Bonjour à tous ! Me revoici pour une nouvelle fic dans l'univers crée par Ywëna, sur les cendres fumantes de l'explosion du Parfum des Arums.
Alors, c'est quoi cette fic ? C'est un recueil de One Shot, chacun racontant la rentrée 2015-2016 d'un élève sorcier dans une des 27 écoles du Monde Magique. Ces écoles proviennent en quasi-totalité de headshots pris sur Tumblr, et traduits par Ywëna. Les autres sont les écoles canons, sauf Mighty Adler qui vient de moi (basé sur des idées trouvées sur The Other Time).
Il n'y aura pas vraiment de rythme de publication, j'écris cette fic de temps en temps quand j'ai une panne dans Entre les Mondes. Pour le style… ça devrait pas trop changer. Du sérieux, du drôle, du WTF, et des expériences sadiques avec mes personnages.
Par contre, comme le titre le suggère… les liens seront très nombreux. Pas forcément dans tous les chapitres, mais vous vous doutez bien que quand il sera question de Poudlard, Mighty Adler, Salem, etc… Enfin bref, je voudrais pas spoiler !
Disclaimer : LIBERTÉÉÉÉÉ ! Et pis vive Joanne !
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1) Afrique du Sud : Palier de Drakensberg
– Dépêche-toi, Richard ! Le bus pour Bloemfontein part dans quinze minutes !
– Hé, on a le temps, Cici, c'est au bout de la rue !
– Je te rappelle que tu n'as même pas fini tes valises…
– Si.
– … et que tu es chargé comme un buffle. Et non, tu n'as pas fini. Tu comptes faire comment, sans ça ? demanda-t-elle en désignant une vieille paire de basket usée par le temps.
– Mais Ciciii ! Je vais pas mettre ça ! C'est trop l'air con, on dirait des passoires !
– Hé ! Maman te les a achetées au market i peine deux ans. Malheur à toi, fils indigne, qui use l'argent de notre mère à shooter dans des cailloux.
– Je fais du foot de rue…
– Un ballon vous aurait coûté moins cher que des baskets neuves ! Tu crois que l'école s'appelle "Le Palier" par plaisir ? T'y vas en sandales, elles sont mortes avant la quinzaine. Et au lieu de discuter, file ! Si tu rates le bus, tu rates la navette, tu rates la rentrée !
– Qu'est-ce que t'en sais, toi ? marmonna Richard.
Sa sœur lui jeta un regard sombre.
– J'ai entendu, petit crétin. Et je te rappelle que j'y suis déjà allé, moi. Mais je dois aider Maman à l'usine. Soit heureux que le Frappe-Pierre t'ait évité de devoir descendre avec le paternel.
– Descendre ? À la mine ? Plutôt me pendre par les pieds à un cactus courbé par le vent sablonneux.
– Par nos ancêtres, Richard, file !
– Grmblr…
Richard Gaenlou ajusta son sac à dos, glissa sa sacoche en bandoulière, empoigna sa valise d'une main, et son grand sac de sport de l'autre. Sa sœur glissa de force la vieille paire de baskets dans ce dernier, pendant qu'il enfilait ses sandales. Il quitta ensuite la maison, et descendit la rue en direction du bus, qui était déjà là. Emporté par le poids de ses bagages, dans son élan pour descendre la côte, il percuta de plein fouet le bus. Le contrôleur ricana, puis, charitable, l'aida à charger ses bagages dans la soute. Depuis le village, il y avait quasiment cinq heures de bus pour se rendre à Bloemfontein, capitale judiciaire de l'Afrique du Sud, ville fondée par les Afrikaners, mais surtout, point de départ des navettes en direction du Palier de Drakensberg, le fameux Institut Sud-Africain pour Sorcières et Sorciers, suspendu à flanc de montagne.
Car oui, Richard Gaenlou était un sorcier. Du haut de ses onze ans et demi, il s'apprêtait à traverser le pays en solitaire, pour rejoindre le Frappe-Pierre, un vieillard qui semblait avoir trois-cent ans et demi, et qui faisait la liaison entre le pays et l'école par le biais des Pierres Chantantes. Bien sûr, son rôle ne s'arrêtait pas là, puisque c'était également lui qui venait prévenir les familles que leur enfant était né sorcier. Richard, bien sûr, n'avait jamais vu le vieil homme, sa mère étant sorcière, de même que sa sœur. Mais la réalité de leur campagne reculée était différente. À quatorze ans, tout juste détentrice du Premier Grade, sa sœur Cicélione avait dû quitter l'école pour aider leur mère, qui après avoir quitté elle aussi l'école s'était retrouvée dans une usine de paillage de balais volants. Leur père, lui, était un moldu travaillant aux mines de diamant. On aurait pu penser, dans un environnement pareil, qu'il aurait trouvé à s'enrichir. Mais la mine était régit par deux frères sorciers afrikaners cruels et vénaux, et toute tentative de vol de diamant, même un éclat de quelques carats, valait au malheureux d'horribles souffrances dues aux pièges antivols irradiants de magie noire. Un matin, Richard avait enfin reçu l'appel du Frappe-Pierre, et se rappela être allé danser la gigue sous l'orage, soulagé de ne pas devoir finir aux mines.
