Bonsoir à toutes et à tous.
Ce soir, je publie le premier texte d'une série d'OS anniversaire, puisque j'ai eu envie d'essayer de dédier une fiction par chevalier. Il est probable que tous n'y aient pas droit pour autant, puisque je n'ai pas la prétention d'affirmer d'avoir systématiquement de l'inspiration ou tout simplement les qualités nécessaires pour écrire à leur sujet. (Je pense notamment à Shaka.) Les ratings varieront, les personnages présents également de même que les genres, j'espère néanmoins que vous passerez un agréable moment.
J'aurais normalement dû commencer avec Shura, mais j'étais déjà en retard pour l'écrit lui-même, et par la suite, je n'étais toujours pas sûre de moi. Le texte sera donc retravaillé à part et paraîtra sans doute dans Yggdrasil à la place. C'est donc notre cher Camus qui a le droit d'ouvrir le bal.
Disclaimer: Tous les personnages présents et cités appartiennent à Masami Kurumada.
7 Février : Camus.
Rating : T.
PS : Remerciements à Talim76 pour son écoute et ses encouragements. Comme toujours me dira-t-on, mais j'estime qu'il est important de dire « merci » souvent, même lorsque la personne n'a pas conscience du soutien apporté. : )
RAPPEL : A toutes fins utiles, je répète que je n'apprécie pas les ajouts en follows/favoris lorsqu'ils ne sont pas accompagnés ne serait-ce que d'un tout petit mot pour dire que la fiction a été appréciée. Ce n'est pas parce que nous pouvons avoir accès plus facilement aux fictions où que nous soyons qu'il faut oublier la personne qui se cache derrière le texte. Merci !
Ils étaient trois, assis autour de cette table. Dans le silence le plus total. Comme chaque soir, maintenant qu'il y repensait. S'essuyant lentement la bouche du bout de sa serviette, Camus observa les deux garçons, dont les têtes dodelinaient dangereusement depuis plusieurs minutes à présent. La journée avait été rude, il devait bien l'avouer. Il les avait poussé un cran au-dessus de d'habitude, pour une raison qu'il ne comprenait pas vraiment. Volonté de se perdre dans l'entraînement de ses disciples, pour faire passer au plus vite une journée qu'il imaginait interminable ? Probablement. Ce n'était ni très juste, ni très charitable de sa part en y repensant. Son but n'était guère de tuer ces enfants après tout, mais bel et bien de les confronter à la réalité de la situation. A ce qui risquait de leur arriver par la suite. L'un d'eux devrait porter l'armure du Cygne, devenant ainsi le Bronze affilié à l'étoile du Nord. La tâche était déjà bien ardue, demandait tout son savoir-faire, et il craignait déjà le jour où il verrait l'élu affronter les glaciers millénaires pour pouvoir obtenir la protectrice choisie.
Quant à l'autre… Il n'aurait jamais pensé commencer à entraîner son successeur aussi rapidement. De ce qu'il en savait, il était le seul, d'ailleurs, à en avoir un. Et cela ne le réjouissait guère de devoir déjà former un autre au grade de chevalier d'Or. Lui-même peinait encore à se remettre des séquelles que l'épreuve avait engendré sur son corps, et à oublier ce qu'il lui avait été demandé. Heureusement, l'heure n'était pas encore venue. Et c'était une bonne chose, car, en dépit de leurs déterminations respectives, aucun des deux n'était prêt.
Les autres avaient toujours dit de lui qu'il était un maître dur, mais juste. Toujours, quelle que soit la situation. Quand bien même il trouvait étrange que les autres chevaliers se soient fait une opinion d'une réalité à laquelle ils n'avaient jamais assisté. Après tout, personne n'avait le droit de franchir les portes de leur demeure, en dehors du maître des lieux et de ses disciples. Du moins, personne n'aurait dû…
La vision du visage de Hyôga passant fort près de la table le tira de ses réflexions. En jetant un coup d'œil à droite, il se rendit compte que le jeune finlandais avait lui aussi toutes les peines du monde à demeurer éveillé, en dépit de sa volonté évidente d'être à la hauteur des attentes de son maître, et ce, en toutes circonstances. Un trait de sa personnalité aussi remarquable qu'étrange. Il ignorait tout de la vie d'Isaak avant qu'il ne lui ait été remis. Mais il avait appris à faire avec : il connaissait le garçon depuis plusieurs années déjà, et ils avaient appris à fonctionner aisément ainsi.
« Allez-vous coucher tous les deux. Demain, je vous réveillerai à six heures.
— Maître… ?
