Avertissement :
J'avais initialement classé cette fic en PWP, et puis comme ce n'en est manifestement pas un et qu'on m'en a fait la remarque ^.^ j'ai enlevé l'avertissement. Toutefois, les limes et lemons sont nombreux et je ne le rappellerai pas au début de chaque chapitre, toute la fic est classée M. Aussi, si les histoires d'amour vous ennuient et que les histoires de cul vous ennuient encore plus, eh bien… lisez autre chose, trouvez-vous une autre activité, ne perdez pas votre temps ici. Pour tous (toutes surtout!) les autres, bienvenue aux Bains de la Succube, et bonne lecture! ^_^
Chapitre 1 – Prison de velours
21 Novembre 1838
Draco Malfoy poussa un cri perçant lorsque les trois hommes le rattrapèrent. Quelques instants plus tôt, le plus vif de ses poursuivants lui avait arraché sa baguette et avec elle toute chance de se défendre. Il tenta de transplaner mais au moment où il tournait sur lui-même, le plus massif se rua sur lui et le plaqua sol, l'écrasant sous son poids. Sa tête heurta si durement le sol, qu'il aurait sûrement une bosse sur le sommet du front et la vilaine éraflure qui barrait sa joue droite était déjà moite de sang. Ces blessures sans importance étaient pourtant le cadet de ses soucis car il était bien évident que ces trois hommes ne lui voulaient pas du bien.
– C'est bon, il s'enfuira pas, constata le chef de la bande en reprenant son souffle. Tenez-le bien, on le ramène tout d'suite, avant qu'il décide d'nous fausser compagnie…
Ses compagnons approuvèrent d'un signe de tête et remirent sur pieds le jeune homme qui se débattait vainement en poussant des cris furieux. Leur chef jeta un sort de silence pour bâillonner leur prise et les regarda transplaner avec le garçon. Puis après un dernier coup d'œil soupçonneux à la ruelle vide de la ville calme d'Oxford, il transplana à son tour dans un crac ! sonore.
*.*.*.*.*
Les deux hommes traînèrent Draco sans aucune délicatesse jusqu'à une lourde porte en fer, petite et gondolée, elle était encastrée dans un mur de vieilles pierres irrégulières au fond d'une ruelle humide et sinistre. Le prisonnier n'eut pas le moindre doute quant à l'endroit où il se trouvait : seule l'Allée des Embrumes pouvait être à la fois aussi effrayante et aussi misérable. Leur chef, qui ouvrait la marche, donna cinq coups secs à un rythme précis contre la porte et s'écarta. Une lucarne s'ouvrit alors, révélant un œil méfiant.
– Qui c'est ? demanda une voix bourrue sur un ton peu engageant.
– B'soir, Service des Rapts ! plaisanta le chef des ravisseurs avec un sourire.
Un rire gras entrecoupé d'une toux sèche leur répondit. La lucarne se referma et la porte s'ouvrit en grand.
– Entrez, entrez ! les invita le portier quand sa toux se fut calmée. Vous avez passé l'contrat avec Sirius ?
– Oui, c'est moi qui les ai engagés, répondit soudain une voix grave et profonde surgie du couloir.
Un homme encapuchonné glissa jusqu'à la porte dans un claquement de cape et les quatre hommes parurent brusquement d'humeur moins joyeuse.
– B'soir, m'sieur Black, se risqua le chef des ravisseurs. On vous ramène le p'tit gars qu'vous vouliez…
L'homme vêtu de noir émit un grognement.
– Que je voulais en parfait état… Et vous me le ramenez écorché.
– C'est qu'y s'est débattu comme un forcené, l'gamin !
– J'espère pour vous que le Maître s'en contentera, le fit taire l'homme d'une voix glaciale où perçait la menace.
Une menace que le trio comprit très bien à en croire le frisson qui les parcourut.
– Voilà vos Gallions, reprit Sirius, et n'en parlez à personne.
– Z'en faites pas m'sieur Black, j'tiens pas à perdre un client comme vous. Ah et tenez ! C'est sa baguette au p'tit…
Le grand homme effrayant remercia sommairement le mercenaire et empoigna fermement Draco qui ne pouvait que se débattre en silence à cause du sort, pendant que le portier invitait les trois hommes à prendre une bière-au-beurre.
Le jeune homme fut entraîné sans ménagement dans le bâtiment qui se révéla être, malgré les apparences extérieures, d'une taille colossale et d'un luxe indiscutable. Draco n'y prêta cependant pas la moindre attention, trop occupé qu'il était à tenter de s'extraire de la poigne de l'homme.
