Précision : Fic non centrée sur le MC mais sur Romero "Romeo" Parada, Luis Torres et Nero Padilla. Slash Nero/Luis et léger Romero/Luis. Je précise que Nero et Gemma ont bel et bien rompu afin qu'aucun problème personnel n'interfère dans les affaires avec le club, ce qui n'est pas plus mal. Les noms de lieux sortent de mon imagination.
En cet après-midi de juillet dominé par un soleil de plomb, les Sons Of Anarchy, au guidon de leurs motos, crevaient de chaud sous leurs cuirs et aucun courant d'air n'avait la sympathie de leur caresser le visage. Pas même un petit vent pour leur inspirer un brin de volonté pour continuer leur route. Jax en particulier ne risquait pas de prendre l'air de quelque manière que ce soit, lui qui tenait si fort son guidon qu'il avait l'impression de l'arracher. La raison de cet excès de force? Il surchauffait intérieurement à cause des mots que Tara avait prononcés le matin même. En effet, elle était persuadée qu'un homme la suivait. Un basané, peut-être un Mexicain. Environ un mètre quatre-vingt, cheveux courts et bruns, roulant en 4x4 noir, la quarantaine bien tassée mais une prestance insistante et inquiétante. Jax n'avait pas perdu de temps avant de coller un visage sur cette description. Aucun gangster Latino de Charming ne s'en était pris aux familles à part jusqu'à présent et très peu de Latinos collaient aux basques de Samcro. Écartés les gangsters Mayans, il ne restait donc que les membres du Cartel et de toute façon, Jax aurait reconnu un de leur véhicule habituel.
Voilà pourquoi lorsqu'ils arrivèrent à l'embouchure de Remington Hills, non loin de Lodi, les yeux vengeurs du président cherchèrent en tout premier lieu le brun en question. Il salua pourtant comme il fallait le leader d'un hochement de tête et fit son possible pour ne pas croiser le regard de l'homme concerné par son humeur du jour, son lieutenant Luis Torres, sous peine de lui sauter dessus. Aucun hispanique ne chercha des histoires au club parmi le Cartel et pour preuve, ils furent tous aussi impassibles et scrutateurs que d'habitude, excepté un. De toute manière, la plupart des hommes de main avaient le crâne rasé et recouvert de tatouages, ou les cheveux longs et attachés. Seul Torres sortait du lot et si les autres furent tellement désintéressés en cet instant, ils étaient sérieux et sa démarche à lui devait être personnelle. Jax se questionna sans relâche durant les parlements entre les deux clans et jeta de temps en temps un œil sur Luis, dont les œillades étaient de plus en plus étranges. Au bout d'un moment, le regard du basané changea et ses yeux brillèrent en même temps que sa bouche se tordit lorsqu'il regarda Jax, malgré l'angle très sérieux du sujet abordé. Il ricanait.
Fixé, Jax commença à bouillonner devant ses regards douteux et insistants, se demandant si le basané savait que Tara l'avait informé à propos de lui. Malheureusement, le destin se joua de lui et ce qui devait arriver arriva. Jax n'étant pas du genre à se maîtriser quand on crachait sur sa famille, il sortit de ses gonds et cogna Luis au visage, surprenant tout le monde et déclenchant un mouvement de violence incontrôlable dans les deux camps. Les mots et injures fusèrent de la bouche du président des Sons et Happy, Ratboy et Tig passèrent directement à l'offensive contre les trafiquants de cocaïne, s'approchant de Jax et menaçant d'attaquer le premier qui toucherait à leur leader. Romero, plus consciencieux, s'interposa comme il put entre ses hommes et les bikers et Bobby en fit autant. Il y en avait au moins deux qui restaient concentrés... ou plutôt trois. Au bout d'une infinie minute, une rafale de coups de feu retentit et tout le monde en chercha la source. Un membre du cartel avait eu la présence d'esprit de ne pas chercher à répondre aux coups et d'aider son chef en sortant un fusil d'assaut pour le pointer en l'air. Assez maladroit étant donné le bruit mais essentiel au vu des circonstances. Parada le remercia d'un hochement de tête et s'en prit au seul responsable. Tel un chien enragé, le blond ne lâchait pas le morceau et son adversaire Mexicain non plus.
- Qu'est-ce que vous faites, vous deux ? LUIS ! TELLER !
- JAX ! ALLEZ ARRÊTE !
Romero maîtrisa d'abord tous les sous-fifres qui avaient suivi Torres dans sa riposte et braqua ensuite un regard furieux sur Jackson, ne comprenant pas sa lancée imprévue. Chibs non plus et il voulut en savoir plus avant de déclarer inutilement la guerre, demandant au passage à Happy de ranger son couteau.
- C'est quoi le problème, Jacky boy ? se renseigna t-il.
Celui-ci cherchait au moins à se renseigner avant de provoquer une bagarre dans les règles, idem pour Bobby. Jax parla pour eux en évitant soigneusement de se faire entendre des Mexicains.
- Ce Torres, je vais m'le faire. Il cherche à s'en prendre à Tara.
- Sans déconner !
- Tu plaisantes ?
Ayant abandonné Luis entre les mains de leurs gars parce qu'il refusait de se calmer, Parada s'avança vers Teller pour en savoir davantage sur cette échauffourée. Il n'en voulut pas à son bras droit d'être furax mais espéra que la raison serait plus que justifiée.
- Ça rime à quoi cette embrouille, Teller ? Où est-ce que tu veux en venir en attaquant mes gars ? Il y a des moyens plus radicaux de mettre fin à des accords, tu sais.
- C'est pas pour y mettre fin, Parada. Ton pote Luis passe son temps à traîner à Charming et suit ma femme comme son ombre quand elle sort de la maison le matin. T'étais au courant ?
- C'est n'importe quoi !
Perplexe, Romero regarda son homme qui bataillait encore contre les siens et il s'énerva devant un tel manque de contrôle de soi.
- LUIS, ÇA SUFFIT !
- Ton gars a picolé ou bien il a pioché dans la came, scruta Tig.
- Peu importe qu'il soit pinté ou camé, il harcèle ma femme, grogna Jax.
Voyant son chef et ami parler à voix basse avec leur associé, Torres tenta de porter la main à son arme mais se reprit. Carlos, un jeune brun tatoué de partout, n'hésita pas à le malmener pour le raisonner.
- Allez reste tranquille, Luis. Parada va être dans une colère noire si tu fous le deal en l'air.
Plus loin, leur boss aux longs cheveux tentait de défendre son équipier comme il le pouvait.
- C'est impossible, il est tout le temps avec moi.
Bobby, qui faisait confiance au jugement de Jackson, chercha à le piéger autrement.
- Vous dormez aussi sous le même toit avec ton pote ?
Torres, impossible à contenir, s'était dégagé peut-être en menaçant les gars ou juste en simulant une reprise de calme. Il avait apparemment entendu les autres parler de lui car il n'hésita pas à se montrer direct :
- C'est elle qui te l'a dit ?
Romero continua à tout contredire le temps des premières accusations mais s'arrêta en remarquant que son collègue devenait de moins en moins bavard au fil des mots et semblait même prendre un certain plaisir à écouter et encourager Jax à perdre le contrôle.
- Luis, il dit vrai ?
Son ami ne répondit pas lorsque Jax sourit méchamment alors qu'il avait enfin trouvé celui qui harcelait sa femme.
- Lou, regarde-moi.
Ce dernier, sans obéir, soupira et fronça les sourcils. Il répondit tout en continuant de toiser Jax sans ciller :
- Non, et je t'ai déjà dit de ne pas m'appeler comme ça.
- Mais c'est qu'il a l'air sincère, en plus... J'aurai pourtant juré que c'était toi que Tara me disait avoir vu en train de la suivre en 4x4, celui-là précisément. Un Latino plutôt sérieux avec des lunettes de soleil.
- Bien sûr, quel imbécile je fais. J'oubliais que je suis le seul Latino dans ce coin torride à porter des lunettes de soleil. Euh... aride, pardon !
Provocation à laquelle Jax aurait volontiers répliqué si l'intervention de Bobby et Chibs n'avait pas eu lieu. Parada les regarda chacun leur tour.
- Les gars, je ne sais vraiment pas à quoi vous jouez mais... " tenta t-il.
- ... et elle a dit un regard de pervers quand tu as enlevé tes lunettes.
Luis grogna en voulant porter la main à son arme mais Romero l'en empêcha en lui attrapant la main.
- Qu'est-ce que t'as dit ?
Romero finit par bouillir, n'étant pas aidé d'autant plus que certains des siens affichaient des rictus plus loin au lieu d'agir avec lui devant ces joutes verbales. D'autres plus réfléchis commençaient nettement à s'impatienter d'autant qu'ils en avaient marre qu'un de leurs chefs ne s'emballe et lève la main sur eux alors qu'ils voulaient juste le contenir. Donc ils restaient en retrait.
- Arrête tout de suite ! Les gars, on est là pour parler affaire et pas pour s'attarder sur vos querelles personnelles.
Jax se calma et sourit, de ce sourire qui en général envoyait beaucoup de menaces envers la personne désignée.
- En gros, ma femme ment ? Parce qu'elle n'a pas menti pour tes yeux, en tout cas.
- Alors amène-la ta bêcheuse et on verra si c'est vrai.
