TOXIQUE
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Voici la suite et fin de Jusqu'ici tout va bien, qui suit Porcelaine.
Il y a des références aux deux premières séries: * renvoie à Porcelaine, ** renvoie à Jusqu'ici tout va bien et *** renvoie aux deux. Je crois qu'on peut suivre sans vraiment savoir ce qui s'est passé avant.
C'EST M, les enfants! Y a des choses explicites comme on dit. Y a des choses bizarres et même des gens qui meurent, mais pas de trop de bastons (en fait je suis nulle pour ça, donc j'annonce). Cette fois-ci, la romance est enroulée dans une intrigue policière.
Evidemment, les personnages, comme vous savez, ne m'appartiennent pas quoique j'en ai pervertis certains.
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Chapitre 1
C'était un jour spécialement triste pour lui et le climat s'était exceptionnellement accordé à son humeur. Le ciel était gris et bas, menaçant. Une pluie morose et glaciale tombait par intermittence, jamais vraiment décidée à s'abattre franchement sur la petite foule qui s'était réunie dans la grande maison de Gyumao pour venir lui rendre leur dernier hommage.
Chichi se tenait inhabituellement tranquille et silencieuse entre son frère et lui. Il avait passé son bras sur ses épaules et pressait tendrement la minuscule silhouette de sa mère contre lui. Elle restait pourtant digne, remerciant scrupuleusement tous ceux qui venaient vers elle pour lui présenter leurs condoléances. Elle essuyait parfois sa joue furtivement avec son mouchoir froissé mais ne pleurait plus vraiment. Gohan était stoïque, comme toujours, hochant sobrement la tête à chaque parole de réconfort.
Leur père errait quelque part dans la foule des invités, prêtant main forte à Videl, qui s'efforçait de le garder occupé en lui confiant des taches les plus élémentaires possibles, comme débarrasser les plats ou les remplir.
Goten avait rencontré un nombre incroyable de personnes qu'il ne connaissait pas et il réalisait qu'il n'avait jamais vraiment compris à quel point son grand-père avait été populaire. Ses funérailles étaient pour lui l'occasion de s'apercevoir qu'il avait pleinement vécu. Ça lui réchauffait le cœur en même temps que ça le rendait triste. Il ne pouvait que se reprocher de n'avoir pas été plus proche de lui sur ses derniers jours. Il avait été un mourant aussi discret qu'il avait été un vivant tonitruant.
Le visage de Marron, souriant piteusement le sortit de ses pensées. Elle l'étreignit brièvement et se tourna vers Chichi et Gohan pour leur murmurer quelques mots de consolation. Végéta et Trunks la suivaient. Le père se contentait de hocher la tête d'un air impassible, ce qui représentait le mieux qu'il puisse faire en la circonstance, très certainement sommé par sa femme d'être présent à cette occasion. Le fils eut un geste discret pour son ami avant de s'adresser à sa mère.
- Chichi, si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésite pas… Je suis désolé…
Il leva la tête vers Gohan et ajouta :
- Maman va pas tarder à arriver, elle est allée chercher Bra à l'aéroport…
Goten tressaillit imperceptiblement en entendant cette annonce. Il ne laissa rien paraître. D'autres personnes se pressaient déjà derrière les Briefs avec des mines déconfites.
- Maman, tu ne préfèrerais pas t'assoir ? glissa Goten au bout d'un moment.
Chichi accepta d'un mouvement de tête et Gohan approcha un fauteuil pour qu'elle puisse s'y installer. Les derniers jours avaient été très éprouvants pour elle et elle était physiquement marquée par le chagrin.
- Goten, tu n'as rien mangé, vas donc prendre quelque chose, je m'en sortirai. Demande à ton père de venir, dit-elle d'une voix blanche, tout juste audible.
Goten obtempéra et s'éloigna après avoir échangé un regard avec son frère qui l'assurait de rester aux côtés de leur mère.
Il ne retrouva pas son père au milieu de l'assemblée et finit par renoncer à lui passer le message de Chichi dans l'immédiat. Il se servit une assiette dans l'un des plats à disposition des invités.
- Comment ça se passe ? demanda une voix derrière lui.
Il se retourna et se retrouva face à une jeune femme en robe noire, les cheveux roux en chignon, qui l'interrogeait du regard.
- Evana, tu es encore là ? Tu aurais pu partir, c'est assez long et sinistre, tu n'es pas obligée de rester, tu sais, répondit Goten avec douceur.
Elle lui sourit et passa sa main dans son dos.
- Je tiens à rester jusqu'au bout. Ne t'inquiète pas pour moi. Ta mère tient le coup ?
Il lui rendit son sourire.