Ils passèrent rapidement devant un groupe de jeunes femmes qui ne les regardèrent même pas, puis le dénommé Sirius le tira dans les larges escaliers qui conduisaient aux étages. Arrivés au sommet du bâtiment, le grand homme frappa à une élégante porte de bois à double battants, murmura quelque chose et ouvrit sans attendre de réponse. Juste avant d'entrer dans la pièce, Draco réussit à décocher un violent coup de pied dans le tibia de l'homme qui grogna avec autant de conviction qu'un chien dont on aurait violé le territoire.
Le blond ne parvint pourtant pas à se soustraire de la main de fer qui l'emprisonnait et l'homme l'attira brutalement vers lui pour le forcer à entrer.
– Tiens-toi tranquille, ordonna-t-il à voix basse contre son oreille, ou il se pourrait qu'il change d'avis à ton sujet…
Puis il poussa Draco au centre de la pièce et referma la porte derrière lui. Le blond resta immobile un instant, coupé dans son élan par l'étrangeté des lieux. Il était dans une sorte de salon, au parquet vernis, aux tapis brodés de fils d'or, aux confortables fauteuils et aux profonds coussins. Une élégante cheminée au manteau sculpté diffusait chaleur et crépitements sonores dans une ambiance feutrée, et de longues tentures somptueuses recouvraient les murs dans un mélange chaleureux d'ocre et de pourpre. Cette seule pièce était plus confortable et plus luxueuse que tout le manoir Malfoy.
Au fond de la pièce, devant une grande fenêtre sur laquelle des rideaux de velours grenat avaient été tirés, se dressait un large bureau encombré, derrière lequel travaillait un jeune homme brun qui devait avoir le même âge que Draco. Il ne leva même pas la tête vers les visiteurs.
– J'amène quelque chose qui t'appartient, dit l'homme sombre de sa voix profonde.
– Alors j'espère que c'est une excellente bouteille de Whisky Pur-Feu, répondit le brun en grattant un dernier mot du bout de sa longue plume noire.
Puis il leva la tête et plongea dans les yeux de Draco un regard vert empire, sombre et inquiétant, au fond duquel venait mourir la faible lueur des bougies.
Il posa sa plume dans l'encrier et agita sa baguette d'un geste souple. Draco sentit sa gorge se libérer de l'étau magique qui le forçait au silence
– Tu es bien Draco Malfoy ? demanda le brun.
– Chien ! C'est pour me demander ça que vous m'avez poursuivi dans tout le royaume ? répliqua Draco en criant presque. Etes-vous l'homme qui a fait assassiner mes parents ?
– Je m'appelle Harry Potter, répondit seulement l'autre.
– Je suis ravi d'avoir fait votre connaissance ! répliqua Draco, sarcastique. Maintenant si vous permettez, j'ai passé une très mauvaise journée et je voudrais partir…
Sur ces mots le blond tourna les talons et marcha sans trembler en direction du grand homme effrayant planté devant la porte.
– Partir où ? demanda le brun d'une voix amusée. A Oxford chez Bellatrix ? C'est bien là que tu comptais te réfugier ? Une chance qu'on t'ait trouvé avant que tu y parviennes, cette sorcière t'aurait dévoré vivant…
Draco, surpris, s'était tourné brusquement vers le brun qui souriait.
– Comment est-ce que vous savez que je… Bellatrix est…
– Ta tante oui, je sais. Mais elle n'est pas très recommandable, même pour les membres de sa famille… Mon ami Sirius en sait quelque chose.
Son sourire narquois s'étira encore et il continua.
– Et puis, je doute que ton très cher père ait aimé te savoir prisonnier des griffes de sa belle sœur…
Draco traversa la pièce en trois grandes enjambées et se planta devant l'imposant bureau.
– Vous avez l'air bien renseigné, beaucoup trop bien, dit-il doucement en plantant ses yeux d'acier gelé dans ceux, amusés, du brun. Mes parents ont été assassinés aujourd'hui, êtes-vous le responsable ?... Répondez !
Le brun se contenta de le regarder calmement en posant sur lui un regard malicieux et perçant. Dans un élan de rage, Draco attrapa le premier objet qui passa sous sa main – en l'occurrence une lourde pierre de jade qui faisait office de presse-papier – et le jeta au visage du jeune homme. Mais la pierre n'atteignit pas sa cible, le brun la bloqua avec l'agilité d'un chat, sans quitter Draco des yeux. Puis, lentement, il la reposa sur le bureau… et attrapa au passage le poignet du blond pour l'attirer à lui.
Draco se retrouva penché au dessus du bureau, dans une position inconfortable, piégé entre la poigne de fer et le regard de pierre du maître des lieux.
– Il est dans un sale état, fit Harry, soudain sérieux, dans un reproche adressé à l'homme en noir resté en retrait.
L'éraflure que Draco avait sur la joue avait taché ses cheveux de sang, accordant sinistrement le mélange rouge et or aux couleurs de la pièce. Harry lâcha son prisonnier qui recula, soudain intimidé par son assurance et par la force surprenante de sa poigne.
