Disclaimer: Je ne possède rien si ce n'est ces quelques mots.

Synopsis: Engagées dans une relations sans attaches, les attentes de Cath et Sara diffèrents. Une fois le cercle vicieux rompu, Cath va de l'avant et essaie de trouver son bonheur ailleurs, alors que Sara réalise que ce qu'elle désire le plus se trouve là où elle l'attendait le moins... C/S

Bonne lecture

So ;)

ps: AcidRed, un peu plus de lecture ;)


Le Cercle

Par SoFrost

Partie I

Catherine

« Hmm… » Sara soupire avec contentement avant de rouler à mes côtés. Nos respirations laborieuses sont les seules choses qui brisent le silence.

Je me tourne vers Sara, me love contre elle tant que j'en ai encore le droit, tant qu'on partage l'insouciance et la béatitude post orgasmique. Son cœur bât à tout rompre, mais il fait sûrement écho au mien je ferme les yeux et comme à chaque fois je m'imprègne de son odeur, du goût de sa peau encore sur mes lèvres de ses courbes qui épousent si bien les miennes de la chaleur de son corps contre le mien du désir toujours si présent, renouvelé presque immédiatement après avoir été assouvi…

Pendant quelques minutes elle est encore à moi, et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

A mesure que son cœur reprend son rythme normal, le mien se serre dans ma poitrine car je sais qu'elle m'échappe. Elle soupire profondément, et mes paupières fermées se resserrent encore plus.

C'est fini.

Elle ne dit rien et se contente de rompre notre étreinte, comme à son habitude, elle reste assise pendant une minute sur le bord du lit, son dos nu me fait face comme d'habitude je me retiens de redessiner les muscles de son dos d'une main délicate, je me contente de prendre une grande inspiration pour ne pas pleurer.

Je me demande toujours à quoi elle pense à ce moment là, cet instant où elle est encore mon amante. Elle se lève et toujours comme à son habitude elle va prendre une douche, effaçant ainsi toutes traces de ce qui vient de se passer. Je roule sur mon dos et écoute l'eau couler, m'imagine sous la douche avec elle, la serrant dans mes bras, lui embrassant la peau… je m'imagine avec elle tout simplement.

Quelques minutes plus tard, elle sort de la salle de bain à nouveau vêtue. « J'ai faim… tu veux quelque chose ? » elle demande en se séchant les cheveux.

« Non, merci, » je lui réponds sans émotions.

Je reste allongé encore deux minutes puis me lève, saisi ma robe de chambre, l'enfile et rejoins Sara au rez-de-chaussée. Je reste de l'autre côté du comptoir et la regarde se déplacer dans ma cuisine avec aisance.

Je prends une grande inspiration et m'éclaircit la gorge. « Je me disais qu'on pourrait sortir, toi et moi… dîner ensemble. C'est une idée, tu ne penses pas ? »

« Une mauvaise idée, oui, » elle répond simplement tout en se concentrant sur le sandwich qu'elle est en train de préparer.

J'accuse le coup rapidement, et ne lâche pas prise. « Je t'invite, on dîne, on se fait un ciné ou on va boire un verre. Ou… je ne sais pas on n'est pas obligées de sortir non plus. On peut se louer un film, passer du temps ensemble. »

« Non, comme je l'ai dit c'est une mauvaise idée. »

« Pourquoi ?… qu'est ce que ça coûte de sortir ? » je lui demande et elle se contente de soupirer pour seule réponse. « Ne me dis pas que ça te suffit, que tu ne veux pas plus… »

Cette fois elle perd patience, quand elle se tourne vers moi, la colère illumine son regard. « Tu comptes me faire la même scène à chaque fois? » elle demande de manière rhétorique. « Tu deviens vraiment lourde. Je te l'ai déjà dis cent fois, je ne veux pas plus. Pourquoi est ce que je voudrais plus d'ailleurs ? On n'est même pas amies et tu voudrais qu'on soit amantes ? » elle ricane sèchement. « C'est une blague ? »

« On est amantes Sara, » je lui dis fermement.

« Non, » elle secoue un doigt devant elle avec un sourire narquois aux lèvres « Non, non, » elle renifle avec sarcasme « Tout ce qu'on est l'une pour l'autre, c'est un bon plan cul, nuance » elle me corrige avec un mouvement de va et vient de son index droit cette fois ses mots ont la violence d'une déflagration en moi, faisant s'effondrer les derniers remparts autour de mon cœur. J'ai peur que la prochaine attaque me soit fatale.

« Les règles ont toujours été limpides entre nous. On s'envoie en l'air, on prend notre pied, et une fois que c'est fini, la vie reprend son court. »

« Tu mens… et tu le sais. Si c'était le cas au début ça ne l'est plus. Tu peux raconter tout ce que tu veux mais plus d'une fois tu m'as caressé avec passion et sentiments… plus d'une fois, c'était plus qu'une simple partie de jambes en l'air, » je dis avec véhémence.

« Oh putain… » elle se pince l'arête du nez avec exaspération. « On a un job stressant, et avec toute la tension qui s'accumule, on a tous besoin d'un exutoire. Pour ma part, je baise, plus précisément, je te baise, ce qui – je dois l'admettre – est une façon très plaisante d'évacuer la tension, » elle continue, choisissant les mots qui me feront le plus de mal, et elle réussit.

« Je ne vaux vraiment pas plus que ça pour toi… »

« Et merde, épargne moi le couplet de la martyre ! » elle m'interrompt immédiatement. « Je te signale qu'à l'origine ce n'était qu'un coup d'un soir dû à un trop plein d'émotions et d'alcool, c'est toi qui est venue me chercher pour un bis repetita ; on a conclu un accord, un accord que tu as accepté dans son intégralité 'du sexe, pas d'attache, ni mélodrame'. »

« Les choses ont changé ! » je lui hurle.

