Titre : Chroniques d'une longue semaine.
Genres : Tranches de vie, pseudo-humour, romance, bêtise.
Rating : T
Personnages/Pairings : Aomine/Kise, Kuroko, Akashi, Momoi, Midorima, Murasakibara.
Disclaimer : Les personnages et leur univers appartiennent à Tadatoshi Fujimaki. Le concept et divers éléments du scénario sont inspirés de Seven Days, par Venio Tachibana et Rihito Takarai.
Résumé : « Les filles m'épuisent, des fois... » - « Sors avec moi, alors ? » Aomine ne saurait probablement jamais pourquoi mais, sur le coup, il avait eu l'impression que c'était le bon moment... Mais sa bonne étoile avait oublié de le mettre en garde contre les conditions que lui imposerait Kise, visiblement.
Note de l'auteur : Salut, ça faisait longtemps ! :) Momo à l'appareil. J'ai pas beaucoup de temps, alors je vais tâcher de faire vite... Voici mon nouveau projet sur ce merveilleux fandom qu'est Kuroko no Basuke - et, cette fois-ci, c'est pas un OS, mais une histoire à plusieurs chapitres =) Je sais pas encore combien elle en comptera, mais j'espère m'en sortir avec, disons... quelque chose entre 10 et 20, ce serait bien.
Sinon, vous connaissez le manga Seven Days ? Cette espèce de petite merveille... J'adoore ce manga. Et, justement, je préviens déjà : cette fic en reprendra l'idée principale. ^^ Je précise que ce n'est pas non plus Seven Days en version AoKi ; je me suis juste inspirée... enfin, vous verrez bien.
En dehors de cela... Je suis désolée pour Aomine. Ici, c'est l'Aomine de Teikou, vous savez, celui qui sourit, qui aime le basket, qui mange des glaces avec ses amis... du coup, il va peut-être vous paraître un peu OoC... enfin j'en sais rien argh XD Je sais même plus quoi dire. Je suis désolée pour Aomine, pour Kise, pour le scénario bizarre, pour mon style différent de d'habitude, et pour toutes les tentatives d'humour foireux que je peux aligner dans un chapitre et-
Anjnsjefnjenj. Normalement, ça sera mieux d'ici quelques chapitres x_x
Chapitre 1 : Lundi – 1
« On dirait qu'Aomine-kun a souvent la tête dans les nuages, ces derniers temps. »
A ces mots, Aomine Daiki sursauta.
Kuroko Tetsuya avait prononcé cette simple phrase, ces quelques mots, sur ce ton neutre dont lui seul au monde était capable, comme si ça avait été une évidence cent fois plus qu'autre chose ; cependant, il fallut bien une demi-minute à son ami pour l'entendre, l'écouter, la comprendre et l'assimiler.
« Huh ? Lâcha-t-il enfin, pas très sûr de ce qu'il se passait, exactement. Si tu l'dis, Tetsu, mais... »
Sa phrase resta en suspens, et se perdit quelque part dans l'air de la salle de classe où ils se trouvaient tous deux. Il était une heure et demie de l'après-midi, en ce moment, et la courte pause, celle qu'un petit malin avait fait instaurer entre le cours de littérature et celui d'anglais, celle-là même durant laquelle ils avaient pris l'habitude de se retrouver, serait sans doute bientôt terminée.
Affalé plus qu'appuyé contre la fenêtre de la salle de classe de son camarade, où il s'était introduit depuis une ou deux minutes déjà, Aomine perdit son regard dans le ciel, ou plus en bas, ou quelque part ailleurs, et soupira.
Kuroko, quant à lui, était assis à son bureau, étrangement situé tout au fond de la classe, juste à côté de cette grande fenêtre au rideau pâle, à la vitre propre. Immobile, le dos droit, il sirotait avec application la mince paille du berlingot de jus d'orange qu'il avait acheté la veille, emporté avec lui ce matin. Son regard bleu, tout d'abord concentré sur son jus de fruit, remonta bientôt sur l'épaule d'Aomine, mais ce dernier ne se retourna pas, et fit mine d'ignorer la curiosité qu'il sentait peser sur lui.
« Je me demande à quoi tu penses, déclara Kuroko.
– Ça t'regarde ?
– Peut-être que je devrais te demander à qui tu penses, alors.
– Eh ?! »
Pris au dépourvu, Aomine sursauta une nouvelle fois, et manqua de trébucher – fort heureusement pour lui, il parvint de justesse à se rattraper à la fenêtre, et évita ainsi de se couvrir de ridicule. Son ami, cela dit, le fixait toujours avec autant d'intensité, et la neutralité de ses yeux commençait à lui peser ; d'autant plus que, ce qu'il venait de dire, c'était...