Sirius s'approcha du bureau et tendit à Harry la baguette du blond, que le maître des lieux fit disparaître dans une poche de son veston.
– Les mercenaires ont eu des difficultés à le capturer, expliqua-t-il simplement.
– Si les gens coopéraient, on n'aurait pas besoin d'envoyer des mercenaires pour les capturer, fit remarquer le brun cyniquement. Enfin, ils l'ont eu en premier, c'est déjà ça… Merci de me l'avoir amené, tu peux y aller, je descendrai plus tard.
Sirius adressa un signe de tête entendu à son jeune maître et sortit dans un bruissement de cape.
– Pourquoi est-ce que vous m'avez fait enlever ? demanda Draco d'un ton mauvais lorsque la porte se fut refermée.
– Pour éviter que quelqu'un d'autre ne le fasse, répondit le brun comme si c'était une évidence. Et tu peux me tutoyer, je crois me souvenir que nous avons le même âge toi et moi.
– Oh, je vois, alors en réalité nous sommes amis et nous nous tutoyons. Dans ce cas, j'ai manqué à tous mes devoirs. Merci, de m'avoir si gracieusement épargné d'être enlevé par un groupe de mercenaires violents, c'est vrai qu'après le meurtre de mes parents, ça aurait fait beaucoup dans la même journée !
L'ironie glaciale dans la voix du jeune Malfoy fit sourire Harry. Et Draco, furieux et épuisé, se détourna de lui et marcha jusqu'à la porte.
– Où est-ce que tu vas ?
– Ça ne te regarde pas ! grogna Draco en tirant sur la poignée.
– Bien sûr que si, répondit calmement Harry en se levant de son fauteuil. J'ai payé des hommes pour te retrouver, ça m'ennuierait de devoir recommencer. Les mercenaires sont tellement gourmands. Et puis il faut acheter leur silence…
– Ne te donne pas tant de mal, je m'en voudrais de te faire dépenser une fortune pour moi. Je te propose quelque chose de bien plus honnête : laisse-moi sortir et ne nous revoyons jamais plus.
– Tu dis ça maintenant parce que tu es en sécurité ici. Mais dans moins d'une journée, quand tu seras nu et écorché, attaché dans une cave et que des hommes très ennuyeux te demanderont avec bien peu de diplomatie « donne-nous le mot de passe du trésor de ton père », ce que du reste, tu dois totalement ignorer, tu regretteras de ne pas être resté.
– Resté ?
Draco ricana.
– Alors maintenant c'est une invitation courtoise ? Un peu comme dans « reste, tu es mon invité » ?
Harry se tourna vers un miroir pour nouer un foulard noir autour de son cou et quand il fit à nouveau face à Draco, son visage s'était durci.
– Non. Plutôt comme dans « essaye de sortir si tu veux mais tu n'y arriveras pas parce que tu es mon prisonnier ».
Draco lâcha la poignée de la porte. Jusque là, il avait tenu en respect sa panique, l'empêchant de le submerger, mais maintenant il sentait qu'il perdait l'emprise qu'il avait sur ses émotions et ses mains se mirent à trembler.
– Qu'est-ce que tu vas faire de moi ? demanda Draco d'une voix blanche, comprenant la gravité de sa situation.
Harry sourit doucement, sans méchanceté cette fois.
– Déjà tu es moins farouche… Les Malfoys ont pourtant plus de pugnacité. Tu dois être épuisé, cette journée a été horrible, hein ?
– Garde ta pitié et ta condescendance. Qu'est-ce que tu vas faire de moi ?
– Rien de scandaleux, cruel ou révoltant je le crains… Je vais te garder ici jusqu'à ce que le meurtre de tes parents ait été vengé.
– Tu les connaissais ? demanda Draco surpris.
– Seulement ton père. Lucius avait de nombreuses relations. Et il s'était fait beaucoup d'ennemis.
– Tu étais l'un d'eux ? demanda prudemment Draco.
– A ton avis ?
– Tu n'as pas l'air digne de confiance, répondit franchement Draco. Mais tu es un peu jeune pour assassiner des gens.
Harry éclata d'un grand rire, un rire sans joie et Draco le regarda stoïquement se moquer de lui. Il n'avait plus la force ni de s'énerver ni de se sentir gêné d'avoir dit une bêtise.
Le brun se reprit et ouvrit une petite armoire appuyée contre le mur du fond, à côté de la large fenêtre. Le meuble contenait divers fioles et des pots de couleurs et de tailles variées. Il en écarta plusieurs et sortit un pot en verre rouge. Sur l'étiquette était écrit « Sang de Dragon et Eucalyptus » d'une écriture fine et serrée.