« Pas pour moi ! » elle me répond avec autant de violence.

« Je ne suis pas un objet Sara ! »

« Arrête de me faire passer pour l'enfoirée de service, ce n'est pas comme si je t'avais trompé sur la marchandise, bordel ! 'Oh pauvre de moi on me traite comme une moins que rien, je suis une victime et bla, bla, bla…' » elle geint de manière infantile. « Je te signale tu m'as tout autant utilisé, et si tes cris d'extase sont une indication, tu prenais bien ton pied aussi. Alors arrête de me la faire à l'envers tu veux ! Il n'y a rien entre nous, et ça ne changera jamais, tu m'entends ? »

« Tu mens… » je persiste faiblement. Toute son agressivité m'atteint plus que je ne veux bien le laisser paraître, chaque mot me marque au fer rouge, et résonne en moi dans un écho de souffrance.

« Mais oui, c'est ça, je mens. Je suis folle amoureuse de toi, tu m'as mise à nu, » elle me crache à la figure avec mépris. « Je te baise Catherine, ni plus ni moins, » répète-t-elle en accentuant tous les mots. « Putain, je ne sais pas pourquoi t'éprouves le besoin soudain de te faire des films mais une chose est sure ça me gave, j'en ai raz la casquette de tes jérémiades, » elle s'ébroue. « D'ailleurs, on va en rester là parce que nos attentes quant à notre association de fortune ne sont assurément pas les mêmes, et j'ai personnellement mieux à faire que de jouer un remake pourri de mélodrame genre Melrose Place. »

Elle renifle avec dédain et secoue la tête. « Je me casse, » elle se contente d'ajouter avant de rassembler ses affaires et de sortir de mon appartement, me laissant meurtri avec des plaies profondes au cœur dont je ne suis pas sure de me remettre un jour.

Je retourne tel un zombie vers ma chambre, je me mets boule sur mon lit, étreint avec force l'oreiller où persiste encore l'odeur de Sara, puis mes larmes se mettent à couler sans retenu, laissant des traces brûlantes sur mes joues.

Sara

Je frappe à nouveau sur le volant avec frustration.

Il fallait qu'elle foute tout en l'air ! C'était pourtant simple et ça marchait du tonnerre. Mais non, il a fallu qu'elle se fasse des films et envoie tout valser !

Les gonzesses…

Je sais techniquement j'en fais partie, mais je crois de que mère nature s'est un peu mélangée les pinceaux quand elle est arrivée sur ma personne, ça ou elle avait tout simplement la flemme de s'appliquer, peut être même qu'elle pensait avoir mieux à faire. Dans tous les cas, il y a assurément certaines connexions qui me font défaut ou sont défectueuses parce que je ne comprends pas ce désire – majoritairement féminin, de toujours tout ramener aux sentiments.

Attention, je ne dis pas que je suis contre les sentiments, seulement quand je m'engage dans une relation cul sans attache, je m'y tiens moi ! Je ne me fais pas des films style, oui je joue le jeu un temps et puis forcément les sentiments suivront.

Il y a huit mois de ça, on a eu une sale affaire, le genre boucherie inhumaine insoutenable et le pire c'est que les motifs étaient aussi simples qu'un junky sous grande influence en plein bad trip. Bref, Catherine et moi sommes allé noyer notre dégoût du monde dans un verre et quelques autres l'alcool a fait disparaître les inhibitions, dans notre cas il a aussi fait disparaître nos vêtements et a donné lieu a des ébats certes imbibés mais tout de même sauvages et salvateurs.

Ces choses arrivent, pas tout le temps mais ça arrive. Il n'y a pas mort d'homme, et l'alcool est le principal suspect. On a tous la carte 'j'étais trop ivre, j'ai perdu le contrôle, n'en parlons plus'. Cette nuit là Cath et moi l'avons toutes les deux utilisée. En plus, il n'y avait pas de malaise après coup, étant donné qu'on n'était pas amies – ce qui est toujours le cas, ce n'est pas comme si on avait ruiné quoique ce soit.

Personnellement, mon idée était d'en rester là. Seulement le hasard a décidé de remettre un cas difficile sur notre route, cette fois j'avais éviter de sortir boire en compagnie de Catherine – oui parce que ce n'est pas parce que j'étais complètement beurrée que je n'ai pas appris ma leçon. Bref, j'étais chez moi pépère en train de siroter une bière et de passer mes nerfs sur un jeu vidéo quand Catherine a débarqué, assurément après avoir un peu bu, mais juste les deux ou trois verres nécessaires pour se galvaniser. Là sans crier gare elle s'est jetée sur moi.

Bon il est vrai que j'ai résisté en tout et pour tout une minute. J'avais, après tout, moi aussi de la tension à évacuer.

Donc on a remis ça. Le lendemain cela dit, c'est elle qui s'est sentie obligée de mettre les points sur les 'i', ça ne veux rien dire, et bla, bla, bla. En ce qui me concerne ça allait sans dire, mais apparemment elle en avait besoin pour elle…

Et c'est ainsi que le cercle de notre routine s'est formé. Au début c'était après les cas difficiles, ensuite les jours stressants, et parfois seulement pour l'envie du moment. Elle pouvait débarquer chez moi quand elle le voulait, parfois on échangeait de simples regards entendus avant de quitter le boulot et je me retrouvais chez elle une fois qu'elle s'était occupée de Lindsey d'autre elle m'envoyait un simple message avec une heure indiquée dessus.