Aomine se redressa, s'éloigna un peu de la fenêtre, et tourna la tête vers son ombre – oh, comme il détestait quand Tetsu le regardait comme ça.
« Je vois pas de quoi tu parles, marmonna-t-il alors, sur la défensive.
– De qui, Aomine-kun, le corrigea l'autre, insistant un maximum sur le pronom qu'il avait employé, au point que son ami s'en sentit agacé. D'ailleurs, je pense savoir de qui il s'agit. »
Oui, décidément, il détestait quand Tetsu le regardait comme ça ; quand il le fixait, droit dans les yeux, l'expression morne mais le bleu brillant et l'air de dire n'essaie même pas de me mentir, je peux lire en toi comme dans un livre ouvert.
Daiki ne répondit pas tout de suite, et Tetsuya mit à profit les secondes de silence qui suivirent pour aspirer bruyamment ce qu'il restait de son jus d'orange, le regard toujours fixé sur le visage de son camarade qui, lentement, commençait à virer au rose léger. Après tout, Aomine avait beau affirmer le contraire, il voyait très bien de quoi, enfin, de qui son coéquipier parlait – et tout ça parce qu'il savait, au fond de lui, qu'il n'était vraiment pas discret. Plusieurs fois déjà au cours des semaines précédentes, il s'était repris, avait tâché de s'empêcher de trop le regarder ; il s'était forcé à détourner les yeux de lui, à réprimer un peu son sourire, mais...
En cet instant, il espérait de tout son cœur que Tetsu n'avait rien remarqué, qu'il voulait juste le taquiner – la seconde d'après réduit ses espoirs en cendres.
« Je parle de Kise-kun. »
Jamais l'éternel ton neutre de Kuroko ne lui avait-il paru plus détestable qu'en cet instant précis.
« Pendant les entraînements, tu ne regardes que lui, reprit alors Tetsuya, calmement.
– C-C'est normal, tenta aussitôt de se défendre Aomine, il vient de nous rejoindre, je regarde comment il progresse, c'est tout...
– Quand tu joues avec lui, tu souris toujours.
– Ouais, mais c'est que-
– Tu es jaloux de ses fans, tu insistes pour rentrer avec lui après les entraînements, tu rougis quand il t'appelle Aominecchi, et tu caches sous ton lit plusieurs des magazines pour lesquels il a posé. »
Daiki sentit ses joues chauffer, et imagina la couleur de son visage passer au rouge vif – secrètement, il espéra que le teint mat de sa peau empêcherait de rendre ce détail trop visible, mais c'était peine perdue ; il était gêné, et à peu près certain que ça se voyait.
« J-Je, Tetsu ! S'étrangla-t-il, à moitié en colère, à moitié surpris, et complètement déboussolé. Je, enfin, tu, mais comment tu- ?! »
Comment tu sais ça, toi, exactement ?!
Après tout, l'as de Teikou pouvait expliquer le fait qu'il observe Kise par son envie de le voir progresser, et le fait qu'il lui sourie lorsqu'ils jouaient par son amour du basketball, mais ça, c'était- et puis oh, il s'en voulait de ne pas les avoir jetés, ces foutus magazines.
« Aomine-kun, répondit l'autre, soupirant, comme s'il avait lu dans ses pensées. Je les ai vus la dernière fois que je suis venu chez toi. Les magazines. »
Une seconde s'écoula encore dans le plus parfait des silences, comme Aomine, n'osant plus regarder les yeux bleus qui le fixaient, espérait en vain rafraîchir son visage brûlant en le couvrant en partie de sa large main de peau hâlée.
« J'en déduis que Kise-kun te préoccupe beaucoup. »
C'était affreux, songea Aomine.
C'était affreux, comme à chaque instant où il gardait le silence, il avait l'impression de s'enfoncer de plus en plus dans la honte et l'embarras qui s'emparaient de lui, un peu plus à chaque fois que Tetsu voyait juste.
« Ça se voit tant que ça ? Finit-il donc par lâcher, dans un soupir.
– Comme une brindille dans une botte de foin, Aomine-kun.
– Tetsu, ça, c'est vraiment la pire comparaison que j'aie jamais entendue. »
Nouvel instant de silence, que Kuroko se fit un plaisir de briser en inspirant, une nouvelle fois bruyamment, le contenu de sa paille.
« Tu sais, recommença-t-il ensuite, tu devrais lui en parler.