– Approche. Je vais soigner tes blessures, je ne voudrais pas qu'on dise que je suis un monstre avec mes prisonniers.
Draco avait étudié les plantes et il savait que le Sang de Dragon était une plante utilisée pour soigner les plaies et les contusions et que l'Eucalyptus était un désinfectant. Pourtant il hésita, il regarda la porte close et s'en détourna à regret.
Harry repoussa une pile de papiers et s'assit à moitié sur le rebord de son bureau. Il déboucha le pot et attendit que Draco daigne s'approcher. Il écarta alors les courtes mèches dorées pour appliquer l'onguent sur la balafre et en essuyer le contour avec un petit mouchoir propre.
– Comment est-ce que tu as rencontré mon père ? demanda Draco sans cesser de regarder son geôlier concentré à soigner sa joue.
– Sur le marcher noir de l'Allée des Embrumes. Ça m'a tellement intrigué de voir un homme du ministère dans un endroit pareil que j'ai d'abord cru qu'il avait été envoyé pour nous arrêter. Ce n'est pas qu'aucun homme puissant ne se mouille dans des affaires louches, hein, seulement ils ont d'habitude la décence de ne pas le faire en plein jour et en public. Mais ton père n'était pas du genre à se laisser ralentir par ce genre de considérations… Au début j'ai voulu trouver un moyen discret de le faire disparaître, et finalement, après deux heures d'une conversation fort agréable, j'ai décidé d'en faire mon partenaire.
Draco levait un sourcil sceptique.
– La belle histoire… Ton partenaire, hein ? Mon père était associé avec toi ?
– Mh. Lucius était mon meilleur associé. Il revendait du Shahada pour moi.
– N'importe quoi, soupira Draco. On ne peut pas avoir une conversation sérieuse avec toi…
Le Shahada était une drogue très puissante. A base d'opium, elle se présentait sous la forme d'un liquide d'une belle couleur miel, très facile à faire passer pour un alcool fort. A cause de son prix exorbitant, il n'était consommé que par les riches sorciers dans les salons de la haute société et par des gens très pauvres qui ne vivaient que pour s'en procurer.
– Mais c'est la vérité, protesta Harry.
– Bien sûr, fit Draco agacé. Mon père vendait des fioles de Shahada, il était partenaire avec un gamin bizarre qui avait l'âge de son fils et il…
– A été assassiné, selon toute apparence, par quelqu'un qui convoitait son rang et sa fortune. Tout a fait, termina Harry en appliquant l'onguent sur la bosse qu'avait Draco au sommet du crâne. Toi et ta mère, vous ne vous doutiez vraiment de rien ?
Draco préféra ne pas répondre. Il n'avait aucune envie d'écouter un fou lui raconter des mensonges au sujet de son père. Surtout pas maintenant. Maintenant que sa vie avait basculée. Et dire que sa journée avait commencé d'une manière si ordinaire. Draco ferma les yeux et pria pour se réveiller chez lui, dans son lit, sa mère lisant dans le salon et son père travaillant dans son bureau, dans le calme paisible de leur manoir.
Mais quand il rouvrit les yeux, seules deux malachites le regardaient.
– Déshabille-toi, je vais regarder si tu as été blessé ailleurs.
– Non, ça va, répondit Draco en regardant tristement le grand salon luxueux qui refusait obstinément de disparaître pour le rendre à ses parents. Je n'ai rien de grave.
– Ça c'est à moi d'en décider.
Cette voix douce contenait un ordre très calme, une autorité sans violence dont seuls sont capables les gens rompus aux subtilités du pouvoir. Cet aplomb effraya Draco car il ignorait dans quelle mesure il serait capable de s'y soustraire.
– Je n'ai pas lutté longtemps contre tes mercenaires, raisonna Draco, ils m'ont eu assez facilement. On ne s'est pas assez battu pour qu'ils aient pu me faire mal. Je n'ai pas d'autre blessure.
– Draco, déshabille-toi, ordonna Harry d'une voix un peu plus ferme qui fit frissonner le blond.
Il recula d'un pas.
– Ecoute, puisque pour ta sécurité, tu vas vivre ici un moment, j'aimerais vraiment que tu coopères, reprit Harry plus doucement pour ne pas l'effrayer. S'il-te-plaît, essaye de me rendre la tâche plus facile, je n'ai pas l'habitude de traiter avec les gens de mon âge. D'ailleurs je ne fréquente pas de garçons de bonne famille. Quoi que… avec les agissements de ton père on ne peut pas vraiment dire que tu sois issu d'un milieu social exemplaire.
Harry souriait mais Draco commençait à avoir peur et il recula encore d'un pas en fronçant les sourcils. Sentant arriver les difficultés, il chercha une autre issue que la porte d'entrée.
Harry surprit son regard qui se posait sur une porte et il afficha une expression narquoise.