Profitant de l'interminable trajet en bus, Richard ressortit sa liste, ainsi que son itinéraire. Par le biais du bus, il rejoignait Bloemfontein, où l'attendrait des navettes affrétées pour trois élèves chacune. Ces navettes étaient des voitures moldues conduites par des sorciers, qui emmenaient les futurs sorciers aux Pierres Chantantes, une étrange formation de roches qui servait de portail vers l'école de magie et de moyen de communication à distance, et autour de laquelle un village sorcier s'était construit au fil des siècles. Là, il pourrait acheter ses affaires d'école, puis prendre le portail vers l'école. Richard consulta ensuite la liste en question : Une baguette magique, une amulette de concentration sous quelque forme que ce soit, des plumes, de l'encre, et trois ou quatre grimoires. Voilà ce qui faisait un sorcier en Afrique du Sud : De quoi pratiquer la magie, de quoi apprendre les bases, et des cours servant plus de guide que d'apprentissage. Ici, on favorisait l'instinct, et l'innovation.
Une fois ses valises déchargées du bus, Richard marcha jusqu'à St George Street : les navettes attendaient devant le first raadsaal, le plus vieil édifice de la ville. La rue était plutôt tranquille à cette heure tardive, et Richard n'eut aucun mal à remarquer la limousine garée en travers du trottoir, et les deux hommes en tenue de groom qui défilaient avec des valises. Enfin, alors qu'il arrivait à leur niveau, l'un des hommes sortit une cage renfermant un perroquet de l'arrière de la limousine, tandis que le second ouvrait l'autre porte. Une jeune fille blonde à la peau très pale en sortit. Elle devait avoir l'âge de Richard, et était vêtue comme une poupée de porcelaine. Malgré l'heure avancée, l'homme qui lui avait ouvert la portière ouvrit une ombrelle ornée de dentelles, et l'accompagna jusqu'à la navette. Celle-ci consistait en un minibus grossièrement repeint en blanc qui comptait onze places en plus du chauffeur, avec un large numéro peint en noir sur le côté. Navette numéro trois : celle que Richard devait prendre. L'un des hommes remonta dans la limousine, et ne tarda pas à démarrer. Le second monta dans la navette, et, après avoir glissé une bourse au chauffeur qui protestait, alla s'asseoir à côté de la jeune fille. Richard se décida enfin, et s'avança vers sa navette.
– Bon… bonjour, m'sieur, salua-t-il dans un anglais hésitant. C'est bien la navette pour le P…
– Pchhhhhh ! le réprimanda le chauffeur, un vieux métis à la peau tannée dont la bouche allait presque d'une oreille à l'autre. Pas si fort, les M-O-L-D-U-S vont t'entendre.
Richard tourna la tête à gauche, à droite, se retourna… et haussa les épaules. La rue était déserte, à l'exception d'une jeune fille aux cheveux tressés qui, comme lui quelques minutes auparavant, arrivait à pied en traînant ses valises.
– Y'a personne, m'sieur.
– Prudence, PRUDENCE !
– … Ouais. C'est la bonne navette ?
– Tu dois prendre la numéro trois ?
– Ag, ouais, répondit le garçon en agitant le feuillet sur lequel il avait noté le message télépathique du Frappe-Pierre. "Bloemfontein, first raadsaal, navette n°3, le 21 Mars à 18h30." On est bon, condai ?
– On est bon, Ou ! Embarque, t'es le deuxième, après la petite cullis qu'à peur de choper du hâle, à côté de son laanie de compagnie.
– Shot, m'sieur.
– De rien ! Allez, escalade vite, y'a une stekie chargée comme un baril qui se pointe à l'horizon proche. M'est d'avis qu'on va jamais pouv'ar faire rentrer les packages de tout le monde, si ça continue à c't'allure.
– Je pourrais peut-être prendre un de mes sacs sur les genoux ?
– Te noue pas la culotte pour ça, Ou !
Richard monta alors dans le bus, et, par réflexe, alla s'asseoir au fond du minibus, le plus loin possible de la petite blanche. L'apartheid était peut-être de l'histoire ancienne, mais qu'un pauvre noir s'assoit au même niveau qu'une riche blanche aurait été pris pour une provocation ouverte, et Richard ne cherchait pas le conflit. Le temps de charger ses valises dans la soute, et la nouvelle arrivante monta dans le minibus. Elle fit mine de s'asseoir à l'avant, au niveau de la fillette blonde. Le groom lui jeta un regard plein de sous-entendus, et elle se releva et se dirigea vers le fond du bus. Elle se laissa tomber sur le siège du milieu, et après une série de gestes obscènes à destination du dos du groom, elle remarqua Richard à côté d'elle.
– Se croient tout permis, ces damnés Gorra Ou ! Salut, moi c'est Babsie.
– Richard. Rop de t'rencontrer.
– De même. Tu viens d'où ?
– Un petit village du côté de Tosca.
– Connaît pas !
– Une dorpie à cinq heure nord de Bloem'
– Aitsa ! Moi je suis de Kakamas.
– Ah, je connais, c'est à l'Ouest !
– T'es plus doué en géographie que moi, on dirait.
– Shot !
– Hé, t'la déjà vu la kugel ?
– Ag, laissez-là donc un peu ! Kugel, kugel ! On va pas se juger toute la journée, c'est triste !
– Hé, lag un peu, tu vas déteindre !
