était toujours révélée contre. Ils s'étaient de nombreuses fois disputés à ce propos et elle n'avait pas digéré la disparition du Captain Igloo — à croire qu'elle en pinçait secrètement pour lui, pensa-t-il aigrement.
Il était vrai que depuis que l'ONU exerçait un contrôle sur les Avengers, ça défrisait moins, les missions. C'était fréquent qu'ils arrivassent trop tard pour empêcher les catastrophes et plus souvent qu'à leur tour, ils offraient à leur souvenir de nouvelles scènes de cimetières ouverts. La première fois qu'il avait dû soulever le corps d'un enfant si petit qu'il avait eu peur de le casser, il avait regretté de ne pas avoir agi comme Rogers qui avait pourtant vu ça venir. Depuis, il essayait de se convaincre qu'il avait eu raison, qu'il œuvrait pour le plus grand bien, mais en son for intérieur, il avait plus l'impression d'être un fossoyeur qu'un Avenger.
S'il restait, c'était uniquement pour Nat et Peter. (Et aussi parce qu'une retraite anticipée ne lui convenait pas. Il mourrait d'une crise cardiaque en plein combat, entre lasers venus de l'espace et monstres de foire, pas en ratant un swing au golf, merci pour lui.) Il savait qu'il faisait un leader médiocre, qu'il n'avait pas la carrure pour diriger une association comme les Avengers, il n'était même pas capable de s'occuper de lui tout seul, comment pourrait-il gérer d'autres personnes, bon sang ? Mais il le faisait, malgré tout, et avec le sourire, s'il vous plaît, parce qu'il n'avait pas le choix. Il ne pouvait pas se résoudre à abandonner ses deux amis en pâture. Vision pourrait se débrouiller tout seul — cet être artificiel était probablement plus réussi que lui ne le serait jamais. Une sorte de mélange entre la perfection du Captain, l'intelligence de Jarvis et l'espèce de truc divin que possédait Thor.
Il secoua légèrement la tête en entendant des applaudissements qui retentissaient et il eut le geste à retardement, souriant innocemment à Pepper qui portait sur lui une nouvelle œillade méfiante. Depuis qu'ils n'étaient plus ensemble, elle le surveillait comme s'il était du lait sur le feu, prêt au moindre débordement à chaque instant de faiblesse. Finalement, il se para d'un rictus charmeur, lui tendant son bras, auquel elle suspendit avec un air un peu crispé. Descendant de l'estrade en prenant bien garde à saluer quiconque le connaissait, il retint un nouveau soupir. À présent, il allait falloir naviguer entre les œuvres et faire semblant de s'extasier devant le peu de talent dont faisaient preuve les artistes. C'était Pepper la spécialiste de l'art. Lui n'arrivait pas à s'émouvoir de ça. Son truc, c'était la mécanique, la physique, l'électronique et les superhéros. Pas ça. Pas des coups de crayon sur une toile, dont les noms alambiqués le faisaient toujours rouler des yeux. Il détestait tout ce qui essayait de se donner un air important.
Il passa devant un monochrome de rouge sans lui jeter un regard alors que Pepper tirait sur son bras pour pouvoir s'arrêter et le contempler longuement, lui faisant remarquer le mouvement du pinceau, la volupté des courbes que ça dessinait. Après quelques minutes, elle lui glissa à l'oreille qu'elle le trouvait en vérité hideux, mais que le peintre se situait seulement à une paire de mètres d'eux et qu'elle ne pouvait pas le dire trop fort. Il pouffa et une bouffée de nostalgie le prit au corps.
Il regrettait de ne pas avoir pris plus soin de son couple. Bien sûr qu'elle était plus heureuse sans lui, mais c'était précisément ce constat qui lui brisait un peu le cœur à chaque fois. Il avait eu la chance de pouvoir se refléter dans ses regards amoureux et il avait tout saccagé. Et dire qu'il avait toujours pensé que la culpabilité ne lui seyait pas…
Le tableau suivant était mieux, mais guère plus. Pepper ne fit qu'une légère moue avant de décrire ce que l'œuvre lui inspirait, mais elle entraîna bien vite Tony plus loin, alors qu'il soufflait dans sa coupe de champagne pour faire des bulles plus grosses à la surface, comme un enfant exhale un grand coup dans sa paille. À la dérobée, il observa Pepper et ses lèvres brillantes, ses petites dents qui dépassaient alors qu'elle laissait un sourire ravi la saisir au creux de l'admiration d'un tableau. Il attrapa au vol le regard étincelant d'étoiles, de malice et de dureté de la jeune femme, regrettant une nouvelle fois de ne pas avoir su la chérir comme elle le méritait. Elle était probablement la plus belle des œuvres d'art de cette pièce. Elle tira sur sa manche pour le forcer à se concentrer et il eut toute la peine du monde pour entendre le chuchotement qu'elle glissa dans son oreille.
— Contemplez le tableau plutôt que me manger des yeux, Tony…
Il allait lui dire qu'il ferait bien plus, ou peut-être susurrer qu'elle était la plus ravissante de toutes les toiles étendues dans cette salle, mais ses rétines dévièrent vers un nouveau tableau. Il sentit sa main trembler avec une force inattendue, comme si son corps réagissait sans qu'il eût tout à fait conscience de ce qui se trouvait devant lui. Il contemplait une peinture de lui-même, dans un triptyque qui le liait à Natasha et Peter. Pour une fois dans sa vie, il ne chercha absolument rien à redire et posa sa coupe sur le plateau d'un serveur qui passait par là, craignant de la lâcher et de faire scintiller le verre en mille éclats comme le faisait le métal qui avait accroché son regard.
