Le Bestiaire fantastique de Xenophilius Lovegood

Énormus à babille

Description : Durant la bataille de Poudlard, afin de permettre à Harry de revêtir sa cape et de quitter incognito la Grande Salle, j'ai détourné l'attention des gens en pointant le doigt vers une fenêtre et en criant :« Regardez ! Un Énormus à babille ! » Bien entendu, le temps que tout le monde tourne les yeux vers l'endroit indiqué, l'énormus avait disparu et on m'a encore reproché d'imaginer des choses. Mais moi, j'ai bien vu derrière la fenêtre, l'espace d'une seconde, une forme ronde dotée de sept bouches, de deux paires d'oreilles et, sur le dessus, de petites ailes translucides. En fait, l'énormus ressemble à un poisson-globe. Comme lui, il peut augmenter sa taille en se gonflant d'air. Normalement, il est gros comme une bille, ce qui le rend presque indétectable, mais à son extension maximale ‒ comme lorsque je l'ai vu ‒ il peut atteindre la taille d'un ballon de plage. Cependant, contrairement au poisson-globe qui se gonfle d'air pour effrayer ses ennemis, l'énormus le fait pour se donner de l'importance. En effet, cette créature passe son existence à dialoguer avec elle-même par l'entremise de ses sept bouches, chacune d'elles rivalisant avec les autres dans l'art de l'autoflagellation (d'où le nom d'énormus à babille). À intervalles réguliers, l'énormus réagit et veut montrer au monde qu'il est autre chose qu'un « misérable vermisseau ». Il se gonfle alors d'air mais, comme sa confiance en lui est inférieure à zéro, dès qu'il se rend compte qu'on le regarde, il perd tous ses moyens et…se dégonfle ! Combien d'humains se comportent comme un énormus à babille ?

Anecdote : il est possible, paraît-il, d'apprivoiser l'énormus à babille et de modifier son comportement. C'est du moins ce qu'affirme le spécialiste Sigismond Fraudh dans son ouvrage Comment j'ai apprivoisé et guéri un énormus à babille (Éditions Obscurus, 1922). Il a fallu dix ans au docteur Fraudh pour trouver un énormus, dix autres années pour ne pas le perdre de vue et sept ans pour établir un premier contact. Après dix-huit ans de «psychanalyse», la créature était apparemment guérie : elle restait gonflée en permanence et ne cessait de dénigrer avec ses sept bouches tout ce qui se trouvait à proximité (aussi bien les humains que les animaux et les choses). Beau résultat ! Combien d'humains se comportent comme un énormus à babille guéri ?