– Hum, désolé. J'étais ami avec un afrikaner dans mon village. Tout le monde le méprisait parce que sa famille était riche alors qu'il voulait juste des amis. Et son père l'a frappé à coups de ceinturon, et a menacé de virer mon père le jour où il a su qu'on était amis. Ouais, c'était le fils de son patron. Je me rappellerai toujours de la réaction de mon père. Il a retiré sa vieille ceinture, et…
– Il t'a battu aussi ?
– Nan, il me l'a donné, et m'a dit : "Je suis fier de toi, mon fils. On ne juge pas un enfant au poison qui emplit les veines de son père."
– Un chic type, ton paternel.
– Jawelnofine…
– Je vois. Des sorciers dans ta famille ?
– Ma mère et ma sœur. Toi ?
– Née-moldue.
– Ah, tu l'as su comment ?
– J'ai foutu le feu à ma prof. Enfin, à sa robe. Enfin un tout petit peu. Enfin…
– Las ! J'ai compris le principe !
– Et toi ?
– J'ai réussi à faire fonctionner l'amulette de ma sœur.
– L'amulette de concentration ? demanda Babsie en agitant un feuillet similaire à celui de Richard. C'est quoi d'ailleurs ?
– C'est un artéfact… un objet magique, qui permet de concentrer les flux magiques en soi pour pratiquer certaines magies sans baguette plus facilement. Surtout la magie élémentaire, je crois. D'ailleurs on dirait que t'as déjà trouvé ton élément !
– Le feu ?
– Ouais, faut croire ! Moi c'est la terre, je l'ai découvert en même temps que mes pouvoirs. Faut que je fasse gaffe, ils vont me mettre à la mine. Remarque, je serais bien fichu de faire écrouler les galeries. Je voulais attirer un pot en terre à moi, et je l'ai, euh… décuit.
– Décuit ?
– Ben, j'ai changé un pot en terre cuite en tas de terre pas cuite, quoi.
– Ah ah ! Oh, tiens, guette, il y a un nouveau.
En effet, déchargeant ses valises du coffre d'une petite voiture, un garçon enrobé écoutait les dernières recommandations de sa mère, et lui répondait en faisant de grands gestes. Puis il chargea ses sacs dans la soute à l'aide du chauffeur, et monta à son tour dans la navette. Il salua les deux blancs d'une grande révérence exagérée, puis se précipita vers le fond en sautillant et en se balançant de siège en siège, ce qui avait tendance à faire trembler le minibus. Il s'assit devant Richard, contre la vitre, et se retourna d'un coup en lui tendant la main, avant de la tendre à Babsie.
– Salut, moi c'est Thato, fils du meilleur boulanger de tout Bloem' !
– Richard.
– Babsie.
– Rop, brus ! Z'avez vu, on est dans la même navette que Lady Caaren von Adowa. Elle est choty-goty, hein ?
– Faites comme si j'étais pas là, se vexa Babsie.
– T'es boss aussi, t'inquiète ! Mais… l'aristocrate afrikaner là-bas a d'autres arguments.
– Elle est riche, hein ?
– Nan. Elle est blonde, comme ma maîtresse. Enfin, mon ancienne maîtresse. Bladdy hell, j'en reviens toujours pas d'être ici !
– Ag, tu vas finir par me crever un œil, à faire des grands gestes comme ça !
– Désolé ! Un qu'a l'heure ?
– 18h16, lut Babsie sur sa montre. J'espère qu'ils vont bouger, je suis pressée d'y être !
Avant l'heure fatidique, la navette était pleine, et elle quitta la St George Street à 18h30 précise, en direction de l'Est. Prochain arrêt, les Pierres Chantantes !
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La navette filait bon train sur la route. Ils avaient depuis un moment passé la frontière du Lesotho, et la chaîne du Drakensberg se profilait à l'horizon. Richard, Babsie et Isaki, les trois occupants du siège du fond, discutaient avec énergie de leur vie passée. La famille de Babsie tenaient un petit snack-bar dans la rue principale de Kakamas. Ils ne connaissaient aucun sorcier, et l'apparition de ses pouvoirs avait été un choc. Isaki, lui, était un sorcier sang-pur issu d'une famille de classe moyenne. Sa mère avait été un temps au service de la famille von Adowa, avant de dénicher un poste au ministère. Tout comme l'État Moldu, le gouvernement sorcier d'Afrique du Sud était réparti sur les trois capitales : Pretoria, Le Cap et Bloemfontein. Cette particularité permettait de diviser le pays en trois, ce qui facilitait l'organisation des navettes. La navette de Richard arriva aux Pierres Chantantes vers 21h. Il s'attendait à voir quelque chose d'immense. Il fut déçu : il n'y avait rien du tout, sinon un petit bourg construit autour d'une place dégagée.
Accompagné de ses nouveaux amis, Richard alla faire ses achats scolaires. Malgré l'heure tardive, toutes les boutiques du bourg étaient ouvertes. Après un sandwich Gatsby rapidement avalé, le trio se rendit sur la place, que le plan semblait indiquer. Celle-ci était étrangement déserte. Mais au moment où ils y entrèrent, un phénomène incroyable se produisit. Ils venaient de franchir une barrière d'invisibilité et de silence parfaite, et se retrouvaient désormais aux abords d'une place noire de monde. De monde, ou plutôt de jeunes adolescents. Au centre de celle-ci, trois gigantesques pierres courbées lévitaient, tournant lentement autour d'un quatrième monolithe parfaitement rectangulaire, au sommet duquel un homme était assis en tailleur. Il était tellement vieux que sa barbe blanche atteignait la moitié du monolithe, qui devait pourtant dépasser les cinq mètres de hauteur. Alors que Richard s'émerveillait devant le spectacle, le silence tomba tel un couperet. Il n'entendait plus rien, et avait l'impression que ses oreilles s'étaient bouchées. Puis sa voix retentit dans sa tête. La voix du Frappe-Pierre.