– Hors de question ! S'écria aussitôt Aomine, et il tirait une drôle de tête, l'air mi-dégoûté, mi-dépaysé. Imagine, s'il trouve ça dégueulasse, ou s'il... non. Hors. De. Question. »
Kuroko lâchait déjà sa paille pour lui répondre lorsque la porte de la classe coulissa, s'ouvrant en un claquement, et laissa entrer un groupe de quelques filles, qui rejoignirent leur place en gloussant. Trop heureux de profiter de cette occasion rêvée, Aomine eut tôt fait de rejoindre l'entrée de la classe.
« J'y vais ! Lança-t-il rapidement, toujours embarrassé.
– On en reparlera, Aomine-kun. »
Dans son dos pesait encore le regard bleu, neutre, et pourtant, tellement décidé, tellement intimidant de son coéquipier – et ce ton, celui que Tetsu venait d'employer, insensible, déterminé, ne signifiait décidément rien de bon.
Aussi, lorsqu'il quitta la classe de Kuroko ce jour-là, Aomine eut-il l'impression qu'il allait bien finir par devoir, qu'il le veuille ou non, se confesser à Kise Ryouta – et la simple idée de passer à cet acte fit courir dans son dos le plus long, le plus glacé des frissons.
« Je continue à penser que tu devrais parler à Kise-kun. »
Pris par surprise, une fois de plus, Aomine faillit laisser tomber la glace qu'il tendait à son ami ; par chance toutefois, ce dernier s'y attendait, et eut tôt fait de l'attraper.
Alors, il dirigea son éternel regard aussi bleu que neutre sur celui qui le dépassait bien de deux têtes, l'air interrogateur.
« H-Hors de question, j'ai dit, essaya d'affirmer le plus fort des deux. Et puis, de toute façon, je-
– Si tu ne lui dis rien, il va bien finir par le remarquer lui-même. »
Kuroko l'avait coupé et, en temps normal, pour cela, le jeune homme se serait énervé ; cependant, ce qu'il venait de lui dire le poussait à réfléchir. L'espace d'un instant, il tâcha de s'imaginer Kise, face à lui, un sourire gêné au visage, et alors comme ça, tu m'aimes, hein, Aominecchi...
Embarrassé par cette simple idée, Daiki secoua la tête. Non, il ne pouvait décemment pas laisser Kise deviner lui-même ce qu'il ressentait pour lui – parce qu'en plus, le blond serait peut-être fâché, ou bien flatté, mais peut-être qu'il rirait, ou se moquerait, serait gêné, et- le principe même de ce type de dialogue entre eux deux l'embarrassait affreusement, de toute façon.
Aomine porta la main à son visage, essayant sans trop d'espoir de dissimuler au moins un peu les rougeurs qui, lentement, se répandaient sur sa peau mate.
« Kise-kun peut paraître stupide, continua Kuroko, mais il a l'esprit vif, pour ce genre de choses. Après tout, ce n'est pas comme s'il n'avait pas l'habitude que-
– Pitié, Tetsu, implora-t-il alors, mange ta glace et tais-toi. »
Sans doute dans l'idée de rafraîchir un peu la température de ses joues, il mordit lui-même dans son propre esquimau.
Son camarade, de son côté, sembla faire de même, puisqu'il se tut, quelques instants durant ; toutefois, son silence, ce même silence qu'il gardait habituellement au point qu'on en oubliait jusqu'à sa moindre présence, ne dura pas, et bientôt il arracha ses minces lèvres à la sucrerie gelée.
« Je suppose que tu as envie de l'embrasser, déclara-t-il aussitôt, direct, comme toujours, et gênant, comme trop souvent, ces derniers temps.
– Hé..., hésita alors Aomine, effectivement mis légèrement mal à l'aise par cette supposition qu'il n'avait pas même la force de le nier – de toute manière, ça ne servirait à rien, Tetsu savait...
– Peut-être même, à vrai dire, as-tu envie de le-
– Hé ! »
Peut-être que Tetsu savait tout, mais quand même, là, il allait trop loin – avait-il seulement idée du point auquel il se montrait gênant, là ?
Ni une, ni deux, Aomine manqua de laisser tomber sa glace, et plaqua violemment la première main libre qu'il se trouva sur la bouche de son plus proche camarade, de son ombre dont les simples paroles l'avaient fait rougir, encore une fois. Il maintint leur position une demi-minute, encore, jusqu'à ce qu'il sente une goutte glacée, fondue, glisser contre sa peau ; puis, il tressaillit, lâcha son ami, et revint à l'esquimau qui lui fondait entre les doigts.