Torres se jeta sur lui et le cogna à la lèvre, Jax répondant à ses coups avec plaisir en demandant aux siens de ne rien faire.
- Pfff... et c'est reparti.
Romero soupira de lassitude, se découragea et s'assit plus loin, décidant d'attendre avec tous les autres que les deux hommes des cavernes ne décident enfin de se comporter comme des gens civilisés. Il fit également signe aux siens d'attendre que les deux ne se soient lourdement défoulés. Se battre tout en tapant la conversation... impensable pour leur entourage.
- Je vais te tuer, sous-merde ! cracha Jax.
- Sale enfoiré.
Malheureusement, les coups devinrent de plus en plus sanglants sans qu'aucun ne daigne se fatiguer pour autant. Les membres de Samcro et de Galindo intervinrent comme il le fallut cette fois et n'hésitant pas à utiliser la violence du côté de Parada. Enfin séparés, les hommes ne purent s'empêcher de continuer à s'insulter mais chuchotèrent les dernières rien que pour eux. Une minute plus tard, ils avaient enfin renoncé aux poings, le visage parsemé de sang et d'hématomes. Ils tentèrent de conclure le rendez-vous le plus vite possible, surtout Romero. Une fois chose faite, Torres et Parada s'éloignèrent des leurs pour "raccompagner" les Sons à leurs bécanes. Les membres de Galindo étant suffisamment loin, Jax, avant d'enfourcher sa Harley, se tourna une dernière fois.
- La CIA doit en recruter certains dans des hôpitaux psychiatriques pour que tu te sentes obligé d'agir comme un taré. J'espère au moins que tu joues les guetteurs en dehors de tes heures de boulot ?
Souriant pour éviter de replonger dans un bain de violence, Torres répondit juste :
- Agent de liaison avec la CIA, blondinet. Nuance !
- Voilà qui fait une large différence !
- T'as pas intérêt à nous griller pour ça.
- Garde ta queue entre tes jambes et je fermerai ma gueule. Si tu épies Tara sans que ton boss ne te l'ait demandé, ce n'est pas pour rien.
Les deux hommes se défièrent dangereusement du regard sans se soucier le moins du monde de la présence des autres. Chibs savait à quel point Jax était sensible en cas de simple provocation et qu'il frappait toujours le premier. Hors là, il s'agissait de personnes louches contre qui Samcro ne devrait même pas penser une seule seconde à entrer en guerre. Les cartels étaient les organisations les plus dangereuses du coin et leurs membres se trouvaient être aussi mauvais que leurs victimes étaient nombreuses. Cependant les Services Secrets de tous les pays avaient des habitudes, selon Jax, "très vicelardes et traîtres".
- Viens Jacky Boy, on n'a pas le droit à l'erreur dans ce genre de deals.
Dévisageant une dernière fois leurs partenaires, le blond approcha son visage de celui de Luis et leur balança un "au revoir" à sa manière.
- On en reparlera, ça je te le garantie... Lou.
Luis fronça les sourcils alors qu'ils enfourchaient leurs bécanes et retournaient à Charming. Une fois les bikers loin de leur espace visuel, Romero se planta en face de lui avec la ferme intention de laisser éclater sa mauvaise humeur mais il tâta tout d'abord le visage de son ami. Une joue bien amochée et ce près de l'œil, il s'en était fallu de peu. Luis cracha un peu de sang qui lui sortait de la bouche.
- Fais-moi voir ça, idiota !
- C'est rien, j'ai vu pire que...
- Tais-toi ! Tu mériterais que je t'en rajoute une.
Après lui avoir coupé la parole, il lui tourna le dos afin de bien choisir les mots qui sortiraient de sa bouche.
- Je ne dirai pas que tu ne l'as pas volé mais que ça ne se reproduise plus. On ne va pas avancer dans ce merdier si tu leur fais des coups bas comme ça. Imagine que Jax Teller balance tout sur nous, hein ! Et puis...
Il tourna le regard derrière et se perdit dans les prunelles sombres de son ami dont la patience s'estompa.
- Je n'aime pas du tout ton regard alors accouche, Parada.
- C'est quoi cette histoire avec la femme de Teller ? Alors comme ça tu la suis ?
- Pfff...
Torres commença à aller et venir dans tous les sens en regardant le ciel. Pour Romero, peut-être se faisait-il la moral en pensant "j'aurai fini par y passer".
- Je l'ai suivie juste une fois, et alors ?
- Ce n'est pas ce qu'il a dit et sur ce coup-là, je le crois plus que toi. Parce que tu m'as menti deux fois en une heure, mon vieux. T'as quelque chose qui cloche ou quoi ? Tu en pinces pour elle ?
- N'importe quoi, bordel.
- Ah ouai, alors pourquoi tu la files, dis-moi ? Et pourquoi tu l'as démenti si c'est vrai ?
- Les apparences.
- Eh bien mon gars, tu mens très mal.
Romero s'éloigna plus et s'approcha du sommet de la colline, observant la beauté des étendues vertes et marrons enveloppées du bleu du ciel pour pallier son énervement. Il se demanda essentiellement ce qu'il allait bien pouvoir faire de son ami s'il se lançait sur cette voie. Le mensonge pourrait le mener à faire de pire en pire.
- Pourquoi tu m'as demandé si j'ai un truc qui cloche, Romeo ? J'ai l'air d'un cinglé ?
Romero se retourna. La discussion s'annonçait très personnelle et avec son ami, il ne savait jamais comment il fallait réagir pour l'empêcher de partir au quart de tour.
- Ce ne sont pas les apparences qui comptent, tu devrais le savoir... c'est ce qu'on en fait. Un exemple parfait, tu fais le con avec ces bikers alors que...
- Ah non ! je t'arrête tout de suite, ne me sors pas le speech sur le mec bien. Je sais que je suis une merde, sinon je ne nagerais pas au milieu de tous ces détritus.
Il montra les membres du cartel au loin dont certains s'amusaient à briser des bouteilles vides sur la porte de la grange, puis il s'assit dans l'herbe en regardant au loin. Parada vint le rejoindre et sourit devant le calme et la conscience dont il pouvait de temps en temps faire preuve.
- Eh ben alors... Tu ne me ferais pas une crise de conscience, par hasard ? Arrête-ça, t'es quelqu'un de bien. Écoute-moi, je sais que tu n'as pas toujours été volontaire pour te mêler au cartel Galindo.
Le plus jeune retint un soupir et s'indigna.
- Sans blague, on ne nous a même pas laissé le choix, ni à toi ni à moi.
- C'est vrai, mais il fallait que quelqu'un le fasse et qu'on le veuille ou non, on y est. N'oublie pas qui tu es : tu es l'agent spécial Luis Torres, infiltré dans un cartel et non un membre confirmé de Galindo.
Il eut droit au regard désespéré et humide du plus jeune qui risquait de se laisser aller d'ici peu.
- Je sais.
Sa voix avait tremblé.
- C'est la preuve que t'es toujours un type bien, mano.
Son ami parut assez contrarié quand il tourna le regard à l'opposé :
- Ah ça non, crois-moi.
Croyant savoir de quoi il parlait, Romero leva ses paumes et laissa la chaleur du soleil tomber dessus comme pour les adoucir et en posa une sur une pierre ronde et profondément enfoncée dans la terre sur sa gauche.
- Quel est ton plus gros problème, alors ? Si tu crois en avoir un plus gros que le poids de ta conscience.
- Je suis homo.
Parada releva la tête trop rapidement vers celui qui en regretta déjà d'avoir parlé, en plissant les yeux et lui demanda pour être bien sûr :
- Sans blague, j'ai bien entendu "homo" ?
S'emportant, le plus jeune s'agita et serra le poing par réflexe.
- Oui, tu as bien entendu "homo". Un pédé ou une tante, comme tu veux, t'es content ?
- Hey hey calme-toi, je n'ai rien dit de mal. Pourquoi tu t'énerves, en quoi est-ce un problème ?
Luis se releva, lui tourna le dos et passa ses bras derrière sa tête avant de prendre une grande inspiration comme s'il savourait sa dernière dose d'oxygène avant son exécution. Puis il se retourna vers son ami, le regard chargé d'émotions.
- Ça te fait quoi, alors ? Tu vas m'en coller une ou le dire aux autres ?
En même temps qu'il se remit debout, Parada serra les mâchoires.
- Mais enfin Lou, pour qui est-ce que tu me prends ? Je sais que les Services Secrets et le cartel, ça n'a rien à voir avec la Gay Pride mais l'unité fait quand même partie de nous. Tu as raison, à la limite je pourrais t'en coller une pour avoir osé penser que je m'éloignerais de toi pour m'avoir simplement avoué que tu es homosexuel. Je ne le dirai à personne et je ne te frapperai jamais.
Il s'avança de son ami avant de lui sourire et lui tapoter amicalement la nuque, réussissant à le faire sourire également.
- Merci.
- Allez, on y va. Il va falloir qu'on revoit les motards dans deux jours et on a du "ménage" à faire.
Ils reprirent leur sérieux et s'approchèrent des casseurs de bouteilles qui durent tout nettoyer avant de partir. Parada détestait voir un tel chantier, peu lui importait l'endroit et n'hésita pas à leur faire ramasser leurs ordures.