– Mes chers enfants, nous voici, en ce jour des Droits de l'Homme, à l'aube d'une nouvelle année scolaire. Bienvenue aux nouveaux arrivants, et bon retour aux autres. Dans quelques instants, vous allez être expédié en direction de l'Institut Sud-Africain pour Sorcières et Sorciers, ou Palier de Drakensberg. Mais avant un petit rappel du règlement : Veuillez rester sur la place pendant tout le processus de transfert. Veuillez rester à distance du cercle rouge, qui délimite la zone de rotation des pierres. Enfin, une fois de l'autre côté, veuillez attendre l'arrêt total des pierres avant de vous diriger vers le premier palier. Merci.
– De l'autre côté de quoi ? demanda Babsie.
– On est… dans un téléporteur géant, expliqua vaguement Richard. Ma sœur m'en a parlé une fois ou deux. Les caillasses, là, vont tourner bladdy rapidement, et ça va siffler. Et comme elle vont bouger, ça va faire des bruits différents, comme une mélodie. Ensuite, grand flash de lumière, et hop ! on est au Palier.
– Isit !?
– Oweh ! Juré !
– Hey, l'afrikaner ! s'écria soudainement la voix du vieillard. La place est réservée aux étudiants. Alors tu lâches ta cullis et tu rentres chez ton patron, now now !
– Ah ah, se moqua Babsie, il l'a mouché. La petite riche va devoir porter ses valises toute seule comme une grande !
– Tu parles, répliqua Isaki. Je parie qu'ils vont se précipiter pour l'aider… Tiens ! qu'est ce que je disais ? Regardez-les, ces domkop !
– Ag, sies, man ! cracha Babsie.
– S'ils ont que ça à faire… lâcha Richard en haussant les épaules. Hé regardez, ça commence !
– Ooooh !
En effet, les pierres se mettaient à tourner de plus en plus vite. Rapidement, un sifflement se fit entendre. La barrière miroitante à la lisière de la place s'opacifia, et le sol se mit à vibrer. Puis, alors que le sifflement atteignait son paroxysme, les pierres se mirent à bouger. De haut en bas, en pivotant sur elles-mêmes… et la mélodie se forma. Une mélodie énergique et entraînante, qui montait en crescendo, les pierres tournant de plus en plus vite. Puis, alors que la dernière note résonnait, un immense flash de lumière éclata.
Le flash s'éteignit, et les pierres se mirent à ralentir.
– Il ne s'est rien passé ? demanda Babsie
– Regardez, le vieux n'est plus là ! s'exclama Isaki.
En effet, le sommet du monolithe était vide. Les pierres ralentirent jusqu'à s'arrêter, et se posèrent délicatement contre celui-ci. Alors la barrière se désopacifia, et il le virent. Le Palier de Drakensberg. Le seul, l'unique, l'Institut Sud-Africain pour Sorcières et Sorciers, construit à même le flanc de montagne.
L'appellation était trompeuse : l'Institut ne consistait pas en un, mais en plusieurs paliers, qui ressemblaient à d'immenses disques de marbre plantés dans la roche. Le premier était relié à une passerelle, elle-même reliée à la place circulaire où se tenaient tous les élèves, qui ressemblait en tout point à un palier. Un homme mesurant plus de deux mètres, vêtu d'une tenue traditionnelle zoulou, traversait la passerelle en compagnie d'un minuscule vieux ressemblant comme deux gouttes d'eau au chauffeur de la navette numéro trois, à l'exception des cheveux, que le nouveau venu avait longs et gris, et la taille. Il arrivait à peine à la taille de l'autre homme. Sous sa robe de sorcier violette et dorée surgissaient par intermittence ses inhabituellement longs pieds nus.
– Bonsoir à tous, retentit la voix du colosse, probablement amplifiée par magie. Pour les anciens, vous connaissez la chanson. Les 6ème Année passent en premier, puis les 5ème, … Seuls les 1ère Année restent. Je rappelle, et j'insiste sur ce point : je ne veux pas voir un seul balai voler ce soir.
Les deux hommes s'écartèrent ensuite du passage, et les élèves quittèrent la place dans un ordre et un silence impressionnant. Puis, lorsque la place fut dégagée et qu'il ne restait que les plus jeunes arrivants, le colosse reprit la parole.
– Bonsoir les enfants. Je suis Khayone Mbaasa, le Régisseur de l'Institut. C'est à moi que vous aurez à faire la plupart du temps. À mes côté, notre vénérable directeur, Mohapi Nomathamsanqa Junior.
– Salut, les laaities ! s'exclama soudainement le vieillard, faisant sursauter le régisseur. Howzit ?
Le décalage entre son âge et sa fonction d'un côté, et son allure débonnaire et son langage familier de l'autre en amusa la plupart. Le Régisseur, lui, n'y porta guère attention, et reprit de sa voix amplifiée :
– Demain, la matinée sera consacrée à la découverte de l'Institut. Les cours commenceront l'après-midi. En attendant, je vais vous indiquer les dortoirs. Prenez votre mal en patience, c'est au onzième palier.