La mécanique était simple et bien huilée en somme, elle était parfaite. Bien sûr je me suis rendue compte que depuis trois ou quatre semaines elle commençait ses tentatives pour reconfigurer notre dynamique, et jusqu'à aujourd'hui je l'ai joué plutôt calme, au lieu de me battre avec elle j'ai préféré ignorer ses approches plus ou moins subtiles. Aujourd'hui je dois dire que c'était la première fois qu'elle prenait le taureau par les cornes.

J'ai essayé, j'ai vraiment essayé de l'épargner mais là elle est parti dans un délire complet. Je ne suis pas du genre à tourner autour du pot ou à sucrer la pilule. Et puis merde, j'ai été diplomate pendant trois ou quatre semaines, je pense que ça prouve bien que je suis patiente.

Je n'ai jamais, mais alors jamais envoyé aucun signal disant que je voulais plus. Tout ce que j'ai dit à Catherine, c'est la vérité.

Ce qui me met hors de moi c'est qu'elle essaie de me faire passer pour une enfoirée, insensible. Ce n'est pas le cas. Elle m'a utilisé, tout comme je l'ai utilisé.

Elle a vraiment tout gâché, c'est dommage, on était très compatibles physiquement.

Catherine

Je sirote une bière, tranquille et seule dans un bar branché. Ça fait six mois que je passe ma vie en revue et ma conclusion est que cette dernière année est loin d'avoir été brillante.

J'ai investis huit mois dans une relation charnelle avec Sara, et il faut croire que je suis trop vieille pour ce genre de bêtises parce que mon cœur s'est invité à la fête malgré toutes mes protestations il a réussi à me convaincre qu'il y avait plus entre Sara et moi que de simples parties de jambes en l'air régulières.

La bonne blague… enfin quand je dis bonne…

Quand j'ai essayé de convaincre Sara qu'on partageait quelque chose de bien réel, et je dois dire qu'il y a eu des fois où nos ébats tendaient à appuyer cette thèse, elle n'y est pas allée avec le dos de la cuillère pour remettre les points sur les 'i'. En fait, c'est comme si un trois tonnes m'avait percuté de plein fouet. Bien entendu, dans 99,9% des cas, c'est le trois tonnes qui l'emporte, et quand bien même on est assez chanceux de défier les statistiques, on en arrive à souhaiter ne pas s'en être sorti au vu de notre état plus que misérable; au final le trois tonnes gagne à chaque fois.

Si mes rapports avec Sara n'ont jamais été très chauds – hormis sexuellement, cela va de soit – autant dire qu'après la rupture de notre association de fortune, comme elle l'a si bien nommée, on est entrée dans l'ère glaciaire.

Nos rapports auraient pu devenir conflictuels… enfin, plus conflictuels qu'auparavant. Mais ça n'a pas été le cas. L'air de rien ça demande beaucoup d'énergie d'une part et d'autre avec notre nouvelle routine à chaque fois qu'on se disputait, au moins après on pouvait exprimer cette 'rage' encore plus dans les ébats qui suivaient inexorablement. Mais voilà puisque Sara avait décidé de couper court à notre association physique, j'ai moi aussi mis de la distance entre nous. Malgré tout ce qu'elle m'avait dit la dernière fois qu'elle était chez moi, malgré le fait qu'elle m'ait fait mal en foulant mon cœur aux pieds… malgré tout ça, cet idiot de cœur s'est accroché à ses sentiments… cet abruti d'appendice m'en aura vraiment fait voir de toute les couleurs.

Etre humiliée et meurtrie une fois est plus que suffisant, je sais que je peux être impitoyable mais il m'arrive de souffrir – comme maintenant – et je ne suis pas masochiste. Et puis les disputes avec Sara c'est usant, c'est toujours pareil, donc j'ai juste décidé de me concentrer sur l'essentiel, mon boulot, et d'ignorer le reste. J'ai besoin de mon énergie pour des choses plus importantes, comme ma famille ou mes amis. Comme elle l'a dit, Sara n'appartient à aucune de ces catégories… donc j'ai lâcher prise…

Mon cœur lui… est un con, qui persiste à s'accrocher… mais ça personne d'autre n'a besoin de le savoir.

Le moins qu'on puisse dire c'est qu'on a compensé notre manque de rapports physiques dans notre boulot. Comme quoi il y a du bon dans toutes situations insupportables.

Oui, insupportable. Ça fait six mois que Sara et moi nous ignorons mutuellement si avant on partageait une petite blague de temps en temps, là c'est tellement froid entre nous que c'est un miracle quand on échange un éventuel rictus. Le début était le plus dur, mais éventuellement je me suis reprise en main.

Plutôt que de me morfondre sur ce que je n'aurais jamais, sur ce que j'aurais pu avoir avec Sara, je vais de l'avant, je sors. Seule.

Oh bien entendu il y a eu quelques rencontres d'un soir, mais au bout de la cinquième j'ai décidé d'abandonner le concept, c'est simple Sara m'a ruiné. J'entends par là qu'elle a toujours su comment me satisfaire, et ce dès les premières fois, c'est dingue, on aurait presque dit qu'elle avait déjà caressé mon corps auparavant. Dans la logique des choses, tout n'est allé qu'en s'améliorant, bref, on était très compatibles.

Là, les fois où j'ai laissé quelqu'un d'autre me toucher, ce n'était pas pareil tout était maladroit, imparfait, et surtout insatisfaisant. J'ai pourtant essayé d'y mettre du mien, mais rien. Et il n'y a rien de pire que de rester sur sa faim quand il s'agit de sexe. C'est vrai, au final on est encore plus tendu et à vif qu'avant d'avoir essayer d'entreprendre quoique ce soit. Je me dis donc qu'il vaut mieux être seule que mal accompagnée.