Deux jours plus tard
Les Sons avaient été forcés d'annuler leur prochaine rencontre avec le cartel à cause du shérif qui les suivait de trop près et Romero fut prévenu. Cependant, le Cartel ne prenait jamais de retard et n'annulait jamais une livraison, quitte à la laisser sur place avec un ou deux gars pour la nuit. C'est ainsi que Romero et Luis s'étaient tout de même rendus là où ils auraient du, un territoire agricole négligé et dont certaines parcelles de récoltes pourrissaient au sol, l'endroit idéal. Ils garèrent leur 4x4 boueux et attendirent le vieux pick-up rouge de leurs gars. Pour ne pas attirer l'attention, ils se servirent d'une grange dans le même état que les champs. Cette grange ne leur plaisait guère. Un toit presque croulant, de la paille pourrie et des rats partout en plus d'un vieux tracteur rouillé qui semblait dater de plusieurs décennies malgré son entretien évident. Leurs hommes mettaient du temps et ceux-ci transportant un chargement risqué, cela devint inquiétant pour leurs chefs. Torres s'agita dans tous les sens et commença à râler sur la ponctualité de leurs collègues mais son ami se décida à prendre les devants. Parada consulta leurs deux hommes de main présents sous le regard curieux de Luis et ils ouvrirent la porte. Nerveux, il demanda :
- Où tu vas, Romeo ?
- Je vais voir derrière les collines avec Fernando et Carlos. On se séparera là-bas, toi attends ici au cas où ils arriveraient. Il y a d'autres granges et des hangars dans le coin et les autres sont en retard, alors je vais vérifier qu'ils ne se soient pas plantés d'endroit. On n'a pas que ça à faire et on ne peut pas s'exposer trop longtemps au même endroit.
- D'accord, fais gaffe.
- Ouai.
Luis avait toujours tendance à se montrer prévenant avec son ami et ça, le plus vieux l'avait parfaitement noté. Leur transport de cargaison serait en retard étant donné l'annulation du rendez-vous et la tension montait rapidement dans ces conditions. En tant que trafiquants, ils avaient une réputation à soutenir.
Les collines étant plus grandes qu'elles ne le paraissaient en réalité, ses acolytes mirent un temps fou à traîner au dehors et le Mexicain commença à s'impatienter. Sans ouvrir la grande porte de bois, il regarda par une légère fissure et fulmina en voyant qu'ils étaient partis à pied, les voitures complètement exposées. Il avait le temps de les attendre... il recula et donna un coup de pied dans la roue du tracteur. "Merde ! on n'est pas dans un jardin quand même. Ils aurait pu réfléchir sur la distance".
Luis pesta encore de longues minutes avant d'entendre un moteur au loin. Il espéra avoir entendu une personne égarée repartir aussitôt ou voir venir leur fichu cargaison, même s'il détestait faire tout le travail tout seul. Il tourna en rond dans la grange en attendant que le vrombissement du moteur ne s'éloigne de ses oreilles mais ce fut le contraire. "Enfin cette livraison, j'en ai marre" pensa t-il. Il s'assit sur une botte de paille et attendit l'ouverture de la porte mais se releva immédiatement lorsqu'une femme s'avança dans la grange.
Incrédule, le Latino fixa l'intruse qui avait osé pénétrer dans le hangar sans la moindre hésitation.
- Vous ?
Quant à Tara, elle reconnut son visage quasi-instantanément et paniqua à la seconde.
- Je vous reconnais, vous. C'est vous qui me suiviez à Charming...
Tara voulut s'enfuir mais Torres se leva et la poursuivit sans réfléchir pour la plaquer sur le sol de terre sèche, sa tête heurtant durement une botte de paille.
- Ravi de vous revoir, docteur Knowles ! lui souffla t-il à l'oreille.
Après lui avoir adressé un sourire lubrique, il plongea sur sa gorge pour y faire ce qu'il voulait : respirer son parfum, embrasser et mordiller sa peau, ce qui donna des frissons de dégoût à Tara mais un intense plaisir pour lui. Elle tenta de lui donner un coup de genou entre les jambes mais il le para facilement.
- Ah ! n'y pense même pas la tigresse, sauf si tu veux que je sois méchant.
- Je veux juste que vous me foutiez la paix, espèce de porc.
- Tu t'es aventurée au mauvais endroit au mauvais moment, ma mignonne. C'est de ta faute et pour une fois que je peux m'amuser... Tu sais, mon métier n'est ni drôle ni reposant alors je ne vais pas me priver.
- Vous priver de quoi ?
Il lui caressa les cheveux pour lui donner un aperçu de sa réponse et l'embrassa doucement, Tara serrant les lèvres. Il s'arrêta pour chuchoter :
- Tu sais que tu es magnifique ? Et pourtant, je ne suis pas...
- Et toi tu sais que tu vas mourir ? Je cherchais mon mari et il ne devrait pas tarder à arriver. Il est censé venir ici, aujourd'hui.
Luis lui serra le visage entre ses doigts et lui colla un couteau sous la gorge.
- C'est ça oui, fous-toi de moi. Ton mari n'est pas censé venir aujourd'hui. Si tu fous ton nez dans ses affaires alors tu devais forcément savoir ça. D'après moi, tu cherchais quelqu'un d'autre. Tu voulais me tuer, peut-être...
- Pas du tout...
- Ne me mens pas ! la coupa t-il.
Il plongea son regard dans le sien et même si ses yeux sombres la mirent très mal à l'aise, Tara ne se laissa pas impressionner et lui envoya même un coup de tête, coupant de ce fait le contact visuel un court instant. L'homme faillit tomber sur le côté mais se reprit et éclata de rire.
- Tu as du cran, j'aime ça. Je vais vite me mettre à bander si tu continues.
- Je ne risque pas de le prendre au pied de la lettre, pauvre tâche. Je ne vais pas me laisser passer dessus par un Mexicain en rut.
- Ah oui ? C'est mal me connaître.
Torres la frappa près de la tempe avec le manche de son couteau et Tara fut assaillie par une douleur fulgurante. Après cela, sa vue se brouilla un minimum à cause du coup et elle plissa les yeux. Profitant de sa position, le Latino se lécha les lèvres et embrassa Tara de la même manière que si elle avait été sa petite amie. Il y alla aussi doucement que possible en attendant qu'elle ne reprenne ses esprits. Il sentit tout à coup son jean lui être de plus en plus étroit et c'est à ce moment qu'elle revint à elle et réalisa avec horreur l'effet qu'elle lui faisait.
- Dites-moi que ce n'est pas vrai !
- Je t'avais prévenue... embrasse-moi, chérie.
Bouche bée, Tara n'en revint pas d'entendre ça.
- Quoi ? Non mais ça ne va pas chez vous ?
Il serra plus fort le couteau sous sa gorge et insista :
- C'est seulement pour voir ce que je rate. Et vas-y doucement, c'est-à-dire sans morsure. Tu le regretterais, je te le dis tout de suite.
Par peur du couteau dont la lame très bien aiguisée commençait à la faire saigner, Tara obéit malgré elle lorsqu'il l'embrassa à nouveau. Il était très tendre pour un homme qui lui donnait un baiser forcé mais cela ne la mit pas à l'aise pour autant. Luis monta d'un cran en forçant le passage de ses lèvres malgré le fait que la jeune femme refusa les premières secondes.
- Je vous en prie, vous travaillez avec Jax alors ne faites pas l'imbécile.
- Pas pour le moment. On n'est que tous les deux, tu vois bien.
Même si intérieurement Tara le trouvait séduisant depuis qu'elle l'avait surpris à la suivre, il en restait autant inquiétant et dangereux et elle au moins ne se laissait pas aller aux pulsions physiques comme ça. Elle était mariée, aimait Jax et de toute façon ce Mexicain aussi beau qu'il pouvait l'être lui faisait peur. Luis caressa son visage et l'embrassa beaucoup moins doucement cette fois, agressant sa cavité buccale et sa langue de façon obscène et éloigna discrètement son couteau d'eux. Il plaqua une main derrière la nuque de Tara pour approfondir leur contact autant que possible puis il commença à en réclamer plus, palpant toutes les formes qu'il voulait explorer, ses cuisses, son ventre, ses seins et tenta de plonger une main dans le pantalon de Tara, grondant d'excitation face à sa combativité. Tara voulut rejeter sa main mais ne put pas parler, les lèvres avides de Torres étant toujours plaquées sur les siennes et l'empêchant presque de respirer. À chaque tentative de rompre le baiser pour lui parler, il revenait à la charge. Quand leurs yeux se croisèrent un court instant, Tara décela une certaine lueur dans les yeux de Luis qu'elle aurait pu traduire par les mots "aidez-moi, par pitié ! arrêtez-moi". Elle en aurait eu de la compassion pour lui mais eut peur de tenter une quelconque riposte de peur qu'il ne lui fasse du mal en retour. Les caresses osées du Latino eurent raison de sa patience et il voulut défaire le jean de Tara mais celle-ci ne se laissa toujours pas faire. Entre gémissements et grognements, que ce soit de plaisir ou frustration, la respiration du Latino s'accéléra de façon inquiétante, montrant à Tara qu'il ne pouvait plus tenir. Il délaissa enfin ses lèvres et la laissa respirer.
- Quel effet tu me fais... " murmura t-il.