Un homme se précipita vers lui en voyant que l'œuvre avait su retenir son attention plus d'un quart de seconde. Il lui tendit une main, que Pepper saisit à sa place.
— Mme Potts, M. Stark, je suis Daniel West, c'est un de mes protégés qui a créé cette œuvre.
Tony avisa l'homme avec plus de curiosité. Le visage carré, pas vraiment symétrique, des yeux marron et les cheveux grisonnants, Daniel West n'avait rien de remarquable, si ce n'était une réputation de dénicheur de talents qui le précédait auprès de Pepper. Elle lui sourit chaleureusement et entama une discussion à laquelle Stark ne prêta plus attention. Il était entièrement tourné vers l'œuvre qui le représentait. Le jeu de matière était excellent et le métal avait exactement la teinte de son armure. La peinture s'amusait avec les lumières glissant sur le visage de sa reproduction et son expression était pleine d'une détermination qu'il ne s'était pas vue depuis trop longtemps déjà.
La chemise déchirée de son double proposait un drapé stupéfiant de réalisme, les jeux d'ombre étaient bons et glissaient sur la cicatrice qui ornait son sternum avec un talent certain. Son regard s'égara sur sa gauche et il s'approcha de la toile représentant Black Widow, surpris de distinguer dans les yeux de Nat quelque chose qui ressemblait aux silhouettes de deux hommes que Tony identifia comme Bruce Banner côté cœur, et Clint Barton à droite. Le dessin de Spiderman manquait un peu de vie et restait néanmoins excellent.
Il était scotché. Complètement éberlué. Jamais représentation des Avengers n'avait été aussi juste, tant dans les postures que dans les expressions. Jamais il n'avait eu la sensation d'être compris comme il l'était par ce dessin qui avait su, dans la courbe d'une ride au coin des lèvres, exprimer l'ensemble de ses regrets, qui avait subtilisé la flamme de ses yeux pour la glisser partout dans le regard de son jumeau de peinture et de métal.
Pepper discutait toujours avec l'agent artistique et il tenta de se désintéresser de l'œuvre pour se concentrer sur le dialogue qui se jouait :
— L'artiste est quelqu'un d'assez timide et de délicat à approcher, commentait Daniel West. Il préfère d'ailleurs garder l'anonymat, comme s'il pensait que ses toiles n'en valaient pas vraiment la peine.
— Est-ce un coup d'essai ? demanda Pepper avec un sourire.
— J'aurais adoré vous dire que c'est le cas, ç'aurait été un coup de maître, mais l'homme est un habitué. J'ai sélectionné sa toute dernière œuvre pour la présenter, je trouvais le jeu de matière très intéressant et le message de l'œuvre est tout ce qu'il y a de plus troublant…
— Ce n'est que la représentation des Avengers, commenta Tony d'une voix acide. On en voit des dizaines sur le marché. Pas vraiment besoin d'aller chercher un message caché là-dedans.
— Tony, avertit Pepper d'un ton de basse. Moi, je les trouve excellentes. Vous féliciterez l'artiste de notre part, il faut absolument cultiver ce talent. A-t-il un nouveau projet ?
Daniel West esquissa un sourire et hocha la tête, pendant que Tony s'approchait et frôlait la petite plaque portant le nom de l'œuvre, son doigt retraçant doucement les lettres, une par une, scrutant le bas du cadre à la recherche de la signature de l'œuvre. Il était en train de suivre les contours du deuxième L quand il la trouva. Il cligna des yeux. Ses lèvres s'entr'ouvrirent légèrement et ses doigts tremblèrent une nouvelle fois.
— D'après ce que m'a dit son compagnon, il voudrait s'essayer à la sculpture du métal. Le travail de cette matière lui a, semble-t-il, procuré beaucoup d'inspiration.
— Je les prends.
La voix de Tony fit sursauter Pepper. Elle s'étrangla un peu « Pardon ? » avant de toussoter dans sa main pour tenter de retrouver une contenance. Stark fit volte-face pour affronter le regard de Daniel West qui brillait d'un sentiment mitigé entre surprise et fierté. Un serveur s'approcha avec un plateau, Tony saisit une nouvelle coupe de champagne qu'il but d'une traite, la reposant vide sur le plateau.
— Votre prix sera le mien. Je veux que ces toiles décorent le hall du Manoir Avengers demain matin. Pepper, je vous laisse vous charger de la paperasse. Je rentre, j'ai vu la seule chose qui valait le détour.
Il s'en alla comme il était venu, acclamé comme un prince et Pepper adressa un regard d'excuses à West qui ne semblait pas comprendre ce qu'elle voulait qu'il pardonnât. Elle lui proposa vingt millions pour les toiles, il couina un peu — parce que pour une première toile vendue, quand même, c'était loin d'être une petite somme — elle se méprit et monta à trente. Il accepta d'un hochement de tête halluciné, la main serrée sur celle de Mme Potts, l'autre pinçant discrètement sa cuisse pour s'assurer que c'était bien la réalité qui se jouait devant lui.
Steve Rogers venait de commencer une carrière d'artiste qui était garantie comme très bien partie, grâce à Anthony Stark, premier acquéreur, alors même qu'ils n'avaient pas eu le moindre contact depuis trois ans et s'étaient quittés de façon déchirante sur les Désaccords de Sokovie.
Si ce n'était pas si triste, ce serait à mourir de rire.
Bon, j'espère que vous avez aimé cette première partie. Je dois bien avouer angoisser un peu, ça fait des siècles que je ne me suis pas lancée dans un slash. N'hésitez pas à commenter pour tout me dire, on se retrouve en MP pour de plus amples discussions !