« ... Je vois, lâcha Tetsuya. Aomine-kun a donc véritablement ce genre de désirs déplacés. »
La réponse se fit attendre – mais au moins, Aomine ne l'étouffa pas, cette fois.
« Tetsu, j'vais te frapper. »
Pas déstabilisé le moins du monde par cette menace plus maugréée que proférée, Kuroko releva sur sa lumière deux yeux brillants, et Aomine crut y déceler une pointe d'amusement – ça l'agaça un peu. Il n'en dit rien, cependant ; après tout, il ne pouvait le nier, quelque part, Tetsu avait bel et bien raison, ne serait qu'un tout petit peu... Aomine en avait conscience : depuis bien un mois, peut-être même deux, voire même avant, il ne pensait plus qu'au basketball et à Kise et, de sa part, c'était la preuve la plus tangible que l'on puisse trouver.
Il aimait le basketball, par conséquent il y pensait ; il pensait à Kise, et par conséquent, il devait l'aimer – enfin, il supposait. Après, il n'était pas expert en la matière, et il n'avait jamais eu la moindre petite amie (ni le moindre petit ami) de sa vie entière, mais... il supposait que ne plus pouvoir détacher son regard ni ses pensées d'une personne, que de se sentir heureux sitôt qu'elle s'approchait, et que de ne plus supporter l'idée de la perdre, de la voir s'éloigner ou de s'en faire détester suffisait à prouver qu'il l'aimait.
Restait maintenant le fait que Kise Ryouta était un garçon, que lui aussi, et que le modèle n'était, jusqu'à présent, sorti qu'avec des filles-
« Les lettres d'amour qu'il reçoit ne sont pas toutes écrites par des filles.
– Eh ?! »
Une fois de plus, Kuroko s'était exprimé comme s'il avait eu à énoncer une évidence – Aomine, lui, s'en voyait abasourdi.
« Tetsu, qu'est-ce que tu dis ? S'étonna-t-il.
– Je dis que tu n'es sans doute pas le seul garçon à qui Kise-kun est susceptible de plaire.
– M-Mais... comment ça ? »
Imperceptiblement, Kuroko soupira.
« D'autres garçons aiment Kise-kun aussi.
– Non, mais attends... ça veut dire que je suis pas le seul, alors ? Et y'en a d'autres qui le lui ont dit ?!
– C'est ce que je viens de dire, Aomine-kun. »
Sur ces bonnes paroles, Tetsu attacha consciencieusement ses fines lèvres au coin bleuté de sa glace, et avant même qu'Aomine ne le réalise, tous deux s'étaient mis en route vers le gymnase, où leur entraînement du soir aurait bientôt lieu.
Le plus grand des deux garçons glissa sa main libre dans la poche de son pantalon et, décidant qu'il ne répondrait pas, cette fois, s'attaqua enfin sérieusement à la glace qui fondait toujours contre ses doigts. Chemin faisant, il ne put s'empêcher de réfléchir à ce que Tetsu lui avait dit, cependant ; alors, comme ça, il était possible que Kise ait déjà eu, en plus des admiratrices, quelques admirateurs... sans doute le blond n'était-il pas sorti avec, mais sur le coup, ça lui redonnait un peu d'espoir, et il se prit à sourire, doucement.
Ce n'est que lorsqu'ils furent tous deux dans les vestiaires et qu'Aomine eut l'esprit ailleurs, le crâne coincé dans le col du t-shirt qu'il enfilait, que Kuroko décida, comme ça, sans raison, de reprendre leur précédente conversation.
« En plus, j'ai entendu qu'il ne s'était pas moqué d'eux, lança-t-il, pensif.
– Bordel, Tetsu, sois un peu clair quand tu parles, répondit l'autre, qui ne voyait pas où son ami voulait en venir.
– Kise-kun a refusé de sortir avec les garçons qui le lui ont demandé, mais je pense qu'il l'a fait avec respect. Sans montrer d'homophobie, si tu vois ce que je veux dire. »
Oh.
Ah, oui, il voyait – et sur le coup, c'était bien que Tetsu le précise, parce qu'il n'avait même pas envisagé la possibilité que Kise puisse se foutre de sa gueule au moment où il se déclarerait à lui, enfin, s'il le faisait, et... En fait, la déclaration de Tetsu lui rajoutait une inquiétude en plus. Génial. Aomine soupira, et termina d'enfiler son t-shirt, tâchant tant bien que mal de se concentrer sur l'entraînement à venir plus que sur Kise, Tetsu, ses propres sentiments, et tout le bordel qui allait avec – de toute manière, il n'était pas d'humeur à penser à ça, maintenant. La simple idée de se confesser à Kise le faisait encore rougir un peu, le gênait atrocement, et il n'avait pas vraiment besoin de ça, dans l'immédiat.