— Bonne nuit, Isaak. Toi aussi, Hyôga. »
Mettre fin à la conversation, avant même que le plus observateur des deux ne commente sa décision de les réveiller non pas une, mais bien deux heures après l'horaire habituel. Le semi-russe se laissa porter par son camarade qui le traîna hors de la pièce, un bras passé autour de ses épaules, non sans jeter un coup d'œil à son maître. Observant leur démarche chancelante, Camus songea qu'il les avait, en plus de leur entraînement plus ardu que d'habitude, envoyés se coucher bien plus tard que ce qu'il était raisonnable. Il devrait peut-être aller les réveiller vers 6h30 finalement…
Un volet claqua, quelque part, dans l'isba, rapidement suivi d'un courant d'air. Le onzième chevalier releva la tête, à l'écoute. Ce genre de choses n'arrivait jamais en ces lieux, pour la simple raison que les trois habitants avaient toujours eu conscience de l'absolue nécessité de conserver la chaleur à n'importe quel prix. Il y avait donc quelqu'un d'autre ici. Quelqu'un qui n'aurait pas dû s'y trouver, et qui n'en avait absolument aucun droit. Lentement, son visage se tourna vers le couloir qui menait à chambre, qu'il emprunta, comme une continuation logique de ses pensées, le corps aux aguets. Avant de s'arrêter devant la porte, qui lui semblait aujourd'hui avoir des airs de frontières. Il se tint là, plusieurs minutes. La main sur la poignée, le front posé sur le battant en bois. N'osant pas franchir ces quelques centimètres dont il craignait qu'ils ne déçoivent ses espérances idiotes… encore.
Le français serra les dents, avant de prendre une profonde inspiration. Il ouvrit la porte, lentement. Retardant l'instant où il ferait probablement face au vide, alors même qu'il espérait une présence. Car il était évident que ne pouvait se trouver ici celui qu'il désirait y trouver.
Il ne devait pas y être. Il n'avait de cesse de se le répéter.
Toutefois, lorsque le battant fut entièrement écarté, il put constater qu'il y avait bien quelqu'un dans ses appartements privés. Et que ses prières, pour la première fois depuis bien longtemps, avaient été écoutées. Comme il était inique que ce soient les plus égoïstes d'entre elles qui aient fini par trouver une oreille attentive chez quelque déité…
Le chevalier du Verseau ne s'autorisa pas le moindre geste qui aurait trahi sa surprise, et encore moins son plaisir, — qui frisait le soulagement en cet instant. Il se contenta de faire quelques pas supplémentaires, avant de refermer la porte derrière lui, sans jamais quitter des yeux celui qui se trouvait face à lui. Car, assis sur les draps encore faits de la matinée, se tenait Milo, la tête légèrement penchée, son traditionnel sourire lumineux et espiègle sur le visage. Comme s'il était chez lui. Ce qui était le cas, quand il y repensait. Le grec existerait toujours pleinement là où Camus l'accepterait. Même dans cette demeure ancestrale qui n'appartenait qu'aux héritiers de sa fonction.
« Alors, tu es venu. »
Son regard glissa jusqu'à l'horloge murale. 23h50. Un sourire léger étira ses traits, alors qu'il s'avançait légèrement en croisant les bras.
« Tu as failli être en retard.
— Mais ce n'est pas le cas.
— Tu ne devrais pas être ici.
Pour mille raisons. A commencer par la mise en danger de sa raison.
—Je n'allais tout de même pas rater ton anniversaire ! Toi, le premier d'entre nous à atteindre sa majorité.
Insolence. Ironie. Rire.
— Et tu seras le dernier, insupportable animal.
— Le privilège de la jeunesse. »
Encore ce sourire. Maudit sourire… Qui envahissait ses pupilles et son esprit. Aussi sûrement que la présence de Milo s'infiltrait partout en ces lieux, de son parfum à son aura.
Une pause.
« Tu ne leur as rien dit, n'est-ce pas ?
— Pourquoi l'aurais-je fait ?
— Parce que ce sont tes élèves.
— Ils peuvent mourir à tout instant. Inutile de créer une proximité qui pourrait mettre à mal mon statut et leur propre conditionnement.
— Tu es sans pitié. Depuis le temps qu'ils sont avec toi… S'ils devaient mourir, ça serait déjà arrivé, tu ne crois pas ?
— Le temps n'a aucune logique de ce genre avec nous. Ils n'ont nul besoin de connaître une date aussi insignifiante, ni de m'offrir le moindre présent, Milo. Ce n'est pas pour rien que je les entraîne en ces lieux reculés.
— Néanmoins, tu les as autorisés à se lever plus tard demain.
— Tu ne devrais pas nous espionner.
— Il est vrai qu'il s'agit de ton domaine privilégié. Mais alors, dis-moi…Espérais-tu ma venue, Camus ?
Un regard lourd de sens, à nouveau. Déjà son corps commençait à ressentir toute la tension que produisait la présence du grec dans la pièce. Accrochant les pupilles bleues, il prononça, d'une voix qu'il espérait affirmée, une réponse à la hauteur de son impertinence.