– C'est la porte de la salle de bain que tu lorgnes Draco, tu ne pourras pas t'enfuir par là. Par contre tu pourras aller prendre un bain ensuite si tu veux. Mais je veux d'abord m'assurer que tu n'as rien.
La voix de son ravisseur était rassurante et amusée, mais dans les intonations résonnait une autorité implacable qui fit flancher Draco. Il soupira, résigné. Il regarda longuement ce garçon dont il ne parvenait pas à décider s'il était ami ou ennemi, mais dont la volonté était de fer. Puis sans conviction, il entreprit de déboutonner sa chemise blanche abimée et tachée de poussière.
Harry posa le pot à côté de lui sur le bureau, se leva et vint aider Draco à défaire les boutons.
Mal à l'aise, le blond n'osa pas le repousser et le laissa l'aider. Harry appliqua avec douceur l'onguent sur un vilain hématome qu'il avait au côté droit, sur une écorchure qu'il s'était faite au coude en tombant et sur plusieurs bleus de petite taille tout en lui faisant remarquer qu'avec les blessures qu'il avait, il avait bien fait d'insister pour le soigner.
Puis il reposa le pot en verre et entreprit de déboutonner le pantalon de Draco qui sursauta.
– Arrête, ça suffit, qu'est-ce que tu… ?
Le temps qu'il pose la question, son pantalon était tombé à ses pieds et Harry avait glissé la main entre sa hanche et son caleçon pour repousser celui-ci. Draco l'en empêcha vivement.
– Arrête espèce de pervers ! Qu'est-ce que tu essayes de faire au juste ?
Harry se pinça l'arête du nez pour ne pas se mettre en colère.
– Je te l'ai déjà dit cinq fois, est-ce qu'il faut que j'explique et que je négocie à chaque vêtement ? J'ai du travail tu sais…
– Eh bien vas-y ! Je n'ai pas besoin qu'on veille sur moi avec autant de « zèle », répondit Draco d'un ton franchement mauvais. Et puis j'aimerais bien savoir quel genre de travail peut faire un type de ton âge une fois la nuit tombée.
Draco en avait pourtant une idée très précise et son sarcasme acheva d'user la patience d'Harry.
– Est-ce que tu sais où tu es ici, Draco ? demanda-t-il d'une voix froide.
Draco ne s'était en fait pas encore posé la question. Pour ce qu'il en avait vu, il savait seulement qu'ils étaient dans l'Allée des Embrumes parce que son aspect sombre et inquiétant était inimitable.
– Cet établissement s'appelle Les Bains de Sarasvatî, expliqua Harry, du nom de la déesse indienne des arts. Mais tout le monde l'appelle Les Bains de la Succube.
– On dit « un succube », rectifia Draco avec mépris.
– Oui mais la nôtre est tellement jolie que tout le monde est d'accord pour dire qu'il s'agit d'une succube. Oh, ce n'est pas une vraie bien entendu, c'est une statuette en bois fixée au dessus de la porte d'entrée. As-tu une idée de ce que les succubes signifient chez les moldus ?
– Pas la moindre, répondit Draco avec encore plus de mépris à cause de la mention des « moldus ».
– Les succubes signifient textuellement : cet établissement est une maison close.
Draco se figea brusquement. Il se demanda si Harry se prostituait ou pire, s'il était une sorte de proxénète. Qu'allait-il faire de lui au juste ? Puis il pensa à son père qui selon le brun était son associé, comment son père qui avait le sens de l'honneur aurait-il pu s'associer avec quelqu'un appartenant à tel établissement ?
Quoi qu'il en soit, l'insistance d'Harry pour le déshabiller l'inquiéta soudain beaucoup plus.
– Alors pour moi qui vois tous les jours des gens sans pudeur, il est difficilement concevable de devoir négocier si longtemps, juste pour soigner quelqu'un. Oh, et arrête de faire cette tête, idiot ! Ce n'est pas dans mes plans de te prostituer, tu es beaucoup trop guindé pour plaire à qui que ce soit…
Contre toute attente, cette dernière phrase n'énerva pas Draco. Elle le soulagea au contraire et son cœur battit un peu moins vite.
– Je finis et après je te laisse tranquille, promit Harry plus doucement quand il remarqua le soulagement sur les traits du blond.
Draco pinça les lèvres et le laissa approcher et lui enlever son dernier vêtement dans un geste fluide et leste.
Les doigts habiles appliquèrent l'onguent sur sa hanche où s'était formé un hématome et sur son genou qu'il s'était cogné en tombant. Draco qui ne s'était jamais senti aussi mal de sa vie, se força à regarder droit devant lui et à respirer calmement pour contenir sa gêne et son malaise.