Il passa sa main entre eux à toute vitesse pour la porter à sa ceinture mais Tara l'arrêta, cette fois terrorisée.
- Non, pas ça s'il vous plait.
Railleur, l'homme la détailla.
- C'est bien, continue comme ça.
Puis il continua et dénuda son érection avant de vouloir baisser le jean de Tara, mais celle-ci resta encore une fois une femme solide. Elle posa une main sur son visage et l'obligea à la regarder.
- J'ai vu autre chose tout à l'heure dans vos yeux. Vous n'avez pas du tout envie de faire ça, je le sais.
Sur l'instant, Torres déglutit, ferma les yeux et tourna la tête pour ne pas lui montrer son hésitation.
- Je suis désolé, pardon. Je ne veux pas vous faire du mal... ce sera vite fini.
- NON...
Il lui posa durement la main sur la bouche et se jeta sur son pantalon, Tara pleurant et lui commençant à se torturer l'esprit tout en agissant pour se reprendre face à son comportement qu'il considérait lui-même comme détestable. Il pleura mais son excitation ne disparut pas malgré ce changement d'émotion considérable et il opta pour une autre solution. Abandonnant le pantalon de la jeune femme, il respira l'odeur de son cou, embrassa ses seins à travers son t-shirt et ensuite envahit encore ses lèvres avant que Tara n'entende un bruit indépendant à ce contact mais qu'elle reconnut facilement : il se masturbait. C'était visiblement la seule solution qu'il avait trouvée pour lui éviter la pénétration et les autres contacts interdits entre eux avaient pour but de l'aider à atteindre la jouissance. Tara ferma les yeux et vérifia discrètement que son pantalon était bel et bien fermé. Elle accepta à contrecœur d'embrasser Torres en priant pour qu'il finisse au plus vite, n'en pouvant plus de voir et sentir son corps au-dessus d'elle. Sa respiration haletante ainsi que les bruits gênants qu'il faisaient en se touchant la dérangeaient, lui remémorant par ailleurs le souvenir d'Otto qui s'était caressé tout en reniflant son parfum à la prison. Il ne fallut plus beaucoup de temps avant que la semence de Torres ne se répande tant sur le jean de Tara que sur le sol terreux, le Mexicain grognant cet orgasme qui l'avait totalement détaché de la réalité. Intérieurement, Tara lui fut reconnaissante de ne pas l'avoir touchée de façon plus personnelle. Voulant remonter sa main, elle toucha involontairement le liquide chaud qui commençait à s'imprégner dans son jean mais voulut éviter de montrer son dégoût.
Quant à Luis, il eut beau être repu de son plaisir, il osa à peine regarder sa victime dans les yeux jusqu'à ce qu'elle ne murmure :
- Merci de ne pas être allé plus loin. Ça suffit, maintenant.
Croisant cette fois son regard humide, Luis lâcha enfin sa verge, se pinça les lèvres et fronça les sourcils. Tara voulut lui adresser la parole mais il l'embrassa de nouveau, tout doucement. Elle ne sut plus du tout quoi penser, tremblante d'appréhension et l'accablement prenant le dessus. Luis se rhabilla lentement pendant qu'il l'embrassait, sa respiration tremblotante devenant plus régulière au fil de ses gestes. Tara posa les mains sur sa poitrine pour le faire reculer avec force et fut choquée de le voir retrouver un visage serein après avoir frôlé la crise de nerfs. Il insistait toujours lorsque la porte s'ouvrit sans bruit sur Romero, Fernando, Carlos... et les Sons qui avaient du réussir à trouver une combine pour se débarrasser du shérif mais ayant du se garer plus loin, aucun bruit de moto n'ayant été entendu. Ils virent en premier lieu le tracteur et derrière Torres au-dessus d'un corps de femme qui les vit la première, Luis n'étant toujours pas entièrement redescendu sur Terre.
- Devine qui on... LUIS !
- JAX ! hurla la brune après avoir dégagé ses lèvres à la vue de son mari.
Intérieurement, la panique s'empara de Romero qui sut parfaitement comment allait se dérouler la suite de ce rencard avec les Sons et réfléchit à toute vitesse.
- TARA ! LAISSE-LA, ORDURE.
- Et merde ! s'inquiéta Luis.
Autant surpris que les autres de trouver sa femme dans cet endroit inattendu, le blond se précipita sur l'assaillant et le retourna d'un coup de pied dans le flanc gauche avant qu'il n'ait pu se relever. Par réflexe bien que déconcertés, les autres membres du cartel s'en prirent à Jax pour couvrir leur chef et les Sons s'en prirent aux membres du cartel, si bien que Parada dut éviter un affrontement général. Aussi à cran que leur président, les Sons attirèrent Tara près d'eux tandis que Jax menaçait de sortir son pistolet.
- On est là ma grande, il t'a fait du mal ? s'enquit Chibs.
- Ça va, merci. Non, il ne m'a rien fait ! mentit la brune.
Après avoir fait confiance à son épouse sur ce propos, Jackson se retourna vers le basané pour cracher sa haine :
- Espèce de merde, si tu t'approches encore de ma femme je t'explose. Tu m'as bien compris ?
- C'est ta femme ?
Jax ragea et frappa sur la roue du tracteur.
- Tu le sais parfaitement, sale enculé.
- Jax, s'il te plait calme-toi ! tenta Tara.
Luis se releva et se massa légèrement le flanc avant de s'approcher en étirant son cou pour se moquer :
- Comme c'est mignon... tu me menaces ou je rêve ?
- Ça suffit, maintenant ! intervint Romero.
- Alors tu ne suivais toujours pas ma femme à Charming ? Comment t'expliques avoir voulu te la faire dans un endroit pourri censé servir de lieu de rencontre ? Tu l'as amené ici parce que tu te doutais qu'on aurait le shérif au cul, sale fumier. C'est peut-être même à cause de toi qu'on l'a eu.
Romero pointa un doigt sur lui alors que Luis se plaisait à titiller Jax.
- Arrête, tu t'imagines des choses. Jamais je ne l'aurai laissé faire et il y a des moyens plus subtiles de donner un coup de canif dans un contrat.
- Je n'y peux rien, ce n'est pas moi. Il faut croire qu'elle m'a dans la peau.
- Ta gueule, Luis.
Jax, totalement à bout, voulut se jeter sur lui mais Parada se posta devant son collègue pour le faire reculer, n'hésitant pas à le menacer du regard. Il ne comprit pas du tout pourquoi son ami le provoquait et cela n'annonçait rien de bon pour eux. Tara, quant à elle, se demanda si ce Mexicain jouait le caïd pour masquer ses émotions ou s'il avait vraiment oublié aussi vite ses actes. Emmené plus loin, Torres cessa de ricaner lorsque Parada lui secoua le col.
- Non mais t'es dingue, qu'est-ce qu'il te prend en ce moment ? Ne m'oblige pas à te frapper. Reste ici, je m'en occupe tout seul.
Chibs tenta d'immobiliser Jackson, réalisant que les Sons étaient sous-armés par rapport aux membres de Galindo. Jax serra les dents mais resta aussi stoïque que possible et demanda clairement à Romero de surveiller son ami et ce sans relâche. Torres se calma et observa Tara.
- Arrête de la regarder ! cracha Teller.
Le brun avait fini par arrêter de sourire.
- D'un côté je dis vrai, elle s'est pointée ici toute seule alors fais-toi une idée.
- Luis, ne cherche plus la merde.
L'homme aux cheveux longs n'en pouvait plus de voir son collègue s'en prendre gratuitement à une femme de Samcro et chercha vite à mettre fin à ce rendez-vous désastreux. Il donna à Teller les coordonnées d'une personne de chez eux à contacter et lui intima également de faire en sorte que Tara ne fourre plus son nez dans ce genre d'affaires et surtout, qu'elle ne cherche pas à le trouver s'il est censé "travailler", ce qui avait entraîné de déplaisantes conséquences en ce jour. Acceptant, Jax entraîna Romero à l'écart des autres et vida son sac après avoir vérifié qu'il pouvait lui parler sérieusement et discrètement.
- Être des fédéraux et bosser avec la CIA ne vous donne pas tous les droits et tu le sais. Je ne sais pas s'il a toujours été comme ça ou s'il a retourné sa veste mais garde-le en laisse.
- Non, c'est toujours un agent ! le coupa Romero avec conviction.
- Sans le moindre honneur, alors. Ouai... bah en tout cas t'as intérêt à le surveiller sinon je te jure que je me chargerai de lui, représailles ou non tu peux me croire.
- Inutile de menacer mon équipier. Il a commis une erreur et je le reconnais mais ce n'est pas un pervers. Il a seulement un problème en ce moment. Ta femme sera tranquille, tu as ma parole que Luis ne l'approchera plus.
- Ah ça oui, il a un problème et un gros.
Jax le regarda dans le blanc des yeux avant de relâcher la pression.
- Très bien.
Ils se serrèrent méchamment la main et chaque homme repartit dans son clan. Jax attira sa femme à part, il avait peur. Heureusement pour elle, tous les membres du club avaient été tellement occupés à vouloir tomber sur Luis qu'ils n'avaient pas fait attention aux tâches sur son pantalon.
- Tout va bien ? N'hésite pas à me le dire s'il t'a touchée. Au fait, qu'est-ce que tu fais ici ? Ce bizness est dangereux et ces types aussi, tu ne dois jamais interférer dans les affaires du club...