– Quoi !? s'horrifia Isaki avant de regarder sa montagne de bagages. Et on va devoir monter tout ça à pied !?
– Rassemblez vos valises par ici, ajouta Monsieur Mbaasa, comme en réponse à sa question.
Les jeunes sorciers s'exécutèrent, regroupant leurs bagages au milieu d'un cercle de taille réduite gravée à la surface de l'immense disque de marbre. Le directeur sautilla jusqu'au centre du cercle, s'aidant de son bâton de bois encore plus haut que lui. Puis, parvenu au centre, il dégagea un petit cercle en poussant les valises du pied, et frappa le sol de son bâton. Alors lui et la totalité des bagages disparurent dans un flash lumineux bleuté. Un flash similaire éclaira une fraction de seconde plus tard un palier placé si haut qu'il n'était pas visible dans la pénombre du soir. L'intensité du flash leur donna un aperçu rapide de la hauteur. Richard compta rapidement : si leur dortoir était au onzième palier, alors l'Institut se composait de treize immenses paliers circulaires, plus une sorte de temple à ciel ouvert au sommet d'une crête, sans compter la multitude de petites bâtisses de marbre, et les grottes plus nombreuses encore. Mais ce que Richard avait surtout eu le temps de voir, c'est que chaque palier était séparé de facilement six à huit mètres du suivant… et qu'ils devaient se rendre au onzième ! Avec ou sans bagages, c'était monstrueux. Ils allaient bien dormir, cette nuit !
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Huit heures du matin. Une véritable grasse matinée pour Richard. Il faisait la queue devant la porte de la salle d'eau, écoutant d'une oreille distraite les bavardages de Thato. Jusqu'à ce qu'une phrase retienne son attention.
– Ils ont des quoi ?
– Des Lunettes Zoomastic de Mava. C'est super pour observer le paysage. Bon, t'as l'air un peu dof quand t'en portes, mais c'est pas les aigles qui vont s'en plaindre… Hé machin, on mange quoi ?
– Boka, corrigea le jeune surveillant. Ce matin, c'est tartines et rooibos. D'ailleurs dépêchez-vous, il ne va plus rester grand-chose. Hé, toi ! Recule ! Interdiction de s'approcher du bord du palier !
– Et pourquoi tu lui dis rien, à lui ? s'indigna Isaki. Il est encore plus près.
– Jeremia est en Second Grade. Libre à lui de sauter dans le vide si ça lui chante. Moi je suis responsable du Premier Grade, et le règlement est clair. Alors file de là avant que je décide de te faire récurer les douches avec ta brosse à dent une fois que tout le monde y est passé.
– Ag, sies, man ! T'es dégueu !
– Me tente pas, sale mioche. Allez, file manger !
– J'attends Richard.
– Il peut s'attendre tout seul.
– Garde-moi des tartines, intervint Richard.
Un quart d'heure plus tard, Richard ressortit de la salle de bain, et se dirigea vers les escaliers. À côté de ceux-ci, il remarqua un tunnel qu'il n'avait pas vu la veille, et qui descendait assez rapidement dans la roche. Trop rapidement pour être emprunté à pied. Alors que Richard observait l'étrange tunnel, un élève plus âgé le bouscula.
– Oh, excuse ! Ah… tu te demandes ça sert à quoi, hein ?
Richard jeta un œil au grand dégingandé à la peau aussi noire que le charbon qui se tenait à ses côtés, observant le trou d'un œil expert. Il tenait à la main une longue planche de bois étroite, qui ressemblait à un surf, l'avant recourbé excepté.
– C'est l'ascenseur, dit-il simplement.
Il se jeta dans le tunnel sur sa planche, et disparut rapidement en glissant.
– Énorme ! commenta Richard.
Après le petit-déjeuner, Richard eut son premier cours. Toute la promotion de première année rejoignit le directeur sur le treizième palier. Il frappa le sol de son bâton, et de palier se changea lentement en large hémicycle, en faisant trébucher plus d'un. Enfin, lorsque tout le monde fut installé, il prit la parole.
– La première question que se pose tous les directeurs du monde est la même : "Que doit en priorité apprendre à maîtriser un jeune sorcier ?". Là les avis divergent. Défense, attaque, création, destruction. Quand est venu mon tour de répondre à cette question, j'ai choisi une toute autre voie : La première chose qu'un jeune sorcier doit apprendre à maitriser, c'est lui-même. Bien, vous avez tous vos amulettes ? Bakdat ! Passez-les donc, que nous puissions commencer.
Chacun d'entre vous a de la magie en lui. Une magie brute et puissante. Sinon, vous ne seriez pas là. Il y a divers moyen de l'utiliser. Le plus commun, et aisé, c'est d'employer des sortilèges, à l'aide d'une baguette magique. L'alternative la plus prisée, c'est la magie élémentaire : utiliser une force naturelle comme canal magique. Il y a même, quelque part dans le monde occidental, des sorciers qui utilisent une forme écrite de magie, appelé Runes. Ils y a même des bladdy befok qui utilisent directement ces runes comme canaux magiques, en les prononçant. Dangereux dangereux dangereux ! Mais bon… revenons à nos bufflons. Parmi ces techniques alternatives, il en est une que j'affectionne particulièrement. Utiliser ses pensées comme seul canal. Ce qu'on appelle vulgairement "magie accidentelle" relève précisément de cette discipline.