Et puis pour être honnête après Sara, je pense que je suis fatiguée des choses qui ne mènent à rien, j'ai donné – peut être trop d'ailleurs, dans les relations de complaisances parce que la solitude parfois ça pèse – par conséquent j'ai revu mes standards à la hausse. Jusqu'ici je n'ai pas trouvé la perle rare, mais bon je ne me décourage pas, cela de ne fait que deux mois que je me suis remise à sortir. Et si je n'ai eu que de rares second rendez-vous qui n'ont pas menés à un troisième, j'ai quand même rencontré des gens sympathiques avec lesquelles j'ai passé de bonnes soirées à discuter, je me suis même fait de simples amis – bon d'accord deux, mais c'est déjà pas mal, surtout à Vegas.

« Toujours une bière pour commencer, ensuite des boissons non alcoolisées. La quantité varie, selon la compagnie, » une voix suave et féminine s'incruste dans mes pensées.

Je tourne la tête vers la source du bruit et me retrouve face à une jeune femme, la trentaine passée les cheveux roux coupés court et ébouriffés avec style des yeux qui mélange un vert menthe avec quelques soupçons de doré un visage juvénile et naturellement sympathique un sourire en coin qui laisse entrevoir une fossette l'air charmante et très sure d'elle. Elle est accoudée sur le comptoir, vêtue d'un pantalon noir, une chemise blanche au col large par-dessus laquelle elle porte un léger pull sans manches bleu marine, et pour finir une cravate rayée dans un dégradé de bleu attachée de manière leste avec un double nœud windsor.

Je la regarde de manière impassible, la fixe dans les yeux puis me concentre à nouveau sur ma bière lui laissant une chance de dévoiler son jeu.

« Je vais me permettre de te tutoyer, » elle me prévient avant de continuer. « C'est seulement la huitième fois que tu viens dans ce bar, tu bois toujours seule, parfois tu partages de bonne conversations avec certains, personne n'a eu la chance de pouvoir danser avec toi, mais il y a une certaine grâce dans tes gestes qui me porte à croire que tu saurais bouger ton corps au rythme de la musique. Plutôt discrète, semble inaccessible et pourtant si captivante, » elle continue avant de marquer une pause. « Et convoitée par beaucoup, » elle rit doucement.

« Je dois sûrement passer pour quelqu'un avec une obsession, mais c'est difficile de ne pas remarquer une aussi belle femme que toi, tu as tout simplement capturé mon attention dès la première fois que tu est entrée ici, » elle continue

« Un bon sens de l'observation et un cliché, comme c'est original, » je lui lance un regard légèrement blasé.

Comme je l'ai dit j'ai revu mes standards à la hausse, donc je teste l'endurance de tout ceux et celles qui tentent de me charmer. Ça me permet de faire un tri très expéditif dès les premières minutes. Ceux qui tiennent bon sont généralement ceux qui m'offrent d'excellentes soirées.

Mon inconnue sourit de plus belle, assurément amusée par son attitude.

« Je n'ai jamais prétendue être originale, juste honnête, » cette fois c'est moi qui esquisse un sourire, son aplomb me plait. « Je sais que c'est le moment où je dois me présenter, mais tout va dépendre de ta réponse à la question suivante : est ce que je peux t'offrir un verre ? »

Je m'apprête à répondre mais elle m'en empêche. « Pas de réponse hâtive, avant je vais exposer mon plan pour cette soirée. Après t'avoir offert un verre ou deux ici, je connais un autre bar sympa, beaucoup plus calme où on pourra jouer au billard, en faisant plus ample connaissance ensuite il y a ce petit resto où on pourra manger un bout, après ça… après ça ce sera à toi de prendre le contrôle de la soirée, » elle me lance un sourire charmeur. « Surtout, prends ton temps. »

Je la regarde longuement avant de refaire face au bar, je porte ma bière à ma bouche et en prend une gorgée.

Elle me plait, je ne parle pas du physique, son caractère me plait, il y a ce petit je ne sais quoi chez elle, et ce n'est pas uniquement dû à son excès de confiance. Mais elle m'a donné envie de la connaître. Je la laisse poireauter quelques secondes cela dit, après tout le plaisir est dans la chasse, et il ne s'agit pas d'attraper sa proie du premier coup, il faut s'apprivoiser.

Je prends une autre longue gorgée de ma bière, et joue nonchalamment avec l'étiquette.

« Je vais prendre un coca, » je me contente de répondre après un long silence. Je la regarde à nouveau et un sourire radieux illumine son visage et fait pétiller ses yeux.

Elle se penche sur le bar. « Hey, Speed, un coca et un tonic s'il te plait. »

« Tout de suite boss, » la barman répond.

Mon inconnue se concentre à nouveau sur moi et m'offre sa main. « Lee Anne, » elle se présente.

« Catherine, enchantée. »

« Tout le plaisir est pour moi, » elle répond. Nous sommes servies quasi immédiatement. « Merci, Speed, » Lee Anne fait un clin d'œil à la barman. « Santé, » dit elle avant de trinquer mon verre contre le sien. « Pour faire cliché, parle moi un peu de toi, qu'est ce que tu fais dans la vie ? »

J'ai un petit sourire en coin à son entrée en matière. « Je travaille pour la police scientifique. »

« Ooh… » elle grimace légèrement « La fin de soirée chez moi s'annonce quelque peu compromise, j'ai laissé mes squelettes dans mes placards. »

« Un sens de l'humour, c'est bien. »

« Merci, » elle roule des yeux avec humour. « Police scientifique donc, c'est intéressant ? »

« Très intéressant, parfois c'est cocasse – je ne pense pas que les gens se rende compte de l'étendue de la bêtise humaine, et d'autre assez déprimant de voir de quoi la race humaine est capable. »

« Tu aimes ce job ? »

« Ce que j'aime ce sont le puzzles, et la police scientifique ce n'est rien d'autre que d'essayer de résoudre de grands puzzles, » je souris. « Et toi, si j'ai bien compris tu gères cet endroit. »

Elle rit doucement. « Oui, pour tout dire ce bar appartient à ma famille, enfin à deux de mes frangins et moi-même. On a monté notre business en commençant par celui ci, une fois que tout était en place on s'est développés maintenant on gère deux bars, un club, un café et trois restos. Tout ne se situe pas à Vegas, mais je dois dire qu'on n'a pas à se plaindre. »

« Je vois ça. »

« Impressionnée ? » me demande-t-elle avec un haussement de sourcils taquin.