Puis Harry délaissa son genou, se redressa et se plaça derrière lui. Ses doigts ne posèrent sous les fesses de Draco, en haut de sa cuisse et le blond frissonna.
– Ils n'y sont pas allé de main morte, constata Harry en appliquant l'onguent. Tu as un hématome encore plus gros qu'au côté droit.
Draco grimaça parce que les doigts sur l'énorme bleu lui faisaient un peu mal et parce qu'à chaque geste circulaire, ils avançaient un peu plus vers l'intérieur de sa cuisse. Mortifié, il fut bien obligé de constater que sa situation empirait d'heure en heure depuis qu'il avait trouvé ses parents morts dans le salon en revenant de sa leçon avec son précepteur.
Puis Harry cessa de le toucher, recula, vérifia d'un regard très professionnel qu'il n'avait rien oublié, puis referma le pot. Il le laissa sur son bureau et Draco le regarda partir vers la porte qu'il lui avait indiquée comme étant la salle de bain et en revenir avec un peignoir doux et épais.
– Mets-ça, dit-il en le lui tendant.
Cette fois, Draco ne se fit pas prier pour obéir et se couvrit immédiatement.
– Dobby ! appela Harry à la grande surprise du blond.
La seconde d'après, l'elfe de maison de la famille Malfoy se trouvait au milieu du salon.
– Monsieur Harry a appelé Dobby, monsieur ? demanda l'elfe.
– Dobby ? s'exclama Draco incrédule. Qu'est-ce que tu fais là ?
Il n'avait jamais aimé son serviteur mais il était agréable de trouver quelque chose de familier dans cet endroit inconnu et avec son ravisseur effrayant. Et surtout, Dobby qui lui appartenait désormais, pourrait le protéger en cas de problème…
– Dobby m'a été cédé par testament par ton père, ainsi que tous les biens de la famille Malfoy d'ailleurs. Lucius m'a attribué la gestion de ton héritage s'il venait à mourir prématurément. Mais tu pourras voir Dobby aussi souvent que tu voudras, expliqua calmement le brun qui ramassa les vêtements éparpillés de Draco et les tendit gentiment à l'elfe de maison.
– Quoi ? s'étrangla Draco d'une façon très peu élégante. Mais je suis vivant moi, et je suis majeur maintenant ! Les biens de ma famille me reviennent, qu'est-ce que c'est que cette histoire de testament ?
– Le Maître voulait protéger monsieur Draco, expliqua timidement l'elfe de maison dont seules les oreilles dépassaient derrière la pile de vêtements.
– Silence ! lui hurla Draco qui ne parvenait plus à contenir sa fureur et son angoisse. L'héritage de mes parents me revient et ce stupide elfe de maison m'appartient ! Jamais mon père n'aurait légué sa fortune à quelqu'un d'autre que moi ! Je suis son fils et il…
– Calme-toi, le coupa doucement Harry en posant une main sue l'épaule de Dobby qui avait baissé les oreilles de terreur devant la colère du blond. Ton père ne t'a pas déshérité. Toute sa fortune t'appartient.
Draco se détendit légèrement et se retint de crier à nouveau pour écouter ce que le brun avait à dire.
– Seulement, reprit Harry après avoir discrètement congédié l'elfe pour qu'il aille s'occuper des vêtements de Draco, Lucius a estimé que tu n'étais pas prêt à gérer sa fortune. Ses responsabilités étaient trop nombreuses et trop délicates pour t'être confiées sans t'y préparer. Car tu hérites de beaucoup d'argent et de pouvoir, mais aussi de tous les problèmes qui vont avec. La mort de ton père en est la preuve. Aussi, c'est moi que gèrerai ta fortune jusqu'à ce que tu sois capable de le faire seul.
– Et quand serais-je débarrassé de ta tutelle ? Pendant combien de temps mon père te laisse-t-il la gestion de « ma » fortune ? demanda Draco d'une voix glaciale.
Harry sourit parce qu'il sentait que Draco arrivait à bout de nerfs, et il était convaincu qu'on apprenait beaucoup des gens quand on les poussait dans leurs derniers retranchements. Quelque chose dans la panique de Draco lui indiquait que, contrairement à ce qu'il disait, il se fichait bien de sa fortune, c'était la perspective de rester prisonnier ici qui le terrifiait et le mettait en colère.
– La durée a été laissée à ma discrétion.
Draco poussa un rugissement de dépit. Et empoigna le col d'Harry qui le regardait avec un petit sourire amusé.
– Laissé à ta discrétion ? Laissé à ta discrétion ! Pour que tu ne me rendes jamais ni mon héritage ni ma liberté ? Tu mens ! Jamais mon père n'aurais fait une chose pareille ! Tu vas m'enfermer ici jusqu'à ma mort pour t'approprier mes biens, et aucun testament ne t'en donne le droit ! C'est toi qui as assassiné mes parents et maintenant tu me retiens ici le temps de voler mon héritage !