- C'est une vraie guerrière. Elle ne craquera pas. Mais elle est très fatiguée. Je ne sais pas encore combien de gens vont arriver, ça semble un flot intarissable, reprit le jeune homme.
Elle prit sa main et le dévisagea avec sérieux.
- Et toi ? Comment tu te sens ? insista la jeune femme.
- Ça va.
L'œil de Goten s'attarda un instant dans le groupe d'invités derrière elle. Son sang s'était figé. Bra était là, avec sa mère, parmi la foule. Elle était à une certaine distance et n'avait que peu de chance de pouvoir le repérer au milieu de tous ces visages. Instinctivement il se déplaça suffisamment pour placer son interlocutrice dans la ligne de mire qui le reliait à Bra.
- Je crois que je vais aller manger dans la cuisine. J'ai envie d'un peu de calme et de tranquillité, annonça Goten.
Il s'éloigna aussitôt. Elle le suivit en jetant un œil autour d'elle, consciente que quelque chose venait de changer son humeur, sans comprendre quoi. Il était parfois comme ça, insaisissable, replié sur lui-même.
Elle le trouva en train de manger silencieusement, assis sur la table de la cuisine, les yeux fixant la fenêtre qui donnait sur une grande plaine herbeuse au-dessus de laquelle les nuages d'un blanc sale ne laissaient plus deviner l'heure de la journée.
- Tu vas rentrer chez toi après ? Tu veux que je te ramène ? demanda Evana en prenant place sur l'une des chaises.
- Je ne sais pas, répondit-il évasivement sans détourner son regard du paysage.
Elle l'observa un moment. Elle sentait que le décès de son grand-père l'affectait. Elle ne le connaissait pas comme ça. Ils travaillaient ensemble pour une boite de chasseurs de primes dans laquelle elle faisait le secrétariat. Lui était chasseur depuis presque trois ans et ils sortaient ensemble depuis quelques mois. Mais elle n'avait encore jamais vu cet aspect mélancolique de sa personnalité.
Elle posa sa main sur son bras pour attirer son attention. Il baissa enfin les yeux sur elle et lui sourit avec bienveillance.
- Je suis là en tout cas, conclut-elle.
La porte de la cuisine s'ouvrit brusquement et Bra apparut. Son visage se décomposa instantanément quand elle aperçut Goten.
- Oh, euh… Bonjour Goten… Je cherchais… euh.
Elle ne finit pas sa phrase et traversa la pièce furtivement pour gagner la porte qui donnait vers l'extérieur.
- Faites comme si je n'étais pas là, souffla-t-elle.
Goten la suivit des yeux jusqu'à ce qu'elle ressorte.
Dès qu'elle fut dehors, le vent humide de l'automne l'enveloppa de sa fraîcheur. Elle releva ses épaules dans un réflexe de protection. Mais cette fraîcheur ne pouvait rivaliser avec celle qui venait de geler tout son être intérieur. Elle tremblait un peu. Elle fouilla son sac et en sortit un paquet de cigarettes. Elle en alluma une et ferma les yeux.
Elle n'avait pas revu Goten depuis trois ans. Du moins, elle ne l'avait pas revu physiquement. Ils avaient tous les deux apporté un soin extrême à éviter que leurs routes se croisent. Elle savait qu'elle le rencontrerait aujourd'hui et elle s'y était préparée mais elle avait imaginé que cela se passerait au milieu d'une foule d'autres gens dont la présence aurait fait barrage à ses émotions.
Elle ne s'était pas attendue à le trouver dans cette cuisine quand elle y était entrée, elle ne s'était pas attendue à ce qu'il soit aussi conforme à ses souvenirs exaltés***. Elle sentit son malaise retomber doucement, la scène n'avait duré que quelques secondes. Elle parvenait à dompter l'adrénaline qui avait brièvement afflué dans son organisme.
Elle sursauta un peu quand la porte de la cuisine s'ouvrit. Elle tourna la tête en redoutant de le voir à nouveau devant elle. Mais il s'agissait simplement de la femme qui était en train de discuter avec lui. Elle ne la connaissait pas. C'était une rousse, très élégante, moulée dans une robe de ville noire.
Elle lui sourit aimablement et s'adossa au mur à côté d'elle pour s'allumer une cigarette à son tour. Elle recracha la fumée et se tourna vers Bra qui l'épiait du coin de l'œil.
- Vous êtes Bra Briefs ? demanda la jeune femme.
- C'est bien moi, répondit poliment Bra, je ne crois pas vous connaître.
- Evana Simps, dit simplement l'arrivante en lui tendant la main.
Bra lui serra la main.
- Je suis la petite amie de Goten, précisa Evana, sans ciller.
Bra tressaillit un peu. Elle se demanda si Evana savait vraiment à qui elle s'adressait.
- Ravie de vous rencontrer, marmonna Bra mécaniquement.