- Stop ! Doucement s'il te plait.
Devant la mine qu'afficha Jax, à la fois inquiet et énervé, elle mentit car elle n'avait aucune envie de faire foirer les affaires entre le cartel Galindo et Samcro. Et intérieurement, Luis Torres était un homme qui lui avait plus fait pitié qu'autre chose et elle était soulagée qu'il se soit finalement retenu. Malgré sa peur à ce souvenir, elle décida de lui faire une fleur.
- Alors non, ça ne va pas. Non, il ne m'a pas touchée et enfin je te cherchais pour te dire que Gemma a été arrêtée pour agression. Je ne pouvais pas te joindre en pleine campagne désertique mais c'est urgent vu ses autres antécédents d'agression. L'adjoint du shérif voulait la faire carrément interner parce qu'elle avait consommé quelque chose et hurlait. Elle attaquait tout le monde, c'est impossible de la laisser à l'hôpital.
- Ce n'est pas vrai, elle n'en fait qu'à sa tête.
Tara fut soulagée que son mari ne lui pose pas d'autres questions sur ce moment dans la grange mais par contre, elle allait devoir se donner le courage qu'elle avait su donner à Gemma après son agression par des membres de la League. Elle se mit cependant dans la tête que leurs cas étaient différents, Gemma ayant physiquement tout subi.
Passant un bras rassurant au dessus de ses épaules, Jax ne sentit pas le minuscule soubresaut qui l'avait prise et la conduisit jusqu'à sa voiture, les motards faisant ensuite la route avec elle jusqu'à Charming.
Les nerfs sur le point de lâcher, Parada renvoya ses hommes à leur planque commune avec la cargaison alors qu'il restait sur place afin de passer un savon à son lieutenant et dans les formes. Plaqué au mur extérieur, Luis voulut repousser son aîné mais sachant que son emportement était justifié, finit par se laisser faire.
- Tu savais que c'était la femme de Teller que tu suivais.
- Non !
- Si mais tu as refusé de l'entendre, pourquoi ? Tu cherches à tout foutre en l'air ou quoi ?
- Je n'en savais rien, au début.
- Mais après oui, alors pourquoi tu as continué alors qu'il t'a mis en garde la dernière fois ?
Luis baissa la tête.
- Je n'ai pas réussi à m'arrêter, il faut croire que j'ai pris goût au jeu du guetteur.
- Et tout à l'heure, pourquoi tu as fait ça ? Tu n'as pas pensé qu'on allait revenir peut-être ?
Embarrassé que Romero lui remémore l'agression dont il ignorait heureusement la gravité, Torres n'osa plus affronter son regard, tourna la tête et fronça les sourcils en gigotant un maximum pour que son ami le relâche.
- Je ne faisais plus gaffe. J'avais trop envie, je ne me retiens plus dans ces moments-là et je ne pense plus à rien.
Une mine de profonde peine apparut dans ses yeux alors que ses mots avaient foudroyé Romero.
- De quoi tu me parles, là ? "Envie"... apparemment on est arrivés à temps espèce de... je préfère me taire. Je ne te laisserai même plus seul, ne compte plus là-dessus. Tu as franchement un problème, Torres.
- Tu ne m'apprends rien ! assuma son ami.
Il fut encore plus atteint lorsque son ami lui tourna le dos, tellement il en avait l'habitude, mais il releva vite la tête en sentant son chef se rapprocher rapidement. Romero aussi sembla perdu.
- Au fait, et les mecs dans tout ça ? Tu m'as avoué être homo...
- Ça suffit !
La voix de Torres avait été à la fois tremblante et agressive, il ne s'était jamais adressé à son meilleur ami de cette façon et celui-ci le sonda du regard, finissant par abandonner leur dispute le temps que ce regard qui l'avait stupéfié ne disparaisse. Il pensa à rouvrir la plaie mais si son ami recommençait, il n'arriverait pas à l'aider. Changeant d'avis, il allait partir mais son lieutenant lui attrapa l'épaule et passa devant lui pour le regarder en face.
- Tu devrais avoir passé ta crise d'ado depuis longtemps, Luis.
- J'en suis conscient. Je ne voulais pas te parler comme ça, Romeo. Je suis désolé.
Romero lui baissa la tête et l'embrassa sur le front, chose qu'il lui avait déjà faite une fois, après que le plus jeune ne lui ait sauvé la vie lors de leur quatrième mission pour les Services Secrets.
- Tu es gay, il n'y a pas à tortiller. C'est vrai que ce n'est pas courant dans notre milieu mais tu as quand même confiance en moi, j'espère ?
Le plus jeune releva doucement la tête, comme irrité par lui-même.
- À propos de moi ? Comment j'aurai pu le savoir ? Même mes parents l'ont beaucoup moins bien pris, j'ai perdu ma famille le jour où je leur ai annoncé.
- À ce point là ?
Torres lui tourna le dos mais le regretta, sursautant lorsque Romero lui passa un bras se voulant rassurant derrière les épaules en se mettant à sa hauteur.
- Pardon, je ne voulais pas te faire flipper. Pauvre petit Lou, va.
Mais Luis n'eut pas le cœur à plaisanter et une émotion nouvelle commença à envahir son visage lorsque ses yeux brillèrent de tristesse.
- Ils ont été cruels à ce point-là ?
Torres afficha un air désintéressé en haussant les sourcils.
- Je dirai que ma chère mère m'a gentiment repoussé, quant à mon père...
Dépité, il jeta un œil sur son épaule gauche.
- ... il m'a laissé par terre. De toute manière, je n'en attendais pas moins de lui.
Une affliction non camouflée emplit le visage de Parada tel que cela ne lui était jamais arrivé.
- T'es en train de me dire qu'il t'a frappé ?
Le regard de Torres se perdit entre deux pierres sur le sol terreux qu'il foulait du pied.
- Tabassé à vrai dire. J'ai mis plus d'une heure avant de réussir à me relever, je crachais mon sang et je ne sentais plus mon corps tellement il m'avait donné de coups. Je ne l'ai jamais répété à ma mère mais de toute façon, elle n'aurait rien fait pour m'aider.
Son regard perçant - à la pensée du père - dirigé sur lui, l'aîné jura en donnant un coup dans un caillou :
- Quel vieux con ! et il est encore vivant ?
- Je n'en ai pas la moindre idée et je m'en tape, ça fait un long moment que j'ai oublié ma famille et de toute façon, je ne serai jamais allé jusqu'au crime de sang même si ça me démangeait.
- Et après ça, tu me dis que tu n'es pas quelqu'un de bien.
Romero lui sourit et lui passa une main dans les cheveux, pensant au fait qu'ils en prenaient de plus en plus l'habitude, et chercha à connaître des détails un peu plus gais et qui lui auraient apporté du bonheur au point de pouvoir lui remonter le moral en cet instant.
- Pour changer de sujet, tu as déjà eu un mec dans ta vie ?
Gagné ! son ami sourit instantanément même s'il garda une ombre de peine et une posture voûtée.
- Je prends ça pour un oui, mano.
Le sourire de Luis se mua en rire franc et il s'assit près de son commandant qui en fit de même.
- C'est vrai, ouai. Je voulais me fiancer avec lui, je n'aurai jamais pu l'oublier. Il s'appelait Rodrigo Montoya et il avait trois ans de moins que moi. D'ailleurs, ses parents non plus n'étaient pas fiers qu'il soit différent et ne voulaient pas qu'il sorte avec moi. Ajouté à ça le fait qu'on vivait dans un quartier pourri rempli de gangsters... on avait du mal à se voir tranquillement.
- J'hésite à le demander... mais où est-il maintenant ?
- Je n'en ai pas la moindre idée. De toute façon, il n'assumait pas le fait d'être homosexuel à cause du côté croyant qu'il avait hérité de ses parents, il a du épouser une femme si ça se trouve. Ça m'a fait du mal pendant des années mais j'ai fini par tourner la page.
- Ouai enfin pour ce que ça implique pour toi de tourner la page... t'agresses des femmes, ça ne rime à rien. Idiota !
- Ça va là j'ai compris, n'en rajoute pas.
Les jours suivants furent très calmes pour tout le monde, même trop. Luis refusant d'ailleurs de se présenter aux rendez-vous avec le club, les rencontres se déroulèrent sans accrochages ou hurlements. Parada pensa d'abord que son ami voulait un peu de solitude pour réfléchir sur lui-même. Malheureusement, même en dehors il se fit de moins en moins présent y compris parmi les siens et cela ne rata pour personne. Il ne répondait jamais quand un des siens cherchait à le joindre et le boss en vint à se faire du souci.
Romero avait cherché son ami partout, s'énervant sur son téléphone après être tombé sur sa messagerie encore une fois. Il avait même pris un risque calculé en s'approchant de Charming pour voir s'il ne l'apercevrait pas dans les alentours mais sans succès.
"Cet imbécile m'énerve de ne pas répondre, je suis déjà censé le surveiller. S'il est à Charming en train de jouer au chat et à la souris, ça va chauffer."