C'est là qu'interviennent les amulettes. Vous vous concentrez sur ce que vous voulez faire. Mais au lieu d'imaginer que ça vient de vous, imaginez que ça vient de l'amulette. Ça a l'air facile, hein ? Allez, vous avez trois heures pour me couvrir ce palier de fleurs. N'importe quelle fleur de n'importe quelle couleur. Vous pouvez vous y mettre à plusieurs, organiser le concours de la plus belle ou de la plus grande fleur. Libre à vous ! Moi, je reste à votre disposition si vous avez des questions, ou des difficultés.
Évidemment, la majorité de la matinée se résuma à des tentatives ratées, des bavardages, et quelques accidents magiques. Mais, durant la troisième heure, quelques rares élèves parvinrent à faire pousser une ou deux fleurs rachitiques.
Parmi eux, la nouvelle amie de Richard, Babsie.
– Bladdy hell ! Je suis trop douée ! T'as vu ? T'as vu ?
– Ouais, t'as fait pousser une agapanthe miniature, remarqua Isaki avec cynisme.
– Toi t'as rien fait, alors la ferme ! répliqua Babsie. D'ailleurs toi non plus, Richard !
– Hé j'ai rien dit moi !
– Tu l'as pensé très fort !
– T'es mal, toi !
– Peuh, c'est cela. Tu transpires la jalousie par les narines. Regarde ma fleur, elle se moque de vous !
– T'es sûr qu'elle est pas plutôt en train de faner ? ricana Isaki.
– Mais n'importe… Oh non ! Non non non ! Revis, sale fleur !
– Méthode intéressante, commenta Richard.
– Je suis sûr que c'est toi qui lui a lancé un maléfice ! gronda Babsie en pointant Isaki d'un doigt accusateur.
– Eh ! je suis pas un tricheur moi ! En plus, comme tu l'as si bien fait remarquer, je suis pas vraiment doué avec ça…
– Peuh !
Heureusement l'incident fut vite clos, le professeur-directeur étant passé féliciter Babsie.
– Hé, au fait, Richard. Tu m'as pas dit que t'avais réussi à faire marcher l'amulette de ta sœur ?
– Pour faire de la magie élémentaire, pas de la création brute.
– Ben du coup, tu nous fais une démo ?
– Hum… je peux tenter.
Richard chercha une cible. Il repéra un petit caillou à la périphérie du palier, et se concentra dessus. Il sentit la magie affluer dans son corps avant de se concentrer dans l'amulette. Puis, d'un geste de la main, il attira le caillou à lui… avec un peu trop de ferveur, car le caillou arrivait à pleine vitesse droit sur lui. Au dernier moment, Richard plongea pour l'éviter, et c'est un autre derrière lui qui le reçut derrière la tête.
– Aïe ! Quel est le dwankie qui a fait ça !?
Par acquis de conscience, Richard préféra ne rien dire, faisant semblant d'observer la fleur de Babsie pour justifier sa position assise au sol.
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Cela faisait à présent trois semaines que Richard était entré à Drakensberg. Depuis quand traînaient-ils avec Caaren ? Ah, oui, depuis la semaine passée, où celle-ci avait manqué de rôtir Isaki. En fait, cette fille était très sympathique. Du fait de sa haute naissance, elle était une rivale naturelle de Babsie. Mais le plus amusant était le fait qu'elles aient toutes les deux le même élément : le feu. Lui, bien sûr, avait toujours la terre. Quant à Isaki… Air ? Eau ? Les deux ? Disons… les deux. Bien sûr, en théorie, l'amulette leur permettait de maîtriser les quatre éléments. Mais, alors que la plupart commençaient à peine à maîtriser leur élément, Isaki peinait plus encore, mais à en maîtriser deux. Il lui faudrait plus de temps, mais il avait un avantage conséquent. Quant à la magie avec baguette… Caaren les écrasait largement. Babsie mettait ça sur le coup d'un precepteur payé par sa richissime famille. Isaki, lui, parlait de puissance du sang. Richard ne se posait pas la question : il avait déjà fort à faire avec ses propres problèmes. Et c'est ainsi que, trois semaines après la rentrée, ils se retrouvaient tous les quatre dans une galerie sombre qui s'enfonçaient dans la montagne, après le couvre-feu.
– Vous êtes sûrs que c'est une bonne idée ? frissonna Caaren en regardant la section de tunnel qui s'enfonçait dans les ténèbres d'un œil inquiet.
– T'as peur, fillette ? la tança Babsie.
– Lumos, lança Caaren en lui jetant un regard noir, avant de s'enfoncer seule dans le tunnel.
– Pourquoi tu la provoques toujours ? s'agaça Richard.
– Je la préfère comme ça, répondit Babsie en haussant les épaules. Elle est plus sympa quand elle est vexée.
– Parce qu'elle fait la gueule en marmonnant dans son coin ?
– Hé hé hé !
– Tu es incorrigible…
– Ouais c'est ça, avance !
La petite bande s'enfonça dans le tunnel, et marchèrent pendant près d'une heure, devant parfois presque ramper. Il ne fallait définitivement pas être claustrophobe… Enfin, ils aperçurent la lumière, et débouchèrent en périphérie d'une vallée close, encaissée au centre des montagnes. Une voix à leur droite les fit sursauter.