« Un peu, » j'hausse les épaules. « Je parie que c'est le genre d'info qui fait tomber les filles à tes pieds. »

Son regard devient soudainement sérieux « Je ne saurais pas te le dire, je ne m'intéresse qu'aux femmes, et puis celles que je tente de séduire doivent savoir captiver mon attention, être envoûtantes et dégager un certain charisme, » j'accuse son compliment détourné puis elle continue. « Je ne vais pas te mentir tu n'es pas la première à éveiller en moi un grand intérêt, mais toutes celles avant toi se comptent sur les doigts d'une main. »

Cette fois je souris et me surprends même à rougir légèrement. La conversation file doucement sans interruption et je dois dire que plus je parle avec Lee Anne, plus je l'apprécie.

« C'est l'heure de rush, je te propose de continuer la soirée dans le bar dont je te parlais plus tôt. »

« D'accord, » je réponds simplement.

« Je sais que c'est impoli, mais je vais te demander de m'accorder 15 minutes de ta patience, juste le temps de m'assurer que tout le monde est à son poste et que je ne quitte pas un bateau en difficulté, » elle me demande avec une grimace, vraiment désolée de devoir me laisser pendant quelques minutes. « Je serais de retour aussi vite que possible, je te promets que je saurais me faire pardonner, » elle ajoute.

Elle semble avoir peur que je lui fasse faux bon soit en partant pendant son absence soit en trouvant quelqu'un d'autre pour me tenir compagnie.

« Prends ton temps, je serais là dans 15 minutes. »

Elle se détend à nouveau. « Merci, je me dépêche, » dit elle avant de poser sa main sur la mienne pour la première fois, puis elle s'en va sans rien ajouter.

Elle me plait, elle me plait vraiment.

Je sirote un peu de mon coca, Speed me demande si j'en veux un autre mais je refuse, on discute un peu puis la foule s'ameute autour du bar, l'obligeant à retourner à son service.

Je suis encore en train de penser à Lee Anne quand je sens quelqu'un m'agripper le coude avec force et me faire pivoter sur mon siège, je suis sur le point de réagir mais je reste sans voix quand je me retrouve face à face avec Sara.

« Je ne sais pas à quoi tu joues et je pense avoir été assez tolérante avec tes conneries mais là y'en a marre. »

Je fronce les sourcils dans l'incompréhension la plus totale. « On peut savoir de quoi tu parles ? »

« Arrête de te foutre de moi, » elle me secoue légèrement.

J'extirpe mon bras de son étreinte. « Et d'une, lâches moi, tu me fais mal et de deux soit tu t'expliques soit tu me fous la paix. »

«C'est bizarre mais chaque fois que je sors, quelque soit l'endroit, t'es là. Au début je me suis dis coïncidence, sauf que là ça fait deux mois que ça dure, tu me suis ? C'est quoi le plan ? » elle répond agressive.

« T'as bu ma parole… je sais que tu penses que ma vie est pathétique mais crois moi je n'ai pas encore touché le fond au point de m'intéresser à tes moindres faits et gestes, désolée d'éclater ta bulle mais le monde ne tourne pas autour de ton nombril… »

Mais quel culot, c'est la première fois en six mois qu'on échange des mots en dehors du contexte du boulot et elle me fait une crise de parano. Ce qu'elle dit ne fait aucun sens, je l'aurai quand même remarqué si comme elle le prétend je sortais dans les mêmes endroits qu'elle. C'est quoi ce délire ?

Ça va, six mois que je l'ignore que nos rapports sont purement professionnels, je sors seule, je reste au bar la plupart du temps… quoiqu'il en soit il est certain que si j'étais effectivement dans les même bars que Sara – ce dont je doute, rien n'était intentionnel.

« Bien sûr… tu crois berner qui au juste ? Et puis, qu'est que t'as cru ? Que je deviendrais jalouse à force de te voire jouer les prostituées de luxe au bar ? »

Je me retiens de perdre mon sang froid à ses mots, je refuse de me laisser blesser par ses accusations puériles. Ce sous entendu que je suis une femme facile m'a toujours blessé au plus au point, c'est peut être la seule réflexion qui a toujours fait mouche. Mais cette fois je ne veux pas lui donner le plaisir de m'emporter. Six mois que je souffre, et en quelques mots elle me prouve que finalement elle n'en valait peut être pas la peine.

« Je suis une prostituée de luxe… » je répète platement avec un soupir. « Change de disque… c'est lourd, » je secoue la tête avec indifférence et je vois bien que ma réaction la dérange. « Et puis te suivre… » je ricane. « Merde Sara, tu te donnes beaucoup trop de crédit, t'es pas du genre inoubliable, » je lui balance. Ce n'est pas vrai, ça fait six mois que je souffre et que mon corps et mon cœur la réclament mais assurément elle n'en veut pas. Et je me dis qu'elle ne le mérite pas non plus.

« Maintenant, excuse moi mais j'attends quelqu'un, » sur ces mots je me tourne vers le bar, mettant effectivement un terme à notre échange.