Il chercha donc son ami à l'intérieur de Charming et non plus dans ses alentours, sans pour autant parvenir au moindre résultat. Il opta pour un autre endroit : Langton, une petite ville près de Charming dans laquelle ils avaient tous les deux désigné une planque il y a quelques mois. Une vieille maison, petite, sans prétention, discrète et qu'ils n'utilisaient que très rarement. Sa façade était détériorée mais elle était entourée d'une cour et d'un portail d'une hauteur imposante qui découragerait le moindre intrus ayant de mauvaises intentions. Sur la route, Romero tenta de le joindre à nouveau, toujours rien alors il attendit de se rendre sur place. S'il ne l'y trouvait pas, cette fois, il n'avait plus d'autres options.
Arrivé à Langton, il se gara sans bruit sur la vieille pelouse non entretenue devant le hangar situé à gauche de la maison. "Toujours aussi pourrie, cette baraque" pensa t-il. Volets fermés, certains brisés et nécessitant un coup de pinceau, portail rouillé par le temps, rien de très accueillant. Les drogués des villes alentours adoraient se servir de ce type de vieilles maisons pour se défoncer. Il sortit par prudence son arme en cas de squatteurs éventuels et entra doucement, longeant les murs de chaque pièce à la recherche de son collègue et se promettant d'ouvrir chaque fenêtre plus tard pour faire partir l'odeur de renfermé. En dehors de la cuisine, toutes les pièces étaient dénuées de lumière diurne et vu la taille de l'habitation, Parada ne tarda pas à trouver son ami, qui il fallait s'y attendre, n'avait pas menti sur ses viles manies. Étendu à caresser le ventre d'une femme inconsciente, il n'avait pas entendu Romero entrer.
- Lâche-la, Torres. Hijo de puta, c'est quoi ton problème ? Je croyais que tu avais compris la dernière fois.
Tournant lentement la tête vers le nouvel arrivant, l'autre Mexicain s'énerva au moins autant que lui.
- FOUS-MOI LA PAIX, PARADA.
Fou furieux, il se releva et saisit une barre de fer par terre à côté de son lit. "C'est quoi ce bordel, à quoi il joue ?" pensa Romero. Au cas où le coup serait réservé à la pauvre inconsciente, Romero se jeta sur lui et le plaqua au sol avant de le frapper pour la lui arracher des mains.
- Depuis quand tu te comportes comme une bête ? Et qu'est-ce que tu fais avec ça dans ta piaule ? Luis...
Il avait prononcé son prénom d'une petite voix peinée et à cet instant, il sentit une vive réaction entre les jambes de Torres et sut par son intensité qu'elle était là depuis longtemps. Le plus jeune tourna d'ailleurs le regard vers l'étrangère, source de sa réaction, et attendit que son aîné ne se relève pour en faire autant.
- Merde alors ! Tu es sûr d'être gay, toi ?
L'autre ne répondit pas et frappa de toutes ses forces dans sa table de chevet.
- Dégage d'ici, laisse-moi tranquille.
- Regarde-moi quand je te parle. Je ne vais pas te laisser te comporter de cette façon, je sais que t'es pas comme ça.
- Ah oui ? J'ai tout essayé pour m'en empêcher et rien ne changeait alors j'ai tout simplement laissé tomber. J'ai voulu abandonner les hommes en pensant y arriver mais c'est impossible et les seuls moments où les femmes me font de l'effet, c'est quand je les force. Voilà ! Je te l'ai déjà dit et je te le redis. Je me dégoûte mais j'ai des besoins à assouvir et en forçant une femme, j'y arrive. Celle-là est inconsciente. Dans le meilleur des cas, j'aurai fait en sorte qu'elle se réveille ailleurs sans se souvenir de rien.
Outré et ouvrant de grands yeux devant un tel détachement de conscience, Parada lui envoya son poing dans la figure jusqu'à le propulser sur le lit.
- Puto mais va te faire soigner ! tu deviens vraiment fou à vouloir renier qui tu es. Pourquoi vouloir changer de bord si c'est pour devenir aussi mauvais ? Tu fais comme ton ex, tu n'assumes pas.
- Fais gaffe à ce que tu vas dire.
- Trouve-toi un autre mec, putain, le premier venu fera l'affaire mais fais quelque chose.
Sans prévenir, Torres s'avança à toute vitesse et viola son espace personnel, plaquant ses mains derrière sa tête avant de l'attirer à lui pour l'embrasser durement. Parada se dégagea avec difficulté et recula, totalement ébahi.
- Ben quoi, tu as dit le premier venu si j'ai bien entendu.
- Il est hors de question que je te serve de défouloir à bite juste parce que tu ne sais pas te comporter normalement avec les femmes. Et puis regarde-moi, j'ai l'âge d'être ton père.
Luis recula, l'air grave.
- Tu crois vraiment que je leur fais du mal par méchanceté ? C'est seulement pour arriver à quelque chose, mon vieux.
- Luis ! tu es homo, d'accord ? Alors arrête de violenter des femmes pour pouvoir ressentir quelque chose entre tes jambes et reste braqué sur les hommes. Ça ne fait pas de toi un criminel ou un monstre.
- Ce n'est pas ce que disait mon père. Tu n'imagines pas toutes les horreurs qu'il a pu me sortir, ce jour-là.
Torres observa la jeune femme avec un regard plus doux et se posa sur le lit près d'elle sous la surveillance constante du plus vieux.
- Tu te conduis comme ça parce que les paroles de ton enfoiré de paternel te reviennent à l'esprit depuis tout ce temps ?
Son ami acquiesça d'un hochement de tête.
- Tu m'auras tout fait, Torres. Chasse ce type de ta tête, il n'a plus rien à y faire alors coupe le cordon.
Romero s'interposa en voyant son ami tendre un bras vers le visage de la personne allongée mais Torres se défendit.
- Du calme, d'accord ? Je veux l'amener à la cuisine.
- Soit ! je vais te filer un coup de main.
Romero aida Luis à porter la jeune femme jusqu'à la cuisine afin de la réveiller doucement avec de l'eau sur le visage.
- Dis-moi que ce n'est pas ce que tu as fait à la femme de Teller.
- Elle était consciente quand vous êtes tous arrivés, non ?
Devant des yeux remplis de reproches et de supplications, Torres n'eut pas le cran de lui dire la vérité.
- Rassure-toi, je ne l'ai pas touchée.
Lorsque l'inconnue reprit connaissance, elle fut prise de peur et Luis s'excusa mais avant que Parada ne parle pour la supplier de ne pas porter plainte, elle commença à débiter tout un tas de paroles en espagnol. Elle n'avait pas le moindre souvenir d'une attaque et ne reconnaissait pas le plus jeune, c'était apparemment une immigrée clandestine ne parlant pas un mot d'anglais, ayant fui le poste de police le plus proche et qui même si elle l'aurait envisagé, n'aurait pas pu porter plainte à cause de son statut. Parada lui donna de quoi se nourrir quelques jours en lui indiquant l'adresse d'un endroit fréquenté par des gens dans la même situation qu'elle. Il lui autorisa de-même à se servir de cette maison comme abri si elle n'en trouvait aucun autre à sa convenance mais à condition qu'elle ne le crie pas sur les toits, précisant par ailleurs qu'ils ne s'y trouvaient que très rarement, lui et Luis. Liz, tel était son nom, mit donc les voiles sans demander son reste et en les remerciant comme s'il ne s'était rien passé, ce qui était le cas pour elle.
Une fois la malheureuse expérience passée, Luis garda le silence un bon moment à broyer du noir concernant ses bévues. Il ne finit par avoir une réaction qu'au moment où son collègue lui annonça qu'il allait prendre une douche et l'avertit :
- Je sais que tu n'as jamais pris la peine de rester ici plus de cinq minutes alors ne t'attends pas au luxe, il n'y a qu'une dose limitée d'électricité dans cette maison. On ne peut pas trop allumer d'appareils en même temps. C'est pareil pour l'eau chaude.
- Nous revoilà au Mexique, ma parole !
Parada fut soulagé de voir son ami rire un peu. Pourtant, la salle de bain étant collée à la cuisine, ce dernier l'entendit se plaindre tout au long de son lavement et le vit revenir tout en se plaignant d'avoir du se laver à l'eau tiède.
- C'est dingue, comment tu fais pour supporter ça ?
Le plus jeune haussa les sourcils et s'exclama :
- Ce n'est qu'une planque, après tout. Je n'en fais pas toute une histoire vu que je viens ici juste pour dormir... ou alors je faisais autre chose.
Parada rafficha une mine mauvaise à ces mots.
- Oui, question idiote. Combien de fois as-tu fait ça ?
Il finit par hurler à l'adresse de son ami qui semblait perdre l'usage de la parole, il détestait ce type de silence. Cela lui semblait être un de ces interrogatoires de fédéraux durant lesquels le suspect gardait le silence en se mordant les doigts d'être un criminel.
- HÉ !
- Deux fois en tout, elle plus une autre. Et je te déconseille de me gueuler dessus une fois de plus.
Parada l'observa attentivement, l'air de penser à autre chose et Luis tourna la tête, agacé par un tel regard et finit par se lever en toute hâte pour sortir de la cuisine.
Ils évitèrent d'en reparler les heures qui suivirent, ainsi que les jours suivants. Par contre, Parada le prévint de se tenir à carreau lors de la prochaine rencontre avec les Sons Of Anarchy.