– Les jeunes, bienvenue dans la vallée des veaudelunes ! déclama Bandile, le grand noir au surf. Éteignez vos baguettes s'il vous plaît, il ne faudrait pas les effrayer. Vous avez des lunettes Zoomastic ?
Tous sortirent leur paire de leur poche, sauf Isaki.
– Heu, non, j'étais en retenue le jour où le marchand ambulant est passé…
– Une retenue dès la deuxième semaine !? Comment tu as fait ton compte ?
– Euh…
– Il a jeté un maléfice de crache-limace à Igmar en plein cours, intervint Richard.
– Il l'avait cherché ! Il m'accusait d'avoir triché au contrôle juste parce que je cherchais un flacon d'encre dans mon sac !
– Chut ! souffla Bandile. On y est ! allongez-vous au sol, et rampez vers le bord. Tiens Isaki, j'ai une deuxième paire.
– Shot !
Les jeunes s'exécutèrent, et rampèrent jusqu'au bord du surplomb rocheux. Richard chaussa ses lunettes Zoomastic, qui lui donnait des airs de mouche géante, et regarda en direction de la vallée en contrebas. Au début il ne vit rien, puis… soudain il en aperçut un. Non, deux ! Richard se concentra dessus, et les lunettes zoomèrent toutes seules. Oui, c'était bien deux veaudelunes, sortant timidement du couvert de la forêt pour s'exposer au clair de la lune, pleine depuis la veille.
– C'est magnifique ! s'extasia Caaren.
– T'as vraiment des goûts de kak ! se moqua Babsie. Ces machins sont hideux !
Isaki, blasé, lui mit une claque derrière la tête.
– Aïe !
– Tais-toi et observe. C'est une chance inouïe, ne la gâche pas en râlant.
– Hé, regardez, il y a un petit qui sort ! souffla Richard.
– Il est encore plus moche que les autres, ricana Babsie.
– Là, je te le concède… Bandile ! Bandile !
– Quoi ?
– Qu'est-ce qu'ils font, là !?
– Ils commencent la parade !
Les deux veaudelunes adultes s'étaient dressés sur leurs pattes arrières, et commencèrent à danser en tournant et en sautillant. On aurait dit qu'ils essayaient de danser une valse. Puis ce fut deux, puis trois, puis quatre couples qui surgirent du couvert de la forêt pour danser sous la lune. Même Babsie en était bouche bée. Sangs-purs, sang-mêlés, nés-moldus… ils étaient tous sur un pied d'égalité : aucun d'eux n'avait jamais vu de veaudelunes, une des bêtes les plus rares au monde. Et là, ils en avaient pas moins de neuf sous les yeux.
– Après on descend, et on récolte leurs déjections, lança Bandile.
– Quoi !? lâchèrent d'une seule voix les quatre petits première année.
– Bah oui, c'est un super engrais magique, et il faut le ramasser avant le lever du soleil. Donc on attend… qu'ils aient fait leurs petites affaires… et on descend ramasser le tout.
– C'est répugnant, répliqua Caaren en fronçant le nez.
– T'inquiète, la cullis, rit Bandile. Les deux gars et moi, ça suffira. Je descends tout seul, ajouta-t-il en désignant son balai appuyé sur la paroi rocheuse d'un geste, mais j'aurais besoin d'aide dans les tunnels. Richard, Isaki, on est bon ?
– On est bon, répondit Richard.
– Uniquement si tu me prêtes ton surf demain, tenta Isaki.
– Deal. Ah, ça y est, ils repartent. Je descends.
Bandile enfourcha son vieux balai noirci, et fila dans les airs en direction de l'étrange motif au sol tracé par les larges sabots des veaudelunes dans les hautes herbes. Il atterrit au-milieu, enfila des gants et empoigna un des trois sacs qu'il avait sortis de la poche ventrale de sa robe rapiécée, et se mit à ramasser des trucs.
Contrairement aux apparences, Bandile Gango n'était pas pauvre. C'était juste l'apprenti pyromancien le plus maladroit de la Création. Il passait son temps à brûler ses affaires, à faire des trous dans sa robe, etc… Cela avait cependant un petit avantage : il avait acquis au fil des années une certaine maîtrise de la couture. Malheureusement, le bon goût n'était pas avec, et sa robe, bleu marine à l'origine, ressemblait désormais à un patchwork indescriptible, additionné d'un nombre inconvenant de poches supplémentaires remplies de choses aussi diverse que des fleurs séchées, des pages de grimoires arrachées, ou des réglisses rassis. Son rêve était de devenir professeur de zoomagicologie, et il organisait, dans cette optique, des safaris découvertes clandestins avec les élèves plus jeunes, afin de s'entraîner. C'est donc tout naturellement qu'il avait proposé à Richard, un garçon qu'il croisait souvent au treizième palier, ainsi qu'à ses amis, d'assister à la parade des veaudelunes à l'occasion de la pleine lune.