— Je l'ai craint, en effet. »
Un sourire, dans la pénombre. Les yeux rieurs de Milo, voilés par une frange de plus en plus longue. Le chevalier du Verseau déglutit lentement : la présence de son ami était aussi providentielle que dangereuse pour lui. Il y avait toujours un risque à l'avoir en ces lieux, et ils en avaient tous deux consciences. Toutefois, il sut qu'il était déjà perdu dès lors qu'il accepta de planter son regard dans celui du Scorpion. Alors même que ce dernier quittait le lit pour s'avancer jusqu'à lui, le poussant inconsciemment à reculer jusqu'au mur, alors même que ses bras venaient s'enrouler autour de ses hanches et dans son dos avec un naturel déconcertant, il constata avec effroi que ses propres mains trouvaient déjà leur chemin au travers des mèches blondes face à lui. Que déjà, sa bouche répondait avec ardeur à celle venue empiéter sur son territoire, envahissant son domaine, son intimité : ses propres lèvres, avides d'un contact oublié depuis plusieurs mois s'accrochaient avec une envie dévorante à celles bien trop sèches du grec.
Les apprentis ne devaient rien voir, rien entendre, rien savoir. Pour les protéger eux tout autant que leur histoire. Il devait essayer d'arrêter tout cela… Il le devait, vraiment. Ses lèvres se détachèrent de celles de son homologue, cherchant des mots pour le raisonner. Puiser en lui suffisamment de force pour lui dire que ça n'était pas raisonnable, qu'ils ne pouvaient pas faire ça.
Son discours, aussi beau que banal, mourut dans sa gorge sans voir jamais le jour. Car comment aurait-il pu ne serait-ce que prononcer ces paroles, alors que ses propres mains commençaient déjà à défaire une insupportable chemise lui voilant le torse de l'autre ? Comme toujours en présence de l'autre, son esprit céderait aux désirs de son corps, et à l'appel de son cœur. Etait-ce vraiment grave ? Oui. Et ils le savaient tous les deux. Malgré cela…
Le corps de Milo contre le sien. Sa chaleur, son odeur. Camus ferma les yeux, l'espace d'un bref instant. Ils n'avaient que quelques heures, rien de plus. Une poignée de temps, pour de longs mois de séparation. Ce n'était rien… Mais c'était déjà plus qu'ils ne pouvaient espérer.
Les yeux trop bleus du cadet, et ses lèvres effleurant son cou eurent raison de ses réserves, quand bien même ces dernières semblaient perpétuellement inexistantes lorsque le huitième gardien se trouvait à proximité. Aussi, alors qu'il aurait dû le repousser de toutes forces, et le mettre dehors dans la seconde, il se retrouva incapable du moindre geste, accueillant au contraire avec un plaisir évident quelques mots murmurés à son oreille par l'insupportable grec envahissant. Il se contenta de fermer les yeux, comptant mentalement dans sa tête, comme pour ne pas se laisser entièrement emporter. Ses ongles se refermèrent sur le dos dont les muscles roulaient au rythme de leurs gestes. Embrassant la peau à sa portée, il n'eut aucune réaction particulière lorsque le Scorpion les orienta tous deux vers les draps à présent défaits. Il aurait dû, bien évidemment. Cette relation était étrange, déroutante, et n'aurait probablement jamais dû exister. Seulement…
Au-dessus de lui, il y avait Milo. Contre lui, sur lui, bientôt en lui… Milo, toujours Milo.
Les doigts mats ouvrirent sa chemise, alors que le français tournait la tête vers l'horloge. Minuit. Un sourire étira ses lèvres à l'idée que finalement, son amant serait en retard pour lui souhaiter ce jour « spécial », suivi d'un long gémissement lorsque les doigts et la bouche du huitième gardien s'égarèrent sur son corps. Il reporta son regard sur son cadet, qui réclamait, comme toujours, sa part d'attention. Son regard brûlant, et ses demandes silencieuses. Il lui laissait encore le temps de reculer, de le repousser. Cela aurait dû être sa décision. Mais à l'instar des fois précédentes, ce ne fut pas le cas.
Prenant le parti du risque, plutôt que celui de la raison. Ce n'était pas si grave : il n'existait qu'un seul être à en avoir connaissance. Un baiser, fiévreux, et quelques mots contre ses lèvres donnèrent au Grec la réponse qu'il attendait, et l'encouragèrent dans ses gestes de plus en plus appuyés. Une fois n'était pas coutume après tout. Et s'il devait ne choisir qu'un seul jour pour accepter la présence du Scorpion en ces lieux… Alors que ce soit en cet instant.
« Joyeux anniversaire, Camus.» furent les dernières paroles que le chevalier du Verseau comprit, avant de s'abandonner totalement.
