Blabla inutile : oui, oui, toujours dans Free! On ne change pas une équipe qui gagne... même si je me suis mise à Haikyuu! et qu'une fanfiction est en chemin (oui, je suis irrécupérable).

J'avoue tout : je suis absolument amoureuse de Sousuke et de Rin. *tousse*

Des morceaux d'espace-temps différents écrits pour une très bonne amie.

Le titre vient du poème "Prière" d'Anne Perrier.

Bonne lecture.


Le crépuscule s'étale en couches fines le long de ses bras, rivières de sang virtuel où se reflètent l'éclat douloureux d'un passé qui semble l'aspirer sans fin, et l'odeur du chlore brûle des sillons indélicats dans ses narines alors que les minutes continuent de s'assembler, de se défaire et de s'emmêler à nouveau dans l'ombre d'une nuit proche.

Sousuke serre les dents et ferme les yeux, convaincu que sa dernière heure est arrivée tant son épaule le lance ; il sent des courants électriques lui traverser les paumes, source du sang et du désespoir, et sa chair se gonfle sans plus de cérémonie, enflée d'épines de glace qui raclent contre sa peau devenue fragile.

Il déglutit difficilement, retenant son souffle, le dos collé contre le mur froid qui soutient ses soubresauts d'agonie, et le vertige l'accueille, imprudent, entre ses bras d'hiver.


Les étourdissements momentanés se poursuivent, toujours plus forts, toujours plus longs, mais Sousuke, grisé par la joie de pouvoir à nouveau nager avec Rin, préfère endurer le calvaire d'une blessure irréversible plutôt que de manquer ces instants où les paupières de son meilleur ami ruissellent d'étoiles, où ses sourires deviennent des éclats fourmillants d'une lumière dorée.

Après chaque plongeon, chaque parcours nagé, les larmes amères d'une souffrance qui ne s'apaise jamais se cachent dans les océans de ses yeux : après chaque entraînement, il laisse son regard se brouiller d'angoisse et de crainte ; les bras ballants, il chancelle et rencontre le carrelage froid de sa douche, les épines de glace remontant à la surface et rongeant leur chemin entre chaque nerf et chaque muscle, chaque veine et chaque couche d'épiderme.


Le regard de Rin brûle dans son dos alors que Sousuke balaie le paysage des yeux, perdu dans une contemplation infinie de simples arbres et d'un ciel éclaboussé de sommeil. La douleur sourde de son épaule, en toile de fond de son esprit, ne le quitte jamais vraiment, et maintenant que Rin sait, il se doute bien que les yeux perçants qui scrutent les lignes courbées de sa carrure cherchent des signes d'un endolorissement, d'un fléchissement quelconque.

Sousuke s'attend à entendre divers sermons, des reproches, mais aucune parole n'accroche les bulles de sons qui cognent sporadiquement contre les murs de leur chambre partagée.

Il sent simplement des bras se glisser sous les siens, autour de sa taille, et le poids d'une tête se poser contre la surface de son épaule.

Sousuke, surpris, laisse pourtant un sourire s'épanouir sur ses lèvres, et Rin reste un long moment accroché à lui pour à nouveau l'ancrer sur terre alors que l'océan se débat furieusement en lui, en proie aux regrets et décisions illusoires d'un passé encore trop frais.

Le chemin reste long et aigre, parsemé de vents contraires et d'indécision ; mais Sousuke sait que la lueur du matin finira toujours par accompagner ses pas tant qu'il sentira les doigts de Rin effleurer les siens.