Evana ne sembla pas percevoir la réserve subite de Bra.
- Vous connaissez bien la famille de Goten, n'est-ce pas ? reprit-elle.
- Oui, nos deux familles sont très liées depuis très longtemps. Mais j'étais à l'étranger ces dernières années.
Cela faisait quatre ans que Bra avait quitté l'état de l'Ouest. Elle avait fait trois ans d'étude dans la Capitale du Nord, et venait de terminer sa dernière année dans la capitale de l'Est. A l'heure qu'il était, elle devait trouver un travail. Plusieurs possibilités s'offraient à elle et il était temps de choisir. Elle se fit la réflexion que c'était certainement le pire moment pour revoir Goten.
- Et vous allez rentrer maintenant ? questionna Evana.
- Rien n'est décidé…
En réalité, Bra avait très envie de rentrer. La Capsule, ses parents, ses amis lui avaient furieusement manqué. Elle prenait conscience qu'elle avait passé ces dernières années à fuir. Elle était très peu revenue dans sa famille, trouvant toujours mille bons prétextes pour ne pas faire le voyage à diverses occasions. La fin de ses études et le décès de Gyumao avait tari son imagination et elle avait été contrainte de rentrer.
Elle avait été très émue de retrouver sa mère à l'aéroport et de traverser la ville pour venir ici. Voir Pan, son frère et Marron, son père, l'avait ébranlée dans sa détermination de poursuivre son existence si loin d'eux.
Elle écrasa son mégot nerveusement.
- Je crois qu'on aura sûrement l'occasion de se revoir, on pourrait peut-être se tutoyer ? dit Bra sur le ton le plus enjoué qu'elle put.
- Certainement, confirma Evana avec un sourire.
Bra constata tristement que c'était une très belle femme avec un visage d'ange bienveillant. Elle l'abandonna pour pénétrer dans la cuisine. Goten était toujours là. Il lui tournait le dos, continuant de manger distraitement, assis sur la table, scrutant le paysage par la fenêtre. Elle s'immobilisa, incertaine.
- Goten, je voulais te dire… à quel point je suis désolée… pour ton grand-père, bredouilla-t-elle.
Il tourna la tête lentement vers elle et la toisa une minute sans cesser de mastiquer. Elle se raidit un peu sous son œil. Il avala sa bouchée.
- Tu vas rentrer ? demanda-t-il.
- Je pense, oui, murmura-t-elle en baissant les yeux.
Il détourna son regard, sans un mot, pour reprendre son observation de la plaine herbeuse devant la maison de son grand-père.
Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais rien ne vint. Elle aurait dû poursuivre son chemin pour rejoindre ses parents et la foule des invités mais ses pieds refusaient de bouger. Elle sentait qu'elle aurait dû dire quelque chose à cet instant mais son cerveau en purée restait comme une page blanche.
Elle ne put s'empêcher de le regarder et de remarquer, à nouveau, qu'il n'avait pas changé. Chichi s'était préoccupée de lui faire enfiler un costume sombre et chic qui s'accordait parfaitement à sa tignasse brune. Pas de cravate pour autant. L'autorité de Chichi avait ses limites.
Tandis qu'il semblait l'ignorer, elle eut un imperceptible mouvement latéral, mûe inconsciemment par le désir brûlant de voir son visage. Il ne bougea pas mais elle s'aperçut qu'il ne fixait plus la fenêtre et avait fermé les yeux, comme si il attendait que ce moment finisse.
A nouveau, elle ouvrit la bouche. « Goten », dit-elle. Du moins, elle crut le dire mais sa voix était si inaudible qu'il n'avait aucune chance d'entendre.
Enhardie par ses yeux fermés, elle continua à détailler son visage. Il y avait quelque chose à dire.
Un bruit de porte derrière Bra interrompit la scène. Elle se retourna pour constater que la petite amie revenait. Comme un coup de fouet, son apparition redonna vigueur à ses pieds qui reprirent leur chemin pour sortir de la cuisine.
Elle évolua un moment au milieu de la foule, sans vraiment capter ce qui se passait ou ce qu'on lui disait, encore confuse de cet embarrassant moment dans la cuisine.
Incapable de se reconnecter avec la pénible réalité autour d'elle, elle opta pour une retraite judicieuse, sur un canapé dans un coin de la pièce, à côté de son père. Elle s'appuya contre son épaule avec un air somnolent. La fatigue du voyage, l'émotion ambiante, son émotion de revoir Goten, l'avait anéantie.
A un moment, il reparut dans son champ de vison. Il était au milieu d'un groupe de gens qui discutaient avec animation mais sa rétine n'imprimait que lui. Elle aimait son costume. Elle le trouvait lumineux. Pardon.
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