Trois jours plus tard
Pour le prochain rencard, Chibs n'avait cessé de recommander à Jax de convier Nero et plusieurs de ses gars pour être plus en sécurité. En effet, les Hispaniques avaient tendance à ne pas se provoquer entre eux et de toute façon, Nero refuserait tout litige avec d'autres Latinos et était le meilleur pour s'occuper d'un "bordel".
Terré dans un coin pour se retenir de causer le moindre dérapage, Luis dut néanmoins essuyer un ou deux avertissements de la part de Romero et rien que ça commença à l'énerver alors que les bikers venaient d'arriver. Le moment fut mal choisi, en somme.
- En tout cas, la prochaine fois que je te vois t'en prendre à une femme chez toi ou ailleurs, ça va barder pour ton matricule.
- Oui p'pa, relax ! je n'ai pas...
- Qu'est-ce qui se passe ? Il a recommencé ? s'écria la voix de Jax.
Le président, de son côté, commença déjà à faire du mauvais esprit et Torres ne se gêna pas pour le suivre.
- Oh le revoilà, lui.
Les Sons venaient d'arriver en compagnie de leur escorte basanée menée par Nero. Le blond repensa à Tara et n'ayant pas aimé ce que que l'homme aux cheveux longs venait de dire, ne laissa pas son pistolet dans son étui cette fois-ci et tous dégainèrent en dehors de Nero et sa bande. Le maque, en retrait derrière les motards, garda un œil sur les hommes de main du Cartel qui les braquaient juste derrière eux.
- Il ne s'est rien passé, Teller, alors mêle-toi de tes affaires.
- Mes affaires ? Je te rappelle que la dernière que t'as tenté de violer c'était ma femme, si c'était la dernière, d'après ce que je viens d'entendre. Tu sais ce qui arrive aux mecs comme toi, à Charming ? Ils sont plombés ou castrés à vif.
Torres se planta devant Jax et approcha son visage pour lui balancer :
- Il ne s'est rien passé alors maintenant tu fermes ta gueule, Teller.
- Luis, attention à ce qu'on a dit.
Puis il s'avança également de Jax avant de faire reculer son ami qui risquait de déclencher une énième bagarre et parla uniquement pour que lui ne l'entende.
- Je t'ai dit que je le contiendrais et c'est exactement ce que je fais, on est d'accord ?
Il fut le premier à baisser son arme et fut suivi par Jax, leurs amis se décidant à les imiter, faisant baisser cette lourde tension. Les sujets purent enfin être dévoilés et débattus avec sérieux entre la mort de Laroy, le méfiance à l'égard de Pope et l'IRA qui mettait un temps fou à se décider sur le fait de travailler avec des gens de couleur. Durant tout ce temps, les hommes étaient restés à cran, chacun dévisageant un membre du clan adverse. Seuls Jax, Torres et Parada semblaient être dotés de la parole même si les regards que le biker adressaient au brun cachaient beaucoup de non-dits.
- Et qui dirigera le marché du côté des Niners maintenant ?
- Ils ne sont pas encore décidés, Pope a fichu la trouille aux gars en leur montrant la dépouille de leur chef alors ils ne se pressent pas pour prendre sa place.
Le reste du topo fut énoncé dans le respect et le calme même si les regards mauvais continuaient de se croiser, Nero laissant tomber l'environnement agricole et les membres du Cartel derrière lui. Son regard finit par croiser celui de Torres aussi rapidement qu'il croisait les autres. Ils seraient passés à autre chose si ce n'était pas arrivé une deuxième fois et cette fois, Luis s'attarda en oubliant la conversation qui les concernait tous. Il fronça légèrement les sourcils même si Nero était loin. Il ne savait pas pourquoi leurs regards ne se décrochaient pas mais il dut se résoudre à rejoindre la conversation, n'ayant aucune envie de jouer le provocateur avec un homme inconnu. Il avait déjà l'étiquette du pervers et cela lui suffisait amplement.
Un quart-d'heure après, le deal était conclu ou presque, ils n'auraient plus qu'à attendre la réponse prochaine des Niners et des chefs de l'IRA. Chacun des deux clans venait de se disperser de son côté pour décider personnellement de choses et d'autres. Soulagé par la retenue dont avait fait preuve son bras droit durant ce moment tendu, il s'en serait fallu d'un rien pour que Luis n'essuie aucune remarque mais voyant son ami fixer un autre gars que Teller, Parada demanda de manière aussi neutre que possible :
- Qu'est-ce que tu as ?
- Non rien !
- Ben si, t'arrêtes pas de regarder ce mec et tu fais une drôle de tête, lui aussi en plus.
- J'en sais rien, j'ai l'impression de l'avoir déjà vu quelque part.
- Ne te torture pas les méninges pour un mec que tu crois avoir "déjà vu quelque part", Luis.
Plus loin, Chibs passa un coup de fil aux différents leaders concernés par leur important deal et Jax s'approcha de Nero.
- Tout va bien ? J'espère que tu ne regrettes pas d'être venu, il ne s'est rien passé tu vois...
- Oui enfin rien... tu as failli déclencher une bagarre au début. On venait à peine d'arriver que tu sortais ton flingue, ce n'est pas comme ça qu'on règle une affaire, monsieur le président.
Teller parla plus bas afin que seul Nero ne l'entende.
- C'est à cause de Torres, je me méfie de ce type.
- C'est lequel ? Il n'est pas fiable ?
- Pour le boulot si, très fiable mais le problème vient d'ailleurs. Il harcèle Tara et n'hésite pas à la suivre sans même penser à rester discret, elle a fini par s'en rendre compte et m'a averti. Ce mec est un déséquilibré, j'en suis sûr.
Il avait grogné la dernière phrase, attirant la curiosité du maque qui reposa son regard sur l'autre Latino.
- Plus qu'étrange pour un agent fédéral de harceler quelqu'un ouvertement, peut-être un déséquilibré comme tu dis. Le brun aux cheveux courts avec ses lunettes... c'est bien lui, Torres ?
Jax tourna légèrement la tête et acquiesça de la tête.
- Luis Torres, le meilleur pote et lieutenant de Parada ! Il a un truc qui cloche à un certain niveau et ça a failli tout faire foirer, tout est de sa faute. Pour Tara, j'ai le droit de m'emporter.
- Comment ça ? demanda Nero.
- Ah je préfère éviter de ramener ce sujet, si tu veux bien. Fais gaffe ! arrête de le regarder comme ça, il est du genre irascible.
- Comme toi, Jax.
Obéissant, Nero détourna le regard mais quelque chose lui tournait dans la tête.
- J'ai l'impression de le connaître, c'est bizarre.
Jax rit avant de lui tapoter l'épaule.
- Tous les Mexicains se connaissent par ici.
- C'est presque vrai, ce que tu dis là.
Alors qu'ils se laissaient aller à la plaisanterie, Jax redevint sérieux.
- Je n'en suis pas sûr mais je pense qu'il a touché Tara.
Hésitant à répéter, l'aîné voulut tout de même satisfaire sa curiosité.
- Par "touché", tu veux dire...
- Exact ! et si cet enculé lui a posé la main dessus, il me le paiera.
Un coup de chaud aux joues, Nero devint nerveux par rapport à ce sujet.
- Ouh ! On se calme, Jax, Tara t'en aurait parlé, tu imagines si...
- Les aryens ont violé Gemma.
Révolté par cet aveu, Nero ne parvint plus à ouvrir la bouche et se demanda également pourquoi Gemma ne lui avait jamais parlé de ça.
- Mon Dieu !
- Ils s'y sont pris à plusieurs rien que pour atteindre Samcro. En tout cas, elle n'en a parlé à personne au départ jusqu'à ce que Tara ne l'apprenne et ne l'aide à avancer.
Fulminant contre les aryens, Nero se reprit.
- Tu vas lui demander de parler à Gemma ? Tara ! pour savoir, je veux dire.
- Non, j'observerai sa façon de vivre pour voir si elle changera ses habitudes et si c'est le cas, j'aviserai.
Ce deal n'en finissant plus, Chibs et Happy en étaient à leurs derniers coups de fil et les deux chefs Jax et Romero se concertèrent tous les deux à l'écart. Luis en profita pour s'isoler un moment et fit le tour du seul bâtiment proche qui était une grange, en ruine et semblable à celle dans laquelle il avait humilié Tara rien que de l'extérieur. Marchant tout en gardant les yeux rivés sur ses chaussures pleines de boue, il approcha de l'angle et percuta durement Nero qui arrivait dans le sens inverse. À demi sonné et énervé par ce choc, il ne fit pas et n'attendit pas la plus petite excuse avant de tempêter contre l'autre homme :
- Eh ! L'ami de Teller, je te reconnais. Regarde où tu vas.
- Tu peux parler, mon gars. Entre nous, tu n'es pas excusable.
Reprenant leurs manières, Luis regarda Nero droit dans les yeux et sans savoir pourquoi, mit fin à ses boutades et fut incapable de lui lancer une pique.
- Bon, je vais être direct. On s'est déjà vus quelque part ? Parce que t'as une façon de me regarder assez singulière par rapport aux autres.
- Pas plus que la tienne. Torres, c'est ça ?
- C'est ça ! approuva l'autre homme.
- C'est vrai que j'ai l'impression de t'avoir déjà vu quelque part, après ce n'est peut-être qu'une idée...