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Juin commençait, et avec lui, l'hiver austral arrivait à grand pas. C'était la période idéale pour les examens de fin de trimestre. Une fois n'est pas coutume, c'était au 12ème Palier, qui accueillait le dortoir des filles, que la petite bande révisait. De prime abord, Richard et Isaki étaient mal-à-l'aise à cette idée. Mais Caaren avait souligné qu'ils allait surtout travailler dans la salle de permanence du soir, et Babsie avait asséné que contrairement aux garçons, les filles ne laissaient pas traîner des affaires intimes partout. Et puis Thato s'était joint à eux, et c'est un groupe majoritairement masculin qui s'était alors présenté à l'entrée du palier. Conciliante, Kenoline, l'alter ego féminin du surveillant Boka, les laissa entrer, à condition qu'il ne quitte pas la partie étude. La plus travailleuse du groupe, Caaren, avait fait un planning pour leurs révisions.
– Tout d'abord, Babsie, Richard et Thato allez travailler l'Histoire. Vous avez tout trois des lacunes. Tenez, j'ai emprunté ceci à la bibliothèque pour vous.
Caaren sortit un très vieux grimoire qui consistait en une liasse de parchemins jaunis entre deux plaque de bois, le tout lié par de la vieille ficelle.
– C'est quoi cette horreur !? s'indigna Babsie.
– Ce sont les archives de l'École, ma chère, répliqua Caaren. Pendant ce temps, Isaki et moi-même allons réviser l'Étude de la Faune Magique. Isaki, j'ai entendu le professeur Yar'Adua te féliciter pour tes connaissances des grands félins. J'aimerais qu'on travaille ça ensemble, si tu es d'accord.
– Ça me va.
– Mais c'est chiaaant ! soupira Babsie.
– Après, je vous promet que ça sera plus amusant. On doit tous travailler la magie avec baguette.
– Ah, ça ça me plaît ! commenta Richard. La seule chose que j'arrive à faire avec ce bout de bois, c'est de faire exploser ce que j'essaie de faire léviter.
– Au moins tu fais quelque chose ! ricana Isaki. Caaren triche, elle utilise l'Aéromancie pour faire "léviter" sa plume en cours.
La jeune fille blanchit, et se mit à bafouiller.
– Non ! Je… C'est faux ! Et puis d'abord, tu n'as pas de preuve !
– Une preuve ? oh si, j'en ai une. Tu portes toujours ton amulette autour du cou en cours de Magie avec Baguette, alors que la prof a bien insisté sur les risques de l'interaction des canaliseurs. Ce qui prouve… que tu ne te sers pas de ta baguette ! Élémentaire, ma chère Adowa'tson.
– Hmmph ! souffla Caaren, vexée d'avoir été découverte.
– Ag, t'as l'air dof, quoi ! glissa Babsie avec un sourire en coin.
– Bon, on se concentre ? intervint Richard, charitable. Je vous rappelle que les exams c'est dans une semaine. On est nuls en Histoire, on est nuls en Étude de la Faune et de la Flore. Et je parle même pas de la Magie avec Baguette. En Magie Élémentaire, seul Isaki maîtrise plus d'un élément, et uniquement parce qu'il a une double affiliation…
– Caaren se débrouille pas trop mal avec le vent, souligna Babsie, l'air de rien, faisant rougir son amie.
– … ensuite, les Potions. Aaaah, les Potions ! Rappelez-moi, c'est quel groupe de TD qui a failli faire sauter le Cube ?
– Euh…
– Voilà. Et enfin, l'Astronomie. Je sais où est Beta Hydri uniquement parce que je l'ai dans la tronche pour dormir, et Sigma Octantis parce que le prof la met toujours comme point de repère des cartes. Pour résumer : on est dans la kak.
– Jawelnofine… lâcha Isaki.
– Quel esprit défaitiste, les gronda Caaren. Nous sommes l'avenir de cette école. Nous somme l'avenir de la nation. Nous sommes l'avenir du Monde Sorcier. Oh, je sais ce que tu vas dire, Babsie. Que c'est facile pour moi de dire ça, parce que ma famille est riche. Parce que je suis une bladdy hell de cullis d'Afrikaner. Mais il ne faut pas que vous oubliez une chose. Mohapi Nomathamsanqa Junior était un gamin des rues, qui mendiait et volait dans Johannesbourg avant de recevoir l'appel du Frappe-Pierres. Et il est quoi aujourd'hui ? Directeur du Palier de Drakensberg, la plus grande école de magie d'Afrique. Et Leleti Maharaj, alors ? Une fille de boulangers. Comme toi, Thato. Et aujourd'hui, elle est quoi ?
– …
– J'ai pas entendu, Babsie !
– Elle est Ministre de la Magie.
– Exactement ! La première femme Ministre de la Magie du pays. Et elle a étudié ici, comme nous. Elle a dormi dans ce dortoir. Elle a bû l'infâme rooibos de l'Intendante. Elle s'est sûrement brûlé une mèche ou deux en tentant de maîtriser le feu. Et aujourd'hui, elle dirige notre grand pays. Et vous savez pas la meilleure ?
– Non, mais je parie que tu vas nous le dire, lâcha Richard.
– Elle a eu des notes très moyennes aux examens de Second Cycle. Notre avenir n'est pas gravé dans la pierre. Après tout, rien ne m'empêche de donner la fortune familiale à une œuvre de charité, et de devenir poissonnière. Alors je ne vois pas pourquoi l'inverse ne serait pas possible.
– En d'autres termes ? demanda Thato.
– En d'autres termes… si vous ne vous mettez pas à réviser immédiatement, je vous rôtis comme du poulet chutney.
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Prochaine étape, l'Allemagne ! ICH BIN EIN SORCERER !