Du coin de l'œil je vois qu'elle reste immobile pendant un moment avant de repartir d'où elle est venue. Je fini mon verre d'une traite et me force à me calmer, je passais une bonne soirée avant que Sara ne débarque et j'ai bien l'intention que ça continue.

« Me revoilà, tout va bien ? » Lee Anne revient à mes côtés. Elle me regarde avec inquiétude. « Est-ce qu'elle t'importune ? »

Génial, la dernière chose dont j'avais envie était qu'elle soit témoin de ma légère altercation avec Sara.

« Non, ne t'en fais pas on se connaît, on travaille ensemble, » je lui souris pour la rassurer.

« T'en es sure ? Elle n'avait pas l'air très amicale. Je peux la faire sortir si tu veux. »

Je ris doucement. « J'apprécie ton côté chevalier servant, mais ne t'en fait pas, comme je l'ai dit on travaille ensemble nos rapports sont plutôt tendus en ce moment, mais rien de grave. »

« Ok, » Lee Anne se frotte les mains. « Prête ? »

« Mais je t'attendais,» je réponds avant de prendre mon sac à main.

Sara

Quelle journée de merde…

On a tous dû enchaîner deux services pour au final ne pas être plus avancé. Bon l'avantage c'est que ce soir je suis de repos et ça ne veux dire qu'une chose : prendre du bon temps.

C'est dommage que Catherine ait tout ruiné, avec notre petit accord je n'avais pas à sortir tout le temps au moins c'était simple. Et puis on était très compatibles, avec Catherine j'ai atteint des sommets. J'ai eu de bonnes expériences sexuelles dans le passé, mais Catherine… elle m'a facilement fait oublier les amants avant elle. C'était incroyable l'alchimie entre nous deux, vraiment incroyable.

Bon bien sûr j'ai eu des partenaires satisfaisants après elle, mais ce n'était jamais du niveau de Catherine… en tout cas pour l'instant.

Quoiqu'il en soit ce soir j'ai bien besoin de distraction, je suis sur les nerfs.

Je commence par aller prendre un verre ou deux dans mon bar favoris, histoire de me mettre dans l'ambiance, mais je ne 'chasse' jamais ici c'est une question de principe, ce bar étant mon favori il doit rester un territoire neutre.

Une fois en mode détente je bouge dans les endroits branchés où je reste juste le temps de trouver un ou une partenaire pour la nuit.

Je décide d'aller au 'Wild Stalion' qui est un des endroits les plus en vogue. Ce n'est pas la première fois que je viens ici, j'aime bien traîner dans les mêmes endroits donc je me fais mes relations, notamment avec les videurs. Maintenant quand j'arrive je ne fais pas la queue, c'est vraiment super.

J'arrive souvent après l'heure de rush. J'aime ce moment où les clubs sont bondés, quand il y a tellement de sueur dans l'air que la chaleur en est insupportable parce que lorsque la sueur est dans l'air, le sexe l'est aussi. Le tout mixé avec un désir ardent qui vous colle à la peau et une soif charnelle pend aux lèvres de tout le monde.

Les gens ne vont pas seulement dans les clubs pour s'amuser. Ils y vont pour s'imprégner de cette atmosphère si particulière. Quand on est dans un club on est quelqu'un de différent on devient un objet de désire, de luxure, et de fantasmes. Etre dans un club c'est comme prendre un shoot qui fait gonfler l'ego d'une façon démesurée parce qu'on sait que peu importe qui on est et notre physique il y aura quelqu'un pour nous regarder avec concupiscence, au moins le temps d'une nuit.

Dans un club il n'y a pas de limites, aucune frontière, les genres importent peu, le physique, les préférences sexuelles tout ça n'a aucune importance tout le monde est animé par une seule et même chose : leur appétit sexuel.

Bien sur tout le monde ne cèdera pas à cet appétit. Certains ne viennent que pour avoir la satisfaction d'avoir excité le désir des autres, ressentir ce léger pic d'adrénaline et rien d'autre. Mais les autres sont là justement pour satisfaire leur envie. Ils sont là dans un but précis : s'envoyer en l'air. Alors tout le monde recherche la personne qui aura envie d'atteindre ce but avec eux.

C'est très facile de trouver un coup d'un soir. Les clubs sont comme des buffets géants, on voit ce qu'on aime, on prend ce qu'on veut, et ce jusqu'à satiété. Le sexe juste pour le sexe c'est marrant au début mais après ça devient rapidement ennuyeux. C'est pour ça que je chasse, c'est excitant dès le début. D'abord il faut trouver une proie qui capte votre attention, ensuite il faut la faire vous désirer. Pour moi, tout le plaisir est dans la chasse.

Les coups d'un soir sont les meilleurs, pour moi il n'y a aucun intérêt à être dans une relation sauf souffrir et perdre son temps. Et puis s'envoyer en l'air avec la même personne tout le temps donne toujours lieu à une sorte de routine. Je n'ai pas envie de ça. Catherine est la preuve que les routines ne sont pas une bonne chose. C'est justement pour éviter toute routine que je m'adonne aux coups d'un soir. Les gens sont intéressant quand on ne les connaît pas, parce que ce n'est qu'à ce moment qu'on peut laisser libre court à son imagination. Une fois qu'on obtient ce qu'on veut – ici il s'agit de sexe – les gens perdent leur intérêt, leur mystère, leur fraîcheur elles perdent toutes ces petites choses qui les rendaient désirables.

La meilleure façon de connaître quelqu'un c'est le sexe. En une nuit de sexe on peut apprendre tout sur une personne et son caractère. Vous ne me croyez pas ? C'est pourtant la vérité cela dit, parce que les gens ne sont jamais plus libres que lorsque qu'elles se laissent aller au plaisir charnel. C'est le seul moment où elles se laissent aller, vraiment aller. C'est le moment où les gens sont le plus vulnérables, et elles se dévoilent dans toute leur splendeur. Elles sont insouciantes et honnêtes avec leur nature la plus profonde.