« Réfléchis-y, Aomine-kun. »
Ce dernier conseil sonna un peu loin et, pour toute réponse, il maugréa quelque chose d'assez proche d'un oui, oui moyennement convaincu.
Aomine Daiki aimait le basketball.
Depuis des années, de tout son cœur et de toute son âme – et jamais de sa vie il n'aurait pu croire qu'un jour, quoi que ce soit, qui que ce soit, ne puisse être capable de l'en détourner. C'était simple : lorsqu'il jouait, lorsqu'il courait, dribblait, passait, sautait, visait, tirait, marquait, il était comme dans un autre monde, et parvenait toujours à ne plus penser à rien – il y avait le terrain, les mouvements qu'il faisait, la balle qui épousait à merveille la forme de sa paume, ou sa paume qui épousait à merveille la forme de la balle, il ne savait même plus, et cette sensation qu'il avait de faire quelque chose de naturel, de logique, de nécessaire au bon fonctionnement de sa vie, au même titre que de boire, de manger ou de respirer.
Et pourtant, ce jour-là, lorsqu'il pivota sur ses talons, lorsqu'en levant les yeux il aperçut le panier orange, lorsqu'il prit appui sur sa jambe droite pour sauter, lorsqu'il exécuta un puissant dunk, et même encore lorsqu'il retomba au sol sans difficulté, arquant légèrement les genoux afin de ne pas se blesser, il ne put s'empêcher de penser à autre qu'à simplement marquer.
En l'occurrence, l'autre chose s'appelait Kise. A l'autre bout du terrain, il avait les yeux rivés sur lui et Aomine le savait, le sentait ; d'une part, ça l'emplissait de fierté, mais d'une autre, ça l'embarrassait un peu, et il ne savait plus trop que penser.
« Voilà, on va s'arrêter là, déclara le coach de l'équipe, et il frappa des mains une ou deux fois, espérant ainsi obtenir l'attention de tous les joueurs. Merci à tous, c'est tout pour aujourd'hui. »
L'as de la Génération des Miracles porta la main à son front, et essuya de sa paume une partie des gouttelettes de sueur qui perlaient encore contre sa peau mate – puis, il glissa la main dans ses cheveux, décidé à repousser en arrière les quelques mèches qui collaient à lui. Il soupira ; avait-il seulement bien joué, aujourd'hui ? Il ne savait pas.
« Aominecchi ! »
Cette simple exclamation, non, ce simple cri, suffit à le faire tressaillir.
Non loin de lui Kise, haletant, transpirant, les cheveux blonds emmêlés, mouillés, collés à la peau pâle, le regardait en souriant, le fixait de son regard brillant, et Aomine remarqua qu'il s'approchait, au pas de course. Un peu surpris, il le regarda venir, et d'un seul coup, tout ce que Tetsu lui avait dit lui revint à l'esprit.
Je parle de Kise-kun.
« Aominecchi, c'était génial ! S'exclama le top model, presque hystérique, et c'était comme si un million d'étoiles scintillaient dans son regard. Ahn ! Je veux savoir faire pareil, un jour ! »
Kise-kun qui lui souriait, qui ne regardait que lui, qui avec le temps avait appris à aimer le basket presque autant que lui ; et Kise-kun qui s'entraînait avec lui, jouait contre lui, le défiait de temps à autres, ne cessait de répéter qu'il voulait lui ressembler, Kise-kun dont deux mots suffisaient à le faire sourire, Kise-kun près de qui il se sentait constamment de bonne humeur, ce même Kise-kun qui occupait son esprit à égalité avec son sport préféré, ce à quoi il s'était dévoué, et...
« Rêve ! Répondit Aomine, tâchant de prendre un ton amusé, un peu moqueur. Va falloir faire beaucoup d'efforts, t'as au moins six ans d'entraînement à rattraper !
– Eh ?! Ça veut pas dire que je vais pas y arriver ! »
Kise qui ne perdait pas espoir, s'accrochait, et tentait toujours de l'emporter contre lui, même après dix, vingt, cinquante défaites.
Kise qui lui lançait ce genre de regard à la fois jaloux, admiratif, et brillant de l'excitation d'avoir enfin trouvé quelqu'un qu'il ne soit pas capable de copier ; Kise et son côté un peu gamin, aussi, un peu féminin, parfois.
Sur le coup, Aomine se sentit si heureux, si satisfait, si fier de lui (après tout, tant que Kise l'admirait, c'était qu'il n'avait pas mal joué, non ?), qu'il ne fit pas même attention à Kuroko dont les yeux bleus étaient, actuellement, rivés sur eux.