- Non ! moi aussi mais reste à savoir où. Sauf si c'est une idée comme tu dis...
Ils se dévisagèrent quelques secondes avant que Cesar, un des hommes de Nero, ne l'appelle au loin. Celui-ci attendit un instant et prit congé de son vis-à-vis non sans le saluer d'un signe de tête et d'un sourire, que Luis lui rendit inconsciemment en le suivant du regard et se posant tout un tas de questions. Puis n'en pouvant plus de tourner sans relâche autour de la bâtisse, il pénétra à l'intérieur et y jeta un œil avant que tous ne quittent le lieu de rendez-vous d'ici peu.
"Ces endroits sont tous les mêmes, dans le coin" pensa t-il.
Des poutres aux bottes de paille, cet endroit était presque identique à l'autre. Cet autre... Luis se perdit dans ses pensées et vit une des mallettes pleines de cocaïne, ouverte sans pour autant avoir été touchée. Parada ! il évitait toujours de laisser exposée une partie de la marchandise par simple soin. Soin... le mot en lui-même lui évoqua Tara et son esprit retraça ce qu'il avait osé lui faire, le mettant à genoux. Une de ses mains se posa sur le sol campagnard avant de replonger dans ses pensées. Fuir ou assumer... Luis n'en pouvait plus d'être ce qu'il était, un homme incapable de faire des choix pour lui ou pour le bien des autres et il s'en voulait éperdument. Il se frappa la poitrine avec violence pour se sortir de cette vision infecte qu'il s'était lui-même infligée. Les larmes naissantes, il ragea pour les retenir et se défoula sur un vieux vélo rouillé collé contre la poutre instable. Il vit une masse traînant à deux mètres de lui et se mit à l'abattre sur le cycle, sur les roues, le guidon et la selle, avant de l'abattre sur la poutre qui chancela bruyamment dans la grange. "C'est ça, tombe-moi dessus. Guéris-moi de ces poussées qui font du mal à tous ceux que j'approche. Tue-moi" pensa t-il. Il ne se rendit compte qu'il pleurait qu'au moment où la masse n'atterrit sur le capot de la voiture de Parada. Défoulé, ses mains tremblantes ne se séparèrent pas du poids de l'outil comme s'ils ne faisaient plus qu'un, au cas où l'un réclamerait l'utilité de destruction de l'autre. Il jeta un œil au 4x4 de son ami en ironisant sur le fait qu'il allait encore prendre cher, comme si c'était le pire qui avait ou aurait pu lui arriver. Il se servit de sa main libre pour envoyer dans le décor tout ce qu'il pouvait trouver et au moment d'en finir avec ses nerfs, il allait démolir pour de bon le véhicule noir qui signifiait autant de problèmes que de souvenirs avec son seul ami, sa seule famille. Il cracha dessus et commença à lever l'outil avant d'être interrompu par une voix qu'il avait très peu entendue mais appréciée.
- Luis ?
Le concerné, bouillant de rage contre lui-même, avait balancé la moitié des objets traînant en travers du bâtiment et achevé le vieux vélo abîmé à coups de masse. Nero tendit un bras vers lui, percevant une avalanche de fureur à la moindre intonation de voix mais l'autre homme se calma et tourna la tête vers lui, l'air désintéressé, humide et ailleurs.
- Lou ?
Le regard de l'autre homme changea du tout au tout, Nero pensa sur le coup à une mauvaise substance ingurgitée ou injectée dans le sang de Luis. Il jeta un œil inquisiteur au chantier et à la mallette dont le contenu intact était la cocaïne et se questionna sur les raisons d'une telle colère.
- Je n'ai rien consommé, je ne touche pas à ça. Qu'est-ce que tu me veux ?
Nero lui sourit.
- J'imagine que tu veux dire que tu ne touches "plus".
Torres fronça les sourcils et le dévisagea curieusement.
- On se connaît ou quoi ? Je commence à croire que oui. Il n'y a que deux personnes dans ma chienne de vie qui savent que j'ai déjà pris de la cocaïne : Romeo et quelqu'un que j'ai connu il y a très longte...
Le fin de sa phrase mourut en même temps que le son de sa voix alors que Nero s'approchait encore plus de lui, ignorant la peur de le voir dégainer son arme par méfiance. Chose qui n'arriva pas, rien que la mine plus que pensive de Torres, tellement que la main du maque sur son épaule ne le fit pas réagir.
- Oui, c'est moi. J'ai fini par me souvenir de toi, ou plutôt de la façon dont on s'est connus. Je suis même plus qu'étonné que ce soit moi qui me souvienne de toi et pas l'inverse, vu l'état dans lequel j'étais. Toi tu étais presque sobre, en revanche.
Torres perdit son regard sur le côté, réfléchissant à s'en donner mal au crâne et ses expressions finirent par se transformer face à la risette de Nero.
- Neron ? C'est toi ?
Tout sourire, le proxénète tapa dans ses mains et les plongea dans ses poches.
- Bingo ! Salut Lou, ça faisait un bail, hein ? Au moins vingt ans. Mais ici, je suis plutôt connu en tant que Nero.
- Oui enfin à une lettre près, tu es toujours le même.
Stupéfait, Luis regarda derrière Nero et veilla à ce qu'aucun des autres ne passe par la porte depuis l'extérieur.
- Ça me fait vraiment bizarre de te retrouver ici et dans ces circonstances.
- Il en va de même pour moi, le monde est petit comme on dit.
L'agent acquiesça et finit par se détendre, balançant la masse loin du vélo qui ne ressemblait plus à rien.
- Tu avais besoin de te défouler, on dirait.
Assumant son pétage de plombs précédent, l'agent détourna le sujet :
- Alors comme ça, t'es devenu un maque ? Tu as su t'entourer comme il fallait, dis donc.
- Hé oui ! Les affaires marchent comme sur des roulettes si on traite bien le personnel, il faut croire que cette voie m'était destinée. En fait, les filles sont géniales et on forme comme une grande famille. Quant à toi, tu es un agent fédéral... j'en reviens pas.
- J'étais déjà à moitié dans le bain à l'époque, juste un débutant qui cherchait à faire ses preuves.
- Et tu as réussi, on peut le dire.
Luis recula nerveusement le visage lorsque Nero s'approcha pour le lui frôler de la main mais se rendit compte à quel point ce contact lui avait manqué toutes ces années et le laissa faire la deuxième fois. Nero se sentit bizarre et déglutit devant son propre geste avant de voir Luis en faire autant. Ils eurent la sensation de revenir au moment de leur rencontre mais en plus doux cette fois. Leurs visages se rapprochèrent jusqu'à sentir leurs souffles se mélanger et ils auraient eu le loisir de pousser la chose plus loin si la voix de Jax n'avait pas retenti de l'extérieur, les obligeant à faire marche arrière. Torres se mit à protester tout bas contre Jax :
- Celui-là, un jour...
- Relax, rit Nero. Allez, je vais voir ce qu'il veut avant qu'il ne ramène toute la meute ici.
La main de Luis frôla une dernière fois celle de Nero avant qu'il ne le voit passer la porte et la refermer. Récupérant bruyamment sa respiration, son cœur s'alourdit au fur et à mesure que leur souvenir lui remontait à la surface et il se couvrit la bouche en se retournant. Il dut s'appuyer de la main contre la poutre vétuste pour ne pas perdre l'équilibre tellement il se sentit mal.
- C'est fait, ils s'en vont. Dis, tu le connaissais ce maque ? Il m'a demandé de te saluer en repartant.
Parada ne prenait jamais la peine de s'annoncer en entrant quelque part et il avait fait tressaillir son ami qui lui jeta un regard accusateur avant de se retourner face contre la poutre, le souffle court.
- Respire, qu'est-ce que t'as ? Vous vous êtes battus ?
- Non, tout va bien.
Le timbre de sa voix avait été aigu, indiquant évidemment le contraire.
- À d'autres, j'ai l'impression que tu vas avoir une attaque. Tu me fais peur mon vieux, c'est à cause du mec qui vient de sortir ?
Sur ce même ton fraternel, il allait reprendre lorsqu'il entendit son ami pleurer. Pas un simple sanglot, un flot de larmes profondément enfouies dans cet être rendu froid par la vie et qui s'étaient frayées un chemin jusqu'à la surface en un instant. Sachant qu'il n'en était pas la cause, Romero se plaça à côté de lui avec un sentiment de douleur et lui posa doucement une main sur la nuque avant de passer les doigts dessus. Sans la moindre préoccupation d'être surpris par quiconque, Luis se tourna aussitôt et le prit très fort dans ses bras, laissant éclater ses larmes alors que Parada regardait le chaos autour d'eux.
- Allez, pleure un grand coup.
Caressant le dos de son ami tremblant, il pensa qu'il aurait eu tort d'imaginer une bagarre. Il n'en aurait pas résulté un tel état chez son ami. Seulement, ses yeux se posèrent sur la masse, le vélo défoncé, la poutre tordue et...
"Bordel de merde, la bagnole !" pensa t-il. La seule envie le prenant sur-le-champ fut de secouer son ami par les épaules en prétextant que fracasser leur véhicule n'arrangerait pas ses problèmes, mais malgré tout il s'en passa. Si son collègue allait aussi mal qu'il le paraissait, la voiture attendrait.
à suivre...