Après la première escapade sexuelle, elles redeviennent humaines à nouveau alors elles commencent à rechercher des sentiments elles se cachent à nouveau derrière cette façade, cette personnalité qu'elles se sont construites.

Les vrais coups d'un soir ne signifient pas qu'on joue avec les sentiments des gens – contrairement à ce que pense la plupart des gens. Pendant les coups d'un soir – les vrais, les bons – il s'agit de trouver une échappatoire à nos vies monotone et routinières. Le sexe sans nom, sans visage, dénué de sentiments n'est rien d'autre qu'une manière d'échapper à la réalité et la platitude de la vie. C'est une façon de combattre la conformité, une façon de se prouver à soi même qu'on est toujours vivant parce que c'est un putain de rush d'adrénaline.

Bien entendu de nos jours, le sexe est différent. Les gens voient le sexe comme un moyen d'exprimer leur sentiments mais le fait est que le sexe est quelque chose de primal, d'instinctif et il ne tend qu'à un seul but : le plaisir. Oui le plaisir, la satisfaction, c'est rendre la liberté à toutes ces choses qu'on garde en cage pour goûter ne serait-ce que l'espace d'un instant à une incommensurable délectation. Dans le sexe tout ce qu'on devrait rechercher c'est cette sensation qui peut vous faire vibrer jusqu'au plus profond de notre être.

Et c'est exactement ce que je recherche, et pour atteindre mon but il faut que je trouve quelqu'un – homme ou femme – qui éveillera mon intérêt dans un premier temps.

Les hommes pensent avec leur membre c'est ce que beaucoup de gens disent – les femmes généralement. Et je vais vous dire, jusqu'ici je tends à croire que c'est vrai. C'est pour ça que la plupart du temps je choisis des hommes pour mon coup d'un soir parce qu'on est sur la même longueur d'onde. C'est un enseignement que je tire mes expériences personnelles, dans les premiers temps, 75% des hommes ne veulent rien d'autre que du sexe 23% recherchent des sentiments et une relation et les 2% restants dont sexuellement morts. Avec les femmes les statistiques sont inversées : 75% recherchent des sentiments et une relation, 23% ne veulent que du sexe et les 2% restants sont sexuellement morts.

Quoiqu'il en soit, il n'est jamais très difficile de trouver un partenaire pour une nuit, tout ce qu'il faut c'est un brin d'audace.

« Hey, Sara ! » un homme de deux mètre dix avec une carrure imposante sans être exagérée, m'interpelle dès que je m'approche de l'entrée au Wild Stalion.

« Picasso ! » je souris avec enthousiasme quand je le reconnais. Je passe devant une queue assez conséquente au grand dam de tout le monde. Picasso – Arthur de son vrai prénom, est le videur du club, on l'appelle Picasso parce que les quelques idiots qui se sont opposés à son autorité on eu le droit à un portrait gratuit façon cubiste. Arthur est un garçon attentionné et avec une personnalité très enjouée et calme lorsqu'il ne travaille pas. Comme je l'ai dis j'ai sympathisé avec les videurs de mes endroits favoris. En fait, pour être honnête je m'en suis faits des amis avec lesquelles je sors de temps à autres et oui, tout ceux qui m'ont catalogué comme asociale ne me connaissent pas.

Je fais la bise à Arthur et l'enlace brièvement. « Comment ça va ? »

« Tu me connais, toujours la forme, » il me sourit chaleureusement. « Ça fait un moment que je ne t'ai pas vu. »

« Oui, je sais, le boulot est très envahissant et les fois où j'ai eu le temps de passer t'étais pas de service. »

« En tout cas ça fait plaisir. »

« Bon alors quand est ce que je te donne une nouvelle déculotté au billard ? » je le charrie.

Il rit doucement. « Tu ne me lâcheras jamais avec ça n'est ce pas ? »

« Admets que c'était une belle victoire. »

« Ouais, ouais, » il roule des yeux.

« Appelle moi demain qu'on voit quand nos emplois du temps coïncident pour qu'on sorte, » je lui tapote l'épaule. J'aurais aimé passer un peu plus de temps avec lui mais il bosse et je pense que la patience de ceux qui font la queue commence à faiblir.

« Ok, aller, passe une bonne soirée ma belle, » il m'embrasse la joue avant de me céder le passage.

« A plus, » je lui fais un clin d'œil puis m'engouffre dans le club. Assurément la soirée commence bien.

Cette pensée vole en éclats très rapidement cependant. Après avoir fait un tour d'horizon rapide j'ai repéré une figure que je reconnaîtrais entre mille.

Catherine…

La colère me monte instantanément. J'ai mis un terme à notre association physique il y a six mois parce qu'elle partait dans un délire sentimentale. Alors bon nos rapports au boulot on évolués pour le mieux en ce qui me concerne, rapports minimum, dialogues minimum… bref, on a des rapports strictement professionnels au boulot ce qui est génial vu que je n'en ai jamais demandé plus. Et d'ailleurs en bonus on ne se dispute plus, c'est simple dès qu'on est en désaccord, elle se contente de s'isoler pendant cinq à dix minutes avant de trouver un compromis ce qui me conforte dans ma théorie selon laquelle c'est elle qui était à l'origine de 80% de nos disputes.

Cela dit même si nos disputes m'ont toujours épuisées, j'en étais venue à les apprécier pour la simple et bonne raison que nos rapports physiques n'en étaient que plus intenses.