Cependant, un cri au bord de l'hystérie ne manqua pas de l'arracher à ses rêveries, le faisant sursauter par la même occasion.
« Hé, c'est Kise ! Kisee ! »
Aussitôt, Kise tourna la tête, et Aomine se sentit froncer les sourcils.
Dans les gradins du gymnase se pressaient à présent une dizaine, non, une vingtaine de jeunes filles ; et si elles s'étaient sans doute tues pendant l'entraînement, elles gloussaient, discutaient, et riaient, maintenant. Le jeune homme, agacé (elles faisaient du bruit, et puis, elles étaient sans doute venues accaparer Kise), leur lança un regard des plus dégoûtés – le top model, quant à lui, s'excusa rapidement, et se dirigea vers elles, souriant.
Il souriait de l'un de ces sourires qu'Aomine n'aimait pas, à vrai dire.
Au premier regard, c'était un beau sourire ; tendre, affectueux, classe, il plaisait aux filles. Mais en vérité, il sonnait faux, et Daiki, pour l'avoir observé, le savait parfaitement – c'était le genre de sourire hypocrite, nécessaire à tout modèle digne de ce nom, tout destiné à cacher les véritables émotions et à faire croire à une espèce de bonne humeur continue, sans raison, ininterrompue.
Honnêtement, l'as de Teikou peinait à envisager l'idée que l'on puisse sourire sans en avoir envie – après tout, ça revenait à mentir, non ? Il soupira, et lança un dernier regard à Kise, avant de pivoter sur ses talons.
« Aomine-kun. »
Le collégien, pris au dépourvu, sursauta, et laissa échapper un cri de surprise.
« Tetsu ! S'exclama-t-il, se retournant du même coup. Tu peux pas apparaître normalement, ne serait-ce qu'une fois dans ta vie ?!
– Je n'ai pas apparu, corrigea automatiquement l'autre, je me suis approché, et je t'ai appelé normalement. »
A cet instant, Kuroko marqua une pause, et Aomine ne releva pas – il commençait à en avoir l'habitude, de toute façon.
Devant lui, son plus proche ami reprenait doucement son souffle, au fur et à mesure que sa poitrine se soulevait de moins en moins fort, de moins en moins vite ; il transpirait beaucoup, à vrai dire, et c'était presque étonnant qu'il parvienne encore à se tenir debout. D'un autre côté, l'entraînement de la première équipe du célèbre collège Teikou était toujours des plus intenses, et Tetsu avait bien dû finir par s'y habituer...
« Je voulais te suggérer de réfléchir encore un peu à ce que je t'ai dit tout à l'heure, finit-il par déclarer tout d'une traite, sur ce ton monocorde qui lui était si propre. Tu n'es pas obligé d'agir demain, ni de le faire comme dans les mangas que lit Momoi-san. »
Ah, les mangas de Satsuki.
L'espace d'un instant, Aomine oublia les fangirls de Kise et se prit à s'imaginer en lieu et place d'un garçon prêt à se déclarer, dans le même genre que ceux de ses pseudo œuvres artistiques que son amie d'enfance l'avait forcé à lire, une fois ; il ferma les yeux, massa l'une de ses tempes, se vit soudain debout, le dos droit, rougissant un peu, sous la tempête des pétales de cerisiers en fleurs au début du printemps, Kise face à lui, et... Il sentit son visage prendre une expression dégoûtée – non, décidément, c'était pas un bon plan.
« A vrai dire, reprit alors Tetsu, je pense même qu'il serait préférable que tu présentes ça comme une blague, ou une affaire peu sérieuse. Dans le pire des cas, tu pourras toujours prétendre qu'il s'agissait d'une plaisanterie.
– T'es sérieux quand tu dis ça, Tetsu ?
– A moitié. »
Gêné, Aomine se prit à masser l'arrière de sa nuque, sans doute pour occuper sa main dont il ne savait que faire.
« Et je suis censé faire quoi, moi, du coup ? Demanda-t-il à mi-voix, plus pour lui-même que vraiment pour Tetsu.
– Essaie d'agir normalement, et tu finiras bien par trouver le bon moment. »
Cette histoire de « bon moment » tourna dans la tête d'Aomine pendant de longues minutes encore : sur le terrain, puis dans les vestiaires, sous la douche, il ne put plus penser qu'à cet étrange concept, tout en se demandant exactement ce que ça pouvait bien signifier – le bon moment... pour se déclarer, il supposait. Le bon moment pour avouer à Kise ce qu'il ressentait. Mais, c'était censé arriver quand, exactement ? Tout en se rhabillant, il essaya de poser cette question à Tetsuya, mais celui-ci ne lui répondit pas (et oh, qu'il détestait ça, quand Tetsu s'amusait à lui faire deviner ce dont il avait besoin sous prétexte que « je t'ai déjà assez aidé comme ça, Aomine-kun »).