– Je me fiche complètement de ton héritage, Draco, dit doucement Harry pas impressionné pour deux Mornilles par les vociférations de l'héritier Malfoy. Je possède plus de dix fois la fortune de ton père seulement ici, aux Bains de la Succube. Et quand bien même j'aurais besoin d'or, quel intérêt aurais-je à m'encombrer d'un gamin arrogant alors qu'il me suffirait de te tuer pour m'emparer de ta fortune ?
Draco maugréa quelque chose qui n'avait pas de sens et lâcha Harry.
– Prend tout l'or que tu veux je m'en fiche, s'obstina le blond d'une voix plus faible. Mais rend-moi ma baguette et laisse-moi partir.
– Tu ne m'écoutes pas. Je pense que tu as besoin de temps pour y réfléchir…
– La ferme !
– …alors je vais te laisser seul un moment pour que tu te calmes et t'éclaircisses les idées.
Draco s'empara d'un coupe papier en forme de dague qui reposait sur le bureau et en appuya la pointe sur la gorge du brun.
– La ferme j'ai dit ! Arrête de te foutre de moi ! Tu as ce que tu veux ! Je te lègue ma fortune, je te signe un papier s'il t'en faut un, alors laisse-moi partir !
En un éclair, la main d'Harry se ferma sur le poignet du blond qu'il écrasa en un point précis. La main de Draco s'ouvrit et il lâcha la dague.
L'héritier Malfoy hoqueta. Harry avait réagit beaucoup trop vite pour lui et il réalisa qu'il pourrait le tuer à n'importe quel instant. Il se sentait affaibli sur tous les plans, et il était à deux doigts de fondre en larmes.
– Encore une fois, expliqua Harry patiemment, tu ne peux pas me signer un papier pour me léguer ta fortune, puisque c'est moi qui la gère. Tu ne peux donc rien vendre, acheter, ou donner sans ma permission. Ce qui d'ailleurs est une bonne chose puisque tu as l'air assez pressé de te débarrasser de tes possessions ! Ton père était vraiment un homme sage.
Cette fois Draco tomba à genoux. Ses yeux se posèrent sur la dague mais il ne fit pas un geste pour la ramasser, il était vaincu. Il n'avait plus la moindre volonté et il luttait pour retenir ses larmes. La seule image qui réussissait à se fixer dans son esprit était celle de ses parents morts dans leur salon. S'il avait su, il aurait pris sa mère dans ses bras la veille au soir, il aurait serré chaleureusement la main de père. Il voulait se réveiller et que tout cela soit un affreux cauchemar.
Mais la main bien réelle qui se posa sur son épaule chassa tout doute possible. A partir de maintenant ce cauchemar serait sa réalité. La vie lui sembla être une chose terriblement fragile et instable qui pouvait basculer au moindre coup d'éventail.
– Vas-t-en, souffla Draco en repoussa la main du brun.
– D'accord, répondit doucement Harry en se relevant. Va prendre un bain, mange et repose-toi. Dobby va s'occuper de toi. On rediscutera de tout ça demain.
Draco ne répondit rien, il l'entendait à peine. Il concentrait toutes ses forces à ne pas s'effondrer. Il voulait rentrer chez lui et retrouver ses parents. Il se mordit la lèvre en écoutant le brun sortir… et éclata en sanglots.
*.*.*.*.*
– Comment est-ce qu'il va ? demanda Sirius lorsqu'Harry s'assit à sa table dans le salon réservé aux clients de marque.
– Comme quelqu'un qui a tout perdu, répondit Harry en buvant une gorgée de Whisky Pur-Feu dans le verre de son parrain.
Sirius sourit.
– Alors il n'y a sans doute personne qui soit mieux placé que toi pour le comprendre.
Harry commanda deux autres verres à une serveuse qui portait une robe évoquant un costume traditionnel indien constitué de plusieurs couches de tissus colorés… et transparents.
– Il se fiche complètement que je le comprenne, répondit Harry à son ami. Et il se fiche complètement qu'on lui témoigne de la douceur ou de la compassion. C'est le fils de Lucius, il a été élevé dans l'honneur, il a besoin de vengeance, d'une cible sur qui déverser sa colère.
– Une cible ? Alors tu vas le laisser se défouler sur toi ?
Harry haussa les épaules.
– Tu préfères que je l'envoie tuer l'associé de Lucius ?
Sirius se rembrunit à la mention de Rosenberg, le meurtrier de Lucius Malfoy qui lui avait filé entre les pattes et que ses hommes ne parvenaient pas à localiser.