Tout va bien dans le meilleur des mondes… ou du moins c'est ce que je pensais parce que surprise, ça fait deux mois qu'elle me nargue, qu'elle me suit tout en prétendant ne pas me voir. Non, je ne suis pas parano, un beau jour sans crier gare, elle était dans le même bar que moi, coïncidence me dira-t-on ce à quoi je répondrai certes sauf qu'il se trouve que je fréquentais ce bar régulièrement depuis au moins deux semaines.

Bon la première fois que c'est arrivé je me suis dis que ce n'était pas grave, je l'ai donc ignoré et tout allait pour le mieux. Seulement voilà, dès que je changeais de bar, surprise dès le lendemain elle était là elle aussi. Alors une fois hasard, deux fois coïncidence, la troisième c'est ce foutre ouvertement de moi et là autant dire que je ne le prends pas bien.

J'ai laissé faire pendant deux mois, mais là j'en ai marre. Marre de la voir partout où je vais, se parader au bar, et pour quoi je vous le demande ? Est-ce que c'est sa stratégie pour, je ne sais pas… me rendre jalouse ou me faire tourner en bourrique ?

Tout ce dont je suis sure c'est que ce petit jeu prend fin ce soir. Merde à la fin.

Ni une ni deux je me dirige vers elle à grande enjambées, une fois près d'elle je la saisis par le coude et la fait pivoter dans ma direction.

« Je ne sais pas à quoi tu joues et je pense avoir été assez tolérante avec tes conneries mais là y'en a marre. »

Elle feint l'ignorance avec un froncement de sourcils. « On peut savoir de quoi tu parles ? »

« Arrête de te foutre de moi, » elle me secoue légèrement.

Elle dégage son bras d'un mouvement sec. « Et d'une, lâches moi, tu me fais mal et de deux soit tu t'expliques soit tu me fous la paix. »

Et vas y prends moi pour une imbécile un peu plus longtemps. «C'est bizarre mais chaque fois que je sors, quel que soit l'endroit, t'es là. Au début je me suis dis coïncidence, sauf que là ça fait deux mois que ça dure, tu me suis ? C'est quoi le plan ? » Je lui demande légèrement agressive.

« T'as bu ma parole… je sais que tu penses que ma vie est pathétique mais crois moi je n'ai pas encore touché le fond au point de m'intéresser à tes moindres faits et gestes, désolée d'éclater ta bulle mais le monde ne tourne pas autour de ton nombril… »

« Bien sûr… tu crois berner qui au juste ? Et puis, qu'est que t'as cru ? Que je deviendrais jalouse à force de te voire jouer les prostituées de luxe au bar ? »

La remarque fait mouche comme à chaque fois, bon c'est vrai c'est nul, puérile et surtout c'est du remâcher on pourrait croire qu'après autant d'années j'aurais pu trouver quelque chose de mieux. Mais pourquoi me fouler ? Les trucs les plus anciens sont souvent les meilleurs.

Je m'attends à ce qu'elle explose comme à son habitude, mais elle n'en fait rien. J'ai un goût amer dans la bouche, peut être qu'au fond j'aurais aimé la voir réagir, revoir une flamme dans son regard. Là, le fait qu'elle ne fasse pas d'effort me déçoit un peu.

« Je suis une prostituée de luxe… » elle répète platement avec un soupir. « Change de disque… c'est lourd, » elle secoue la tête avec indifférence. « Et puis te suivre… » elle ricane. « Merde Sara, tu te donnes beaucoup trop de crédit, t'es pas du genre inoubliable, » elle ajoute avec dédain. « Maintenant, excuse moi mais j'attends quelqu'un, » elle m'indique avant de se tourner vers le bar.

J'attends un peu mais elle m'ignore fermement, je serre les dents avant de partir. Elle vient juste de ruiner ma soirée. Je vais m'asseoir à une des tables du club et observe Catherine. Une jeune femme vient la chercher et elles s'en vont je ne sais pas pourquoi mais j'ai une envie soudaine de frapper contre un mur. Au lieu de ça je vais au bar, descend quatre shots et observe la salle.

Il ne me faut pas longtemps pour trouver ce dont j'ai besoin. Une grande brune, me regarde avec insistance et je peux lire dans ses yeux que tout comme moi c'est l'anatomie qui l'intéresse. Je passe ma langue sur mes lèvres et pars à sa rencontre. Je m'arrête une fois que je suis dans son espace personnel.

« Passons les formalités, j'ai envie de découvrir ton corps dans ses moindres détails, » je lui annonce sans préambule.

« Tu pourrais commencer par m'offrir en verre, » elle me lance un sourire en coin.

« Non, je ne pense pas, » je lui réponds sérieusement. « T'auras besoin de beaucoup d'endurance pour tenir ma cadence. »

Elle renifle avant de secouer la tête. « Prétentieuse, à ce que je vois. »

« Réaliste, » j'hausse les épaules avec une légère moue. « Mais, tu n'as qu'à juger par toi-même, » je la mets au défi. On ne se quitte pas des yeux pendant un moment, puis j'esquisse un rictus avant de lui tourner le dos et de me diriger vers la sortie. Pas la peine de me retourner, je sais que dans cinq minutes elle me rejoindra à ma voiture.

Je suis appuyée contre ma voiture, et il faut croire que j'ai été généreuse niveau statistique, parce que j'ai à peine porté une cigarette à mes lèvres que ma grande brune fait son apparition alors que je cherche mon briquet. Une fois encore on se fixe du regard, et un sourire prédateur apparaît sur mes lèvres. Je remets ma cigarette dans le paquet, me redresse pour ouvrir la porte passager à mon invitée. Je fais le tour de la voiture, prends le volant et démarre sans dire un mot.

Ma soirée vient juste de s'améliorer.


Merci de m'avoir lu