Alors, finalement, il décida de s'en tenir au premier conseil de son ombre, et agit normalement – il se changea, salua ses camarades au fur et à mesure qu'ils s'en allaient, et attendit celui qui, retenu par une horde de jeunes filles en furie, sortit bon dernier des vestiaires.
« Aominecchi ! Lança-t-il joyeusement, l'air un peu surpris, lorsqu'enfin il en referma la porte derrière lui. C'est gentil de m'avoir attendu !
– Pas de quoi, répondit l'autre, avec un sourire. On rentre ensemble ?
– Héhé, volontiers~ ! »
Le sourire de Kise était radieux.
Aomine n'aurait pas su expliquer pourquoi, exactement, mais à chaque fois que Kise lui souriait, il avait l'impression que, tout à coup, ça suffisait ; plus besoin de mots, ni de longs discours, et de toute manière s'il fallait parler, le blond parlerait à sa place, simplement une ambiance calme, sereine, qu'il appréciait chaque jour un peu plus, et qui le mettait de bonne humeur.
Ainsi, il ne se défit pas de son propre sourire, même lorsqu'en quittant l'école ils remarquèrent que la nuit déjà commençait à tomber ; Kise fit une remarque à ce sujet, d'ailleurs, à laquelle Aomine se contenta d'acquiescer, et ils prirent tous deux le chemin de chez eux.
Ils avaient chacun près d'un quart d'heure, vingt minutes peut-être à marcher pour se retrouver chez eux, mais par chance, ils habitaient dans la même direction ; aussi, ils avaient pris l'habitude de faire une bonne moitié de ce chemin ensemble, et ce n'était pas pour déplaire à Daiki.
Kise, lui, semblait de bonne humeur quoiqu'il fasse – aujourd'hui, d'ailleurs, ne faisait pas exception à la règle.
« C'était vraiment génial, tout à l'heure, à l'entraînement, lâcha-t-il bientôt, rêveur. T'es vraiment super fort, Aominecchi !
– Ahah, je sais, répondit son camarade, riant un peu. Merci quand même, monsieur le mannequin !
– Oh, Aominecchi, ne m'en parle même pas... T'as vu le nombre de filles qu'il y avait, aujourd'hui ?
– C'est ça, vante-toi... »
L'as de Teikou s'apprêtait à continuer sur sa lancée, et à se moquer gentiment du blond pour cette manière qu'il avait d'attirer des hordes de filles partout où il allait, mais en tournant la tête, il réalisa que le collégien ne se vantait pas ; en vérité, il semblait plutôt gêné, et passait énergiquement la main dans ses cheveux, un sourire embarrassé collé aux lèvres.
« En fait, je préférerais qu'elles ne viennent pas, avoua-t-il, l'air toujours aussi mal à l'aise. Elles font toujours du bruit, ça agace Akashicchi, et après, c'est de ma faute... »
Aomine ne put s'empêcher de pouffer de rire.
« Ça t'apprendra à être aussi célèbre ! Se moqua-t-il, gentiment.
– Aominecchi ! S'indigna faussement le blond. C'est pas drôle, tu sais ! Les punitions d'Akashicchi sont horribles ! »
Sur ce, il se mit à pleurnicher, se plaignant qu'il avait déjà dû plus d'une fois faire des tours de terrain supplémentaires ; mais Daiki savait d'expérience que ces larmes de crocodiles ne signifiaient rien, et il se contenta donc de sourire, amusé.
« Et en plus, c'est encore pire depuis que j'ai rompu avec ma copine ! Finit par s'exclamer Kise. J'étais content d'en avoir enfin fini avec ça, mais maintenant que je suis de nouveau célibataire, y'a encore plus de filles aux entraînements... »
Kise prit une expression identique à celle que l'on appelait communément la tête de chien battu, et Aomine, même s'il savait pertinemment que son coéquipier n'en souffrait pas autant qu'il tentait de le faire croire, ne put s'empêcher de sentir son cœur se serrer un peu.
« Retrouve-toi une copine, alors ? Proposa-t-il, sans trop y réfléchir. Ça devrait pas être bien dur, et ça réglerait le problème... »
Sur le coup, ça lui avait semblé être une bonne idée ; Kise ne sembla pas apprécier, cependant. Pour preuve, il cessa de pleurnicher, mais porta ses deux mains à la lanière de son sac en bandoulière, qu'il serra tout à coup, rentrant les épaules, et il paraissait encore plus embarrassé qu'auparavant.
