La folle jeunesse d'Hishigi et Fubuki, avec en guest stars, Hishigi et Fubuki. Ce prologue est le point de départ des prochains chapitres qui expliciteront les souvenirs évoqués dans ce premier chapitre. Bonne lecture !


«Alors... Une pincée de poivre noir, voilà. Ensuite, une cuillère à café de gingembre, une autre de cannelle... de la vanille, pas trop, de la muscade... Un clou de girofle. Où est-il passé ? Le voilà. Les feuilles de menthe et la touche finale, le citron. Parfait ! Je laisse bouillir quelques minutes, et ...»

Hishigi se retourna en sentant une présence derrière lui. Fubuki venait d'entrer dans la pièce et jetait un regard soupçonneux aux échalotes qui trônait en bonne place sur la table.

«Tu te reconvertis en sorcière maintenant ? Tu vas empoisonner les enfants et maudire tous ceux qui laissent traîner des déchets dans l'enceinte du palais ?

-Tu conviendras que c'est quand même énervant de devoir dire à mes serviteurs de passer le balai tous les deux jours dans mon laboratoire ; tout ça parce que les personnes qui viennent traîner par ici trouvent toujours le moyen de semer des cheveux et des petites boules de chaussettes !

-Soit. Fubuki masqua un début de sourire devant le visage blasé de son ami.

-Ça t'amuse ? Hishigi pencha légèrement la tête sur le côté, les coins de ses lèvres se relevant légèrement.

-Si peu ! Tu te rappelle tes premières tentatives culinaires ?

-Je préfèrerais oublier ces incidents fâcheux... Hishigi grimaça, avant d'ajouter : Surtout le jour où j'ai trouvé cet étrange grimoire contenant des recettes soi-disant magiques...»

Fubuki détourna la tête pour que éviter de rire trop franchement - quoique ce ne soit pas vraiment son genre - devant l'air vaguement dépité d'Hishigi. Ce dernier se désintéressa un instant de la conversation, le temps de remuer sa mixture et d'y rajouter une épice inconnue et assurément très mystérieuse. Les deux sages se rapprochèrent de la seule et unique fenêtre de la pièce, qui éclairait chichement l'endroit où ils étaient, et restèrent un moment sans rien ajouter, fixant l'extérieur du palais, la cour en contrebas et la forêt au loin. Un mouvement leur fit tourner la tête. Tokito était en train de chercher la bagarre avec des habitants de la forêt. Hishigi coula un regard vers Fubuki, guettant une quelconque réaction chez son hirsute ami, mais ce dernier garda un visage impassible.

Plus bas, Tokito venait de finir son massacre. Elle affichait un petit sourire satisfait et ne semblait pas se soucier de la multitude de cadavres à ses pieds. Hishigi pensa un instant que c'était une mauvaise idée de l'avoir laissée faire partie des 4 sages ; cette fille était bien trop ... instable. À l'image de son père, sûrement, mais le sage préféra éviter de le dire à Fubuki. Après tout, il jugeait son ami bien moins durement que sa fille. Cette sale petite créature vicieuse.

«Et dire qu'il n'y a pas si longtemps, c'est nous qui semions la destruction aux quatre vents...

Je m'en souviens comme si c'était hier. »

Les deux sages levèrent la tête dans un bel ensemble et fixèrent le vide, laissant leurs esprits s'imprégner de souvenirs, tandis que le bouillon préparé par le sage laissait échapper des effluves d'herbes et d'épices, telle une madeleine de Proust leur rappelant les nombreux moments passés ensemble.

...


«Tiens, ce bon vieux Muramasa. Qu'est-ce que tu fais ici ?

-Je suis venu vous rendre une petite visite. Je ne suis pas encore vieux, tu sais.

-Si tu le dis.»

Hishigi tendit sa cigarette à moitié consumée à Shihodo, assise à ses côtés, tandis que Muramasa s'asseyait face à eux. Ils se trouvaient dans l'un des jardins privés du Roi Rouge et profitaient de la douceur du jour pour flâner. Shihodo, toujours aussi élégamment assise, aspira une grande bouffée de cigarette, et laissa tomber la cendre à moitié sur son genou, et à moitié dans les fleurs plantées à côté du banc sur lequel ils étaient installés.

«Vous devriez arrêter de fumer, tous les deux. Vous savez très bien comment cela s'est fini la dernière fois...»

Muramasa leva un sourcil -pas vraiment ironique, Muramasa étant la gentillesse incarnée - vers les deux sages. Hishigi se contenta de l'ignorer, détournant le regard sur un massif de fleurs dans lequel s'ébattaient deux moineaux. Shihodo, pour sa part, souffla dédaigneusement la fumée par le nez, sans plus répondre.

Les trois sages levèrent la tête dans un bel ensemble et fixèrent le vide, laissant leurs esprits s'imprégner de souvenirs.

...


«Hishigi ? Hishigi !?»

Trainant dans les couloirs du palais, Fubuki était à la recherche de son meilleur ami. Il venait de finir son entraînement matinal et souhaitait discuter de sa nouvelle technique de combat avec quelqu'un ; et étant donné Fubuki ne faisait confiance qu'à un peu près une seule et unique personne au monde, il lui fallait bien la trouver pour pouvoir en parler. Il ouvrit une porte un peu au hasard. Comme le hasard fait bien les choses, il vit Hishigi attablé, une montagne de produits frais devant lui. Ce dernier ne leva même pas la tête. Fubuki leva un sourcil interrogateur vers la marmite bouillonnante.

«Ah ben t'es là ! Mais qu'est ce que tu fous ?

-Ben, tu vois, je cuisine. Le Roi Rouge vient manger.»

D'un geste sûr et avisé, Hishigi trancha la base d'un poireau avant de l'émincer en fines lamelles qu'il ajouta à un bouillon où flottaient déjà, entre autres, carottes, pommes de terre, algues wakame et oignon. Hishigi reprit :

« C'est bien l'un de tes plus grands rêves les plus fous, non? »

Fubuki, tout à sa joie contenue, ne savait plus quoi répondre. Manger avec le Roi Rouge, cela signifiait qu'ils étaient en excellence position pour devenir l'un des quatre grands sages ! Retenant une réaction de joie comprenant force frottements de mains et rire grinçant, il se contenta de tendre son bras vers le ciel, la paume de la main face à Hishigi, dans une position de high five bien peu orthodoxe pour un guerrier de son rang. Nonobstant son statut de meilleur ami mystérieux et détaché, Hishigi abandonna les légumes à leur triste sort et répondit d'une frappe magistrale.

«Tu te rappelles cette fois où nous avions voulu frapper dans nos mains ainsi et que cela c'était mal terminé ?

-Comme si c'était hier !»

Les deux amis levèrent la tête dans un bel ensemble et fixèrent le vide, laissant leurs esprits s'imprégner de souvenirs.

...