– Il aurait bien du mal, même moi je n'arrive pas à mettre la main dessus, fit Sirius avec une grimace. Il a très bien compris ce qui allait lui arriver, le bougre, il doit être loin à l'heure qu'il est. Et il est parti avec une partie de l'or de Malfoy… enfin de ton or.
– Pff, l'or d'une seule livraison… C'est tellement stupide de tuer pour ça !
– C'était une livraison de cinq cents fioles, répondit Sirius, ça fait 5000 Gallions, c'est quand même une belle somme.
– Beaucoup moins belle que ce qu'il aurait gagné en restant l'associer de Lucius et en partageant les bénéfices avec lui. Mon ami est mort, ce type le rejoindra bientôt dans la tombe, et il y a un orphelin dans mes appartements qui doit être en train de détruire mon mobilier pour calmer ses nerfs, c'est un gâchis total…
Sirius éclata de rire. Il adorait le pragmatisme d'Harry. Depuis la mort de ses parents, le garçon avait survécu en se caparaçonnant de cynisme, il résonnait toujours en terme d'intérêt, il savait comprendre et devancer les désirs des autres afin de contrôler ses ennemis potentiels… ou de les évincer. Il avait su bâtir un empire inébranlable juste sous les fenêtres du monde sorcier, et personne n'osait s'opposer à lui.
Du moins jusqu'à l'assassinat des Malfoy le matin-même. Sirius savait que son filleul était en réalité beaucoup plus inquiet qu'il n'en donnait l'air. Et il savait que personne n'était assez stupide pour s'attirer la colère d'Harry Potter contre seulement 5000 Gallions. Cette affaire était sans doute possible, bien plus complexe qu'il n'y paraissait.
– Est-ce que tu te rappelles de ce qui t'a fait tenir quand tes parents sont morts ? demande Sirius soudain beaucoup plus sérieux.
Le changement de ton ne surpris même pas Harry, du moins il n'en donna pas l'air. Tout son mode de vie était basé sur ce principe : ne jamais se laisser surprendre par le comportement des autres, réagir toujours très vite, s'adapter aux imprévus, prévoir les imprévus.
Harry avait-il prévu la mort de Malfoy ? Sirius avait vu de ses yeux le testament dans lequel Lucius confiait sa famille et sa fortune à Harry pour qu'il les protège s'il venait à lui arriver malheur. C'était donc que Lucius et Harry se doutaient que quelque chose allait arriver, quelque chose qu'Harry n'avait pas pu empêcher malgré sa prévoyance. Mais il avait réagi assez vite pour sauver Draco.
– C'est toi qui m'a fait tenir, répondit Harry.
– Non, c'est ta vengeance.
– Ma vengeance et toi, insista le brun. Où tu veux en venir ?
Il savait très bien où Sirius voulait en venir.
– Sois honnête avec ce gamin, laisse-le t'aider. Tu n'aurais pas aimé qu'on tue Lord Voldemort à ta place.
– Lucius ne lui avait rien dit.
Sirius allait argumenter mais il fronça les sourcils et referma la bouche.
– A quel sujet ? demanda-t-il.
– Tous les sujets. Pour lui son père n'était qu'un honorable membre du ministère, de famille noble et au comportement irréprochable. Il ne sait rien de l'implication de sa famille dans les marchés de la drogue ou de la prostitution.
– Et alors ?
– Alors si Lucius a pris la peine de lui cacher tout ça, c'est certainement qu'il voulait que son fils garde un semblant de pureté. Il devait vouloir qu'il ne devienne pas comme moi.
– Alors quoi ? Quelqu'un d'autre héritera du marché du Shahada ? Tu vas tuer Rosenberg, rendre son argent à ce gosse et le planquer quelque part en attendant qu'on l'oublie et qu'il puisse mener une vie honorable et tranquille ?
– Non, répondit Harry avec un soupir las, le meilleur moyen de le protéger est justement de ne pas le perdre de vue. Mais je peux au moins éviter d'en faire un meurtrier.
– Oh, alors il s'agit de préserver son innocence…
– Qui a parlé « d'innocence » ? demanda Harry dont les yeux prirent une jolie couleur vert ortie et pétillèrent d'une lueur d'amusement teintée de perversion.
Sirius eut un rire qui ressemblait à un aboiement joyeux.
– Personne, reconnut l'animagus en finissant son whisky.
A suivre…
Ecriture achevée le 01/12/2010
Blabla de l'auteuse :
Tout d'abord, un grand merci à Crafty Fox (ma Lyanka d'amour!) qui m'a conseillée, encouragée et corrigée. Je vous conseille vivement d'aller lire ses fics, elles valent le détour!
J'espère que ce début vous a plu et vous a donné envie de lire la suite! La publication sera assez aléatoire (autant que mon inspiration en fait) mais le chapitre 2 est déjà écrit et je le publierai la semaine prochaine. A très vite et profitez bien de la neige! ^_^