« C'est que, Aominecchi... Comment dire ? Commença-t-il, hésitant un peu. Les filles sont... je suis pas censé dire ça, mais... elles sont fatigantes ! »
Il marqua une pause, inspira profondément, et fronça les sourcils.
« En fait, celle d'avant, je ne sortais avec elle que parce qu'elle était fatigante, justement... Elle a insisté pendant deux semaines pour que j'accepte ! Tu imagines ça, Aominecchi ? Elle m'écrivait des lettres tous les jours ! Et les autres ne sont pas mieux, elles sont tout le temps en train de me courir après, de crier, de vouloir des autographes, et des tas de photos... c'est plus vraiment drôle, maintenant. J'aime bien faire des shootings et me voir dans les magazines, mais les filles m'épuisent, des fois... »
Ainsi, le mannequin haussa les épaules, l'air exagérément gêné, et tourna la tête – rien qu'un peu, sur le côté.
Et, l'espace d'un instant, Aomine se demanda si ce n'était pas le bon moment, là.
Il ne savait pas pourquoi, et ne saurait sans doute jamais pourquoi ; mais s'imaginer cette fille dont venait de lui parler Ryouta, ou même toutes les autres filles avec lesquelles il était sorti, ne serait-ce qu'une fois, et prendre conscience du fait que le modèle n'avait sans doute jamais accepté que parce que ces abruties avaient trop insisté, c'était... est-ce que ça voulait dire qu'il l'aurait, lui aussi, s'il insistait ? Ou bien, est-ce que ça voulait dire qu'en tant que garçon, il avait désormais plus sa chance que n'importe quelle fille, puisque la gent féminine le fatiguait, non, l'épuisait carrément ?
Il ne savait pas, et ne saurait sans doute jamais – et pourtant, là, à cette seconde précise, il eut l'impression que c'était ça, le bon moment.
« Enfin ! Reprit soudain Kise, dans un soupir qui se mua vite en sourire un peu gêné, mais Aomine ne l'écoutait déjà plus. Pardon-pardon, Aominecchi, je voulais pas t'embêter avec-
– Sors avec moi, alors ? »
Sans même s'en rendre compte, le génie de Teikou avait pensé tout haut ; ce qu'il avait prévu de murmurer, de souffler le plus bas qu'il le pourrait, il venait de le dire à voix haute, sur un ton qu'il avait voulu drôle, mais qu'il avait senti plus sincère, nonchalant, naturel qu'autre chose, et-
Merde était le seul mot qui lui venait à l'esprit, maintenant. A bas les occasions et les bons moments, et Tetsu et ses conseils à la con ; merde. C'était n'importe quoi, à ce stade-là. Mais qu'allait dire Kise ? Qu'allait-il bien pouvoir penser de lui ? Merde, il n'avait même pas envie de le savoir, et tout à coup la possibilité de rentrer chez lui sur-le-champ et de s'enterrer quelque part dans le jardin de sa vieille voisine de soixante-dix ans lui semblait tellement attirante qu'il faillit s'enfuir en courant.
Il se retint de justesse, cependant, et se contenta de faire quelques pas en avant – ce n'est qu'alors qu'il réalisa que son coéquipier était resté derrière, en retrait. Immobile – il n'avait pas bougé.
Sentant qu'il avait fait la gaffe de sa vie, le plus grand des deux garçons s'apprêta à prendre la parole, et à rajouter aussitôt que c'était une blague, qu'il avait plaisanté, que c'était n'importe quoi, qu'il savait bien que son ami n'était pas de ce bord-là, et toute une ribambelle d'autres excuses ou explications bidons qu'il aurait inventées dans l'instant, mais-
L'autre le prit de court, étonnamment.
« Aominecchi... Tu es sérieux ? »
Il voulut répondre que non, mais il y avait quelque chose comme de la curiosité dans le ton de Kise et, sur le coup, Aomine se prit à espérer que le blond finirait quand même par accepter.
Aaahn bon ça y est j'ai fini c'est fini je reviens la semaine prochaine l'école m'attend daaah-
Merci beaucoup pour votre lecture ;_; J'espère que ça vous a plu ! Que ce soit le cas ou non, n'hésitez pas à me le faire savoir ! =) La prochaine fois, ce sera pas plus intelligent, mais avec un peu de chance, ce sera un poil plus intéressant... aahn désolée x_x *sort discrètement en s'excusant*
